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Les recours devant le Bureau du conseiller-médiateur pour l’application des directives (CAO)

Le Bureau du conseiller-médiateur pour l’application des directives (CAO) a été créé en 1999 dans la foulée de critiques de la société civile dénonçant le manque d’imputabilité de l’IFC envers les communautés affectées par les projets qu’elle finançait110. Il s’agit d’une entité indépen-dante de l’IFC qui relève directement du président du Groupe de la Banque mondiale, une décision prise lors de sa constitution afin d’assurer son indépendance111. Le CAO procure aux personnes et communautés affec-tées par un projet de l’IFC – ou de la MIGA – un mécanisme de plainte. Il vise également à promouvoir l’amélioration des impacts environnemen-taux et sociaux des activités financées par ces deux institutions112. Afin

April 27, 2015, CAO Ref : C-I-R9-Y12-F165, en ligne : <http://www.cao-ombudsman.

org/cases/document-links/documents/CAOInvestigationReportAvianca-May182015.

pdf> (consulté le 7 septembre 2017).

110 Sur l’historique de la création du CAO, voir : Benjamin M. Saper, « The International Finance Corporation’s Compliance Advisor/Ombudsman (CAO) : An examination of Accountability and Effectiveness from a Global Administrative Law Perspective », (2012) 44 International Law and Politics 1279, 1288-1291.

111 Plusieurs mesures sont d’ailleurs prises dans les Directives opérationnelles du CAO pour assurer son indépendance et son impartialité. Voir : Groupedela BanqueMondiale, IFC, MIGA, CAO, CAO Directives opérationnelles, édition 2013, CAO, Washington, en ligne :

<http://www.cao-ombudsman.org/documents/CAO_OpGuide_FRE_Final.pdf>

(consulté le 7 septembre 2017) (ci-après citées « Directives opérationnelles »), section 1.3, p. 5.

112 Id., p. 4, par. 1.1.

d’assurer son mandat, il assume trois fonctions interreliées : celle de règle-ment des différends, celle d’enquête et celle de conseil113. Ce sont ses deux premiers rôles qui peuvent être interpelés dans le cadre de plaintes dépo-sées par des individus ou communautés subissant les impacts environne-mentaux ou sociaux négatifs d’un projet financé par l’IFC ou MIGA114.

Tout individu ou groupe d’individus considérant qu’il est touché ou qu’il pourra être touché par les impacts environnementaux et sociaux d’un projet de l’IFC peut intenter un recours devant le CAO115. Le processus de plainte auprès du CAO vise à être accessible et flexible : hormis le fait que la plainte doit être soumise par écrit, les exigences procédurales sont mini-males et le requérant n’a pas à invoquer un manquement précis aux Normes de performance par le client ou à la Politique de durabilité envi-ronnementale et sociale par l’IFC dans sa demande116. La procédure d’ins-truction d’une plainte débute avec un examen préliminaire de recevabilité.

Trois conditions sont nécessaires pour qu’une plainte soit recevable : [...]

1. elle porte sur un projet auquel IFC ou la MIGA participent ou auquel elles songent sérieusement à participer ;

2. les problèmes qui y sont soulevés relèvent du mandat du CAO d’atténuer les effets environnementaux et sociaux des projets d’IFC et de la MIGA ; 3. le requérant est ou risque d’être affecté par les effets environnementaux

et/ou sociaux évoqués dans la plainte.117

113 Id., p. 4, par. 1.2.

114 Dans cette section, nous référerons essentiellement à l’IFC, bien que les directives opé-rationnelles du CAO s’appliquent autant à cette dernière qu’à la MIGA, l’autre agence du Groupe de la Banque mondiale dont les activités sont orientées vers le secteur privé.

Un autre mécanisme d’imputabilité est accessible au public pour les activités financées par la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) et l’Association internationale de développement (IDA) : le Panel d’inspection de la Banque mondiale. Pour une analyse du fonctionnement de ce mécanismes et une com-paraison avec d’autres processus similaires, dont le CAO, voir : Daniel D. Bradlow,

« Private Complainants and International Organizations : A Comparative Study of The Independent Inspection Mechanisms in International Financial Institutions », (2005) 36 Georgetown Journal of International Law 403.

