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Certains actes engagés engendrent un bouleversement pour l’individu qui en fait l’expérience. Nous les considérons comme indicatifs de la provocation expérimentale à partir du moment où ils révélent, chez l’individu (ou le groupe social), les accomplissements pratiques et tout autre acte de construction qui tapissent la strucure sociale, par le biais d’interrogations, de surprises et d’incertitudes. À ce bouleversement s’applique un phénomène de rupture qui rythme notre rencontre avec le monde. L’art et sa réception, par exemple, illustrent assez bien l’action de ce stimulus qu’est la provocation expérimentale. Son apparition problématique engendre des ruptures dans l’espace social qui s’ouvre et se sépare tout en dévoilant

son unité et sa structuration interne. De ce fait, le phénomène de la rupture présente la double particularité : d’interrompre un mécanisme et d’en révéler sa continuité.

Nous essaierons d’élucider les raisons de cette affirmation en nous aidant de quelques concepts construits pas Edmund Husserl. Nous nous appuierons sur certaines thématiques importantes de la phénoménologie que sont la perception, la constitution de l’ego et l’intersubjectivité. Nous remarquerons alors que certaines de ces idées soulignent le caractère bouleversant, déstabilisateur et fondateur de la provocation expérimentale. Pensons notamment aux phénomènes de ruptures qui jouent pour la conscience un rôle d’aiguillage de l’intentionnalité. Ainsi, après avoir désigné le sens général de la notion de rupture, nous essaierons de comprendre ce que nous enseigne son expérience, puis nous verrons comment celle-ci agit sur les choses du monde et les individus.

Qu’est-ce que la rupture dans la provocation expérimentale

Rupture : de quoi parlons-nous exactemement ? Il n’est question ici ni de choc extraordinaire violent, ni d’accident de nature à stopper brutalement toutes activités quotidiennes, ni de drame propre à une histoire personnelle. Nous définissons la rupture comme une subtile infraction dans l’espace intersubjectif susceptible d’engendrer la séparation, jusque là insoupçonnée, d’un fait actuel avec le sens préalable qui lui est communément admis. La rupture s’exerce sur le lien réflexif du signifiant et du signifié. Bien que provoquée par la manifestation d’un objet, d’une personne ou d’un fait perceptible par la communauté d’individu, elle est insoupçonnée, car le lien rompu s’unit, en sous-entendu habituel, dans le tout de l’arrière-plan de nos activités sociales. Ce lien ne fait pas appel à une reconfiguration systématique entre les hommes, car il est l’un des principaux ingrédients qui forment le mortier de toute communication. Donc, aussi anecdotique et insignifiante soit-elle dans la réalité quotidienne de l’espace social, l’idée de rupture dans la provocation expérimentale couvre un large spectre. Elle rejoint, entre autres, les multiples micro-bifurcations que subissent soit les parcours des uns et des autres, soit les interactions sociales, soit les routines, etc. Et, comme nous l’avons déjà dit à propos de la provocation expérimentale, la rupture engendre des modifications indéniables.

Examinons à présent ses caractéristiques.

La rupture est le résultat d’un événement qui ne se prévoit pas. Même si cet événement peut être organisé, les effets qu’il entraîne surviennent à lui, dans la mesure où la notion même d’ « effet » ne convient pas car elle implique la construction d’une relation causale. La rupture ne dépend ni de la volonté, ni de la réflexion. Pour être rupture, elle doit se manifester dans un contexte familier et se réaliser dans une continuité dont elle modifie la trajectoire de trois façons : soit en la stoppant, soit en la détournant, soit en la conservant. D’une manière ou d’une autre, ce qui se passe contrarie cette continuité et contrarie également les attentes immédiates en réaction aux effets mêmes de cette rupture. Alors, le moment de la rupture est une expérience vécue pour la première fois qui, en dépit qu’il surprenne et déçoive immédiatement nos anticipations et nos projets, suscite des sensations

nouvelles. En cela, nous pouvons dire que l’expérience de la rupture est un « vécu pur nouveau » vers lequel la conscience se tourne 328.

