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Résumé

Les Amines Aromatiques Hétérocycliques (AAH) sont des substances mutagènes et cancérigènes chez l’animal, et suspectées de l’être chez l’homme. Connues depuis les années 1970, plus d’une vingtaine d’AAH ont été caractérisées à des concentrations de l'ordre du ng/g dans la plupart des viandes cuites dans des conditions normales de temps et de température de cuisson. Leur toxicité pour l’homme a suscité de nombreuses études pour estimer le niveau d’exposition du consommateur aux AAH.

Dans ce travail, nous rapportons le développement d’une méthode de quantification de dix AAH par LC-MS/MS et son application à l’analyse de filets de poulets cuits. Après optimisation des différents paramètres d’extraction et de purification, les taux de récupération obtenus sont compris entre 50 et 80 % selon l’AAH considérée. La méthode de dosage par LC-MS/MS utilise une colonne de type C8 (150 × 2 mm) pour la séparation des AAH, l’ionisation par APCI en mode positif et un spectromètre de masse triple quadripolaire pour la quantification, en se basant sur deux transitions spécifiques pour chacune des AAH. L’AAH TriMeIQx est utilisée comme standard interne. Les performances de la méthode en termes de répétabilité, linéarité et sensibilité sont présentées ainsi que les résultats obtenus sur des échantillons ayant subi différents paramètres de cuisson. Les niveaux d’AAH observés varient entre 0.2 et 650 ng/g selon le mode de cuisson utilisé, PhIP représentant dans tous les cas l’AAH majoritaire.

Abstract

Heterocyclic Aromatic Amines (HAAs) are mutagenic and carcinogenic substances in animals, and several of them are classified as possible or probable carcinogens for Humans. Known since the ’70s, more than twenty HAAs have been characterized with concentrations in the ng/g range in most meats cooked under normal conditions of time and temperature. Their toxicity for Human raised up many studies to estimate the level of exposure of consumers towards HAAs.

In this work, we report the development of a quantification method of ten HAAs by LC-MS/MS and its application to the analysis of HAAs in cooked chicken breasts. After optimization of the various extraction and purification parameters, the obtained recovery rates are in the range of 50 to 80 % depending on the considered HAA. The LC-MS/MS determination method involves the use of a C8 type column (150 × 2 mm). Positive APCI is used as the ionization technique and the quantification is carried out on a triple quadruple mass spectrometer, based on two specific transitions for each HAA. TriMeIQx is used as the internal standard. The performances of the method are presented in terms of repeatability,

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cooking modes. The observed HAA levels were comprised between 0.2 and 650 ng/g depending on the cooking mode, and PhIP was found as the major HAA in all samples.

Introduction

Les Amines Aromatiques Hétérocycliques (AAH) sont des substances connues pour leurs propriétés pro-mutagènes et pro-cancérigènes chez des animaux tels que le rat, la souris et le singe, émettant ainsi un sérieux doute sur les effets néfastes de ces molécules chez l’homme (SUGIMURA et al. 2004). Les études chez l’animal ont montré que quel que soit le mode d’administration, les AAH sont presque totalement bio-disponibles et sujettes à une métabolisation importante avant excrétion. Environ 90 % de la dose administrée est excrétée dans les urines (TURTELTAUB et al. 1993), mais seul un faible pourcentage est excrété sous forme inchangée, ce qui confirme le fait que les AAH sont très largement absorbées et bio-disponibles (GOODERHAM et al. 1996). Au cours du métabolisme chez les rongeurs, l’action des enzymes à cytochrome P450 mène à la formation de N- hydroxylamines puis d’ions arylnitrénium, composés génotoxiques susceptibles de se lier à l’ADN et de provoquer ainsi des mutations, voire des cancers (TURESKY 2005). Des études épidémiologiques mettent également en cause certaines AAH dans la cancérogenèse chez l’Homme (KNIZE et FELTON 2005). En particulier, IQ (2-amino-3-méthylimidazo[4,5-

f]quinoline) est fortement soupçonnée d’être impliquée dans l’initiation de cancers du côlon,

et a été classée carcinogène probable pour l’Homme (classe 2A) par l’Agence Internationale de Recherche sur le Cancer (IARC, 1993). De même, MeIQ, MeIQx, PhIP, Glu-P-1, Glu-P-2, Trp-P-1 et Trp-P-2 ont été classées comme carcinogènes possibles (classe 2B) par la même agence.

