• Aucun résultat trouvé

PARTIE II: E TUDE E XPÉRIMENTALE DES T RANSITIONS DE P HASE DES P HYLLOSILICATES

CHAPITRE 7 RESULTATS DANS LE SYSTEME Si-Al-Mg-K-H 2 O

L’étude expérimentale menée dans le système chimique à cinq composants Si-Al-Mg-K-H2O vise à mettre en relation les deux chapitres précédents et à voir dans quelle mesure les observations faites dans les systèmes chimiques simples se reproduisent lorsque l’on augmente la complexité du système chimique. La coïncidence des phases cristallisant dans ce système chimique et dans les précédents montrerait une indépendance de la stabilité thermique relative des phases vis à vis de la composition globale du système. Au contraire, l’apparition de séquences nouvelles de cristallisation dans les expériences ci-dessous montrerait que les stabilités thermiques relatives décrites à partir de ces séquences de cristallisation n’ont de sens qu’à composition chimique connue.

La stabilité des micas et des smectites potassiques a été étudiée expérimentalement dans ce même système chimique par Aja et al. (1991b). Les expériences menées sont des expériences de dissolution, et les auteurs montrent que la substitution de Mg2+ en position octaédrique est négligeable et n’a donc que peu d’effet sur la position des droites d’équilibre entre les différentes phases micacées et smectitiques. En effet l’erreur commise sur la position des courbes en négligeant la présence de Mg2+ dans les minéraux (donc en se positionnant dans un système à 4 composants, sans le magnésium) est de moins de 0,3 unités logarithmiques et permet aux auteurs de dire que la représentation des équilibres en système à 4 composants chimiques est suffisante. Toutefois on peut également se rendre compte que l’erreur issue de cette simplification rentre dans les barres d’erreur de la méthode

PARTIE II : ETUDE DES TRANSITIONS DE PHASE DES PHYLLOSILICATES SOUS GRADIENT DE TEMPÉRATURE

expérimentale utilisée par les auteurs. L’effet de la présence de Mg2+ sur le champ de stabilité des micas ne peut donc être réellement estimée par cette méthode. C’est pourquoi nous espérons compléter les informations de Aja et al. (1991) en nous basant sur une technique expérimentale différente.

1 - Les expériences menées dans le système Si-Al-Mg-K-H

2

O

Un jeu d’expériences à deux capsules a été mené dans ce système chimique regroupant les systèmes traités dans les deux chapitres précédents. Les produits de départ sont un gel de clinochlore, source du magnésium, et un gel de muscovite, source du potassium. La capsule contenant le gel de clinochlore est placée au point chaud et la capsule contenant le gel de muscovite est placée au point froid dans l’expérience 5 ; et inversement dans l’expérience 6 (Figure 89).

Figure 89 : Configuration des tubes expérimentaux des expériences 5 et 6.

1 138

La composition chimique globale de ces deux expériences est représentées sur la Figure 90 et la Figure 91. Nous voyons que les deux expériences ont les mêmes compositions en potassium, et sont très proches d’une composition d’illites. Il y a une plus grande différence dans la composition en magnésium : l’expérience 5 a une composition globale de départ proche des chlorites alors que l’expérience 6 a une composition plus siliceuse, plus proche des smectites.

Figure 90 : Diagramme ternaire Si – Al – K (projection depuis H2O et Mg) montrant la composition chimique globale des expériences 5 et 6.

Figure 91 : Diagramme ternaire Si – Al – Mg (projection depuis H2O et K) montrant la composition chimique globale des expériences 5 et 6.

PARTIE II : ETUDE DES TRANSITIONS DE PHASE DES PHYLLOSILICATES SOUS GRADIENT DE TEMPÉRATURE

Les conditions d’expérimentation sont semblables à celles des expériences menées précédemment (Tableau 13).

Tableau 13 : Conditions expérimentales des expériences 5 et 6.

