• Aucun résultat trouvé

3.3 Mesure de la "température" du gaz granulaire

3.3.3 Relation de Fluctuation

6J)

(b) Rapport F D en fonction de f , calculé aux

fré-quences fk(carrés rouges) et calculé pour toutes les valeurs de f en utilisant les ajustements de l’équa-tion 3.12 (ligne noire).

Figure 3.9 – Spectre Se et rapport F D tracés en fonction de f. La quantité F D s’identifie à la température kTFDT selon le TFD.

système est vraisemblablement biaisée par la trop grande proximité avec un pic de résonance ; nous n’en tiendrons donc pas compte. D’autre part, si la quantité F D est constante pour f ∈ [0.1; 80] Hz, elle décroît ensuite violemment. Le TFD n’est donc pas vérifié pour notre système, ce qui n’est pas surprenant. Cependant, nous pouvons tenter d’expliquer la chute aux plus hautes fréquences de la façon suivante : le rapport F D correspond à une énergie caractéristique associée au système, à une fréquence donnée. Si le Théorème de Fluctuation-Dissipation prévoit que F D= kTTFD (∀f), c’est parce que le bruit ξ considéré est blanc, c’est à dire de même intensité à toutes les fréquences. Or cela ne peut pas être le cas pour notre système, puisque le gaz granulaire n’a pas de dynamique à très haute fréquence : les billes étant inertielles et le gaz peu dense, la pale ne peut pas avoir de dynamique à très haute fréquence. Nous nous concentrons donc sur la dynamique à basse fréquence, et nous décidons d’extraire une température kTTFD à partir du comportement constant de F D pour f ∈ [0.1; 80] Hz. On mesure sur l’exemple de la figure 3.9b, kTTFD= (0.95±0.15) 10−6J. Comme attendu, cette valeur est bien au delà des valeurs classiques mesurées pour les systèmes thermiques (à température ambiante, kBT ∼ 4 10−21J). Dans la suite, nous décrivons comment nous utilisons la Relation de Fluctuation pour extraire une autre mesure de la température effective du système. Nous discuterons alors plus en détail la valeur obtenue ici, et surtout, nous verrons comment elle évolue avec l’agitation du gaz.

3.3.3 Relation de Fluctuation

Il est important de noter que la situation est différente de celle étudiée dans le chapitre 2 (Sec. 2.5.4) et qui correspond à la majorité des études du même type sur des granulaires vibrés [Aumaitre et al. - 2001, Aumaitre et al. - 2004]. Dans ces études, la puissance sur laquelle est testée la RF est la puissance qui alimente le système dissipatif, qui compense en moyenne la dissipation : dans le cas de la bille, c’est la puissance injectée par le piston. L’expérience que nous présentons dans cette partie se démarque de ces études car nous considérons la puissance échangée entre la pale et le gaz, et non la puissance qui compense la dissipation pour maintenir

le gaz à l’état de gaz. Pour fixer les idées, la puissance typique nécessaire à l’entretien du mouvement du gaz granulaire est de l’ordre de quelques W, alors que la puissance moyenne échangée avec la pale peut être choisie aussi petite que voulue (ici entre 10−9 et 10−6W).

Comme évoqué dans l’introduction générale de cette thèse, le taux de création d’entropie ne peut se mesurer directement dans un système comme le notre. En revanche, on peut définir la variation d’entropie dans le gaz comme dS = dw/T , où dw est le travail fourni par la pale au gaz puisque la puissance fournie par l’agitation compense la dissipation en moyenne, et où T serait la température du thermostat. Ceci nous permet donc de considérer le travail w(t) injecté au gaz pour exprimer la RF comme évoqué dans l’introduction. Rappelons tout de même qu’il existe quelques réserves quant à la validité de la RF :

– la RF n’est pas attendue puisque le travail injecté est perdu en chaleur, il ne peut pas y avoir micro-réversibilité.

– T n’est pas ici une vraie température, mais une température effective.

Malgré tout, on souhaite vérifier si cette relation peut décrire correctement notre système, et on l’utilise pour définir une température effective.

0 0.2 0.4 0.6 0.8 −0.5 −0.25 0 0.25 0.5 t (s) 0.2 I (t) (mA) e(t) (mV)

(a) Signaux temporels e(t) et I(t).

−100 −50 0 50 100 101 103 105 ˙ w (10−6 W) P ( ˙w )

(b) Distribution de probabilité de la puissance

injec-tée instantanée, P ( ˙w(t)).

Figure 3.10 – Avec les signaux temporels e(t) et I(t), on peut calculer la puissance instantanée injectée par la pale dans le gaz, ˙w(t) = e I. Sa distribution de probabilité, P ( ˙w(t)), est fortement non-gaussienne, avec beaucoup d’événements négatifs. On a ici ⟨ ˙w⟩ = 2.5 10−7W.