115 Directives opérationnelles, préc., note 111, p. 10, par. 2.1.2. Le recours peut également être intenté par une organisation qui représente les individus ou communautés affec-tées, mais dans ce cas, la plainte doit « clairement identifier les personnes au nom des-quelles la plainte est déposée ».

116 Id., p. 12, par. 2.1.4.

117 Id., p. 13, par. 2.2.1.

À la deuxième étape, lorsque la question de la recevabilité a été réglée, le CAO conduit une évaluation de la plainte afin de bien comprendre les enjeux soulevés118. Cette évaluation est également l’occasion pour le CAO de prendre contact avec le requérant et le client, d’identifier les communau-tés et les parties prenantes concernées et de leur expliquer ses différents rôles et responsabilités. Le CAO établit également si les parties désirent se prévaloir de sa fonction de règlement des différends ou d’enquête. Si les parties ne s’entendent pas pour entamer un processus de règlement des différends, la plainte est transférée à la fonction enquête119. À l’issue de l’évaluation de la plainte120, le CAO doit rendre public un rapport d’évaluation comprenant un résumé des informations collectées pendant l’évaluation et la décision des parties de recourir à son rôle de règlement des différends ou d’enquête.

Lorsque le CAO exerce sa fonction de règlement des différends, il agit afin de faciliter la conclusion d’une entente mutuellement satisfaisante pour les parties prenantes, ce qui comprend minimalement le requérant et le client121. Il s’agit d’un processus non judiciaire, non accusatoire, qui pro-cure un forum neutre aux parties. Dans l’exercice de ce rôle, le CAO cherche à « travailler directement avec les populations affectées par le pro-jet » et « assure un traitement équitable des participants à une procédure de règlement des différends. »122. Il utilise différentes méthodes pour résoudre les enjeux découlant de la plainte, incluant la facilitation et l’échange d’in-formations ; les recherches conjointes ; le dialogue et la négociation ; la médiation et la conciliation123. Si un accord est conclu durant le processus, il contient les objectifs, la nature et les conditions de l’accord et peut men-tionner des mesures de corrections afférentes ainsi qu’un calendrier de réalisation124. Le CAO assure le suivi de l’accord, appuie les parties dans sa mise en œuvre et publie les résultats sur son site Web125. Lorsqu’une plainte est classée, le CAO publie un rapport de conclusion qui souligne les

diffé-118 Id., p. 13, par. 2.3.

119 Id.

120 Le délai pour le processus d’évaluation est de 120 jours à partir du moment où la plainte a été considérée recevable, id.

121 Id., p. 18, par. 3.1.

122 Id.

123 Id., p. 18, par. 3.2.1.

124 Id., p. 19, par. 3.2.2.

125 Id., p. 18, par. 3.2.3.

rentes étapes du processus, indique les résultats obtenus et explique les raisons de la fermeture du dossier126.

La mission du CAO n’est pas d’évaluer si le client de l’IFC a contre-venu à ses obligations contractuelles en faisant défaut de respecter les conditions des Normes de performance identifiées dans l’accord de finan-cement. Les directives opérationnelles du CAO n’établissent aucune pro-cédure lui permettant de déterminer la responsabilité d’un client quant aux impacts environnementaux et sociaux causés par un projet financé par l’IFC et d’offrir en corolaire une réparation aux victimes. La volonté du client d’entreprendre des discussions avec le CAO et le requérant sur les enjeux environnementaux et sociaux soulevés dans une plainte est ainsi indispensable à toute résolution d’un litige. Si le client refuse de prendre part au processus de règlement des différends, le CAO transfère le dossier au service d’enquête.

Lorsque le CAO exerce sa fonction d’enquête, il évalue la manière dont l’IFC a exercé sa diligence raisonnable environnementale et sociale et appliqué ses directives en la matière dans le cadre des projets financés127. Si le CAO s’intéresse aux agissements de l’IFC dans le cadre de ce processus et non à ceux de son client, il peut néanmoins lui être nécessaire d’exami-ner les activités du client et leurs impacts pour évaluer la performance de l’IFC. La fonction d’enquête est exercée lorsqu’une plainte est transférée du département de règlement des différends, mais peut aussi être initiée par le vice-président du CAO ou encore le président ou la haute direction de l’IFC128. L’enquête par le CAO comprend deux étapes : 1) la procédure d’examen préalable à une enquête ; 2) la procédure d’enquête sur l’appli-cation des directives.