Nom de l’expérience Température au point

chaud (°C) Pression (kbars) Temps de l’expérience

Expce 5 350 1,00 61 jours

Expce 6 350 1,02 60 jours

2 - Résultats expérience 5 : gel de clinochlore point chaud – gel de

muscovite point froid

2.1 - Etude morphologique au MEB

Les observations faites au microscope électronique à balayage montrent une prépondérance des minéraux phylliteux dans les cristallisations ayant lieu au cours de l’expérience.

Le point froid de l’expérience montre essentiellement des agglomérats de plaquettes de phyllosilicates (Figure 92a, b, c et d). Ces plaquettes font moins d’un µm d’épaisseur (Figure 92c), et forment parfois des tapis continus (Figure 92d). Ponctuellement on voit des formes plus compactes (Figure 92e et f). Le minéral de la Figure 92e est difficile à identifier puisqu’on ne voit que la face « lisse » originellement posée sur la paroi métallique du tube expérimental. Le minéral de la Figure 92f ressemble à un grain de quartz, et il n’en a été observé que cette unique occurrence.

Les agglomérats de plaquettes phylliteuses se rencontrent tout le long du tube (Figure 93a, b et c), jusqu’au point chaud. On rencontre même à ce point chaud ces phyllosilicates poussant sur un minéral préexistant (Figure 93e), qui est probablement un quartz.

1 140

Figure 92 : Photographies MEB des phases néoformées dans l’expérience 5, au Bout 1 (Point froid). (a), (b), (c) et (d) : plaquettes de micas ;

(e) : phase alumineuse posée sur un tapis de micas ; (f) : grain de quartz isolé.

PARTIE II : ETUDE DES TRANSITIONS DE PHASE DES PHYLLOSILICATES SOUS GRADIENT DE TEMPÉRATURE

Figure 93 : Photographies MEB des phases néoformées dans l’expérience 5. (a) : Bout 2 ; plaquettes de micas ;

(b) et (c) : Bout 4 ; plaquettes de chlorites ;

(e) et (f) : Bout 5 (point chaud) ; plaquettes de micas en remplacement d’un minéral préexistant.

1 142

2.2 - Chimie semi-quantitative (EDS MEB et MET)

Les analyses semi-quantitatives effectuées au MEB sont représentées dans les diagrammes triangulaires de la Figure 94 et de la Figure 95. La composition chimique de cette expérience comportant 4 éléments majeurs (en dehors de H2O), nous avons choisi de représenter les compositions chimiques des minéraux dans deux diagrammes, l’un montrant essentiellement les micas en domaine potassique, et l’autre représentant les phases silicatées magnésiennes.

Figure 94 : Composition dans un diagramme ternaire Si-Al-Mg projeté depuis H2O et K des minéraux précipités dans l’expérience 5 (analyses semi-quantitatives au MEB).

Nous pouvons voir sur la Figure 94 que seuls les échantillons Bout 4 et Bout 5, situés dans la partie chaude du tube, montrent des compositions chimiques riches en magnésium. Dans le Bout 4 (carrés oranges) semble cristalliser du clinochlore, tandis qu’au point chaud du tube (triangles rouges) cristallise une chlorite plus intermédiaire entre clinochlore et sudoite.

PARTIE II : ETUDE DES TRANSITIONS DE PHASE DES PHYLLOSILICATES SOUS GRADIENT DE TEMPÉRATURE

Figure 95 : Composition dans un diagramme ternaire Si-Al-K projeté depuis H2O et Mg des minéraux précipités dans l’expérience 5 (analyses semi-quantitatives au MEB).

Dans un diagramme triangulaire montrant les micas, nous voyons (Figure 95) que dans la moitié chaude du tube (carrés oranges et triangles rouges), en plus des chlorites vues précédemment, nous avons des analyses correspondant à des micas de type muscovite. Nous voyons aussi des points intermédiaires entre le clinochlore et les micas, se situant sur une droite de mélange entre ces deux phases. En effet plusieurs analyses sont effectuées sur des zones épaisses où les phases sont superposées les unes aux autres. Nous voyons également que la moitié froide du tube (cercles bleus et losanges verts) est constituée essentiellement de micas, avec une forte concentration des points sur la composition de type muscovite. De plus nous voyons une droite de mélange très nette se dessiner entre la muscovite et le pôle aluminium, suggérant qu’au point froid du tube il y a en plus des micas une phase purement alumineuse.

