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Chapitre 6 : Essai de positionnement des jardins Grenoblois au/du XVIII e siècle

III. Remarques et observations sur les plans

a. Grenoble Intra-muros

L’observation du plan complété de Grenoble, nous donne quelques précieuses informations sur le positionnement des jardins au sein de la ville. On remarque d’abord l’absence de vergers, la présence de jardins et de deux orangeries. Malgré une tendance des historiens du XVIIIe siècle à opposer « jardin potager » et « jardin d’agrément », Quellier souligne qu’on oublie l’existence de jardins combinant les deux388

. Comme les « jardins d’herbes » du Moyen-Age, les potagers du grand siècle ou plus tard les jardins ouvriers, il existe aussi au XVIIIe siècle des « jardins mixtes ». Durant le siècle des lumières, la vogue des légumes, des fruits et l’utilisation accrue d’herbes aromatiques dans la cuisine facilitent l’existence de parcelles « mixtes »389

.

Directement liés au foyer, les jardins de l’intérieur de Grenoble avoisinent le plus souvent une parcelle d’habitation (celle du propriétaire ou du locataire).

La taille des parcelles de jardins varie. Certaines sont très grandes, comme par exemple celles situées autour des rues Bayard et Pertuisière390. Les grands jardins appartiennent à de riches propriétaires comme le «payeur général de la ville391 », Renard, la Dame de Bassy (possédant aussi une orangerie392 ou encore le conseiller des guerres « Bourgeois de Saint Paul393 ». La préfecture de l’Isère est également propriétaire de jardins, comme c’est le cas de la parcelle 377 située rue Pertuisière394. D’autres, sont détenus par la « commune de Grenoble » ou le « génie des fortifications»395. Pour aller plus loin, dans l’étude de cette source, il serait possible de représenter différemment, sur le plan, les parcelles privées de celles des administrations.

388

Florent QUELLIER, Histoire du jardin potager, op. cit., p. 7.

389

Ibid., p. 99.

390

Voir plan n°1.

391

Section J, parcelles n°313 et 313 bis situées rue Bayard. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

392

Section J, parcelles n°379 et 382 situées rue Sainte Claire. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

393

Section J, parcelles n°101 située place de la Citadelle. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

394

Section J, parcelles n°377 située rue Pertusière. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

395

Par exemple : la commune de Grenoble possède un jardin rue Neuve (section A, parcelle 614) ; Le génie possède des jardins place Saint Louis (section A, parcelles 864, 866). AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

D’autres jardins sont bien plus petits. Citons par exemple, les jardins du tisseur Jean- Baptiste Pascal, situés rue des Muriers396, ou celui du cordonnier François Eymin, situé au même lieu397.

Globalement, la lecture de ce plan de Grenoble intra-muros révèle une certaine homogénéité dans la taille des jardins. Une analyse plus pointue des différents propriétaires permettrait de mieux discerner le lien entre richesse et possession d’un jardin.

Contrairement à ce qu’on aurait pu penser, selon le cadastre, les jardins n’abondent pas dans les rues construites au XVIIe siècle. Pourtant, le contraire n’aurait pas été surprenant dans ces rues plus larges, mieux pensées et amplement habitées par les élites. Comme dans les états de sections de 1792 on ne trouve pas de jardins dans les rues marchandes situées autour des places Claveyson, Saint André et aux Herbes. Dans ces rues largement commerçantes et plus étriquées, le manque de place et la densité de population expliquent sans doute cette absence398.

Le quartier Saint Laurent comporte plus de jardins. On en dénombre quelques grands, mais la plupart sont plus petits que de l’autre côté de l’Isère. Les propriétaires exercent des professions diverses. On retrouve par exemple des « gantiers399 », des « chamoisseurs400 », des « tisseurs401 » ainsi que des « greffiers à la cour402 », des « entrepreneurs403 » ou des « commissaire des guerres404 ».

396

Section J, parcelles n°176 et 178 situées rue des Muriers. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

397

Section J, parcelle n° 187 située rue des Muriers. AMG, LL267, Etat de section de la ville de Grenoble, 1792.

398

Voir plan n°1.

399

Par exemple, le propriétaire des parcelles n°434 et 435 de la section K. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

400

Par exemple, le propriétaire de la parcelle n°402 de la section K. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

401

Par exemple, le propriétaire de la parcelle n° 261 de la section K. AMG, LL267, Etat de section de la ville de Grenoble, 1792.