L’examen préalable vise à déterminer si un dossier mérite une enquête.

Seuls les projets qui soulèvent des préoccupations importantes quant à leurs impacts environnementaux et sociaux ou des « problèmes de nature systémique » pour l’IFC peuvent faire l’objet d’une enquête. Afin de déci-der de la pertinente d’ouvrir une enquête, le CAO examine dans quelle mesure :

126 Id., p. 19, par. 3.2.4.

127 Id., p. 22, par. 4.1.

128 Id., p. 22, par. 4.2.1.

[...]

• des éléments prouvent la réalité, actuelle ou future, d’effets environnemen-taux et sociaux négatifs potentiellement importants ;

• certains éléments indiquent qu’une politique ou d’autres critères d’évalua-tion n’ont peut-être pas été respectés ou appliqués convenablement par IFC ou la MIGA ;

• des éléments indiquent que les dispositions prévues par IFC ou la MIGA, qu’elles aient été respectées ou non, n’ont pas permis d’assurer un niveau de protection suffisant.129

Durant l’examen, le CAO approche les membres du personnel de l’IFC impliqués dans le dossier à l’étude et les autres parties prenantes afin de bien saisir la façon dont les politiques environnementales et sociales ont été mises en œuvre et si une enquête s’avère être appropriée. À la fin de cette étape, un rapport d’évaluation est publié par le CAO130.

Lorsqu’une enquête est recommandée, le CAO forme un groupe d’en-quête composé d’experts compétents, indépendants et impartiaux131 et élabore les termes de référence de l’enquête132. Les objectifs du processus sont de déterminer si :

[...]

• les effets environnementaux et/ou sociaux observés sont conformes, ou bien contraires, aux résultats recherchés par les dispositions prescriptives ;

• l’incapacité à remédier aux problèmes environnementaux et/ou sociaux dans le cadre du processus d’examen a eu des effets contraires aux résultats recherchés par les dispositions prescriptives.133

Les méthodes d’enquête peuvent inclure « l’étude de documents, la conduite d’entretien, l’observation d’activités et de situations, et d’autres moyens appropriés. »134 Un rapport d’enquête est préparé et sa version préliminaire est soumise à l’IFC afin de vérifier l’exactitude des faits et de

129 Id., p. 23, par. 4.2.1.

130 Id., p. 23, par. 4.2.2.

131 Id., p. 24, par. 4.4.4.

132 Id., p. 24, par. 4.4.3.

133 Id., p. 24, par. 4.4.2.

134 Id., p. 23, par. 4.3.

recueillir des commentaires135. Par la suite, le rapport est finalisé et rendu public par le service d’enquête du CAO. Lorsque le rapport conclut que l’IFC a contrevenu à ses politiques, le CAO assure un suivi du dossier jus-qu’à ce que l’institution prenne les mesures nécessaires pour corriger les manquements136.

En fonction de ce qui précède, peut-on dire que le CAO remplit les critères d’efficacité prévus dans les Principes directeurs de l’ONU en ce qui a trait aux mécanismes de réclamation non judiciaires ? Une étude récente de la question en vient à des conclusions partagées :

Overall, based on Guiding Principle 31’s seven effectiveness criteria, both the Inspection Panel and the CAO have several characteristics of an effective mechanism : they are accessible to communities before a harm has occurred, they strike a good balance between promoting transparency and respecting complainants confidentiality, and they have the potential to promote insti-tutional learning. The CAO has additional characteristics of an adequate mechanism : it does not require complainants to pursue any other redress mechanism first, and it allows for complaints by individuals, rather than only communities. But both mechanisms are also lacking in several areas. Neither mechanism is fully rights-compatible or has perfect legitimacy. Both mecha-nisms may only promote institutional learning in limited circumstances. In addition, the Inspection Panel meets fewer criteria than the CAO, namely predictability, accessibility and equitability.137

Parmi les critiques les plus pertinentes de l’analyse, notons le fait que l’accessibilité au CAO est entachée par l’ignorance de son existence par les individus et les communautés affectés, un enjeu dont le CAO est toutefois bien conscient et face auquel il a entrepris différentes mesures d’informa-tion et de sensibilisad’informa-tion.

