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Retour sur les expériences avec Listeria

Les expériences du chapitre précédent ont fourni un grand nombre de données, de dynamique modérée certes, puisque la fréquence d’obtention d’image était d’une image par minute, mais une bibliothèque d’image de points d’intensité suffisamment fournie pour nous permettre de faire une analyse quantitative des caractéristiques des points d’intensité sur les expériences réalisées. Encore une fois, nous ne présentons ici qu’un exemple d’analyse d’expérience.

Comme nous l’avons vu dans le chapitre 3, Listeria montre une très grande spécificité pour les anticorps qui lui sont destinés, et dans les temps d’analyse qui étaient utiles pour la détection, nous avons pu voir qu’il n’y avait que très peu d’accroche non

Figure 4.25 Répartition des trajectoires en fonction du déplacement total et du temps d’arrêt

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spécifique sur les autres zones (une dizaine de bactéries au bout de sept heures d’incubation en contact avec la surface). Cela limite à priori fortement les zones analysables si l’on ne peut observer de bactéries uniques que sur les plots positifs.

En réalité, tout est une question d’échelle de temps. Si en sept heures après une injection à 102 UFC.mL-1, il n’y a en effet quasiment aucune accroche non spécifique, il y en a après plus de douze heures d’incubation. Ces temps longs d’analyse étaient inutiles pour la détection car à ce moment de l’expérience les plots d’anticorps spécifique sont saturés. Mais pour effectuer une cartographie du comportement bactérien, cela peut être pertinent.

Sur la Figure 4.26 sont représentées deux portions d’images différentielles prises à deux instants différents de l’expérience.

Sur les deux images, l’anticorps LiM 14, c’est-à-dire la zone entourée en violet, correspond au même plot. En a, à un peu moins de 8h après l’injection, quelques dizaines d’évènements bactériens sont comptables et très intenses sur le plot de LiM16, mais rien n’est observable autour du plot. Après plus de 12h d’incubation, les plots de LiM16 et de LiM14 sont entièrement saturés et on ne peut plus détecter d’évènement unique sur ces plots, tandis on peut observer de nombreux points individuels sur la zone entre les plots et sur les plots de Lis12.

Grace à ces deux temps permettant d’observer des évènements individuels sur des plots différents, on peut reconstituer la cartographie des caractéristiques des points d’intensité selon leur position sur l’image. De plus, ici les images sont reconstruites pour avoir une netteté homogène sur toute l’image, donc il est possible d’analyser un champ trois fois plus large que dans les images obtenues lors des expériences avec E. coli ATCC 11775.

Figure 4.26 Comparaison des aspects d’évènements uniques a. Sur plot d’anticorps spécifique LiM 14, 472 min après injection b. Sur plot d’anticorps non spécifique et sur or passivé 793 min après

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Sur ces cartes topologiques, deux observations principales peuvent être faites. Tout d’abord, la présence de zones sans données statistiques sur les plots de KLH montre que ce contrôle négatif est très efficace pour Listeria dans les conditions de détection. La différence de comportement entre E. coli observé précédemment et Listeria par rapport au plot de KLH peut être simplement dû à des morphologies différentes (Listeria n’a ni pili ni flagelle à la température expérimentale). Il est également possible que le temps caractéristique d’interaction de la bactérie pathogène avec le contrôle négatif soit trop court par rapport au temps d’exposition des images, qui est de plusieurs dizaines de millisecondes. Dans ce cas, le signal intégré sur le temps d’exposition ne permet pas de voire ces signaux fugaces.

Concernant l’intensité moyenne des points d’intensité, il est marquant que les anticorps spécifiques LiM14 et LiM16 sont des surfaces où les points d’intensité sont particulièrement intenses. L’explication est similaire à celle que nous avons effectué dans précédemment. Les anticorps spécifiques ont des interactions importantes avec la bactérie étudiée ce qui à la fois rapproche la bactérie de la surface et en même déforme la morphologie de la cellule. Ces deux phénomènes accentuent la perturbation du champ plasmon ce qui explique la forte intensité observée. Cette fois, contrairement aux expériences sur E. coli, la surface d’or a été passivé et la carte topologique des intensités montre bien que le comportement bactérien sur l’or se manifeste par une intensité de ponts faibles, signifiant une faible interaction avec la surface.

En revanche, l’analyse de la topologie des rayons des points d’intensité offre un résultat surprenant. Ici, les points d’intensité situés sur les plots d’anticorps spécifiques ont des rayons plus faibles qu’ailleurs sur l’image. Le raisonnement sur la déformation des bactéries en fonction de la force des interactions avec la surface ne peut pas justifier cette observation.

Pour trouver une possible explication à cette observation, il faut encore une fois raisonner sur le temps d’exposition. Ici, les plots de Lis12 et les zones d’or passivées ont une interaction non spécifique avec les bactéries : celles-ci demeurent donc plus mobiles que sur les plots spécifiques. Les points d’intensité relativement gros sont donc vraisemblablement dus à un flou de mouvement des bactéries pendant la période d’intégration du signal.

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Cet exemple d’application de notre traitement du signal à un cas de bactéries pathogènes a permis d’approfondir les analyses de détection de pathogènes que nous avons vues dans le chapitre précédent.

Mais pour montrer l’intérêt de notre technique pour l’étude de l’interaction entre bactéries et surfaces spécifiques, il serait intéressant de s’atteler à un cas moins traditionnel que les surfaces d’anticorps, qui sont très efficaces mais donnent des résultats assez prévisibles puisque les interactions entre antigènes et anticorps sont étudiées depuis des dizaines d’années [225].

Figure 4.27 Étude de l’accroche spécifique de Listeria monocytogenes sur des plots spécifiques d’anticorps

a. Topologie des plots d’anticorps anti Listeria en fonction du rayon estimé maximisant le contraste des points d’intensité détectés

b. Topologie des plots d’anticorps anti Listeria en fonction de l’intensité moyenne des points d’intensité détectés

c. Image brute reconstruite de la zone étudiée montrant les hétérogénéités de surface au niveau des plots d’anticorps

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