En effet, l’événement de la rupture n’est pas la conséquence stricte d’une situation matérielle concrète et objective. En apparaissant dans une situation inopinée, la rupture promeut l’individu au rang de principal acteur de son monde. Elle force sa capacité à agir, à définir ou rationaliser l’environnement, à édifier de sens ce qui n’est d’abord rien d’autre qu’une apparence, qu’un phénomène primaire, qu’une insignifiance qui se donne à « l’intuition » 329. Car la rupture dont nous parlons n’a pas de contexte événementiel. Elle est un événement en soi et pour soi. C’est un fait autonome qui ne trouve pas sa cause dans les éléments du processus rompu.

Comprenons que le principe de causalité est une rationalisation objective de la situation événementielle qui accompagne le phénomène de rupture. Mais elle ne fournit pas l’explication de la particularité subjective de ce vécu, ni même la raison certaine de son apparition. Sur la question de ce qui nous pousse à chercher un facteur déclencheur à tout événement de cette nature, Rupert Riedl explique que la pensée causale se base sur des coïncidences et des jugements approximatifs qui dépendent de nos seuls modes de perception, et par conséquent nous empêchent de voir plus. Il conclut que « l’inconnu est donc inventé par analogie avec des buts et des pouvoirs familiers 330. » L’inconnu est en quelque sorte couvert de sens dans la limite des outils conceptuels dont nous disposons et que nous partageons. C’est justement cette absence de cause réelle qui donne à l’événement de la rupture une raison d’être inattendu, instaurateur de monde et de possibilités nouvelles : une plus-value qui s’exprime d’abord à travers un sentiment de contrariété, celui de ne pouvoir complétement s’appuyer sur des repères familiers pour l’interpréter.

Nous pouvons tenter de saisir ce sentiment de contrariété en s’intéressant, avec Husserl, aux anticipations que l’individu formule dans sa perception du monde.

Lorsqu’un individu regarde un objet familier, celui-ci apparaît à ses yeux avec une détermination préconçue qu’il lui faut réaliser. Mais ne pouvant voir toutes les faces qu’il connaît de cet objet, il en formule l’existence par anticipation. Puis, au fur et à mesure de cette observation, il confirme ou infirme ces anticipations en ouvrant toujours de nouveaux horizons. C’est un fait qu’Husserl d’écrit comme une

« nécessité eidétique » : « […] une conscience empirique de la même chose perçue sous

“toutes ses faces”, et qui se confirme continuellement en elle-même de manière à ne former qu’une unique perception, comporte un système complexe formé par un divers

328 Nous attirons l’attention sur la conception husserlienne du « vécu » qui éclaire, à notre sens, le caractéristique fondatrice de l’idée de rupture telle que nous la définissons : « Le vécu, réellement vécu à un certain moment, se donne, à l'instant où il tombe nouvellement sous le regard de la réflexion, comme véritablement vécu, comme existant “ maintenant ” ; ce n’est pas tout, il se donne aussi comme quelque chose qui vient justement d'exister et, dans la mesure où il était non regardé, il se donne précisément comme tel, comme ayant existé sans être réfléchi. » Edmund Husserl, Idées directrices pour une phénoménologie et une philosophie phénoménologique pures, tome I, Introduction générale à la phénoménologie pure, trad. P. Ricœur, Paris, Gallimard, 1950, p. 247-248.

329 L’intuition est une connaissance immédiate et, dans le cas de la phénoménologie, sensible. La notion d’intuition est à comprendre au sens donné par Husserl : « […] toute intuition donatrice originaire est une source de droit pour la connaissance ; tout ce qui s’offre à nous dans “ l’intuition ” de façon originaire (dans sa réalité corporelle pour ainsi dire) doit être simplement reçu pour ce qu’il se donne, mais sans non plus outrepasser les limites dans lesquelles il se donne alors. » Husserl, Ibid., p. 78.

