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Les deux cas d’étude examinés dans ce chapitre ont d’abord démontré que niveaux d’abstraction et styles de modélisation ne sont pas liés. Le filtre a été décrit avec les quatre styles de modélisation alors qu’il relève du niveau module – selon le processus de raffinement proposé au chapitre III. Le four a été lui aussi entièrement décrit dans chacun des quatre styles de modélisation alors qu’il comportait des éléments à des niveaux d’abstraction différents : IHM au niveau module, unité de cuisson au niveau unité fonctionnelle, régulateur PI au niveau module (modélisation TDF) puis au niveau structure interne du module (modélisa­ tions LSF, LSF encapsulé et ELN). Par conséquent, un même niveau d’abstraction peut être décrit avec dif­ férents styles de modélisation alors qu’un même style de modélisation peut être employé à différents niveaux d’abstraction.

Pour choisir le style de modélisation de façon pertinente, deux aspects doivent être pris en compte : la durée à simuler et la taille du système modélisé. Ce dernier point implique d’estimer le nombre total de modules dans le style TDF, le nombre de signaux dans le style LSF ou le nombre de nœuds dans le style ELN. En effet, le style TDF, bien que spécialement conçue pour le prototypage virtuel de systèmes mixtes et analogiques [2], n’est pas toujours le plus rapide. Quand le système est de taille réduite, c’est-à-dire consti­ tué d’un nombre restreint d’éléments, les styles de modélisation LSF et ELN offrent une vitesse de simula­ tion plus élevée. Quand la taille du système augmente, la durée de simulation envisagée prend de l’impor­ tance. En effet, les styles de modélisation LSF et ELN sont pénalisés par le temps d’élaboration du simula­ teur. Ainsi, si les durées simulées sont courtes, le temps d’élaboration domine et devient dissuasif pour les systèmes de grande taille. Dès les tailles moyennes, c’est-à-dire une cinquantaine de primitives pour le style ELN et entre cent et deux cents pour le style LSF, le temps total consommé par l’exécution de l’élaboration et de la simulation proprement dite dépasse le temps de simulation du style TDF. Cependant, s’il est envisa­ gé de longues durées de simulation les styles de modélisation LSF et ELN fournissent les vitesses de simu­ lation les plus élevées. Toutefois pour exploiter pleinement ce potentiel, la durée de simulation doit dépasser le temps d’élaboration pour une taille de système donnée.

Quand la taille du système devient très importantes, le style TDF n’est pas en mesure d’apporter une vitesse de simulation supérieure à celle de Simulink et, si la durée à simuler n’est pas très longue, les styles de modélisation LSF et ELN seront encore plus lents. Utiliser SystemC-AMS pour la modélisation des sys­ tèmes de très grande taille garde toutefois un intérêt face à Simulink par la possibilité offert par Sys­ temC-AMS de raffiner progressivement et méthodiquement le modèle du système jusqu’à des niveaux de détails inatteignables avec Simulink.

La pertinence du style de modélisation LSF encapsulée a été grandement amoindri avec les améliora­ tions apportées au modèle de calcul LSF dans la déclinaison bêta 2 de la version 1.0 de SystemC-AMS. Pour les systèmes de taille réduite avec des boucles de rétroaction, le style de modélisation LSF apporte désormais la plus grande vitesse de simulation alors qu’il était le plus lent précédemment. Le style de modé­ lisation LSF encapsulée n’amène plus d’amélioration dans ce genre de modélisation. Malgré cela et malgré un effort de codage supplémentaire nécessaire pour encapsuler chaque primitive LSF, ce style de modélisa­ tion peut rester attrayant dans le cas de systèmes de très grande taille avec des durées simulées relativement brèves : le style de modélisation LSF encapsulée apporte les performances du style TDF avec le formalisme du style LSF.

Modèle d’amplificateur opérationnel simplifié

La description des parties analogiques des systèmes mixtes sur puce est aujourd’hui abordée soit de façon très abstraite avec un point de vue système, soit à l’inverse avec une faible abstraction et une vision détaillée de la mise en œuvre physique. Les descriptions avec un niveau élevé d’abstraction sont purement comportementales et reposent souvent sur des fonctions de transfert, des équations et des algorithmes. Elles conviennent bien pour compléter l’étude des parties numériques au niveaux les plus abstraits. Cependant, elles masquent complètement les phénomènes physiques qui s’observent sur un circuit réel. Les descriptions proches de la mise en œuvre matérielle imitent de façon précise et détaillée le comportement du circuit réel. Pour atteindre un tel degré de précision, elles sous-entendent des choix de topologie et de technologie. Dans le contexte d’un processus de raffinement méthodique tel que celui proposé au chapitre III, le concepteur définit une architecture et vérifie qu’avec celle-ci le système a un comportement qui respecte les spécifica­ tions. Puis, il définit la structure interne des modules constitutifs de cette architecture. La définition de la structure interne des modules analogiques est le niveau adapté pour introduire les principales limitations et les non-linéarités dominantes, celles qui influencent le plus le comportement du module. Il est également le niveau adapté pour s’assurer que, malgré celles-ci, le système respecte toujours les spécifications. Ensuite seulement, le concepteur devrait commencer à élaborer une topologie pour chaque bloc analogique. Le bon déroulement d’un tel processus de raffinement exige des transitions progressives entre les niveaux d’abstraction. Pourtant dans les faits, les concepteurs ont de nos jours tendance à sauter cette étape et à pas­ ser directement d’une description avec le point de vue système à une description détaillée proche du maté­ riel et par conséquent à présupposer des choix topologiques et technologiques. Ceci accroit le risque de dis­ torsion entre les niveaux d’abstraction les plus élevés et les plus bas. Introduire progressivement les limita­ tions et les non-linéarités en s’assurant au fur et à mesure que les spécifications sont toujours bien respectées est au contraire une méthode efficace de réduction des risques de discordance entre le modèle comporte­ mental et le circuit réel. De plus, un raffinement dont la progressivité est assurée par le soin apporté aux étapes intermédiaires est un moyen d’aider le concepteur à faire ses choix topologiques et technologiques.

Le présent chapitre montrera à travers le cas d’étude d’un amplificateur opérationnel, à sortie simple en tension, ce qu’est la description d’un bloc analogique à un niveau intermédiaire d’abstraction pour lequel les limitations et les non-linéarités dominantes sont prises en compte sans pour autant faire d’hypothèse topolo­ gique ni technologique.

Les signaux analogiques considérés dans le cadre de cette étude sont tous supposés être à temps continu et à énergie finie (signaux apériodiques) ou puissance finie (signaux périodiques).

V.1) Pourquoi écrire à nouveau un modèle d’amplificateur opérationnel ?

Ce paragraphe explique les raisons pour lesquelles le classique modèle de l’amplificateur idéal ainsi que les nombreux modèles haut niveau d’amplificateur opérationnel que l’on peut trouver dans la littérature ne sont pas adaptés à la description de niveau intermédiaire qui est recherchée ici.