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Le renouvellement et la conservation dans le cadre de la durabilité du

Introduction

Ce chapitre est un essai d’appréciation de concepts tels que le renouvellement urbain durable, la conservation intégrée et l’habitabilité comme étant des enjeux majeurs du développement urbain durable. Il s’agit dans un premier temps de confronter les deux concepts renouvellement et conservation dans le cadre du développement urbain durable. Ceci a pour objectif de trouver un juste milieu entre les deux phénomènes extrêmes, à savoir : la mutation spontanée et la muséification.

La durabilité du développement urbain est donc utilisée ici comme un moyen et non comme une fin. Elle permet de mettre en valeur l’habitabilité comme enjeux majeurs, démontrer les aberrations d’une conservation à outrance, et d’inscrire le renouvellement

1

MICHON Perrine, « Le partenariat public-privé et la régénération urbaine », In Géocarrefour... op. cit., p. 126.

2

CRUCHON Jacky, « Un projet : la reconquête du centre de Bayonne », In Patrimoine et développement des coeurs de ville, Actes des 4e Assises du Patrimoine du Grand-Ouest tenu à Bordeaux journées du le 30 et 31 janvier 2003, p. 351.

60 urbain dans une logique durable. En effet, le renouvellement urbain possède, par essence, plusieurs qualités allant dans le sens du développement urbain durable.

1. L’enjeu de "faire la ville sur la ville" et le développement urbain durable 1.1. L’espace comme ressource épuisable

Des thèmes, comme freiner l’étalement urbain ou favoriser le retour aux centres urbains, sont au cœur du discours sur le développement urbain durable qui a conforté depuis les actions de renouvellement urbain, et les a accentué par les dimensions sociale et environnementale1.

Dans les années 1990, ces discussions sont reprises sous le développement urbain durable, avec le principe de "reconstruire la ville sur la ville" qui cherche une économie de l’espace et une meilleure gestion du foncier. Il s’agit d’une lutte contre le mitage2. Ainsi en France, des outils de maîtrise foncière commençaient à être mis en place pour tenter de remédier à une situation déséquilibrante.

En conséquence, la question d’une meilleure utilisation du sol urbain se pose actuellement sous une forme plus aiguë que jamais3. La lutte contre l’étalement urbain est incorporé dans les principes du développement urbain durable4. Ce qui implique, dans le principe, une utilisation optimale du foncier de façon à ce que le développement urbain ne soit pas laissé au seul laisser-faire du marché ou des pratiques d’appropriation sauvage des espaces.

En 2004, la commission européenne a exprimé ses priorités pour un urbanisme qui traite les terrains comme une ressource précieuse devant être utilisée de la façon la plus efficace possible, en réutilisant les terrains anciens et les immeubles vides présents dans l’agglomération, de préférence à l’aménagement de terrains vierges à l’extérieur de la zone urbaine, évitant ainsi le mitage5. Elle a exprimé également ses priorités pour une ville qui :

— assure à la population des lieux de vie et de travail esthétiques, originaux, sûrs, sains et de haute qualité, propres à susciter un fort sentiment d’appartenance, de fierté, d’équité sociale, d’intégration et d’identité ;

— crée les conditions d’une économie dynamique, équilibrée, équitable, ouverte à tous, et qui peut promouvoir la régénération urbaine ;

1

HAPENCIUC BLUM Ileana, Régénération urbaine et renouvellement... op. cit., p. 37.

2

RAFFAUD Fanny, L’urbain, l’environnement et le développement durable en France... op. cit., p. 54.

3

ALLAIN Rémy, Morphologie Urbaine... op. cit., p. 211.

4

Programme d’Actions Prioritaires (PAP), Lignes directrices pour une régénération... op. cit., p. 9.

5

Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, COM 2004, 60 final, cité par CHARLOT-VALDEU Catherine et OUTREQUIN Philippe, L’Urbanisme durable... op. cit., pp. 34,35.

61 — promeut une utilisation mixte de l’espace afin de tirer le meilleur parti possible des bénéfices de la proximité et de limiter ainsi au minimum les trajets entre domicile, commerces et lieu de travail ;

— respecte et met en valeur le patrimoine et les communautés culturelles.

— présente suffisamment de densité et d’intensité d’activité et d’utilisation pour que les services tels que les transports publics soient viables et efficaces tout en respectant un cadre de vie de qualité : intimité et espace privé, effets néfastes minimaux (bruit, par exemple).