330 Rupert Riedl, « Les conséquences de la pensée causale », in L’Invention de la réalité, contribution au constructivisme, op. cit., p. 93.

ininterrompu d’apparences et d’esquisses. […] Au regard de la conscience qui la saisit et qui unit synthétiquement le souvenir et la nouvelle perception, chaque détermination s’offre comme identique, même si le cours continu de la perception actuelle vient à être interrompu 331. » Husserl développe l’idée d’un « horizon » afférent à l’état de conscience : « Ainsi, par exemple, dans chaque perception extérieure, les côtés “ réellement perçus ” de l’objet renvoient aux côtés qui ne le sont pas encore et ne sont qu’anticipés dans l’attente d’une façon non intuitive comme aspect “ à venir ” dans la perception 332. » Qu’advient-il alors de ce processus de normalisation de nos perceptions lorsque les aspects à venir ne viennent pas, ou bien, lorsqu’ils se révèlent non-conformes à nos attentes ?

À cet effet, les anticipations contrariées sont toujours le fait d’une rupture en tant qu’infirmation des anticipations. Elles conduisent à de nouvelles synthèses de perception qui s’ajoutent aux anciennes. Ainsi, les éléments perçus de l’objet s’enrichissent, ce que Husserl nomme les « esquisses », et la perception générale de l’objet évolue. Elle se transforme sans aucune brutalité, car l’individu réajuste au nécessaire dans le souci permanent de constituer l’objet. Nous supposons alors que la simple modification d’une façade préalablement invisible de l’objet, par son absence par exemple, conduit à transformer son statut, et dans certains cas son usage.

Prenons l’exemple ordinaire d’un homme, dans un centre commercial, qui se dirige vers un chariot métallique pour s’en saisir et faire ses courses. Naturellement, il s’attend à trouver l’objet conforme à l’expérience objective qu’il en a, bien qu’il n’en perçoive pas toutes les faces, c’est-à-dire les roues, le fond, ainsi que les parties tactiles, comme la rigidité générale, l’état des roulements à billes, etc. Or, quand il prend le chariot, il s’aperçoit que celui-ci n’a que trois roues dont deux sont bloquées. Par conséquent, l’homme ne peut pas utiliser ce chariot défectueux. Son attente est contrariée, et aussitôt s’ouvrent des horizons nouveaux dans la perception des chariots en général. L’homme se saisit donc d’un autre chariot préalablement perçu avec cette nouvelle possibilité que celui-ci soit hors d’usage.

Dans ce cas, nous dirons que ce qui était attendu ne s’est pas présenté et a laissé place à autre chose. L’expérience a occasionné chez l’homme une rupture des anticipations sur la constitution du chariot métallique convoité, provoquant une transformation générale des anticipations de tous les chariots qui seront désormais visés comme tels par sa conscience 333. Ce type de rupture produit du sens nouveau sur la réalité. Il conduit à un enrichissement pratique des perceptions. La rupture, malgré tous les désagréments qu’elle dégage dans cet exemple, est un événement générateur d’attitudes et de connaissances nouvelles pour le sujet. Elle met à l’épreuve les capacités individuelles d’adaptation pratique. Volontairement trivial, cet exemple intervient dans cette démonstration pour indiquer, par contraste, la valeur que prend la provocation expérimentale dans l’art et le rôle important que joue l’art dans la société, ses ruptures toujours imprévisibles d’une très grande ampleur pour les civilisations.

331 Edmund Husserl, Idées directrices pour une phénoménologie et une philosophie phénoménologique pures, tome I, op. cit., p. 132-133.

332 Edmund Husserl, Méditations cartésiennes, op. cit., p. 82-83.

333 Dans cet exemple, la visée intentionnelle concerne surtout l’usage que la forme.

Pour maintenir un état de réalité fort et collectif, l’individu doit interprèter la rupture comme un phénomène qui possède ses causes et ses conséquences. Il pourra ainsi justifier l’appréhension future d’expériences similaires. Husserl indique d’ailleurs que lorsque la forme habituelle change d’aspect, la nouvelle perception est appréhendée comme une « circonstance objective causale », c’est-à-dire comme un des aspects possibles du monde nouvellement expérimenté. Le point de la rupture se précise au moment où l’identité de l’objet est altérée et actualisée par une expérience nouvelle concomitante. Les moments de rupture dans le réel sont aussi des moments de transformation.

