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Sélection des outputs et des inputs

Essai 2. Origine migratoire et performance scolaire:

III. L’ EFFICIENCE DE LA PRODUCTION EDUCATIONNELLE

4. Sélection des outputs et des inputs

En considérant les écoles comme des firmes spécialisées dans la production d’éducation, SCHULTZ (1963) ouvre la voie à l’estimation de frontières de production et à la mesure d’efficience en éducation. L’école est alors considérée comme une entité réalisant un processus de production (en l’occurrence éducationnel) afin de transformer des inputs en outputs (THANASSOULIS et DUNSTAN, 1994). Etant donnée la relative connaissance de ce processus d’acquisition, l’école est généralement considérée comme une boîte noire. La conceptualisation ainsi que la mesure des outputs et inputs font parti des problèmes récurrents de nombreuses études (MANCEBON et BANDRES, 1999).

Les données utilisées proviennent de l’échantillon national de l’enquête PISA réalisée en 2000 par l’OCDE (OCDE, 2002). L’objectif de cette enquête était de tester les compétences des élèves afin de comparer les acquis des jeunes. Celles-ci ont été appréhendées dans trois domaines: en lecture, en mathématiques et en sciences. La population de l’échantillon est définie en fonction de l’année scolaire. Il s’agit de la 9e année du système scolaire suisse

qui correspond à la dernière année de la scolarité obligatoire59.

Concernant l’échantillonnage, la Direction nationale du projet PISA (i.e. la Confédération et les cantons) a tiré des échantillons représentatifs des trois grandes régions linguistiques60. Dans une première étape, les écoles ont été

tirées au sort sur la base des données scolaires de 1998/99 de l’Office fédéral de la statistique (OFS). Dans une seconde étape, les élèves ont été sélectionnés de manière aléatoire parmi les écoles retenues. Les élèves n’ont donc pas tous participé à PISA et seuls certains élèves de certaines écoles ont répondu aux tests.

Nous avons conservé dans notre échantillon uniquement les écoles dans lesquelles au moins 20 élèves ont participé à l’enquête PISA. C’est le cas de 156 écoles de 22 cantons61. Ce nombre est basé sur le nombre moyen

d’élèves par classe (seulement pour les écoles publiques) qui était en 1999- 2000 de 19,1 au degré secondaire I (OFS, 1999). Les statistiques descriptives de ce sous-échantillon ont été comparées à l’échantillon total (243 écoles) afin de vérifier qu’il n’y avait pas de biais d’attrition.

59 La scolarité obligatoire dure 9 ans et comprend les degrés primaire et secondaire I. Dans la majorité des cantons, le primaire dure 6 ans (de 6/7 ans à 11/12 ans) et le secondaire I, 3 ans (de 12/13 ans à 14/15 ans). Pour plus de détails sur le système éducatif suisse, voir le site internet de la CDIP (http://www.ides.ch/umfrage2003/mainUmfrage_F.html).

60 Il s’agit de l’allemand (parlé par 64% de la population résidente selon la langue principale), du français (20%) et de l’italien (7%). Les 9% restant s’expriment dans d’autres langues. 61 Deux cantons (Uri et Appenzell Rhodes-Intérieur) n’ont pas participé à PISA et les écoles des

4.1 Les outputs

L’output éducationnel doit représenter les objectifs de l’école. En tant qu’institution, l’école a pour fonction essentielle de transmettre un curriculum. On parlera de curriculum formel pour désigner ce qui est censé être transmis officiellement aux élèves (principalement des compétences cognitives). Mais en se situant dans un monde de socialisation, l’école permet également aux élèves d’acquérir ce que certains sociologues nomment le curriculum caché: des compétences affectives (DURU-BELLAT et VAN ZANTEN, 1999). Toute la difficulté réside dans le caractère multidimensionnel de l’éducation, autrement dit dans la multiplicité des objectifs poursuivis par l’école qui ne peuvent être agrégés en une seule et unique mesure (BESSENT et al., 1982). Il n’est par ailleurs pas toujours facile de mesurer cette production éducationnelle. Or si l’on souhaite analyser la production des écoles, il est pourtant essentiel d’employer des mesures adéquates des résultats.