Pour tester la RF, nous utilisons les mêmes données que celles utilisées pour le TFD (Sec. 3.3.2). En effet, en imposant un couple à la pale, elle transmet de l’énergie au gaz granulaire. Encore une fois, le courant I imposé au MCC (via la résistance R, cf Fig. 3.3) doit être d’ampli-tude assez faible pour que l’injection d’énergie ne soit qu’une perturbation (concrètement, on ne veut pas que la pale "brasse" le gaz granulaire et change totalement sa dynamique), mais il faut que la puissance moyenne injectée soit suffisamment importante pour pouvoir calculer la fonc-tion d’asymétrie. On voit sur les tracés temporels (Fig. 3.10a) que la fém e est parfois du même signe que le forçage I (la pale injecte de l’énergie dans le gaz), mais elle peut aussi être de signe opposé (la pale reçoit de l’énergie de la part du gaz). On voit alors que la puissance instantanée injectée par la pale dans le gaz, ˙w(t) = Γ ˙θ = e I, peut être positive comme négative. Par ailleurs, la distribution de probabilité de ˙w est très loin d’être gaussienne, avec des ailes très développées (Fig. 3.10b). La puissance moyenne injectée sur une durée τ vaut ˙wτ(t) = 1

τ

trace figure 3.11a les distributions de probabilité pour plusieurs valeurs de τ. La valeur moyenne des distributions est positive (on injecte de l’énergie en moyenne) et vaut ici ⟨ ˙w⟩ = 2.5 10−7W. On observe comme attendu que plus les valeurs de τ sont grandes (du plus foncé vers le plus clair), moins la distribution P ( ˙wτ) est large, et plus elle devient gaussienne.

−5 0 5 x 10−6 2 4 6 8 10 12 14 ˙ wτ ln (P ( ˙wτ ))

(a) ln (P ( ˙wτ)) pour différentes valeurs de τ .

0 1 2 3 4 x 10−6 0 1 2 3 ˙ wτ δ( ˙wτ )

(b) δ( ˙wτ) pour différentes valeurs de τ . Insert : agran-dissement autour de l’origine avec les courbes corres-pondant aux valeurs de τ les plus élevées.

Figure 3.11 – Distributions de probabilité ln[P ( ˙wτ)] et fonctions d’asymétrie δ( ˙wτ) pour τ ∈ [10; 60] s (du plus foncé au plus clair). La ligne rouge représente l’ajustement linéaire le plus approprié pour déterminer Ec,1 pour τ = 60 s [Eq. 3.16)]. On a ici ⟨ ˙w⟩ = 2.5 10−7W.

Par analogie avec la RF, nous souhaitons donc tester l’existence d’une relation entre la probabilité pour la pale de fournir une puissance ˙wτ au gaz et la probabilité qu’elle reçoive la même puissance venant du gaz, dans la limite des τ infinis :

P( ˙wτ)

P(− ˙wτ) = eτ ˙wτ/kTRF, pour τ → ∞ (3.15) où kTRFdésigne la température effective du système. Notre objectif est de tester cette relation et de mesurer, si cela est pertinent, le paramètre kTRF pour différentes valeurs d’agitation du gaz. Pour cela, nous introduisons la fonction d’asymétrie δ( ˙wτ) ≡ 1

τln[ P ( ˙wτ)

P (− ˙wτ)

]

, que nous calculons pour des valeurs croissantes de τ (Fig. 3.11b).

La RF établit que la linéarité de la fonction d’asymétrie : δ( ˙wτ) = ˙wτ

Ec,1, avec Ec,1 → kTRF quand τ → ∞. (3.16)

Il est également possible d’obtenir une autre mesure de kTRF, sous réserve que la distribution de probabilité P ( ˙wτ) soit gaussienne. Dans ce cas, on a

˙w2

τ

˙wτ= Ec,2, avec Ec,2 → kTRF quand τ → ∞. (3.17) Comme expliqué Section 2.5.4, il n’est pas possible d’atteindre réellement la limite τ → ∞ puisque nous avons des statistiques de taille finie. Nous nous imposons donc de moyenner sur un temps supérieur à 5 τc c est le temps typique de corrélation du système, mesuré à la

section 3.2.2), tout en gardant un domaine de définition de la fonction d’asymétrie suffisamment grand : ˙wτ[0; 5 ⟨ ˙w⟩]. Ces critères sont faciles à respecter dans la mesure où nous pouvons choisir la valeur de ⟨ ˙w⟩ et où nous pouvons faire des acquisitions de plusieurs heures. Il est important de noter que nous ne pouvons pas prouver la validité de la RF : nous vérifions simplement que dans nos barres d’erreur, avec nos critères de moyenne, la linéarité de la fonction d’asymétrie est vérifiée.

Pour déterminer Ec,1, nous effectuons un ajustement linéaire de la fonction d’asymétrie sur les 3/4 de son domaine de définition. En effet, le manque de statistique commence à être important dans le dernier quart. Pour Ec,1, il nous suffit de calculer le rapport des moments. On trace donc les énergies caractéristiques Ec,1 et Ec,2 [Eq. (3.16) et (3.17)] en fonction de τ sur la figure 3.12. On voit que les deux quantités sont stables pour τ ∈ [40; 60] s, et qu’elles coïncident. Notons tout de même que la mesure de Ec,2 semble beaucoup plus précise. Cependant, elle suppose que P ( ˙wτ) soit gaussienne, ce qui n’est pas prouvé. Nous déduisons ici une valeur de kTRF = (1.15 ± 0.10) 10−6J. 0 20 40 60 1 1.1 1.2 1.3 τ (s) Ec ,1 (1 0 6 J)

(a) Énergie caractéristique Ec,1en fonction de τ .

0 20 40 60 1 1,1 1,2 1,3 τ (s) Ec ,2 (1 0 6 J)

(b) Énergie caractéristique Ec,2en fonction de τ .

Figure 3.12 –Énergies caractéristiques Ec,1 et Ec,2 [Eq. (3.16) et (3.17)] en fonction de τ. Elles sont stables pour τ ∈ [40; 60] s et on déduit kTRF = (1.15 ± 0.10) 10−6J.