L’expérience de la rupture Fragilité du solide

La rupture participe à la découverte de notre milieu. Son apparition embrase l’environnement. Elle jaillit, comme l’éclair d’une nuit d’orage illumine soudainement le paysage d’une brève lumière blafarde et crue, si longtemps accrochée à nos rétines éblouies. Ce faisant, elle nous enseigne la fragilité du solide. Car c’est ce qui est d’apparence colossale et forte qui se rompt, comme la terre que nous foulons ou la grosse branche sur laquelle nous construisons notre habitat. Notre monde est plein de ces choses sans lesquelles nous supposons ne plus être. Nous sommes parfois exagérément abasourdis devant un contretemps n’ayant aucune importance directe avec notre survie. Mais ce contretemps, dont le sens est donné à soi-même par chacun de nous, peut renfermer une succession d’événements passés ou prévisibles qui, sans aucun lien de cause à effet, s’abattent sur notre réalité, ébranlent l’édifice de notre quotidien. Ce moment de rupture, souvent provoqué de façon indirecte dans l’enchaînement de nos actions ordinaires, montre l’intemporalité du renouvellement infini des possibles qui soutiennent notre existence, tout en montrant le caractère temporaire des déterminations finies. Celles-ci se désintègrent alors momentanément et se perdent dans l’indéfinition atemporelle du renouvellement des possibles.

Les déterminations finies sont des objets provisoirement constitués par les individus. Elles présentent le paradoxe qui fait que le principe de constitution de leur finitude nécessite d’être fondé sur l’éventualité omniprésente de leur transformation.

Dans le cas de nos perceptions, si nous acceptons de construire un objet de sens, nous incluons dans sa signification le mécanisme originaire de sa construction, et par conséquent, sa dépendance à ce simple mécanisme qui plus est artificiel, et donc potentiellement faux. À ce sujet, Husserl nous dit : « […] toute expérience aussi vaste soit elle laisse subsister la possibilité que le donné n’existe pas, en dépit de la conscience persistante de sa présence corporelle et en personne. On peut énoncer cette loi d’essence : l’existence des choses n’est jamais requise comme nécessaire par sa propre donnée ; elle est d’une certaine façon toujours contingente 334. » Ainsi, l’expérience de la rupture est corrélative à son contraire, c’est-à-dire l’expérience de l’unité, de la continuité et du lien. Elle nous enseigne la possibilité de penser le doute et le paradoxe d’une réalité construite, contingente et présumée, car seule notre capacité

334 Edmund Husserl, Idées directrices pour une phénoménologie et une philosophie phénoménologique pures, tome II, op. cit., p. 150.

à constituer un monde censé nous assure de la réalité actuelle de notre vécu.

Contenue dans l’expérience même de la continuité, la rupture est dès lors une éventualité omniprésente.

Pour autant, la rupture n’efface rien. Elle conforte l’individu de la pertinence de ses expériences constitutives du monde qu’il partage avec les autres. L’existence objective du monde se situe sur une fracture de ce monde. « Le monde n’est pas sujet au doute en ce sens que nous trouverions des motifs rationnels qui entreraient en ligne contre la force énorme des expériences convergentes, mais en ce sens qu’un doute est toujours pensable et qu’il en est ainsi parce que la possibilité du non-être, en tant que possibilité de principe, n’est jamais exclue 335. » Comprenons alors l’expérience de la rupture comme un oubli constitutif de notre réalité, dans le but de la maintenir et de l’adapter.

L’existence d’autrui

De ce point de vue, nous considérons la réalité comme une expérience vécue et construite dans une continuité. Apparemment stable, le vécu traverse diverses stades d’évolution. Vraissemblablement, il se décline dans toutes les activités de la vie quotidienne, y compris dans les activités de perception des objets du monde.

L’expérience vécue de la perception d’un objet est le pendant des significations et des formes qui lui sont conférés. Dans toute expérience de perception, le moment de la rupture révèle les formes et les significations antérieures. De manière plus générale, la rupture dévoile, par rétroaction, la suite logique d’une chose dorénavant rompue. Elle nous fait prendre conscience des éléments qui structurent la constitution du monde, car cette soudaine absence de continuité logique les met en lumière. C’est ainsi que la rupture témoigne de nos constructions en les dévoilant.

