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O RGANISATION DE FILAMENTS DANS L ’ AIR : THEORIE ET SIMULATIONS NUMERIQUES

Tension inter-électrodes ( kV )

C HAPITRE 4 : C ONTROLE DE LA LONGUEUR DES CANAUX DE PLASMA CREES PAR DES FILAMENTS FEMTOSECONDES

5. O RGANISATION DE FILAMENTS DANS L ’ AIR

5.3 O RGANISATION DE FILAMENTS DANS L ’ AIR : THEORIE ET SIMULATIONS NUMERIQUES

L’énergie contenue dans le faisceau après le diaphragme vaut Ein = 10 mJ. Les profils initiaux

sont représentés dans la figure 5.9.a et 5.9.b. Les figures 5.9.c et 5.9.d représentent la

distribution en fluence (

(

)

+∞

(

)

∞ − ≡ x y z t dt z y x

F , , E , , , 2 ) des figures multi-filamentaires obtenues après une distance de propagation dans l’air de 15 m environ avec respectivement 3 et 5 filaments. Comme les gradients sont les plus élevés à la périphérie du faisceau, un anneau non circulaire qui suit le contour du diaphragme est formé au cours de la phase d’auto- focalisation. L’auto-focalisation amplifie cette structure non uniforme pour donner naissance à une figure multi-filamentaire prédéterminée. Les filaments sont localisés sur les bords d’un polygone et leur nombre suit le nombre N de lobes du diaphragme (si Pin > N×Pcr). En faisant

varier le nombre N ainsi que l’énergie initiale (afin d’avoir le bon nombre de puissance critique), il est ainsi possible de générer des figures multi-filamentaires avec un nombre de filaments compris entre 2 et 10 (voir chapitre 4, § 4.3.5). Lorsque l’intensité dans chacun des filaments est assez importante, l’ionisation multiphotonique est déclenchée et sature la croissance de l’intensité sur l’axe de chaque filament (voir figures 5.10). Les figures multi- filamentaires constituées de 3 ou 5 filaments se propagent sur plusieurs dizaines de mètres avec de faibles modifications de leur structure.

(a) (b)

(c) (d)

Figure 5.9 : Représentation du profil du faisceau en fluence à différentes distances de propagation pour les masques d’amplitude avec 3 et 5 lobes. (a) et (b) Profils initiaux calculés après la traversée du masque d’amplitude. (c) et (d) Intensités intégrées dans le temps des figures multi- filamentaires obtenues avec une impulsion de 10 mJ pour respectivement un masque de symétrie ternaire et un masque de symétrie pentagonale.

La figure 5.10 représente l’évolution de l’intensité maximum dans le filament le plus intense (échelle de gauche) et l’évolution de la densité électronique maximum dans le filament (échelle de droite) au cours de la propagation. L’intensité sur l’axe de propagation du filament est comprise entre 1012 et 1013 W.cm-2. On observe aussi la présence de canaux de plasma dont la densité électronique est de l’ordre de 1016 cm-3 dont la longueur est de l’ordre de plusieurs dizaines de centimètres. Ces plasmas évitent que les filaments s’effondrent sur eux-mêmes. La distance de propagation sous forme de filaments s’étend sur plus de 40 m, ce qui est beaucoup plus long que dans le cas d’un filament unique (1 m) aussi bien numériquement qu’expérimentalement avec les mêmes conditions initiales et sans masque d’amplitude.

Figure 5.10 : Evolution de l’intensité (trait continu, échelle de gauche) et de la densité électronique (courbe en tiret, échelle de droite) dans le cœur du filament le plus intense en fonction de la distance de propagation. Trait fin : masque en forme de trèfle à 3 feuilles. Trait en gras : masque en forme de trèfle à 5 feuilles.

Lorsque la puissance crête est suffisamment importante, chaque filament devrait se scinder en deux sous-filaments régulièrement répartis en conservant éventuellement la même symétrie de la figure initiale. Néanmoins, comme on peut le voir dans la figure 5.11 où les filaments sont représentés sous forme d’iso-surface en fluence à 0.2 J.cm-2, les filaments convergent vers l’axe de propagation du faisceau et fusionnent pour former un filament central robuste.

5.3 ORGANISATION DE FILAMENTS DANS L’AIR : THEORIE ET SIMULATIONS NUMERIQUES

(b) (c) (d)

Figure 5.11 : (a) Isosurface en fluence pour 0.2 J cm-2 obtenue avec un masque de symétrie

pentagonale. (b), (c) et (d) Evolution de la fluence en fonction de la distance de propagation (8 m, 17.25 m et 26 m).

