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Les relations internes, les verbes logico-topologiques et les verbes neutres

CHAPITRE 4 : LES RELATIONS DE LOCALISATION

4. L ES TYPES DE VERBES ET DE RELATIONS DE LOCALISATION

4.3. Les relations logico-topologiques (notées LOG) :

4.3.1. Les relations internes, les verbes logico-topologiques et les verbes neutres

La présentation des relations de localisation interne nous est utile, non seulement pour l'analyse

des verbes logico-topologiques, mais aussi pour la description des verbes neutres qui, comme

on l'a vu, décrivent théoriquement une transition entre l'intérieur et l'extérieur d'une entité. La

plupart des verbes logico-topologiques décrivent intrinsèquement des relations internes (on

parle de verbes internes), alors que pour la majorité des verbes neutres, cette relation n'est

que le résultat de la composition (le trait INT ne les affecte que de façon secondaire (ils sont

notés dans ce cas (NEUT_(INT)) .

D'une manière générale, la relation interne est fortement dépendante de la notion fonctionnelle

de 'contenance' (cf. Vandeloise 1986, 1987, Vieu 1991). De fortes contraintes pèsent donc

sur la nature du site qui doit présenter ces propriétés. Elles résultent le plus souvent d'une

interaction entre un type d'activité décrit par le verbe et la relation habituelle existant entre la

pratique de cette activité et un lieu particulier exprimé par l'objet du verbe. Les verbes logico-

topologiques impliquent intrinsèquement une relation interne parce qu'ils dérivent d'un emploi

transitif qui était lié, comme on l'a vu, à la réalisation d'une activité particulière (arpenter,

sillonner...). Les verbes neutres quant à eux, ne décrivent une relation interne que si le site

présente les propriétés d'un lieu, mais on note également qu'ils se combinent avec n'importe

quelle entité, à partir du moment où cette entité est impliquée dans la réalisation d'une activité

particulière (quitter le piano). Les verbes logiques, dans leur ensemble, seraient donc

également liés à l'origine, à l'expression non pas d'un déplacement, mais d'une action

spécifique, plus transitive. Le déplacement ne serait donc pas initialement ce qui est exprimé

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de la cible vis à vis des frontières de l'entité de référence. En ce sens, on peut considérer qu'il

y a un continuum entre les verbes logico-topologiques internes et les verbes neutres. Le

rapport à l'objet ne relève pas du domaine de la localisation, mais de l'action. Il n'évoque pas

une localisation par rapport aux frontières de l'objet, mais une action par rapport à l'objet dans

sa globalité. Il s'agit donc à la fois d'une action plus concrète qu'un déplacement (i.e. plus

transitive) et plus abstraite, dans la mesure où la transition décrite est plus exprimée par le

temps du procès que par le passage effectif d'une frontière. Les verbes neutres décrivent des

changements d'état (le plus souvent des achèvements) qui peuvent correspondre dans certains

cas à des changements de lieu (ex. elle abandonne la maison). Une double interprétation est

possible, à la fois conceptuelle et spatiale. Selon la situation, une des deux lectures peut

primer. Cela peut signifier en effet qu'elle n'entretient pas la maison dans laquelle elle vit

(interprétation conceptuelle), ou bien qu'elle s'en éloigne physiquement (spatiale). Dans des

proportions variables, ces deux interprétations sont présentes et ne peuvent être dissociées.

C'est pourquoi, il paraît très réducteur de rendre compte de la sémantique d'un tel verbe

seulement en termes de transition de frontières spatiales. L'ensemble des verbes neutres

demanderait à être traité au cas par cas. Mais le plus important dans l'immédiat, nous semble-

t-il, est de dégager les tendances comportementales de chaque classe de verbes. Les

propriétés que nous avons mises en évidence à partir de la description de quelques verbes

nous paraissent assez représentatives du comportement de l'ensemble de la classe, et montrent

que cette tendance affecte non pas une classe de verbes mais l'ensemble des classes (de

contact, neutres et logico-topologiques).

Après avoir souligné le caractère (initialement23) non spatial des verbes logiques et logico-

topologiques, nous pouvons à présent revenir sur la description des relations internes,

impliquées dans les interprétations spatiales de ces verbes.

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Les verbes semblent subir un processus d'évolution vers un comportement intransitif, qui se traduit par un affaiblissement du rapport référentiel à l'objet (passage du rôle de patient dans les relations de contact, au rôle de locatif dans les relations logico-topologiques). Peut-être faudrait-il inventer un rôle intermédiaire, à la fois patient et locatif pour caractériser l'objet des verbes neutres, ou bien, à la manière de Rauh (1988), Jackendoff (1990) introduire plusieurs niveaux de représentation. Rauh introduit la distinction entre les schémas de mouvement (qui correspondent aux processus locatifs ou autres non causatif) et les schémas d'action (qui englobent les processus causatifs et les actions causatrices). Jackendoff quant à lui, isole le niveau thématique et le niveau actionnel. (cf. François 1997 :119- 156).