2.3 - Cristallographie par diffraction des rayons X

Les diagrammes DRX obtenus dans le bout froid du tube (Figure 96) montre deux pics à 10,11 Å et 3,35 Å caractérisant la présence d’un mica de type muscovite, qui semble la phase majoritaire du bout froid. Le pic de diffraction à 6,11 Å montre la présence d’une phase purement alumineuse, la boehmite de formule AlO(OH). Un très faible pic à 7,19 Å montre la présence probable de chlorites, mais en suffisamment faible quantité pour qu’elle n’apparaissent pas dans les analyses chimiques.

1 144

Expérience 5 - Bout 1 0 10 20 30 40 50 6 2 tetha Co 0 10,11 A 1,998 A 3,35 A 4,99 A 6,11 A 7,19 A

Figure 96 : Diagramme de diffraction RX effectué sur le matériel du Bout 1 (point froid) de l’expérience 5 ; trait bleu : diagramme naturel ; trait rouge : après traitement à l’éthylène glycol.

Expérience 5 - Bout 5 0 10 20 30 40 50 6 2 tetha Co 0 10,11 A 7,17 A 2,81 A 4,97 A 6,13 A 3,57 A 3,35 A

Figure 97 : Diagramme de DRX effectué sur le Bout 5 (point chaud) de l’expérience 5. Au point chaud du tube (Figure 97), nous constatons toujours la présence d’un mica de type muscovite (pics à 10,11 Å et 3,35 Å). Toutefois la phase majoritaire ici est la chlorite, visible par les pics à 7,17 Å, 4,97 Å et 3,57 Å. La boehmite, bien que très faiblement présente, est visible par le pic de diffraction à 6,13 Å.

PARTIE II : ETUDE DES TRANSITIONS DE PHASE DES PHYLLOSILICATES SOUS GRADIENT DE TEMPÉRATURE

Figure 98 : Séquence de cristallisation dans l’expérience 5.

3 - Résultats expérience 6 : gel de muscovite point chaud – gel de

clinochlore point froid

3.1 - Etude morphologique au MEB

Les observations faites au microscope électronique à balayage montrent une grande prépondérance de formes en fines plaquettes caractéristiques des phyllosilicates. Dans la partie froide du tube, nous voyons de grandes plaques continues formées d’agglomérats de fines plaquettes (Figure 99). Les mêmes formes se voient dans le milieu du tube (Bout 3), où l’on peut distinguer à fort grossissement la forme caractéristique des phyllosilicates, en plaquettes de bien moins d’un micron d’épaisseur (Figure 99). Les mêmes observations peuvent être faites dans la partie chaude du tube (Figure 100) : les parois du tube sont partout tapissées de ces agrégats de fine plaquettes.

1 146

Figure 99 : Photographies MEB des phases néoformées dans l’expérience 6.

(a) et (b) : Bout 2 ; (a) : tapis de plaquettes magnésiennes ; (b) : phyllosilicates potassiques. (c), (d) et (e) : Bout 3 ; on y voit les agrégats de fine plaquettes de phyllosilicates potassiques (d)

PARTIE II : ETUDE DES TRANSITIONS DE PHASE DES PHYLLOSILICATES SOUS GRADIENT DE TEMPÉRATURE

Figure 100 : Photographies MEB des phases néoformées dans l’expérience 6. (a), (b) et (c) : Bout 4.

(d), (e) et (f) : Bout 5 (point chaud).

1 148

3.2 - Chimie semi-quantitative (EDS MEB)

Les analyses semi-quantitatives effectuées au MEB sont représentées dans les diagrammes triangulaires de la Figure 101 et de la Figure 102. De la même façon que pour l’expérience 5, les analyses chimiques sont représentées à la fois dans un diagramme Si-Al-Mg et dans un diagramme Si-Al-K.