A partir du moment où les décisions d’orientation des élèves sont théoriquement fondées sur des critères scolaires objectifs tels que les notes, celles-ci représentent une mesure reconnue par l’institution elle-même. C’est le cas dans la plupart des cantons suisses puisque la moyenne des notes obtenues à la fin de l’année scolaire sert de base pour la promotion, provisoire ou définitive dans la classe supérieure (CDIP, 2001). Dans la littérature, la majorité des études utilise les scores de tests d’aptitudes standardisés (BRADLEY et al., 2001). Cet output remplit un des objectifs primordiaux des écoles à savoir celui d’orientation et donc de sélection au sein du système éducatif. Dans cette étude, nous utilisons le score en lecture au test PISA 2000 comme output (READ). Il s’agit de la moyenne arithmétique par école des élèves ayant participé à l’enquête. L’école est donc l’unité de production éducationnelle. Les élèves ayant participé à l’enquête en 2000 ont tous répondu au questionnaire en lecture. Cela n’a malheureusement pas été le cas en mathématiques et en sciences entraînant une forte attrition des données62. C’est pourquoi nous utilisons seulement les

résultats en lecture63.

Afin de mesurer l’homogénéité des performances des élèves au sein des établissements, nous utilisons également l’inverse de l’écart-type (par école) du score en lecture (INVRSD). Cette variable, peu présente dans la littérature, permet de tenir compte de la dispersion des résultats à l’intérieur de l’école. Plus la valeur est grande, plus les résultats des élèves au sein de l’école sont homogènes c’est-à-dire concentrés autour de la moyenne de l’école considérée64. On souhaite ainsi porter une attention particulière à la notion

62 Parmi tous les élèves de l’échantillon d’origine ayant participé au test en lecture (7997 élèves), seuls 2653 ont répondu à la fois aux questionnaires en lecture et en sciences, 2647 en lecture et mathématiques, 1804 en lecture, mathématiques et sciences et 893, seulement en lecture. 63 Les coefficients de corrélation entre les matières des 1804 élèves ayant répondu aux trois

questionnaires sont: lecture et mathématiques (0.8120), lecture et sciences (0.8983) et mathématiques et sciences (0.7979).

64 KANE et STAIGER (2002) indiquent que la variance entre les écoles, concernant les scores des élèves aux tests, représente seulement de 10 à 15% de la variance entre les élèves à l’intérieur d’une même école.

d’équité. Si l’on considère deux écoles ayant le même score moyen, celle dans laquelle tous les élèves sont concentrés autour de la moyenne sera préférée à celle dans laquelle les élèves sont scindés en deux avec d’un côté les mauvais et de l’autre les bons. Il s’agit d’un choix arbitraire que de préférer comme output, une homogénéisation des résultats.

Le graphique 3 illustre la relation entre les deux outputs utilisés dans le DEA. Le degré d’homogénéité des élèves est positivement corrélé au niveau moyen de performance en lecture (le coefficient de corrélation est de 0.6009). Deux interprétations sont possibles. La première est que l’élévation de la performance au sein des établissements entraîne une homogénéisation des résultats des élèves. Autrement dit, le fait de poursuivre comme objectif l’augmentation du niveau moyen de performance à l’intérieur d’une école ne se fait pas forcément au détriment de l’équité. La seconde est que les écoles qui se situent dans un environnement homogène obtiendront de meilleures performances. La causalité entre performance et équité est alors inverse à la première explication.

Graphique 3. Les deux outputs (READ et INVRSD) du DEA

RE A D INVRSD .009184 .012 .014 .016 .018 .02 .022 .024114 323.35 350 400 450 500 550 600 624.979 4.2 Les inputs

Les inputs sélectionnés doivent représenter au mieux les caractéristiques du système éducatif ayant un impact dans le processus de production éducationnelle. Cette sélection est cependant contrainte par la disponibilité des informations dans la base de données. Le choix des inputs ne fait pas l’unanimité dans la littérature (HANUSHEK, 1986).

