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Représentation des bâtiments dans le modèle

CHAPITRE 1 INTRODUCTION

1.2 Revue Bibliographique

1.2.4 Représentation des bâtiments dans le modèle

La modélisation numérique de la propagation des inondations en zone urbaine est une tache ambitieuse due à la variabilité de taille de forme et d'agencement des structures qui composent le tissue urbain. Un réseau complexe de canaux se créé par les bâtisses, les rues et les aires ouvertes (cours, parcs, places, etc.), comme vue précédemment cela aboutit à des écoulements complexes avec de nombreuses zones de transition entre régime fluvial et torrentiel et implique donc la formation de zone turbulente.

Il vient alors la problématique de la représentation numérique des édifices dans un modèle 2D couplé à un maillage non structuré ou hybride, pour les raisons énoncées dans la partie précédente. Plusieurs méthodes ont été développées pour répondre à ce problème, soit les méthodes nommées dans la littérature : Building Resistance (BR), Building Block (BB), Bulding Hole (BH) et Building Porosity (BP) (Alcrudo, 2004; Aureli et al., 2015; Kim et al., 2015; Liang, Falconer, & Lin, 2007; Sanders et al., 2008; Schubert & Sanders, 2012; Schubert et al., 2008; Soares-Frazao et al., 2008; Soares-Frazão, S. & Zech, 2007). Ces méthodes sont utilisées pour représenter numériquement l'impact que les bâtiments ont sur l'écoulement, par restriction de l'espace disponible pour le transport et augmentation des contraintes de friction localement. Chacune d'entre elles offre différents compromis entre précisions de calculs, temps d'exécution et niveau de difficulté de configuration du modèle, leurs applications dépendent donc des besoins du modélisateur, des données disponibles, et du matériel informatique. Elles sont cependant toutes limitées par la disponibilité des données de géolocalisation des structures et de leurs surfaces.

1.2.4.1 Méthode Building Resistance (BR)

La méthode BR consiste à augmenter localement le coefficient de friction pour les parcelles du maillage où des bâtiments sont présents. C'est la plus ancienne technique de prise en compte des bâtiments dans les modèles 2D, et encore aujourd'hui une des plus utilisée (Alcrudo & Mulet, 2004). Elle offre la plus grande facilitée d'implantation et un temps d'exécution relativement plus rapide que les autres méthodes, mais présente cependant des lacunes sur les résultats des caractéristiques de l'écoulement dans la zone urbaine. Le coefficient de friction est augmenté soit pour un amas de bâtiments et de rues, soit seulement pour les bâtiments, les rues étant représentées par un coefficient plus faible que ces derniers. (Figure 1.15)

Figure 1.15 : Méthodes de représentation d'un groupe de bâtiments comme une région à coefficient de friction augmenté (milieu), comme une région avec des points de friction augmentée (Alcrudo, 2004)

Après une calibration adéquate du coefficient de friction, cette méthode permet d'obtenir une bonne prédiction de la superficie et de la durée de l'inondation (Alcrudo, 2004; Schubert et al., 2008), ce qui peut être suffisant pour certaines études de risque. Elle peut être également adaptée pour des études où une prévision approximative de la hauteur d'eau et de sa vitesse est suffisante, sans besoin d'informations localisées dans la zone urbaine, c’est-à-dire pour une représentation plus globale de la région. Un maillage relativement grossier est alors acceptable, sans affinement local nécessaire, ce qui fait de cette technique la moins exigeante en calculs numériques (Schubert et al., 2008).

La plus grande difficulté de la méthode revient à déterminer le ou les coefficients de friction adaptés pour une zone urbaine spécifique. Ceux-ci doivent pouvoir représenter l'effet de blocage et de réflexion qu'une paroi engendrerait et tout du moins reproduire la résistance à l'écoulement que l'ensemble du tissu urbain implique. La calibration du coefficient de Manning est commune aux 4 méthodes, la complexité de ce paramètre est vue en détail dans la partie sensibilité et calibration. L'autre caractère hasardeux de cette méthode réside dans la capacité de stockage en eau des zones à coefficient de friction augmenté (Alcrudo, 2004).

1.2.4.2 Méthode Building Block (BB)

Cette méthode intègre la géométrie et la hauteur des bâtiments dans le modèle en élevant le terrain où ils coïncident avec le maillage. Cette technique est moyennement difficile à implanter si la localisation des structures est connue. L'extrudation des cellules pour former le toit d'une structure ne peut cependant former des façades à pente infinie, bien que très raides elles dépendent de l'échelle du maillage (figure 1.16 et 1.17).

Figure 1.16 : Groupe de bâtiments représentés en Bottom Elevation, maillage grossier (Alcrudo, 2004)

Figure 1.17 : Groupe de bâtiments représentés en Bottom Elevation, maillage fin (Alcrudo, 2004)

Un maillage grossier implique donc des pentes plus faibles qu'un maillage fin ; une bonne représentation des bâtiments demande donc un maillage fin pour la précision des calculs, qui sont a fortiori plus longs.