Figure 101 : Composition dans un diagramme ternaire Si-Al-Mg projeté depuis H2O et K des minéraux précipités dans l’expérience 6 (analyses semi-quantitatives au MEB).

Nous voyons sur la Figure 101 et la Figure 102 que le point froid du tube (ronds bleus) est constitué essentiellement de chlorites intermédiaires entre clinochlore et sudoite, ainsi que de quelques points typiques de micas. En se déplaçant dans les Bouts 2 et 3 (losanges verts et carrés violets), nous rencontrons toujours les mêmes chlorites, mais accompagnées de plus nombreux micas (de composition de type muscovite), ainsi que d’une phase extrêmement alumineuse. Le Bout 4 présente la même association : muscovite, chlorite et phase alumineuse. Quant au point chaud du tube (triangles rouges), il ne semble contenir que des chlorites magnésiennes.

PARTIE II : ETUDE DES TRANSITIONS DE PHASE DES PHYLLOSILICATES SOUS GRADIENT DE TEMPÉRATURE

Figure 102 : Composition dans un diagramme ternaire Si-Al-K projeté depuis H2O et Mg des minéraux précipités dans l’expérience 6 (analyses semi-quantitatives au MEB). 3.3 - Cristallographie par diffraction des rayons X

Les diagrammes DRX obtenus dans le bout froid du tube (Figure 103) montrent un pic à 7,14 Å caractérisant la présence majoritaire de chlorites dans le point froid du tube. On peut remarquer que ce point froid contient également de la boehmite (pic à 6,10 Å) et de la muscovite (pics à 10,09 Å et à 3,55 Å). Expce 6 Bout 1 0 10 20 30 40 50 6 2 tetha Co 0 10,09 A 7,14 A 6,10 A 3,55 A

Figure 103 : Diagramme de diffraction RX effectué sur le matériel du Bout 1 (point froid) de l’expérience 6.

Au point chaud du tube (Figure 104) nous observons encore du mica et des chlorites, comme dans tout le reste du tube. Un pic à 10,06 Å est nettement visible,

1 150

caractérisant la présence de micas alors qu’aucune analyse potassique n’a pu être effectuée dans le Bout 5.

Expce 6 Bout 5

0 10 20 30 40 50 6 2 tetha Co 0 10,06 A 7,09 A 3,34 A 2,81 A

Figure 104 : Diagramme de diffraction RX effectué sur le matériel du Bout 1 (point froid) de l’expérience 5.

Nous obtenons donc la séquence de cristallisation suivante dans l’expérience 6 :

Figure 105 : Séquence de cristallisation dans l’expérience 6.

4 - Conclusion sur les expériences en système Si – Al – K– Mg–

H

2

O

Les deux expériences 5 et 6 montrent une séquence de cristallisation très similaire. Les deux séquences sont constituées par des associations à chlorite, muscovite, et boehmite de façon très comparable. On remarque un petit décalage de l’extension de chacune des phases dans le tube en fonction de la proximité de la capsule fournissant

PARTIE II : ETUDE DES TRANSITIONS DE PHASE DES PHYLLOSILICATES SOUS GRADIENT DE TEMPÉRATURE

l’élément chimique limitant de chacune des phases (le potassium pour la muscovite, le magnésium pour les chlorites). La disponibilité des éléments chimiques a donc une influence sur la répartition des phases mais par sur le type de phases qui cristallisent. Les deux séquences observées semblent indiquer qu’une association à muscovite, chlorite et boehmite est stable entre 350 et 200°C dans les conditions de nos expériences.

On observe par ailleurs que les micas n’incorporent pratiquement pas de magnésium, et que les chlorites n’incorporent presque pas de potassium. Les conditions thermiques semblent favoriser une association à une phase magnésienne et une phase potassique plutôt qu’une seule phase de composition plus intermédiaire (par exemple une smectite ou un interstratifié). Cela semble aller dans le sens de Aja et al. (1991b) qui disent que la présence de magnésium dans la solution n’a que peu d’influence sur la stabilité des micas.

1 152

CHAPITRE 8 : LA STABILITE THERMIQUE RELATIVE

Documents relatifs