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En Afrique et particulièrement dans les pays fran-cophones en développement, les aléas naturels sont inévitables. Si rien n’est fait pour réduire la vulnérabilité de ces États, nous assisterons à un accroissement des répercussions négatives, aussi bien humaines qu’économiques. Toutefois, pour amoindrir ces effets, les communautés de certains pays ont développé des solutions éco-innovantes qui s’avèrent efficaces. Trois d’entre elles ont retenu notre attention.

Madagascar : un détour pour prévenir et réduire les risques de catastrophes dans les communautés d’Ambodipont et d’Antsirabato

Ce premier exemple nous vient de Care International.

Situé au nord-est du pays, le district d’Antalaha a été frappé ces dernières années par trois cyclones de haute intensité, dont les conséquences ne sont plus à démontrer. Entre 2000 et 2017, deux des conséquences de ces cyclones nous intéressent. Il s’agit premièrement de la perte de deux ponts ayant respectivement cent et quarante-cinq mètres de long, et deuxièmement de la perte d’un ferry.

Pour prévenir et réduire ces risques d’aléas natu-rels, Care a proposé que les 2 000 membres des communautés d’Ambodipont et d’Antsirabato construisent un détour de cinq kilomètres à l’inté-rieur des terres afin de faciliter leurs déplacements.

Adhérant au projet parce qu’elle y sera impliquée, la collectivité a pris la décision de construire ce détour, ce qui réduira à long terme les coûts d’entretien et l’exposition de la route aux risques d’érosion, aux cyclones et aux ondes de tempête.

Sur la base de cette onction, le projet routier a été élaboré avec pour objectif de favoriser le déplace-ment des personnes et de leurs biens grâce aux programmes « vivres contre travail » dans sa pre-mière phase, et « travail contre rémunération en espèces » dans sa seconde phase. Cette stratégie permettrait premièrement d’assurer la sécurité alimentaire des personnes les plus touchées par les cyclones, deuxièmement de faciliter la circula-tion des personnes et des biens pour aider le redémarrage de l’économie locale, et troisième-ment d’améliorer la sécurité et l’accès des cinq villages côtiers. Treize ans après la construction du détour, 2 200 habitants de la côte ont été recasés à presque un kilomètre à l’intérieur des terres, dans le but de les rapprocher de la route.

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Aujourd’hui, ils continuent à jouir des retombées économiques et de l’accès à la communication offerte par cette infrastructure. Le fait d’avoir déplacé ces populations à l’intérieur des terres a réduit l’impact humain sur le biotope côtier ainsi que la distance qui sépare les villages des terres agricoles. Cela a également favorisé l’accroisse-ment de la production agricole. Désormais, les hommes qui, auparavant, passaient tout leur temps soit en mer, soit à s’occuper de leur matériel de pêche, se consacrent à des activités agricoles avec les femmes.

Togo : la construction des amas de pierres et des puits accolés pour prévenir et réduire les risques de catastrophes à Akpagli

Ce second exemple est tiré de l’article de Hlomador (2017), second lauréat du concours de rédaction d’articles dans le cadre de la 23e session de la Conférence des Parties.

En quarante ans, près d’une douzaine de villages côtiers du Togo ont été engloutis par la mer, dont le niveau a considérablement augmenté, obligeant ainsi leurs populations à un exode urbain. Nous en voulons par exemple pour preuve les villages d’Afidégnigban, d’Agbavi et d’Akpagli, où les effets directs des changements climatiques sont visibles à ce jour. La plage d’Afidégnigban, qui jadis attirait du monde, n’est plus que l’ombre d’elle-même, tel un désert, avec des fragments de maisons abandonnées et rongées par les eaux, des cocotiers pratiquement déracinés ainsi que

des pirogues condamnées à un repos éternel.

Malgré la recrudescence du phénomène, certains membres de ces communautés, particulièrement ceux du village d’Akpagli devenus à risque, sont restés dans leur village afin de préserver leur patri-moine familial. D’après eux, pendant les nuits, les vagues de la mer débordent de leur lit pour s’emparer du reste des cases déjà à moitié détruites. Leur activité principale, qui était la pêche, n’est plus pratiquée aujourd’hui du fait de l’envahissement des eaux par des immondices de tous genres. Une autre conséquence de cette avancée de la mer est la perte des deux premières routes nationales reliant Lomé à la ville d’Aného.

Pour prévenir et réduire ces risques d’aléas natu-rels, les villageois se sont donc organisés à leur manière. Ainsi, à l’initiative des élites de la localité et de fervents défenseurs de l’environnement, les riverains ont mis sur pied deux types d’ouvrages pour combattre cette montée des eaux. Il s’agit, dans un premier temps, de construire des amas de pierres perpendiculaires à la mer afin de créer un ensablement et, dans un second temps, de creuser plusieurs puits accolés et parallèles à la côte, dans le but de mettre en place un brise-lame qui permettra d’atténuer l’énergie des vagues et de les empêcher d’aller plus loin. Pour l’un des initiateurs de ce projet, il a fallu mobiliser une dizaine de villageois pour sa réalisation. Une prime leur était accordée afin de les inciter à s’engager, mais surtout à joindre les deux bouts du fait de la cessation de leur activité principale qu’est la pêche.

Aujourd’hui, grâce à ce projet, la perte de la côte togolaise ne cesse de s’amoindrir.

Ghana1 : un programme régional de résilience communautaire pour prévenir et réduire les risques de catastrophes à Yinduri, Pwalugu et Santeng

Ce troisième exemple nous vient de World Vision International.

