• Aucun résultat trouvé

2. Contexte de l’étude

2.2 Les relations de genre à travers l’histoire du Malaw

Les événements ayant marqué l’histoire du Malawi depuis la fin du 20e siècle à aujourd’hui ont influencé les rapports de genre au Malawi. L’influence des Anglais pendant une soixantaine d’années et du régime politique sévère du Dr Hastings Kamuzu Banda qui dirigea le pays pendant 30 ans, sur les lois et les normes de genres est toujours bien présente comme nous le verrons dans la prochaine section.

David Livingstone, le premier explorateur écossais dans la région du Malawi telle qu’on la connait aujourd’hui, a foulé le sol du pays pour la première fois en 1859 (Verjeijen, 2013). Peu de temps après, il a été suivi de missionnaires chrétiens qui établirent des missions à travers le pays. À cette époque, le système de filiation matrilinéaire, un système prédominant dans le sud du Malawi et dans lequel les femmes ont un statut plus valorisé que dans le système patriarcal, n’avait pas encore été influencé par les pratiques externes des colons anglais venant rejoindre les premiers missionnaires européens dans le but d’exploiter le territoire (Verheijen, 2013 ; Mandala, 1984). Cependant, l’idéologie patriarcale des missionnaires et des administrateurs coloniaux semble être à l’origine d’un changement dans les relations de genre en favorisant l’accès des hommes à l’éducation et au travail salarié. D’ailleurs, un missionnaire, établi dans la région du sud, notait dans ses observations de la population que le statut des femmes ne semblait aucunement inférieur à celui des hommes et qu’il y avait un partage équitable des tâches entre les deux sexes (Verheijen, 2013 ; Mandala, 1984). L’adoption de l’idéologie et des pratiques chrétiennes ainsi que le contrôle des hommes sur les ressources matérielles et la production agricole auraient sévèrement atteint le statut des femmes (Bennesch, 2011). Néanmoins, le système de filiation matriarcal en place est demeuré et a coexisté avec la doctrine chrétienne dans tout le Malawi, ce qui explique sa présence encore de nos jours dans plusieurs régions du pays.

De 1907 à 1964, le protectorat britannique du Nyassaland (le Malawi actuel) a dominé le territoire jusqu’à l’indépendance du pays en 1964 lorsque le Dr Banda est devenu le premier président du pays (Veiheijen, 2013). À son arrivée au pouvoir, le Dr Banda renomma le territoire Malawi, d’après l’empire précolonial de Maravi. Il se proclama Chef suprême du pays qu’il dirigea en s’entourant de symboles coutumiers associés aux chefs traditionnels. Il présida le pays de façon autocratique pendant 30 ans (Verheijen, 2013). Son autorité eut une grande influence sur la définition des normes sociales et sur les comportements tolérés pour les femmes et les hommes.

Le Dr Banda imposa sur le peuple du Malawi une idéologie dont les normes de genre ont été grandement influencées par son héritage d’origine matrilinéaire et les normes de genres auxquelles il a été familiarisé lors de ses expériences aux États-Unis et en Grande-Bretagne où il a vécu pendant plus de 30 ans (Pike, 1968; Veiheijen, 2013). Il voulait à la fois que les

femmes aient un statut égal aux hommes, mais dans leur sphère respective, c’est-à-dire dans le ménage et hors du ménage. Selon l’idéologie du Dr Banda, le travail des femmes se réduisait aux tâches ménagères et le rôle des hommes était celui de pourvoyeur du ménage (Semu, 2002). Selon Verheijen (2013), les impacts de l’idéologie du Dr Banda sont encore visibles dans la population (Phiri, 1983). Lors de notre séjour au Malawi, nous avons également perçu, à travers nos conversations avec nos collègues locaux, la grande influence que le régime du Dr Banda eut sur la population. Un régime pendant lequel les comportements des hommes et des femmes étaient sévèrement contrôlés et toute désobéissance était persécutée. Le respect des droits de la personne fut remis en question au début des années 1990 à la suite de la fin de la Guerre froide.

En 1993, des manifestations nationales ont mené à un premier référendum à la suite duquel un système démocratique a été mis en place (Semu, 2002). Avec l’arrivée au pouvoir d’un nouveau parti politique, le Front démocratique uni, et le soutien de la communauté internationale, le gouvernement du Malawi a procédé à la révision des lois régissant le mariage dans le but de revoir certaines pratiques discriminatoires envers les femmes afin de promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes. De plus, le Malawi a fait l’objet de plusieurs programmes ayant pour but d’améliorer les conditions de vie et de santé de sa population grandement touchée par les effets d’une extrême pauvreté et de l’épidémie du VIH.

En 2001, une commission a été chargée de la révision des lois et, à la suite d'une évaluation, en a déduit que le système de lois sur le mariage en place à ce moment-là perpétuait des inégalités en raison des différences entre les droits et les obligations des époux (Mwanbene, 2005). La commission a aussi conclu que l’État et la société avaient le mandat de protéger toutes les parties impliquées dans un contrat de mariage et d’assurer le respect de leurs droits sous l’institution du mariage.

En 2015, une réforme de la loi a été mise en œuvre (Goitom, 2015; Godwe, 2015). Selon la nouvelle réforme, les quatre types d’unions retrouvés au Malawi ont maintenant le même statut légal : les mariages civils, traditionnels, religieux et la cohabitation. La polygamie demeure interdite pour les unions civiles seulement. La réforme établit aussi les lignes directrices pour régulariser la définition de la cohabitation. Finalement, l’âge légal du mariage

est passé de 15 à 18 ans pour les femmes et les hommes, peu importe le type de mariage (Goitom, 2015; Godwe, 2015).

Documents relatifs