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Le temps productif des hommes et des femmes a tendance à augmenter parallè-lement avec le revenu personnel et la scolarité. Ainsi, il s’accroît en général d’une classe de revenu à l’autre, tant pour les hommes que pour les femmes (ta-bleau 22.10). En 1998, les femmes gagnant 40 000 $ et plus sont celles qui ont les journées productives les plus longues avec 9,7 heures par jour réparties à raison de 5,9 heures en temps professionnel et de 3,7 heures en temps domestique.

Leurs vis-à-vis masculins allouent environ 1,4 heure de moins par jour aux activi-tés productives, avec 8,3 heures. La plus grande partie de l’écart s’explique par le fait que les hommes consacrent 1,1 heure de moins par jour aux tâches domesti-ques.

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Les hommes et les femmes avec les niveaux de revenu personnel les plus élevés sont ceux qui ont le moins de temps pour leurs soins personnels et pour les activités de temps libre. Ainsi, comparativement aux femmes qui gagnent entre 10 000 $ et 20 000 $ par année, les femmes avec un revenu personnel de 40 000 $ et plus ont 1,8 heure de moins de temps libre par jour et 0,6 heure de moins pour leurs soins personnels. Chez les hommes, on observe un écart respectif de 1,4 heure et de 0,4 heure pour ces mêmes activités.

Au cours des années, on a observé des changements significatifs dans l’emploi du temps selon le niveau de revenu. Il importe cependant de préciser que la défi-nition des classes de revenu pour les trois enquêtes sur l’emploi du temps ne tient par compte de la hausse des prix entre 1986 et 1998 (l’indice des prix à la consom-mation – IPC – a augmenté de 35 % entre 1986 et 1997), de sorte que les catégo-ries de revenu ne sont pas vraiment comparables en termes réels d’une année à l’autre. En conséquence de la non-indexation des limites des diverses classes de revenu au cours des années, il faut s’attendre à ce qu’il soit possible d’atteindre un niveau de revenu personnel donné avec un moins grand nombre d’heures al-louées au temps professionnel. En corollaire, on peut penser qu’en 1998 l’échelon des 40 000 $ et plus contient en bonne partie des personnes qui se seraient si-tuées à des échelons de revenu inférieurs en 1986.

Tableau 22.10

Moyenne quotidienne de temps¹ consacré à certains groupes d’activités selon le sexe et le revenu personnel des répondants, population de 15 ans et plus, Québec, 1998

Sexe et Aucun Moins de 10,000 $ 20,000 $ 30,000 $ 40,000 $ Non Total

groupe revenu 10,000 $ à à à et plus déclaré

d’activités 19,999 $ 29,999 $ 39,999 $

h/j

Hommes 24,0 24,0 24,0 24,0 24,0 24,0 24,0 24,0

Professionnel 2,8 3,6 4,1 4,8 5,0 5,7 4,4 4,7

Domestique 1,8 1,7 2,3 2,4 3,1 2,6 2,8 2,5

Personnel 11,3 10,7 10,8 10,5 10,2 10,4 11,0 10,6

Libre 8,0 8,0 6,7 6,3 5,8 5,3 5,8 6,2

Résiduel 0,1

Femmes 24,0 24,0 24,0 24,0 24,0 24,0 24,0 24,0

Professionnel 0,9 2,9 2,8 4,6 4,8 5,9 2,9 3,1

Domestique 5,5 3,6 4,4 4,1 3,6 3,7 3,7 4,1

Personnel 11,4 11,0 10,7 10,4 10,8 10,1 11,4 11,0

Libre 6,2 6,5 6,1 4,9 4,7 4,3 5,9 5,8

Résiduel 0,1

1. Journée moyenne représentative des 7 jours de la semaine.

Source : Statistique Canada, Enquête sociale générale 1998, fichier de microdonnées.

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Chez les hommes comme chez les femmes, la progression du temps profession-nel est plus importante d’un échelon à l’autre de revenu en 1998 que lors des enquêtes précédentes. Cependant, chez les femmes, il n’y a qu’à l’échelon de revenu le plus élevé que le temps professionnel s’avère plus important en 1998 qu’en 1992; chez les hommes, la situation est restée à peu près la même.

Par ailleurs, à tous les échelons de revenu sauf un, les hommes consacrent davan-tage de temps aux activités domestiques qu’en 1992; dans le cas des femmes, on observe la même tendance, sauf aux deux échelons supérieurs de revenu. En 1998, à tous les échelons de revenu, les femmes consacrent davantage de temps aux activités productives que les hommes se trouvant au même échelon de re-venu personnel.

Le temps productif des hommes et des femmes tend également à augmenter avec le degré de scolarité atteint (tableau 22.11). Chez les femmes ayant atteint le niveau des études universitaires, il s’élève à 8,8 heures par jour en 1998, contre 7,4 heures par jour pour celles qui ont terminé leurs études secondaires avec l’obtention d’un diplôme. On observe qu’à mesure que s’élève le niveau d’éduca-tion atteint par les répondantes, la durée moyenne du temps professionnel s’ac-croît.