Concernant cette dernière, il convient de noter que l’idée de la ville dense ou la ville compacte peut apporter d’importants bienfaits écologiques de même qu’une multitude d’avantages sociaux. Planifiées de manière intégrée, les villes denses peuvent être conçues pour mieux utiliser l’énergie, moins consommer de ressources, moins polluer, et ne pas se répandre sur la campagne1.

Les COS incitatifs et la libéralisation des règlements ont pour effet l’augmentation des surfaces de plancher. Le renouvellement peut donc s’effectuer par "verticalisation", par conséquent, le changement de gabarit du bâti pourrait être tel que le paysage urbain se trouverait transformé. En même temps, les règlements jouent un rôle décisif pour la maitrise de toute densification, on peut penser que toute incitation peut être sensiblement freinée par un plafond de densité2.

1.2. Le préfixe "re" et l’impérieuse nécessité de faire la ville sur elle-même

En Europe, pour les responsables publics, encourager l’évolution de la ville sur elle- même est aujourd’hui une priorité. Une volonté grandissante de réinvestir la ville existante est en train de voir le jour, visant principalement les quartiers anciens et les centres historiques3.

À l’heure actuelle, renforcer cette contre-tendance à l’étalement urbain est devenu une nécessité. Pour ainsi dire, "faire la ville sur la ville" par sédimentation, est devenu l’un des enjeux majeurs de la ville durable de demain. Ceci se discerne aussi dans les mots de Pierre Liochon : « La ville renouvelée ne doit pas se faire que dans les espaces vides ou rien n’est à protéger, ou sur des terrains qui ne sont pas visibles de ce qui doit être protégé : elle doit intégrer dans sa fabrication des espaces bâtis et non-bâtis, intégrer et produire du patrimoine, travailler sur les espaces publics et usagers. Quand bien même la ville existante ou le patrimoine prendraient une place essentielle, c’est d’abord comme éléments de diagnostic au

1

ROGERS Richard et GUMUCHDJIAN Philip, Des villes pour une petite planète... op. cit., p. 53.

2

DOUBRÈRE Jean-Claude, Cours d’urbanisme appliqué... op. cit., p. 218.

3

62 niveau des besoins de l’identité du lieu, des mémoires, de l’histoire, de la culture, des usagers, de l’environnement participant à la compréhension, et ainsi à l’élaboration du projet. Ce n’est que dans un deuxième temps qu’il peut devenir objet de protection et d’action »1.

Pour exprimer ce retour à la ville, tout un vocabulaire de "reprise" a été développé dans le but de récupérer des pans de quartiers. Nous assistons, dès lors, à la conceptualisation d’une panoplie de termes commençant par le préfixe "re": rénovation, restauration, réhabilitation, restructuration, renouvellement, régénération, retissage, redynamisation, revitalisation, reconquête, etc. Dans le lexique français, la préfixation en "re-" appliquée à un verbe ou un adjectif a soit une valeur itérative (ex. redire), soit une valeur spatiale ou temporelle avec l’idée de retour en arrière (ex. redescendre) soit une valeur intensive (ex. réchauffer)2. En matière d’urbanisme, ces concepts signifient la reprise de l’existant pour le reconstituer, l’améliorer ou le réparer mais qui sont également à interpréter comme doté de valeurs de retour en arrière, retour au point de départ3. De ce fait, ces vocables marquent un retour mais aussi une évolution et parfois une révolution dans la manière d’intervenir sur le tissu urbain hérité4.

Le dénominateur commun de ces concepts réside donc dans l’idée qu’il faut intervenir sur la ville existante, pour en récupérer les parties les plus abandonnées, les plus obsolètes, afin de développer des réalisations répondant aux aspirations modernes des villes actuelles. En outre, ces concepts ne renvoient pas à des politiques urbaines précises, mais à des actions d’urbanisme afin de retisser des entités urbaines, bien souvent disloquées. L’utilisation de ces termes dans un discours urbain est directement liée à la forme urbaine, à la forme architecturale et évidemment aux activités économiques5.

D’un côté sémantique, on oppose au préfixe "re-" le préfixe "de-" significatif d’un processus de transformation négative. Le diagnostic d’une situation est vu sous un jour

1

LIOCHON Pierre, « Loi SRU et patrimoine, le nouveau cadre législatif », In Patrimoine et développement des cœurs de ville... op. cit., p. 296.

