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Le risque de faux négatifs varie selon les études et leurs effectifs. Chio et al., dans une étude rétrospective internationale incluant 201 patients retrouvent 45% d’erreur diagnostique initiale (214). Belsh et al. estiment ce risque à 27% à partir d’un plus petit effectif de 45 patients, plus important chez les plus de 60 ans (48% versus 16%), avec pour conséquence 57% d’exclusion d’essais thérapeutiques. Les auteurs débattent de la possibilité que les praticiens aient envisagé le diagnostic de SLA. Néanmoins le tableau clinique ne permettant pas de l’affirmer de façon certaine, et redoutant l’effet irréversible et les conséquences d’une telle annonce diagnostique, ceux-ci auraient alors préféré attendre et évoquer en premier lieu un autre diagnostic (215). La coexistence d'autres pathologies auxquelles peuvent être rattachés les symptômes, un bilan paraclinique orientant vers un autre diagnostic, une mauvaise connaissance de la pathologie par les non neurologues ou une présentation clinique atypique sont autant d’autres explications possibles.

Dans l’étude de Belsh, 5 faux négatifs ont bénéficié d’une chirurgie, dont 2 décompressions lombaires et une endartériectomie carotidienne (215). Une autre étude rapporte une intervention chirurgicale (décompression médullaire et ulnaire) chez 12% de patients chez qui les symptômes a posteriori

70 étaient attribuables à la SLA (248), ce qui est comparable aux 13% rapportés par Srinivasan et al. (249). La question se pose d’une inefficacité complète de la chirurgie, ou d’un possible bénéfice non constaté car masqué par l’évolution péjorative d’une SLA associée. Ces faux négatifs souffrent en conséquence d’une latence diagnostique significativement allongée (18,4-19 mois versus 10-13,2 mois (215)(248)).

b. Faux positifs

Concernant le taux de faux positifs, on l’estime à 5-15% (106)(247). L’étude comprenant le plus gros effectif de patients s’est basée sur un suivi de plus de 500 patients diagnostiqués initialement SLA, issus du registre écossais. Chez les 53 faux positifs de cette étude, 4% présentaient une atteinte bulbaire seule, 72% une atteinte spinale uniquement, 21% une association d’atteintes bulbaire et spinale. La reconsidération diagnostique a eu lieu en raison d’une clinique atypique dans 36% des cas, du résultat d’examens complémentaires pour 21%, et d’une absence d’évolution clinique dans 43% des cas. Les diagnostics finalement retenus étaient variés : myélopathie cervicale, cause vasculaire, radiculopathie, SEP, AMS, NMMBC, polymyosite, hydrocéphalie à pression normale, tumeur rétro pharyngée, méningiome cervical, fasciculations bénignes, sténose lombaire… (213)

V.

PRONOSTIC ET SURVIE

A. Cinétique d’évolution

a. Topographique

Le pattern d’évolution des atteintes cliniques des NMC et NMP a bien été étudié par Korner et al. (92), sur une analyse rétrospective de 189 patients présentant une SLA probable ou certaine.

Les 3 figures suivantes représentent la distribution et la progression des atteintes cliniques du NMC et du NMP dans chaque région, entre une 1ère évaluation à t

0 et une 2ème un an après, pour les formes à

71 A : Début bulbaire.

B : Début cervical.

C : Début lombaire.

Figure 27 : Comparaison de l’évolution des signes d’atteintes du NMC (à gauche) et du NMP (à droite) en fonction du site initial. A : début bulbaire ; B : début cervical ; C : début lombaire.

Barres bleues : 1ère évaluation ; barres jaunes : 2ème évaluation à un an.

D’après Korner et al. (92)

L’analyse de ces schémas nous indique que :

- L’évolution vers une atteinte bulbaire serait plus importante en cas de début cervical. Ceci avait déjà été avancé par d’autres auteurs (80).