La réalité objective des rapports interindividuels et le problème de l’identification d’autrui, étudiés par Husserl, sont capitales pour comprendre cette idée, car la présence d’autrui est au cœur de nos constructions, lesquelles structurent le monde que nous partageons. D’abord, ce que l’individu vit dans le monde ne se transforme en expérience que s’il peut le partager avec d’autres. Husserl le dit ainsi : « Mon ego, donné à moi-même d’une manière apodictique ne peut être un ego ayant l’expérience du monde que s’il est en commerce avec d’autres ego, ses pareils, s’il est membre d’une société de monades qui lui est donné d’une manière orientée 336. » Au moment où l’événement apparaît dans l’espace social, l’expérience sensible que l’individu traverse est donc partagée, mais ne l’est pas toujours symboliquement alors que le sens objectif est en devenir. À l’occasion d’un événement qui provoque des ruptures de sens, les rapports interindividuels, lors du partage de cette expérience, se mettent à jour et se rompent aux frontières des réalités subjectives et symboliques propres aux individus. Les liens d’identification qui nous unissent en communauté socialement organisée sont frappés d’hésitation. Les rapports qui régissent la situation des êtres entre eux se dévoilent alors.

335 Ibid. p. 152.

336 Edmund Husserl, Méditations cartésiennes, op. cit., p. 224.

La nature de ces rapports nous amène au problème d’identifiaction de l’autre. En effet, Husserl nous dit que la constitution du sujet étranger se réalise d’une part dans l’aperception d’autrui en tant qu’analogon du sujet qui perçoit, et d’autre part dans l’aperception d’autrui en tant qu’objet de la nature 337. Autrement dit, l’alter ego s’érige dans l’ego même de qui est en présence de l’autre. Le statut de subjectivité de l’autre dans ma propre constitution est justement ce qui peut poser problème.

Comment l’autre peut-il être différent quand alors il est le résultat du produit de mon être ?

Ce questionnement pourrait être celui de tout individu qui réagit face à la différence de l’autre, conduisant à un jugement soumis à une norme en exercice dans la communauté sociale et culturelle contextuelle. Les premiers explorateurs européens qui découvrirent les peuples d’Afrique, lors du voyage au royaume Kongo du portugais Diégo Cam au XVe siècle, ont pu vivre cette expérience de la constitution de l’alter ego en interrogeant leur condition d’« être » au regard des

« indigènes ». Est-ce bien possible, ont-ils pu s’interroger, que l’individu qui se trouve devant moi soit bien une « modification de moi-même 338 » ? Car la rencontre avec l’étranger s’effectue dans la certitude intuitive et immédiate que l’autre est bien un autre moi-même, chose qui ne se produit pas lors d’une rencontre avec un être vivant d’essence incomparable (une plante, un oiseau). Husserl d’affirmer : « Dès lors, il est clair que seule une ressemblance reliant dans la sphère primordiale cet autre corps avec le mien, peut fournir le fondement et le motif de concevoir “ par analogie ” ce corps comme un autre organisme 339. » Par conséquent, intuitivement convaincu de cette analogie, l’étranger est mon alter ego. Or l’écart des deux situations culturelles,

« indigènes ». Est-ce bien possible, ont-ils pu s’interroger, que l’individu qui se trouve devant moi soit bien une « modification de moi-même 338 » ? Car la rencontre avec l’étranger s’effectue dans la certitude intuitive et immédiate que l’autre est bien un autre moi-même, chose qui ne se produit pas lors d’une rencontre avec un être vivant d’essence incomparable (une plante, un oiseau). Husserl d’affirmer : « Dès lors, il est clair que seule une ressemblance reliant dans la sphère primordiale cet autre corps avec le mien, peut fournir le fondement et le motif de concevoir “ par analogie ” ce corps comme un autre organisme 339. » Par conséquent, intuitivement convaincu de cette analogie, l’étranger est mon alter ego. Or l’écart des deux situations culturelles,