2

LEHMANN Alise et MARTIN-BERTHET Françoise, Introduction à la lexicologie : sémantique et morphologie, Nathan Université, Paris, 2000, p. 153, cité par VALCKE Simone, « La réparation, une approche des espaces urbains », In Mots, Les langages du politique, n° 72, juillet 2003, p. 32.

3

VALCKE Simone, « La réparation, une approche des espaces urbains », In Mots... op. cit., p. 32.

4

MONS Dominique, « Les formes de renouvellement urbain dans la ville de tradition industrielle, métropole lilloise », In Plate-forme d’observation des projets et stratégies urbaines [en ligne], 2009, <http://www.popsu.archi.fr/sites/default/files/nodes/document/817/files/lille-them-renouv-urbain-

renouvellement-urbain.pdf> (page consultée le 23 décembre 2012), p. 100.

5

HAPENCIUC BLUM Ileana, Régénération urbaine et renouvellement des pratiques d’urbanisation en Roumanie : Le cas du centre historique de Bucarest, Thèse de doctorat en « Environnement Ville Société », L’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon, 2007, p. 11.

63 négatif par le biais d’un vocabulaire exprimant dégradation, déqualification, dévitalisation, dévalorisation, déclin1.

Autrement dit, le thème de construire la ville sur elle-même brasse à priori de nombreuses conceptualisations, approches et définitions ; il parait exprimer globalement l’élaboration de stratégies relatives aux contextes concernés. Il semblerait s’agir d’une ambition qui revête l’aspect d’une politique de l’ensemble de la ville en vue de sa remise à niveau. Cela suppose l’implication de différents enjeux, l’alliance entre différentes dimensions, pour transformer une réalité matérielle et un vécu de la ville2.

Au regard de ce qui été évoqué, la question de la reconquête urbaine ne s’exprime plus dans comment "faire" la ville, mais dans, comment "re-faire" la ville sur elle-même ? En l’occurrence, il faut chercher à enraciner la ville, comme ce fût toujours le cas, dans son histoire. La reconstruction des villes sur elles-mêmes n’a jamais posé de problème à travers le temps, tel un palimpseste3 dont on efface l’écriture pour le réutiliser à nouveau. Toutefois, le seul obstacle qui entrave cette démarche est la rente foncière qui empêche pratiquement toute idée de construction de la ville sur elle-même4. À cet effet, dans les années 90, l’Algérie a subi une spéculation foncière intense en vue de reconvertir des terrains domaniaux en lotissements constructibles. Malheureusement, l’écho de cette formule nous est parvenu jusqu’aujourd’hui.

2. Le renouvellement urbain durable comme alternative à toute mutation spontanée

2.1. Le duo renouvellement urbain et développement urbain durable

Par définition, le concept du renouvellement urbain durable s’inscrit dans une continuité historique, urbaine et paysagère. Il s’agit du croisement des pratiques du renouvellement urbain et des principes du développement durable. Cela implique un réinvestissement sur des sites ayant un potentiel économique sous-utilisé, un remodelage des quartiers et une nouvelle articulation des quartiers avec le reste de la ville5.

1

VALCKE Simone, « La réparation, une approche des espaces urbains », In Mots... op. cit., p. 32.

2

BOUDJABI Naouel Hanane, Les stratégies de la reconstruction de la ville sur la ville, Analyse d’un cas d’étude : Constantine, Mémoire de magistère en Architecture, Université Mentouri, Constantine, 2005, p. 6.

3

Sur la métaphore du palimpseste, voir p. 87.

4

DELFANTE Charles, Grande histoire de la ville... op. cit., p. 236.

5

Charte du renouvellement urbain durable [en ligne], 2015, <http://apes- npdc.org/IMG/pdf/urba_durable_280807_version_finale.pdf> (page consultée le 2 décembre 2015). p. 10.

64 Actuellement, le renouvellement urbain est devenue l’un des outils du développement urbain durable1. En effet, les préoccupations générées par le thème du développement durable vont, sans conteste, conforter les tenants du renouvellement urbain. Il s’agit, en effet, de freiner l’étalement urbain et corrélativement de favoriser le retour au centre, plus encore de réutiliser tous les espaces vacants, préservant de surcroit les divers héritages propres à maintenir la mémoire de la ville2.