402

Par exemple, le propriétaire de la parcelle n° 400 de la section K. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

403

Par exemple, le propriétaire de la parcelle n° 423 de la section K. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

404

Par exemple, le propriétaire de la parcelle n° 459 de la section K. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

Dans ce quartier, les jardins si situent à l’arrière des maisons, au pied de la montagne. En revanche, les hommes boudent ses flans, à l’installation de jardins ils préfèrent la culture de la vigne405.

b. Faubourgs et Mas de la ville

Le second plan permet l’étude des jardins et vergers situés dans les faubourgs et mas de la ville. Les alentours directs des remparts et notamment les faubourgs Saint-Joseph et Très-Cloitre abritent de nombreux jardins. C’est d’ailleurs dans ces lieux que se trouvent les trois jardins potagers que nous avons réussi à replacer sur le plan406. A l’extérieur de la ville, on retrouve le même lien entre jardins et habitations, mais certaines parcelles sont indépendantes. L’acquisition d’un jardin situé à l’extérieur de la ville représente une solution pour les urbains ne disposant pas de place pour leurs cultures407.

Comme à l’intérieur des remparts, les propriétaires exercent des professions diverses : « Taillandier »408, « charpentier409 », « aubergistes410 » ou encore « médecin411 » et « avocat412 ». Sur l’ensemble des jardins mentionnés par le cadastre napoléonien, quatre seulement appartiennent à des jardiniers de profession413.

La taille des jardins est plus hétérogène qu’à l’intérieur de la ville. On décèle de toutes petites parcelles (par exemple, au faubourg Saint-Joseph les parcelles n° 3, 5, 9bis, 33 etc.414), des moyennes (par exemple, à Bois Rolland, les parcelles n° 77, 76, 106 etc.415)

405

AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, sections J et K, 1792.

406

Voir plan n°2.

407

Florent QUELLIER, Histoire du jardin potager, op. cit., p. 13.

408

Par exemple, le propriétaire de la parcelle n° 58 de la section A. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

409

Par exemple, le propriétaire de la parcelle n° 2 de la section B. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

410

Par exemple, le propriétaire de la parcelle n° 3 de la section B. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

411

Par exemple, le propriétaire de la parcelle n° 52 de la section B. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

412

Par exemple, le propriétaire de la parcelle n° 245 de la section B. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, 1792.

413

La jardin n° 24 de la section B appartenant à Philippe Fortuna ; Les jardins n° 201 et 298 de la section B appartenant à Balthazard Gerente ; Le jardin n° 143 de la section C appartenant à Mr. Bellier. AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, section C, 1792.

414

AMG, LL267, Etat de sections de la ville de Grenoble, section C, 1792.

415

et d’autres très grandes (en bordure de Saint Martin d’Hères, par exemple, les parcelles n° 288, 318, 357, 359 etc.416).

Aux abords directs de la ville, au Mas de l’Isle Verte, on remarque la présence de « vergers ». Ceux-ci sont en moins grand nombre que les « jardins » (qui peuvent contenir des fruits rappelons le) mais en nombre plus important que les « potagers ». Les vergers sont presque toujours collés à une parcelle de jardin. Cette proximité témoigne de la culture souvent commune, des fruits et légumes. Cette identification précise des parcelles réservées à la culture fruitière invite une fois de plus à penser qu’une histoire de l’arboriculture grenobloise est possible.

Le cadastre Napoléonien de 1810, par sa composition (états de sections et plans) permet de replacer géographiquement les jardins à l’intérieur de Grenoble. Bien que sa réalisation date du XIXe siècle, la plupart des parcelles de jardins lui préexistent, sans doute. La confrontation des données du cadastre napoléonien et de celles des états de sections de 1792, permet d’observer que le nombre de jardins à l’intérieur de la ville a diminué. La comparaison entre les deux documents permet aussi de retrouver certaines parcelles, à condition que celles-ci n’aient pas changé de propriétaire. Nous avons d’ailleurs réussi à replacer sur le cadastre trois des quatre potagers mentionnés par le document de 1792.

Nous avons cherché, au travers de l’utilisation de deux plans, à avoir une vision large de la position des jardins de la fin du XVIIIe siècle. Ces documents permettent d’observer la taille des parcelles, au demeurant plutôt homogène à l’intérieur de la ville. Ils permettent de mettre en évidence, les zones pourvues d'un plus grand nombre de jardins, telles que le quartier Saint-Laurent. L’utilisation de ces plans permet aussi d’observer conjointement (ou presque) les jardins situés à l’intérieur et à l’extérieur des remparts

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