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CHAPITRE 5 DISCUSSION DES RÉSULTATS ET CONCLUSION

5.1 Retour sur les propositions de recherche

5.1.1 Il y a un lien entre les modes d’organisation du travail (VI) et le recours au TSO (VD).

Effectivement, les résultats obtenus appuient notre première proposition de recherche. D’abord, nous remarquons que les modes d’organisation diffèrent entre le centre hospitalier francophone et le centre hospitalier anglophone : parmi ces deux centres hospitaliers, un seul a recours au TSO.

Le centre hospitalier francophone recourt davantage au TSO que le centre hospitalier anglophone – à l’exception d’un seul hôpital récemment fusionné au centre hospitalier anglophone. Bien que la pratique professionnelle soit encadrée par la législation, notamment par la Loi 90, il revient au droit de gérance de prévoir l’organisation du travail des professionnels en soins et d’adapter les règles internes en conséquence. Les résultats montrent que certains éléments des modes

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d’organisation du travail ont tendance à augmenter le recours au TSO : un taux élevé d’emploi à temps partiel chez les infirmières, la composition de l’équipe de soins, le type de quarts de travail (rotation ou non, huit ou douze heures), la philosophie de gestion et la culture de l’établissement, notamment.

Tel qu’indiqué au troisième chapitre, la majorité des équipes de soins du centre hospitalier francophone sont constituées d’infirmières, d’infirmières auxiliaires et de préposées aux bénéficiaires qui travaillent en interdisciplinarité. Or, lorsqu’une infirmière s’absente, il devient impératif de la remplacer ou d’obliger une infirmière à faire du temps supplémentaire : les autres intervenants ne sont pas autorisés à effectuer les tâches de l’infirmière. Du côté du centre hospitalier anglophone, les équipes de soins sont presque uniquement constituées d’infirmières. Lorsqu’une infirmière s’absente, le travail peut donc être redistribué aux autres infirmières de l’équipe et réorganisé sans devoir remplacer l’infirmière ou obliger une infirmière à faire du temps supplémentaire. Ces résultats nous permettent d’appuyer notre première proposition, laquelle indique qu’il y a un lien entre les modes d’organisation du travail et le recours au TSO.

Nous constatons aussi que les modes d’organisation du travail reposent en grande partie sur la philosophie de gestion et de la culture de l’établissement. Au centre hospitalier francophone, nous avons remarqué qu’il y a une culture qui prône le travail en interdisciplinarité où les équipes de soins se composent d’infirmières, d’infirmières auxiliaires et de préposées aux bénéficiaires depuis des années. Nous remarquons aussi, que la philosophie de gestion a un effet important sur le recours au TSO. Les gestionnaires du centre hospitalier francophone proviennent de moins en moins du domaine de la santé. Cela nous permet de penser qu’ils gèrent avec plus de détachement face à la profession et ont une gestion axée sur le contrôle des coûts. Or, l’implantation des projets d’optimisation Lean ont pour objectif la réorganisation du travail pour réduire les pertes de temps. Les résultats de notre recherche indiquent que ce mode d’organisation favorise la gestion en juste-à-temps

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et l’organisation du travail avec le moins de ressources possibles. Ces deux facteurs augmentent le recours au TSO au sein du centre hospitalier francophone.

Au centre hospitalier anglophone, nous avons remarqué que la culture valorise la profession infirmière, ce qui peut expliquer pourquoi les équipes de soins ne sont composées que d’infirmières. C’est aussi ce qui explique que les infirmières sont autonomes dans leur pratique professionnelle pour organiser les soins. De plus, les gestionnaires des unités de soins sont encore, pour la plupart, des infirmières de profession qui ont une philosophie de gestion valorisant la profession infirmière et moins orientée sur le contrôle des coûts. Les unités de soins se composent principalement d’une infirmière chef et d’infirmières, qui elles, réalisent les plans de soins de chacun des patients et s’occupent de l’intégralité des soins donnés aux patients. Depuis l’intégration des infirmières auxiliaires au sein de certaines unités de soins, certaines commencent à travailler en interdisciplinarité. En cas d’absence ou de surcroit de travail, les infirmières réorganisent leur journée de travail entre elles, car elles ont toutes le même champ de pratique. Le TSO est donc peu utilisé au sein du centre hospitalier anglophone.

5.1.2 Les modes d’organisation du travail (VI) ont une influence sur l’aménagement des temps de travail (VM)

À la lumière des résultats obtenus, nous pouvons également soutenir notre deuxième proposition de recherche. Tel que mentionné au point précédent, les gestionnaires jouent un rôle discrétionnaire sur le plan de l’organisation du travail et l’aménagement des temps de travail. Comme l’aménagement des temps de travail est une matière négociée localement, les syndicats n’ont aucun pouvoir, ni de moyen de pression pour tenter de négocier avec la partie patronale. Malgré certaines clauses des ententes locales encadrant l’aménagement des heures et de la semaine, les gestionnaires peuvent organiser les horaires en fonction de leurs besoins.

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Ainsi, nous constatons que les modes d’organisation du travail – Lean, par exemple, qui prônent une gestion en juste-à-temps – influencent certainement l’aménagement des temps de travail. Les résultats montrent qu’au sein du centre hospitalier francophone, où le modèle Lean est mis de l’avant, les horaires de travail des infirmières sont moins flexibles et plus imprévisibles. Ces effets sont le fruit de deux facteurs : leurs horaires sont gérés par des commis aux horaires, puis elles sont contraintes de faire du TSO. Du côté anglophone, comme les équipes sont composées majoritairement d’infirmières, ces dernières s’occupent elles-mêmes de la gestion de leur horaire. Ainsi, les infirmières qui travaillent au sein du centre hospitalier anglophone ont des horaires de travail plus prévisibles et jouissent d’une meilleure conciliation travail et vie personnelle.

5.1.3 L’aménagement des temps de travail (VM) modère soit de manière positive ou négative la relation qu’il y a entre les modes d’organisation du travail (VI) et du temps supplémentaire obligatoire (VD)

Les résultats obtenus appuient la proposition selon laquelle l’aménagement des temps de travail modère de manière positive la relation entre les modes d’organisation du travail et le recours au TSO. D’abord, tel que mentionné dans la section 5.1.1, nous pouvons dire qu’il existe une relation entre les modes d’organisation du travail et le recours au TSO. Ensuite, nous cherchions à savoir si l’aménagement des temps de travail modère de manière positive ou négative cette relation. Nous constatons que plus les temps de travail s’éloignent des horaires collectifs uniformes et plus ils sont atypiques, plus l’effet de la relation entre les modes d’organisation du travail et le recours au TSO s’accentue.

Les résultats montrent un lien entre les horaires de travail imprévisibles et les modes d’organisation Lean ou en juste-à-temps, qui offrent plus de flexibilité aux gestionnaires. Ces éléments sont directement liés au TSO. Ainsi, nous pouvons confirmer notre troisième proposition de recherche. Cette dernière indique que plus

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l’aménagement des temps de travail est atypique, plus le lien entre les modes d’organisation du travail et le recours au TSO est fort.

Maintenant que nous avons discuté de nos propositions de recherches, nous revenons sur notre revue de la littérature afin de mettre en lumière ce que notre recherche appuie et apporte comme nouvelles connaissances en la matière.

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