De manière à comprendre plus en détail ce phénomène, nous avons représenté l’évolution temporelle de l’impulsion dans chacun des filaments au cours de la propagation. La dynamique temporelle des filaments saturés par l’ionisation multiphotonique suit les principales étapes en trois dimensions du modèle exposé par Mlejnek et al. [5.10] (« spatial replenishment model »). Une fois que la figure multi-filamentaire est obtenue avec une intensité suffisante dans chaque canal de lumière (voir figure 5.12.a), l’ionisation agit comme un effet de saturation et défocalise l’arrière de l’impulsion. Ce phénomène apparaît tout d’abord dans le centre de l’impulsion puis à l’arrière de l’impulsion et casse l’impulsion en deux sous-impulsions (voir figure 5.12.b). Ce phénomène est amplifié par la présence du plasma qui accélère l’arrière de la première impulsion et la raccourcit considérablement (voir figures 5.12.c et 5.12.d).

(a) (b)

(c) (d)

Figure 5.12 : Evolution temporelle des filaments en fonction de la distance de propagation. Les

canaux de lumière sont représentés pour des intensités égales à 1011 W.cm-2 en fonction du temps

et de l’espace. (a) z = 10 m ; (b) z = 15 m ; (c) z = 20 m ; (d) z = 25 m.

5.3.2 Effet d’un masque de phase

Un autre moyen de contrôler le processus de multi-filamentation est de conserver la symétrie circulaire initiale du faisceau et de contrôler la phase initiale de l’impulsion laser. Forcer les aberrations initiales du faisceau permet de contrôler la filamentation multiple avec l’avantage de minimiser les pertes d’énergie dues à l’insertion d’un masque d’amplitude sur le trajet du faisceau. Nous avons alors introduit dans le code la phase mesurée dans l’équation (5.1) avec les conditions initiales d’astigmatisme expérimentales. La figure 5.13.a représente un motif multi-filamentaire calculé numériquement avec une impulsion initiale d’énergie 7.7 mJ. Au cours de la phase d’auto-focalisation, le faisceau se contracte plus vite dans le plan vertical y-z et finit par former une figure elliptique le long de l’axe y. Deux filaments apparaissent ensuite dans le plan sagittal (x-z) aux extrémités de cette structure ovale. Ils se propagent sur plusieurs mètres. A des distances plus importantes, la figure effectue une rotation de 90° dans le plan tangentiel (y-z). Ces prédictions numériques avec des conditions très proches de l’expérience sont en très bon accord avec les résultats expérimentaux.

(b)

Figure 5.13 : Profils en fluence calculés numériquement à partir d’un faisceau dont la phase

présente de l’astigmatisme. L’énergie initiale vaut 5 mJ et le col du faisceau initial w0 = 5 mm. (a)

5.4 CONCLUSION DU CHAPITRE 5

En conclusion, nous avons montré que l’auto-focalisation de faisceaux super-gaussiens non homogènes conduit de manière déterministe à la formation de figures multi-filamentaires. Les canaux de lumières sont préférentiellement amplifiés à la périphérie du diaphragme utilisé pour diaphragmer le faisceau incident. Des figures très régulières en forme de fleurs à plusieurs pétales (de 2 à 10) ont été obtenues. Ces figures sont reproductibles d’un tir à l’autre et très bien expliquées par les simulations numériques. La distribution des filaments est prédéterminée par les forts gradients d’intensité du faisceau initial où les perturbations seront amplifiées au cours de la phase d’auto-focalisation et ne dépend pas du bruit inhérent du faisceau initial. Une distorsion de phase, par exemple l’astigmatisme, permet également de contrôler l’organisation des filaments, avec l’avantage de minimiser les pertes en énergie. Enfin, l’influence de l’ionisation après la formation des filaments a pour effet d’exciter des modes d’ordre supérieur et permet l’apparition de filaments secondaires qui fusionnent par redistribution de l’énergie vers le centre du faisceau.

Le contrôle du processus de filamentation multiple permet de répartir l’énergie initiale du faisceau vers des surintensités très localisées et stables qui fusionnent en un filament central au cours de leur propagation. Le contrôle de la localisation de cette coalescence peut être obtenu en modifiant la structure du faisceau initial et devrait améliorer et optimiser la maîtrise de la génération de filaments sur de longues distances.

REFERENCES

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[5.10] M. Mlejnek, E. M. Wright, and J. V. Moloney, Dynamic spatial replenishment of femtosecond pulses propagating in air, Opt. Lett. 23, n°5 (1998).

E

T U D E D E L A P R OP A G A T I O N D

I M P UL S I O N S F E M T O S E C O N D E S E N A L T I T U D E