Considérons maintenant les exemples suivants :

(48) a. Les grévistes ont évacué les locaux

b. Léon a arpenté les bois

c. Les troupes ont envahi la ville

En (48a) ci-dessus, évacuer, qui est un verbe initial, implique l'inclusion de la cible (les

grévistes) dans l'intérieur de l'entité site, dénotée par les locaux au moment initial du

déplacement. En (48b), arpenter, qui est un verbe médian, implique l'inclusion de l'entité

dénotée par le SNc (Léon) dans l'intérieur de l'entité dénotée par le SNs (les bois) pendant la

phase médiane du procès. En (48c), envahir implique l'inclusion de l'entité-cible, dénotée par

le SNc (les troupes) dans l'intérieur de l'entité-site, dénotée par le SNs (la ville) au moment

final du déplacement. Ces verbes décrivent donc l'inclusion de la cible dans la portion

d'espace correspondant à l'intérieur du site pendant la phase correspondant à leurs polarités

respectives.

Plusieurs types d'intérieurs ont été mis en évidence par Vieu (1991 : pp. 208-211). Le terme

intérieur présente un statut mixte entre composant et NL. Il possède des propriétés

d'individuation et donc d'autonomie référentielle qui varient en fonction de la configuration de

l'entité-tout.

(i) Les intérieurs de type 1 (intérieurs dits classiques) sont ceux des entités qui possèdent une

concavité contenante (la maison, le verre). Ils sont déterminés par les contours de la

contenante concavité de l’entité : si c’est un objet (un verre), par la fermeture convexe de la

partie contenante de cette concavité; si c’est un lieu géographique (Toulouse), en élevant des

verticales à partir des frontières au sol. Ces intérieurs sont les plus typiques parmi les diverses

classes distinguées. Ils font appel à des notions à la fois géométriques et fonctionnelles,

contrairement aux classes 2 et 3 que nous décrivons dans la suite et qui se basent, pour

l'essentiel, sur des concepts géométriques.

(ii) Les intérieurs de type 2 sont ceux des entités qui ne possèdent pas de parties contenantes

a priori (c’est-à-dire des objets collectifs comme une foule, un tas de pomme, ou des objets

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par la fonction “outline” qui épouse les contours de l’objet “au plus près”, fonction introduite

par Herskovits (1982).

(iii) Les intérieurs de type 3 (intérieurs dits d'enchâssement) correspondent à l’espace occupé

par un poisson dans l’eau, par des termites dans le bois ou par un avion dans un nuage...

Ces intérieurs se comportent comme des entités du type "opportuniste" créées par l’entité

cible,. En effet, aucune portion d’espace n’existe a priori dans l’eau avant que le poisson n’y

soit localisé, ni dans le bois avant que les termites ne s’y logent. Les frontières de tels intérieurs

sont définis par les frontières de l’entité-cible.

La définition plus ou moins nette des frontières de ces différents types d'intérieurs a une

importance sur la description des changements de relation de localisation, dans la mesure où

les portions d’espace correspondant à ces différents types d’intérieurs ne présentent pas les

mêmes propriétés référentielles (cf. note 23).

Cependant, et indépendamment de ces distinctions, on considèrera qu’un verbe décrit une

relation de localisation interne à partir du moment où il implique que la cible est localisée dans

l’intérieur du site, et que cette relation de localisation correspond à l’information locative

positive du procès.

On aurait pu ajouter une dernière classe d'intérieurs, les intérieurs abstraits ou psychologiques,

qui permettrait d'interpréter de façon unifiée, en termes topologiques, les différents emplois des

verbes neutres. Cela nous aurait amenée à considérer tous les verbes neutres comme des

verbes décrivant intrinsèquement une relation interne. Par exemple, on aurait pu décider qu'un

verbe comme quitter, - qui peut, dans certain cas, s'interpréter comme verbe interne -

introduise de façon systématique un intérieur correspondant, selon la nature de l'objet, à

l'espace du couple (cf. Léon quitte Juliette), à l'espace d'interaction supposé par la pratique

d'une activité (quitter le piano, le travail, la chorale)... etc. Si une telle option reste possible,

nous craignons cependant qu'elle soit en fin de compte trop puissante, dans la mesure où on

finirait peut-être par décrire tous les verbes dans ces mêmes termes, et ceci alors qu'ils

possèdent souvent plusieurs traits distinctifs (notamment quant à leur comportement aspectuel

intrinsèquement une relation spatiale et les autres. Nous préférons donc limiter la référence du

terme intérieur aux trois types définis ci-dessus (Vieu 1991).

4.3.2. Les relations internes, les verbes logico-topologiques et les verbes

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