Dans la mesure où les résultats du DEA sont sensibles aux inputs utilisés, il s’agit d’une étape importante de la modélisation. Dans la littérature, il existe une scission méthodologique découlant précisément de ce choix. D’une part, les études qui proposent de n’utiliser dans le DEA que des inputs discrétionnaires c’est-à-dire sous le contrôle des écoles (CHARNES et al., 1981; BESSENT et al., 1982 et 1984; RAY, 1991; MANCEBON et BANDRES, 1999). D’autre part, celles qui utilisent à la fois des inputs discrétionnaires et non discrétionnaires comme par exemple des inputs environnementaux ou socio-économiques (RUGGIERO, 1996; KIRJAVAINEN et LOIKKANEN, 1998). Ce choix méthodologique a des implications empiriques. Les études qui n’introduisent que des inputs discrétionnaires dans le DEA utilisent généralement les inputs non discrétionnaires dans une seconde étape (un OLS ou un tobit) afin d’expliquer la distribution des scores d’efficience (BRADLEY et al., 2001). D’autres utilisent la méthode économétrique des frontières stochastiques (BARROW, 1991; COOPER et COHN, 1997).

Les inputs de capital humain retenus dans cette analyse incluent le nombre de professeurs par élève65 (TEACHER) afin d’appréhender les ressources

allouées à l’enseignement d’un point de vue quantitatif66. Ils incluent

également le nombre d’heures d’encadrement par année (TOTHRS) qui permet de tenir compte du temps annuel à disposition pour l’enseignement des élèves. Cet input est important dans le cas de la Suisse car on observe une grande variabilité entre les établissements du fait que la fixation du plan d’études du secondaire I est du ressort des autorités cantonales. Par exemple, un élève du canton de Genève va à l’école 700 heures de moins au cours de sa scolarité obligatoire qu’un élève du canton de Fribourg (CDIP, 2001). Finalement, afin de tenir compte des ressources allouées à l’enseignement d’un point de vue qualitatif, le nombre d’enseignants par élève ayant un diplôme d’enseignement d’une haute école (QUAL) a également été retenu. Alors que le rapport Coleman (1966) concluait que l’expérience des enseignants ne comptait que marginalement, les résultats de SUMMERS et WOLFE (1977) ou GOLDHABER et BREWER (1997) sont plutôt en désaccord avec cette affirmation. De plus, les résultats des estimations réalisées au niveau des élèves indiquent que la formation des enseignants contribue de manière conséquente à la performance des élèves (MEUNIER, 2006). Etant donné que le système de formation des enseignants est régi par les législations cantonales, cet input est important dans le cas de la Suisse67. Les

conditions de travail des enseignants, l’échelle des salaires ou les modalités

65 La quantité de ressources disponibles en enseignants peut être mesurée de différentes manières: le nombre de professionnels pour 100 élèves (BESSENT et al., 1982), le nombre d’enseignants par élève (MANCEBON et BANDRES, 1999; DIAGNE, 2006) ou le ratio élèves/enseignants (MIZALA et al., 2002). Par soucis d’homogénéité, des mesures par élève pour toutes les variables ont été retenues.

66 L’importance de la taille des classes sur la performance scolaire a été mis en évidence dans la littérature (SUMMERS et WOLFE, 1977; ARIAS et al., 2004). Il est donc regrettable que cette variable n’apparaisse pas dans PISA d’autant plus quand on connaît le débat virulent qui entoure cette problématique (KRUEGER, 2003).

67 Depuis 2005, l’ensemble de la formation des enseignants s’effectue au degré tertiaire. Les hautes écoles pédagogiques (HEP) ont été créées à cet effet.

du poste sont également fixées par les cantons (CDIP, 2001). Nous ne disposons malheureusement pas de ces informations dans PISA 2000.

Conformément à RUGGIERO (1996), nous tenons également compte d’un input en capital physique68. Il s’agit du nombre d’ordinateurs par élève

(COMPUTER) afin d’approximer la disponibilité des installations

informatiques de base et donc de mesurer l’engagement financier de l’école dans les nouvelles technologies. Les statistiques descriptives des variables utilisées sont présentées en annexe (tableau A2) ainsi que la matrice de corrélation (tableau A3).

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