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Médiateur familial, France

REFLEXIONS PLUS GLOBALES

Comme d’autres parents, Annaelle et Gaétan ont été confrontés à une situation paradoxale: comment penser «rupture conjugale» et «poursuite de relations bienveillantes de coéducation parentale»?

Une crise tend à construire des visions binaires, à envisager des solutions tranchées. La complexité n’est possible à aborder qu’avec un minimum de sécurité.

En situation de crise et de conflit, les arguments communs tendent à privilégier pour le jeune enfant la stabilité de ses repères, un seul logement et la stabilité de la relation établie entre l’enfant et un seul de ses parents. Comment assurer la stabilité des lieux, des situations et des relations dans une situation qui a changé et qui n’est donc plus la même.

Le rapport au temps est à considérer, l’histoire de chaque parent est revisitée et percutée de manière inattendue lors de la rupture conjugale et de la décohabitation. Les temps du quotidien de chaque parent prennent place parmi d’autres temps professionnels, personnels, ceux des transports, des démarches administratives.

Ils étaient d’accord pour trouver entre eux des solutions et les résistances et les peurs ont été les plus fortes, au cours du temps du déroulement de la médiation familiale. Le défi a été d’identifier des garanties, de construire des réassurances moins dans les déclarations que dans le concret expérimenté:

- La maturation individuelle, collective du conflit suit des cheminements où leur part de mystère,

- Le fractionnement, la progressivité, la régularité et la flexibilité d’évolution des temps de vie de Simon entre la crèche, au domicile de l’un, de l’autre de ses parents, avec l’un chez le médecin, avec l’autre chez des grands-parents et aussi des temps à trois…. Constituent les éléments d’un puzzle dont le résultat n’est pas déterminé mais dont l’anticipation est fondatrice.

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La tension était importante pour Annaelle et Gaétan entre d’une part le modèle où le dialogue, la prise en compte des dimensions relationnelles et émotionnelles sont des valeurs privilégiées et d’autre part, leurs antagonismes forts avec des représentations, des discours théoriques, des mises en forme judiciaires omniprésents.

L’égalité femme-homme est à penser aujourd’hui avec la restitution des différences d’être père et d’être mère, alors que conjointement les fonctions dites «maternelles et paternelles» ne sont pas figées et qu’elles sont à repréciser au niveau symbolique et concret.

Un conflit est une spirale d’aspiration plus que d’inspiration, tous les protagonistes y vont de leur expertise avec des représentations et des préconisations qui tiennent lieu de «certitudes» à rebours de la singularité de leur situation.

Professionnels eux-mêmes, ils se sont entourés de nombreux professionnels pour d’abord confirmer leurs positions puis, ont séparé entre d’une part ceux qui pouvaient être investis de confiance par les deux parents et ceux dont chacun avait seul la confiance.

Ils ont rapidement partagé le constat navré que les acteurs du système judiciaire les avaient conduits à participer à une «machine infernale» qui les dépassait, les dessaisissait de leur décision et dans l’attente insécurisante d’une décision dont l’effet était incertain.

La médiation familiale favorise-t-elle la résidence alternée?

Ma deuxième réponse sera OUI.

La médiation familiale n’est pas un dispositif pour ou contre la garde alternée ou la résidence alternée ou paritaire. Elle propose d’aborder simplement la complexité des besoins de chaque adulte et d’aborder de manière globale les bénéfices possibles pour l’enfant.

La médiation familiale offre aux parents la possibilité d’envisager chacun et ensemble des choix dans la singularité de leur situation avec leurs différences, leur coexistence, leur complémentarité. Sont abordées les modalités de l’organisation de vie de leur enfant en prenant en compte la complexité et les enjeux les plus saillants de leurs situations ainsi que leurs appréciations des besoins de leur enfant.

Le résultat est généralement celui d’une alternance de temps de vie de l’enfant avec l’un puis avec l’autre de ses parents. Parfois, elle peut être devenir «résidence alternée», ce qui ne constitue pas un objectif mais l’issue possible d’une construction, d’un processus avec un résultat non formulable d’emblée.

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Elle a pour objectif avec sa part de prétention, d’illusion et d’ambition, que chaque parent puisse conscientiser, exprimer ce qui important pour lui, échanger des informations et dialoguer. Pas nécessairement pour parvenir à se mettre d’accord, mais pour envisager les modalités d’une organisation des temps qui prennent en compte les besoins de chacun et plus particulièrement ceux de l’enfant.

Le médiateur familial accompagne des personnes dans leur recherche de changements et de solutions qui soient satisfaisantes à court, moyen et plus long terme avec des repères pour envisager d’autres changements. A partir du présent, revisiter le passé afin d’anticiper pour un meilleur avenir.

La médiation familiale offre aux parents la possibilité d'échanger ensemble sur les modalités d’organisation des différents temps de vie de leurs enfants en prenant en compte la complexité et les enjeux de leur situation singulière.

Réflexions sur des termes, le piège des mots et des enjeux

Comment le choix des termes juridiques peut-il les rendre aptes à sortir de la confusion entre autorité parentale, garde, exercice conjoint, résidence principale ou alternée et droit de visite et d’hébergement?

Même si l’usage du terme «garde alternée» est aboli depuis 1978 en France, le terme de résidence principale laisse la place à la notion d'un parent principal pour les décisions usuelles et celle d'un parent secondaire associé de manière accessoire par la fixation d’un droit de visite et d’hébergement. Et ce dans une situation d’exercice conjoint de l’autorité parentale avec «mêmes droits, mêmes devoirs».

Le terme de «double résidence» ne signifie pas égalité arithmétique et symétrique du temps de l’enfant auprès de chacun de ses parents et il ouvre la possibilité à de nombreuses combinaisons d’organisation de vie.

S’agit-il d’un partage de l’enfant entre ses parents ou du partage des temps de vie de l’enfant entre différents lieux et différentes personnes qui participeront à son développement dans des conditions sécures?

En termes de conclusion, oui, la médiation familiale favorise le maintien des relations avec chaque parent et sa famille. Celui-ci s’inscrit dans une pluralité de modes d’organisation dont la résidence alternée ou la double domiciliation sont des références significatives adaptables aux besoins de l’enfant dans son évolution.

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Références bibliographiques

Geoffray, M. (2014). Grossesse et Médiation familiale. Le Carnet Psy, 181, 39-42.

Hachet, B. (2016). Résidence alternée. Pratiques polémiques et normes ambivalentes.

Journal des Anthropologues, 144/145, 191-219.

Neyrand, G., Poussin, G. et Wilpert, M.-D. (2015). Père, mère après séparation.

Résidence alternée et co-parentalité. Toulouse, France: Erès.

Neyrand G. et Zaouche Gaudron, C. (2014). Le livre blanc de la résidence alternée. Toulouse, France: Erès.

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Die alternierende Obhut - Betreuungsmodelle vom Kind her

denken: teilhaben dürfen statt wechseln müssen

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