Tableau 22.11

Moyenne quotidienne de temps¹ consacré à certains groupes d’activités selon la scolarité, population de 15 ans et plus, Québec, 1998

Sexe et Études Études Diplôme École Études Études Total²

groupe élémentaires secondaires d’études des collégiales universitaires d’activités partielles secondaires métiers

h/j

Hommes 24,0 24,0 24,0 24,0 24,0 24,0 24,0

Professionnel 2,1 3,9 5,2 4,9 4,8 5,4 4,7

Domestique 3,0 2,4 3,0 2,3 2,1 2,8 2,5

Personnel 12,3 10,6 10,5 10,6 10,2 10,4 10,6

Libre 6,6 7,0 5,3 6,1 6,9 5,4 6,2

Résiduel 0,1

Femmes 24,0 24,0 24,0 24,0 24,0 24,0 24,0

Professionnel 0,5 1,7 2,9 2,7 4,2 5,0 3,1

Domestique 3,9 4,1 4,5 4,7 3,9 3,8 4,1

Personnel 12,1 11,5 10,9 10,8 10,6 10,2 11,0

Libre 7,4 6,6 5,7 5,8 5,3 5,0 5,8

Résiduel 0,1

1. Journée moyenne représentative des 7 jours de la semaine.

2. La catégorie « non déclaré » est omise dans ce tableau.

Source : Statistique Canada, Enquête sociale générale 1998, fichier de microdonnées.

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Dans le cas des activités domestiques, ce sont les femmes ayant fait des études à une école de métier qui y accordent le plus de temps et ce sont celles aux deux extrémités de l’échelle de la scolarité qui y consacrent le moins de temps. Les femmes avec des études de niveau élémentaire ou moins sont celles qui consa-crent le moins de temps aux activités professionnelles; ce groupe compte plus de 62 % de personnes âgées de 65 ans et plus qui ont sans doute joint pour la plu-part les rangs des retraitées. Par ailleurs, les femmes avec les niveaux de scolarité les plus élevés allouent la part la plus importante de leur temps productif aux activités professionnelles; le recours à des substituts marchands est une hypo-thèse parfois évoquée comme explication de la réduction du temps alloué aux tâches domestiques. Une autre thèse veut que les femmes les plus scolarisées parviennent en général à établir un partage plus égalitaire des tâches domesti-ques avec leur conjoint (Shelton et John, 1996, p. 305). En général, plus une femme est scolarisée, moins elle dispose de moments libres et de temps pour les activi-tés de soins personnels.

Chez les hommes, les détenteurs d’un diplôme d’études secondaires et ceux ayant effectué des études universitaires affichent la prestation productive la plus éle-vée, avec 8,2 heures par jour. Les hommes de ces deux groupes sont ceux qui consacrent le plus de temps aux activités professionnelles. Les hommes avec des études de niveau élémentaire ou moins (comprenant 54,0 % d’hommes âgés de 65 ans et plus) ont la contribution productive la moins importante, soit 5,1 heures par jour; c’est la seule catégorie où le temps domestique s’avère plus important que le temps professionnel. Sauf pour ce dernier groupe, les profils d’emploi du temps des hommes selon la scolarité présentent moins de contrastes que les profils des femmes.

La façon de mesurer la scolarité présente des variantes d’une enquête à l’autre; il est donc difficile de déterminer avec précision comment l’emploi du temps selon la scolarité a évolué entre 1986 et 1998.

Conclusion

Sans être imperméable au changement, l’emploi du temps se caractérise par une importante force d’inertie dans le court et le moyen terme. L’emploi du temps peut être vu comme la résultante d’une multitude de cycles qui s’imbriquent les uns aux autres et dans lesquels des modifications doivent se produire pour qu’un changement significatif dans les moyennes de temps soit perceptible. De tels changements doivent se répercuter sur la routine quotidienne, le cycle hebdoma-daire ou le rythme saisonnier des activités sur lesquelles s’exerce une série de contraintes naturelles, physiologiques et sociales parfois immuables. Une jour-née comptera toujours 24 heures et les gens devront toujours se nourrir, se repo-ser et dormir. Les comportements exprimés sur l’ensemble du cycle de vie des

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individus, sur leur calendrier de vie reproductive et sur la durée de leur carrière professionnelle, à travers les hauts et les bas des cycles économiques, doivent être durablement infléchis pour qu’une tendance devienne significative.

La comparaison des résultats observés au cours des années à partir des trois enquêtes budgets-temps dont on dispose pour la période 1986-1998 laisse voir que des changements notables dans l’utilisation du temps sont survenus ou sont en cours. Ainsi, les différences entre les hommes et les femmes s’atténuent, et la division sexuelle des tâches est nettement moins marquée que par le passé. Par ailleurs, il semble se produire une baisse tendancielle du temps personnel, com-pensée néanmoins par une hausse du temps libre. Le temps alloué aux activités productives est demeuré à peu près stable, mais sa répartition entre les activités professionnelles et les activités domestiques s’est modifiée, dans le cas des hom-mes, à l’avantage des dernières.

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