Les AAH sont générées lors de la cuisson des viandes et poissons, soit par des mécanismes radicalaires intervenant dans les processus de pyrolyse à des températures supérieures à 300°C, soit selon la réaction chimique complexe de Maillard à partir d’acides aminés, les sucres, la créatine et la créatinine et intervenant à des températures de 150- 200°C (MURKOVIC 2004a). Les structures des AAH étudiées dans ce travail sont présentées en Figure 1. Le type et les quantités d’AAH formées dépendent de paramètres physiques comme la température, la durée, ou encore la technique de cuisson mais aussi de paramètres chimiques comme la présence de précurseurs, d’activateurs (lipides) ou d’inhibiteurs (antioxydants, micronutriments) de leur formation pour une viande ou poisson donné (SKOG et al. 1998, AHN et GRÜN 2005, DASHWOOD 2002).

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Figure 1. : Structure chimique des 10 AAH étudiées et du standard interne utilisé (TriMeIQx).

Chemical structure of the 10 HAAs investigated and internal standard (TriMeIQx) used in this work. Depuis les premiers travaux concernant les AAH dans les années 70, plusieurs familles d'AAH ont été répertoriées, qui présentent à la fois des structures chimiques, des propriétés physicochimiques ainsi que des mécanismes de formation différents (MURKOVIC 2004a). Plus d’une vingtaine d’AAH ont été caractérisées à des concentrations de l'ordre du ng/g (ppb) dans la plupart des viandes cuites (poulet, bœuf, porc et poisson) dans des conditions normales de temps et de température de cuisson (MURKOVIC 2004b, SKOG et

al. 1998, SKOG et SOLYAKOV 2002, PAIS et KNIZE 2000). Les plus abondantes

rencontrées dans les viandes cuisinées sont PhIP, AαC, MeIQx, DiMeIQx et IQ. De fortes teneurs en PhIP et AαC sont trouvées dans le poisson (25 à 30 ng/g), de même que l’on trouve des quantités abondantes de PhIP dans les blancs de poulet frits (jusqu’à 330 ng/g) (MURKOVIC 2004b) ou dans les blancs de poulet grillés au barbecue (jusqu’à 480 ng/g) (SINHA et al. 1995). On estime entre 0.1 à 15 µg l’exposition quotidienne du consommateur aux AAH par le biais de son alimentation (GOODERHAM et al. 1996, SKOG et al. 1998).

De nombreuses méthodes de dosages des AAH dans les aliments cuits sont décrites dans la littérature, utilisant comme technique séparative la chromatographie gazeuse (GC) ou liquide (LC), ou encore d’électrophorèse capillaire (EC), et comme méthode de détection associée l’absorbance UV, la fluorescence, l’électrochimie ou la spectrométrie de masse (MS) (PAIS et KNIZE 2000). Cependant, depuis ces dernières années, pour des raisons de sélectivité et de sensibilité, la détermination des teneurs en AAH dans les matrices alimentaires cuites est principalement effectuée en utilisant le couplage LC-MS (BARCELO-

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à analyser et les faibles quantités d’AAH présentes, plusieurs méthodes d’extraction et de purification ont été proposées, toutes basées sur une méthode initiale développée par Gross (GROSS et GRUTER 1992, FAY et al. 1997, TORIBIO et al. 2000b, SANTOS et al. 2004, MESSNER et MURKOVIC 2004).

Dans ce travail, nous rapportons le développement d’une méthode de quantification de dix AAH par LC-APCI-MS/MS avec étalonnage interne, dans la viande de poulet. En premier lieu, les protocoles d’extraction et de purification ont été optimisés de façon à obtenir un taux de récupération maximum pour chacune des AAH considérées. La méthode de dosage par LC-MS/MS repose sur l’utilisation de l’ionisation par APCI (mode positif) et d’un spectromètre de masse triple quadripolaire en se basant sur deux transitions spécifiques pour chacune des AAH. La séparation par HPLC est réalisée sur une colonne de type C8 de 2 mm de diamètre interne. L’AAH TriMeIQx (voir Figure 1) est choisie comme standard interne. Ce composé représente le standard interne le plus utilisé pour le dosage des AAH par SM en l’absence de standard deutéré (SANTOS et al. 2004, GUY et al. 2000). Les performances de la méthode sont présentées en termes de répétabilité, linéarité et sensibilité. L’effet matrice sur la réponse obtenue en SM a également été étudié. Les quelques résultats obtenus sur des échantillons de blancs de poulet ayant subi différents temps, températures et modes de cuisson, sont également présentés et montrent clairement l’influence de ces différents paramètres sur les quantités d’AAH formées.

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