De plus, les thématiques du renouvellement urbain se superposent à celle de la ville durable et il devient impossible d’isoler ce renouvellement urbain du développement durable puisque cette notion appliquée aux agglomérations « renvoie précisément au recyclage des

terrains urbains et à la reconstruction de la ville sur elle-même plutôt qu’à la poursuite de

l’extension »3.

Qu’ils soient issus de rénovations, de désindustrialisation ou de conflits militaires, les sites à réaménager, issus d’une destruction, constituent des opportunités majeures pour rendre les villes plus durables4. À cet effet, lors de la première biennale des villes et des urbanistes

d’Europe, intitulée « Planification urbaine et développement durable »5, la ville est définie en terme de durabilité à travers la notion de "ville recyclable". À cet égard, le "recyclage urbain" est pour les urbanistes, l’acceptation la plus opérationnelle du développement urbain durable. Il s’agit d’une aptitude de cette dernière à se renouveler sur elle-même par le recyclage des espaces bâtis6.

Ce qui a été abordé nous amène à dire que, par essence, le renouvellement urbain des secteurs centraux des villes adhère à l’esprit du développement urbain durable, en faveur d’une évolution harmonieuse et tenable de la ville. Néanmoins, ceci n’exclut pas l’inscription de ce dernier dans une perspective sociale, et une croissance urbaine qui préserve les richesses patrimoniales7.

1

CHASSERIAU Aude, « Les projets de régénération urbaine où comment recréer la proximité », In RALLET Alain et TORRE André (dirs), Les nouvelles proximités urbaines... op. cit., p. 189.

2

CHALINE Claude, La régénération urbaine... op. cit., p. 35.

3

RAFFAUD Fanny, L’urbain, l’environnement et le développement durable en France... op. cit., p. 134.

4

ROGERS Richard et GUMUCHDJIAN Philip, Des villes pour une petite planète... op. cit., p. 78.

5

Les 4, 5, et 6 décembre 1995 à Lyon s’est déroulé la 1ère biennale des villes et urbanistes d’Europe liée à la 16ème rencontre de la Fédération Nationale des Agences d’Urbanisme sur le thème : planification urbaine et développement durable.

6

RAFFAUD Fanny, L’urbain, l’environnement et le développement durable en France... op. cit., p. 122.

7

PICKARD Rob, « Comparaisons avec des pays européens », In CORNU Marie, FERAULT Marie-Agnès et FROMAGEAU Jérôme (dirs), Patrimoine architectural urbain et paysager : Enjeux juridiques et dynamiques territoriales, Actes du colloque tenu les 6, 7 et 8 décembre 2001 à Lyon, L’Harmattan, Paris, 2002, p. 66.

65 2.2. La durabilité dans la planification d’un renouvellement urbain

En France, les objectifs assignés par l’Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (l’ANRU) aux projets de renouvellement urbain et de transformation durable des quartiers sont :

— Insérer les quartiers dans la ville en favorisant leur désenclavement et en donnant de la lisibilité à la trame viaire ;

— Améliorer et diversifier l’offre de logements ;

— Clarifier les usages, les propriétés et la gestion des espaces ; — Diversifier les fonctions du quartier ;

— Renforcer la qualité de service ;

— Coordonner les interventions urbaines avec les autres aspects de la politique de la ville: chartes locales, programmes de logements, aides sociales...1.

À cela on pourrait ajouter que l’élément fondamental pour la réussite d’un projet de renouvellement urbain est la participation, c’est-à-dire que l’implication de la communauté qu’ils forment ensemble est au cœur de tout le processus2. Ceci commence d’abord par l’identification des priorités des habitants, par la suite, la mise en place d’un support communicatif pour une meilleure compréhension du programme par la communauté. Enfin, l’élaboration d’une structure de consultation pour une vision partagée du projet et une réelle appropriation par le suivi de son évolution.

L’exigence de développement durable s’exprime également par l’obligation de transversalité si difficile à mettre en œuvre dans les administrations. La démarche de projet systémique (ou intégrée) que certaines grandes entreprises ont adoptée dans leur mode de management interne (flexibilité, adaptabilité, transversalité) doit être le fil conducteur des projets d’aménagement ou de renouvellement urbain3. Tous ces aspects sont étroitement liés à une volonté d’un travail plus concerté sur la ville entre usagers, élus, investisseurs, industriels et aménageurs, afin que toute opération soit mise en œuvre avec le consentement de la population.