De surcroît, l'utilisation de pente raide va à l'encontre de l'hypothèse d'application des équations de Saint-Venant qui stipule que les pentes doivent être assez faible pour faire l'approximation sin β = β. Enfreindre cette limitation ne rend cependant pas le modèle 2D inapplicable, l'obstacle vertical va causer une stagnation du fluide à sa proximité et agir telle une condition de non-glissement à l'interface fluide/structure (Alcrudo, 2004). Ces pentes raides peuvent néanmoins avoir un impact sur la stabilité de l'algorithme de calculs, il faut alors s'assurer que le modèle hydraulique 2D est assez robuste pour les prendre en compte (Hunter et al., 2008).

1.2.4.3 Méthode Building Hole (BH)

Dans le cadre d'une modélisation 2D de propagation des inondations en zone urbaine, cette technique permet la représentation de la forme exacte sur le maillage des édifices. Les façades des bâtiments sont incorporées telles des conditions frontière sans glissement, excluant leurs aires du domaine de calculs. (figure 1.18)

La méthode BH est la plus précise représentation d'une ville, sur les 4 présentés ici, pour une modélisation 2D. Théoriquement, elle est celle qui contrevient le moins aux hypothèses des équations de Saint-Venant. Comme vue sur la figure 1.18 et dans les publications (Alcrudo, 2004; El Kadi Abderrezzak et al., 2008; Sanders et al., 2008; Schubert & Sanders, 2012; Schubert et al., 2008; Soares-Frazao et al., 2008; Soares-Frazão, S. & Zech, 2007; Testa et al., 2007) les zones de transition entre écoulements fluviale et torrentielle ainsi que les zones stagnantes sont bien représentées au coin des façades par cette méthode.

Figure 1.18 : représentation des bâtiments en Building Hole (Alcrudo, 2004)

La principale limitation de cette technique réside dans le maillage du réseau de rues et d'aires ouvertes du secteur (Alcrudo, 2004). La section précédente fait référence à un minimum de 3 ou 4 cellules de maillage sur les sections transversales des rues, la distorsion de la grille que cela engendre peut toutefois être résolue par l'emploi d'un maillage non structuré ou hybride qui permettent les affinements locaux et de mieux intégré les différences d'échelles entre ville et plaine inondable. Pour les géométries complexes, le raffinement peut avoir des conséquences néfastes qui handicapent l'efficacité du modèle (Schubert & Sanders, 2012).

BH tout autant que BE exclue la capacité de rétention d'eau et de transport que l’intérieur des bâtiments peuvent offrir lors de l'inondation. Contrairement à BE, BH ne permet pas non plus d'écoulement au-dessus des structures dans le cas d'un niveau d'eau supérieur à l'élévation du toit. Cependant cette propriété ne limite pas la technique BH, la défaillance structurelle étant plus restrictive (Aureli et al., 2015).

Bien que BH soit la technique la plus exigeante en temps de calcul et la plus difficile à implanter dans le modèle que BR et BB, elle reste la plus adaptée et la plus précise pour capturer les complexités d'un écoulement à travers le tissu urbain (Schubert et al., 2008).

1.2.4.4 Méthode Building Porosity (BP)

Dans un effort d'accélérer l'exécution des modèles tout en gardant une qualité de modélisation proche de la méthode BH, un intérêt relativement récent dans la technique BP se manifeste dans les publications (Kim et al., 2015; Liang et al., 2007; Sanders et al., 2008; Schubert & Sanders, 2012; Soares-Frazao et al., 2008). BP utilise des équations de Saint-Venant modifiées pour mettre en lumière l'analogie d'une ville à un système poreux, permettant ainsi de représenter le passage de l'écoulement dans un tissue urbain en prenant le réseau de rue en compte. Cette méthode est encore à l'état de recherche, il n'existe pas de logiciel de modélisation commercial la reprenant à ce jour. Son principal avantage par rapport à BE ou BH est de résoudre les modèles hydrauliques en zone urbaine de façon précise sans faire appel à un maillage fin et des affinements locaux, sans avoir besoin de retranscrire la géométrie des structures, et donc avec une plus grande facilité de calculs informatique (Soares-Frazao et al., 2008).

Cependant la méthode souffre encore de sa difficulté d'implantation et d'évaluation des paramètres qu'elle introduit (Liang et al., 2007). Le comportement d'une ville face à une onde de crue est anisotropique par l'orientation et la forme des bâtiments, ce qui implique l'estimation des coefficients de porosité volumétrique et surfacique, ainsi que de son coefficient de traînée. De plus, BP nécessite un maillage ou les vertices sont fixé aux centroïdes des structures (figure 1.19). Le prétraitement de cette méthode peut donc être long et fastidieux, malgré sa précision (figure 1.20) et son temps d'exécution plus faible (Schubert & Sanders, 2012). Néanmoins des développements futurs dans une automatisation d'évaluation des paramètres grâce à la télédétection pourraient en faire une méthode plus accessible aux modélisateurs (Sanders et al., 2008).

Figure 1.19 : Modèle de la rivière Toce. Représentation de bâtiments en Building Porosity. Vertex au centroïde des bâtiments (Sanders et al., 2008)

Figure 1.20 : Champ des vitesses obtenues avec la méthode BP (Sanders et al., 2008)