Ce programme avait pour ambition de donner un coup de pouce à ces trois communautés afin

1. Le Ghana est un membre associé de l’Organisation inter-nationale de la Francophonie ; nous l’avons considéré ici comme un pays francophone en développement.

Cdit photo : CGTN Africa

77 Économie bleue : une opportunité de résilience et d’adaptation aux changements climatiques pour les PEID

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qu’elles puissent intensifier le rendement de leurs cultures, gérer durablement leurs ressources natu-relles, varier leurs sources de revenus et défendre leurs moyens d’existence contre les effets nocifs, tout en réduisant sur le long terme les risques liés aux catastrophes. En 2009, sur plus de vingt-cinq kilomètres le long de la rive du fleuve Volta blanche, au Ghana, les inondations ont occasionné des pertes en vies humaines, et détruit les habi-tations des agriculteurs et leurs champs où ils cultivaient principalement le maïs. En effet, les communautés de Yinduri, Pwalugu et Santeng, vivant le long du fleuve et gagnant leur vie par l’agriculture qu’elles pratiquent le long des berges, sont régulièrement touchées par les inondations, les incendies sauvages, la sécheresse et les mala-dies. Dans le district de Talensi Nabdam, où vivent ces communautés, les berges du fleuve constituent la seule superficie productive disponible, alors que le reste des terres est rocheux et infertile. Malheu-reusement, sur cette superficie, le changement climatique a perturbé les systèmes agricoles, occa-sionné des inondations dans les zones côtières et abaissé les niveaux d’eau autour du delta du fleuve, qui fournit presque quatre-vingts pour cent de l’approvisionnement en électricité du pays. Pour prévenir et réduire ces risques d’aléas naturels, World Vision International a mis sur pied un pro-gramme régional de résilience communautaire axé à la fois sur une approche intégrée et sur une approche flexible et réactive. En incluant ces deux approches, la gestion intégrée du projet a permis : i) aux agriculteurs de se doter de nouvelles

connaissances et compétences pour ce qui est des moyens d’existence ; ii) aux familles de stimuler leurs revenus et leur rendement grâce à la com-mercialisation des produits agricoles ; iii) aux agri-culteurs d’adopter des pratiques culturales plus résistantes aux chocs et aux contraintes de leur milieu ; iv) aux membres des familles d’améliorer leur état nutritionnel par une amplification de la consommation de denrées nutritives (Turnbull et coll., 2013, p. 60). Malgré les fortes pluies qui surviennent au fil des ans, les membres de ces trois communautés réussissent toujours à développer d’autres perspectives de subsistance grâce aux eaux des inondations, et aussi à utiliser l’humidité résiduelle du sol, qui survient après la décrue, pour réaliser des cultures à maturation rapide comme le haricot, la pastèque et le melon jaune.

Les aléas naturels sont perceptibles dans les pays francophones en développement. Au regard de leurs répercussions négatives, les populations ont développé des solutions éco-innovantes afin de renforcer leur résilience, conformément au 13e objectif de développement durable, en vigueur depuis janvier 2016 : « Prendre d’urgence des mesures pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions. »

Bibliographie

Hlomador, Fabrice Kobla (2017). « Togo : les villages côtiers en proie à l’avancée de la mer », Médiaterre, 16 novembre.

Pasteur, Katherine (2011). From vulnerability to resi­

lience : A framework for analysis and action to build community resilience, Bourton on Dunsmore, Practical Action Publishing.

Quenault, Béatrice (2015). « De Hyo¯go à Sendai, la résilience comme impératif d’adaptation aux risques de catastrophe : nouvelle valeur universelle ou gouverne-ment par la catastrophe ? », Développegouverne-ment durable et territoires, vol. 6, no 3 (décembre), p. 1-15.

Turnbull, Marilise, Charlotte Sterrett et Amy Hilleboe (2013). Vers la résilience : Un guide pour la réduction des risques de catastrophe et l’adaptation au chan­

gement climatique, Bourton on Dunsmore, Practical Action Publishing.

Cdit photo : HLOMADOR Fabrice Kobla

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akowedahobienvenu@gmail.com gnouatin@gmail.com idjenontin@gmail.com

Bienvenu Akowedaho DAGOUDO

Dagoudo Akowedaho Bienvenu est assistant de recherche, master en sociologie et économie rurales, spécialité communication et conseil agricole à la Faculté d’agro-nomie de l’Université de Parakou (Bénin). Il est assistant de recherche et d’ensei-gnement au département d’économie et sociologie rurales à la Faculté d’agronomie de l’Université de Parakou.

Guy Sourou NOUATIN

Nouatin Sourou Guy est enseignant-chercheur à la Faculté d’Agronomie de l’Uni-versité de Parakou (Bénin). Il a été vice-recteur chargé de la Coopération Interuni-versitaire, des relations Extérieures et de l’Insertion Professionnelle de l’Université de Parakou. Il est engagé et dirige de nombreux projet de coopération internationale.

Il est spécialiste en science de la communication et d’innovations, en développement organisationnel et institutionnel.

Ida Nadia S. DJENONTIN

Djenontin Ida Nadia S. est étudiante doctorante aux États-Unis dans le Michigan.

Elle est au Michigan State University (MSU) ou elle poursuit un double doctorat en Géographie et Sciences Environnementales et Politiques (Environmental Sciences and Policy). Elle est aussi assistante de recherche et d’enseignement dans le dépar-tement de Géographie a MSU.

Les ressources en eau du secteur