Le renouvellement urbain durable constitue aussi une opportunité pour les quartiers reconquis devenant suffisamment performants en matière de ressources environnementales, notamment en ce qui concerne l’utilisation de l’énergie, de l’eau et des matériaux. Tout se doit être dans une vision de gestion économe des ressources naturelles. À cela s’ajoute

1

CHARLOT-VALDEU Catherine et OUTREQUIN Philippe, L’Urbanisme durable... op. cit., p. 62.

2

Ibid., p. 144.

3

66 l’équité entre les générations, mais surtout la prépondérance de l’impact social et économique, respectivement à travers la cohérence financière et l’amélioration du cadre de vie. Il est nécessaire de réunir tous ces aspects pour qu’un projet de planification urbaine soit considéré comme durable, confirmant ainsi son harmonie avec les principes du développement urbain durable. Pour ce faire, plusieurs grilles d’évaluations ont été mises au point1. Nous nous contentons d’en faire mention, car une discussion complète de ces grilles sortirait du cadre de cette étude.

3. La conservation face à l’évolutivité

L’étude de la croissance refuse la conception de ville-musée, d’œuvre finie, sans horizon évolutif, condamnée à se construire perpétuellement ex-novo à côté d’elle-même, en conservant intacts les espaces antérieurement construits. À côté des critères de patrimonialisation, sont ainsi évoquées les nécessités des destructions et démolitions. Tout ne

peut être conservé2. Le cadre urbain ne reste pas et ne peut rester figé. Un certain renouvellement du parc immobilier, une certaine réadaptation de l’organisation de l’espace et des équipements urbains sont nécessaires3.

À l’évidence, on ne peut imaginer un tissu urbain qui ne saurait rien détruire. Les villes se renouvellent, se densifient, se régénèrent sur elles-mêmes" et que "toute leur histoire est faite de reconversions et de régénérescences". Contre le culte du monument, il faut comprendre que c’est le tissu urbain qui fait la matière même de l’urbanisme ; la "reconquête

de la ville sur elle-même" est autant d’expressions qui évoquent la dimension organique de la

ville comme organisme vivant.

Françoise Choay précise bien que le patrimoine urbain ancien peut « être utilisé à des usages contemporains, de proximité, et donc intégré dans les plans d’urbanisme et d’aménagement »4, à condition que les nouvelles activités puissent s’accorder avec l’organisation initiale de l’édifice qui les accueille. Pour leur part, le couple Duplay affirme que la protection du patrimoine urbain passe par son utilisation, même si cela implique des

1

Dans l’état actuel de nos connaissances, la grille RST02 (réseau scientifique et technique) est l’une des mieux

adaptées à celle du renouvellement urbain. C’est un « outil de questionnement et d’analyse de critères du développement durable. [...] Elle a été construite pour évaluer n’importe quel projet - étude, plan, programme quel que soit son état d’avancement, de sa conception à sa mise en œuvre ». CHARLOT-VALDEU Catherine et OUTREQUIN Philippe, L’Urbanisme durable... op. cit., p. 184.

2

MARIN Brigitte, « Synthèse : patrimoine, problèmes de définition de l’objet », In DUFOUR Annie-Hélène (dir.), ville et patrimoine... op. cit., p. 30.

3

BASTIÉ Jean et DÉZERT Bernard, L’espace urbain... op. cit., p. 312.

4

CHOAY Françoise, Le règne de l’urbanisme et la mort de la ville, La Ville, Centre Georges Pompidou, 1994, p. 32. Cité par PAQUOT Thierry, « Le paysage urbain est-il patrimonialisable ? », In Patrimoine et développement des cœurs de ville... op. cit., p. 170.

67 transformations ; par conséquent, « le bâti évolue ou meurt »1. Ceci en dépit du fait que l’évolution ou le changement d’affectation que subit une ancienne construction lui apporte une complexité supplémentaire, résultant de la confrontation entre fonction nouvelle et forme antérieure.

Beaucoup de théoriciens et praticiens pensent que « Conserver c’est encore créer »2 ou encore « Conserver c’est transformer »3. Ainsi, le patrimoine est toujours en création, en