Sur le plan pratique, depuis sa création, le CAO a reçu plus de 150 plaintes provenant d’au moins 46 pays, sur l’ensemble des enjeux tou-chés par les Normes de performance138. Si au départ, il traitait davantage les cas déposés devant lui par le biais de son rôle de résolution des litiges,

135 Id., p. 25, par. 4.4.5

136 Id., p. 22, par. 4.4.6.

137 M. Natenson, préc., note 23, p. 524.

138 CAO, CAO Annual report 2015. Fifteen Years of Impact, Washington, 2015, p. 71, en ligne : <http://www.cao-ombudsman.org/publications/documents/CAO_Annual_

Report_2015.pdf> (consulté le 7 septembre 2017).

depuis 2011, le nombre de cas dans lesquels sa fonction d’enquête a été sollicitée a augmenté de façon significative139. Lorsqu’il exerce sa fonction de résolution des différends, le CAO porte une attention particulière à la capacité des parties de prendre part de façon effective au processus et vise à améliorer leurs compétences à cette fin140. Il les accompagne dans la recherche d’une solution adaptée aux situations locales141. Le processus de règlement des différends et l’implication du CAO auprès des parties peu-vent s’étendre sur de nombreuses années. Dans plusieurs cas, l’interven-tion du CAO a permis aux individus et communautés affectés de faire valoir leurs préoccupations, de participer à un dialogue avec le client et de conce-voir conjointement des solutions à leurs préoccupations142. Le CAO semble donc adopter une approche axée sur le développement, qui s’intéresse tant au processus qu’aux résultats143. Ce processus n’implique toutefois aucu-nement une admission de responsabilité de la part du client et, comme mentionné précédemment, le CAO ne se prononce pas sur le manque-ment du client à ses obligations au regard des Normes de performance. Le CAO s’apparente donc aux processus de résolution alternatifs de règle-ments des différends dont l’objectif est de résoudre les conflits reliés aux respects des droits de l’homme par les entreprises144.

139 Id., p. 73.

140 Id., p. 20.

141 Id., p. 23.

142 Voir par exemple : CAO, Building Hope and Health through Dialogue : A Story of Com-pany-Community Dispute Resolution in Nicaragua, CAO, Washington, 2016, en ligne :

<http://www.cao-ombudsman.org/publications/documents/475551.pdf> (consulté le 7 septembre 2017) ; voir aussi : CAO, A Journey towards Solutions : A Story of Company-Community Dispute Resolution in Uganda, CAO, Washington, 2015, en ligne : <http://

www.cao-ombudsman.org/publications/documents/475551.pdf> (consulté le 7 sep-tembre 2017).

143 Les deux aspects sont interreliés dans l’avancement des droits : « achieving, advancing or restoring the enjoyment of rights as an outcome while empowering rights-holders to participate actively and shape outcomes that also reflect their interests and human dignity ». Caroline Rees, Mediation in Business-Related Human Rights Disputes : objec-tions, Opportunities and Challenges, Harvard Kennedy School, Working Paper No. 56, February 2010.

144 Id. Le travail du CAO rappelle notamment celui des Points de contact nationaux (PCN) créés sous l’égide des Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entre-prises multinationales (OCDE, préc., note 11, p. 81 et suiv.). Le fonctionnement de chaque PCN est variable, mais certains envisagent leur rôle de façon plus large que ne le fait le CAO. En effet, certains PCN offrent non seulement leurs bons offices pour la résolution des différends, mais en l’absence d’accord de l’entreprise concernée à

parti-La fonction d’enquête du CAO vise à améliorer l’imputabilité de l’IFC quant aux impacts environnementaux et sociaux des projets qu’elle finance.