72 - En cas de début bulbaire, à un an les taux d’atteinte du NMP sont comparables entre les

régions bulbaire et cervicale.

- L’atteinte du NMP prédomine toujours au niveau de la région initiale, même au cours de l’évolution, avec surtout une majoration de l’atteinte en distalité.

L’évaluation clinique (basée sur les items du score ALSFRS-R, et donc ne distinguant pas atteintes du NMC et du NMP) de 150 patients en début de maladie, répétée tous les 3 mois jusqu’à la présence d’une atteinte respiratoire, a permis de dégager des tendances quant à l’évolution du phénotype (109) :

- D’une atteinte initialement bulbaire, la 2ème région touchée serait cervicale dans 71% des cas

(avec une atteinte significativement plus rapide à cette région), lombaire dans 29% des cas. Par ailleurs il a été avancé que l’atteinte des membres après début bulbaire serait plus rapide chez les hommes (80).

- En cas de début cervical la 2ème région touchée serait lombaire dans 64% des cas, bulbaire dans

32% des cas et respiratoire dans 5% des cas. De manière plus précise, le schéma d’évolution en cas de début cervical serait le suivant : atteinte du MS controlatéral, atteinte du MI ipsilatéral puis controlatéral et atteinte bulbaire, le plus souvent retardée par rapport à l’atteinte lombaire (110).

- En cas de début lombaire la 2ème région serait cervicale dans 83% des cas (avec une atteinte

significativement plus rapide à cette région), bulbaire dans 14% des cas et respiratoire dans 3% des cas. Turner et al. retrouvent quant à eux en évaluant de manière prospective 109 patients une propagation au MI controlatéral pour 76% de leurs patients, et au MS homolatéral pour 24% d’entre eux, sans propagation à la sphère bulbaire (8).

L’analyse rétrospective de 282 patients présentant une SLA probable ou certaine a permis de mettre en évidence une propagation du déficit selon une direction horizontale dans 33% des cas, rostro- caudale dans 32%, caudo-rostrale dans 21% (associée à la meilleure survie), et à distance dans 14% des cas (250). Il avait déjà été mis en évidence que la propagation à des aires non contiguës serait plus rapide au sein de la moelle que de la moelle à la région bulbaire (80). Ceci confirme ce qui a été abordé dans le chapitre concernant la physiopathologie, à savoir que tous les tableaux cliniques ne peuvent pas être expliqués par une propagation par contiguïté.

b. Fonctionnelle

L’équipe de la Pitié Salpêtrière a montré, à partir du recueil prospectif de plus de 1800 patients, que la progression de la maladie serait curviligne et non linéaire, comme cela était supposé auparavant (251). Ce pattern curviligne concernerait tous les patients (y compris les formes lentes), avec un déclin plus rapide chez les patients les plus âgés et en cas d’atteinte bulbaire, et chez tous les patients aux phases

73 les plus précoces et les plus tardives de la maladie. Cette progression a été évaluée à partir du score ALSFRS-R, mais serait valable également pour le score MMT qui évalue la force musculaire. Ceci est important notamment pour le design des essais thérapeutiques et la prise en charge des patients (252), afin de ne pas mettre par exemple l’évolution initialement plus rapide sur le compte d’une inefficacité complète du traitement à l’essai.

Figure 28 : Déclin du score ALSFRS-R en fonction du temps.

D’après Gordon et al. (252)

En étudiant de manière prospective l’histoire naturelle de la maladie chez 1471 patients suivis en centre de référence, Roche et al. ont pu déterminer des étapes importantes, et établir que celles-ci surviennent généralement à des délais prévisibles. Ainsi le diagnostic serait posé à 35% de l’évolution de la maladie, l’atteinte d’une 2ème région à 38%, d’une 3ème région à 61%, la pose d’une gastrostomie

puis d’une VNI à 77 et 80% respectivement (chiffres calculés par rapport à la durée de la maladie des patients décédés, 100% représentant le décès) (253).

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