On peut comprendre ce rôle comme un mécanisme d’apprentissage par la voie de contrôles et d’inspections145. L’évaluation des plaintes par le CAO à la première étape du processus, et l’examen par le groupe d’enquête à la seconde étape, permettent toutes deux d’identifier les problèmes dans l’application par l’IFC de ses directives, et plus précisément dans l’exercice de sa diligence raisonnable. Les rapports d’évaluation et d’enquête don-nent des conseils concrets à l’IFC sur les moyens d’améliorer la mise en œuvre de son Cadre de durabilité et sa diligence raisonnable environne-mentale et sociale, ce qui peut permettre d’apporter des changements sys-témiques dans la conduite par l’IFC de ses activités. La publication des rapports peut engendrer des effets négatifs pour la réputation de l’IFC et l’obliger ainsi, dans une certaine mesure, à justifier sa conduite146. Toute-fois, les conditions d’ouverture de la fonction d’enquête sont trop restric-tives, ce qui entraîne le rejet d’un grand nombre de dossiers à l’étape initiale d’évaluation147. Enfin, le CAO lui-même souligne que l’IFC ne met pas en application les recommandations contenues dans ses rapports de façon systématique et consistante148. Une situation qui ultimement peut engendrer un problème de légitimité à la fois pour le CAO et l’IFC.

Le CAO, par la combinaison de ses divers rôles, est donc appelé à intervenir auprès du client et de l’IFC dans le but d’apporter des solutions concrètes lorsque des problèmes surgissent dans l’application des Normes de performance ou lorsque l’IFC fait défaut d’appliquer correctement ses

ciper à un processus de médiation, ils examinent et clarifient dans quelle mesure les pratiques d’une entreprise visée par une communication du public ont contrevenu aux Principes directeurs de l’OCDE. Voir : Leyla DavarneJad, « In the Shadow of Soft Law : The Handling of Corporate Social Responsibility Disputes Under the OECD Guidelines for Multinational Enterprises », (2011) 2 Journal of Dispute Resolution 351, 372 et 374-375.

145 Un mécanisme qui s’apparente à l’idée de « learning by monitoring » développée par Charles Sabel. Voir : Charles F. SaBel, « Learning by Monitoring : The Institutions of Economic Development », dans Lloyd Rodwin and Donald A. Schoön (dir.), Rethin-king the Development Experience. Essays Provoked by the Work of Albert O. Hirschman, Cambridge (Mass.), The Lincoln Institute of Land Policy, 1995, p. 231. Voir aussi : Archon FunG, Dara O’RourKe et Charles SaBel, « Realizing Labor Standards », (2001) 26 Boston Review 1.

146 B. Saper, préc., note 110, p. 1310, 1312.

147 CAO, préc., note 138, p. 32.

148 Id., p. 36.

politiques. Les compétences du CAO demeurent néanmoins limitées à plusieurs égards : il ne peut mettre fin à un projet ; il ne peut ni donner une interprétation des Normes de performance ni évaluer la conformité d’un client aux Normes de performance ; et enfin, il ne peut assurer que les vic-times recevront réparation.

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L’intégration des Normes de performance dans le contrat d’investisse-ment entre l’IFC et un client fait d’elles de véritables obligations contrac-tuelles. Toutefois, l’étude du système de gouvernance par contrat des risques environnementaux et sociaux établi par le Cadre de durabilité de l’IFC révèle que les parties envisagent la mise en œuvre de ces obligations de façon flexible, comme un processus d’amélioration continue. Si l’IFC possède, du moins théoriquement, le pouvoir de contraindre le client au res-pect de ses engagements environnementaux et sociaux, on peut valablement s’interroger sur sa volonté d’exercer ce droit149. Sur le plan de la confor-mité, les exigences de l’IFC envers ses clients peuvent être assimilées davantage à une demande d’adhésion aux Normes de performance qu’à une requête d’observance stricte de celles-ci. L’approche adoptée par l’IFC est ainsi pragmatique : bien qu’elle aille au-delà d’une simple incitation à respecter les Normes de performance, elle comporte certaines « zones de tolérance »150, pour autant que le client soit prêt à collaborer et puisse être en mesure de se conformer dans un délai raisonnable151. Il s’agit d’un choix conscient de la part de l’IFC, qui s’explique entre autres par les enjeux par-ticuliers reliés au respect des droits de l’homme – notamment le manque de capacité des clients – dans les zones où elle investit, particulièrement pour ce qui est des États les plus pauvres et les États fragiles152. Dans un document résumant les changements apportés à la version de 2012 de son Cadre de durabilité, l’IFC souligne d’ailleurs sa double préoccupation de

149 Comme mentionné, le degré d’influence réel sur le client peut aussi varier en fonction

149 Comme mentionné, le degré d’influence réel sur le client peut aussi varier en fonction