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Detecting Jupiters with AMBER on the VLTI

5.3 Reconstruction d’images

Si la technique d’ajustement de modèles paramétriques permet déjà d’obtenir nombre d’informations essentielles sur la structure géométrique et la physique de la source, elle n’est pas à même de lever toutes les ambiguïtés. L’observation d’étoiles jeunes Herbig Ae/Be en est un des exemples les plus frappants. L’histoire commence par une controverse. Si l’excès infrarouge de la distribution spectrale d’énergie de ces objets pouvait s’interpréter comme provenant de l’émission d’un disque à faible taux d’accrétion [Hillenbrand et al. (1992)] ou d’une enveloppe sphérique de poussière [Berrilli et al. (1992), Hartmann et al. (1993)], les observations interféromériques ne corroboraient pas ces hypothèses de manière suffisamment convaincante [Millan-Gabet et al. (1998)]. Ces dernières plaidaient plutôt pour la présence d’un anneau dont le rayon interne est égal au rayon de sublimation de la poussière (endroit où la température est T ' 1100 − 1500K) [Monnier & Millan-Gabet (2002)]. Il semble aujourd’hui que la communauté astrophysique a atteint un consensus quant à la modélisation de tels objets, l’anneau de poussière étant la partie interne d’un disque qui a "enflé" sous l’effet de l’irradiation stellaire et de la luminosité d’accrétion [Dullemond et al. (2001), Nattaet al. (2001)]. Mais le doute subsiste...

La seule façon de s’affranchir de telles ambiguïtés est d’effectuer un ajustement des données par un modèle objectif, soit en d’autres termes de faire de la reconstruction d’images. Or, avec l’avènement d’interféromètres optiques tels le VLTI, l’ère de l’imagerie est en train de s’ouvrir. En effet, le VLTI offre à la fois la haute résolution angulaire (avec des lignes de bases allant jusqu’à B ∼ 200m), la sensibilité (avec de diamètres de D = 1.8m et D = 8m) ainsi qu’une couverture de plan (u, v) exceptionnelle, l’ensemble donnant à ce site un potentiel imageur unique.

Le but de cette partie est donc d’étudier la capacité de l’instrument AMBER/VLTI à reconstruire des images, et d’en déterminer les limitations rédhibitoires. Cette étude a été présentée oralement à la conférence SPIE (Glasgow 2004). Le manuscrit étant joint à ce chapitre, je décris ici les éléments majeurs de cette analyse, notamment la description du modèle d’étoiles jeunes utilisé et les conclusions concernant la possibilité de reconstruire de tels objets.

5.3.1 Modèles de disques d’étoiles jeunes

Le modèle présenté ici est une version modifiée du modèle de [Malbet & Bertout (1995)]. L’environnement circumstellaire de l’étoile est supposé géométriquement fin et centro-symétrique. Il est constitué (voir figure 5.2):

– d’un disque d’accrétion avec une loi de température en r−q [Malbet & Bertout (1995)] auquel a été rajouté

– un anneau à la température de sublimation Tset de rayon interne le rayon de sublimation Rs. En supposant que la section de cet anneau est circulaire, la taille radiale est définie

5.3. RECONSTRUCTION D’IMAGES 145 Hrim Circumstellar disk a few tenth of AUs a few hundreds of AUs Rdust Hrim

Star (Teff) Ring (Tdust)

Fig. 5.2: Modèle simplifié de disques d’étoiles jeunes inspiré de [Dullemond et al. (2001)], composé d’un anneau "gonflé" à la température de sublimation de la poussière et d’un disque d’accrétion. 0.1 1.0 10.0 100.0 10−12 10−11 10−10 10−9 10−8 10−7 Wavelength Star Ring Disk λ F λ λ= 2.2 µm −4 −2 0 2 4 −4 −2 0 2 4 Astronomical units

Astronomical unitsAstronomical Units

Astronomical Units

Fig. 5.3: Image et distribution spectrale d’énergie pour une étoile jeune de type AB Aur. Les paramètres sont: M = 2.4M¯, R = 2R¯, Tef f = 9520K, Tdust = 1500K, Rdust = 0.52AU, Hrim= 0.19Rdust, Rout= 400AU, q = 0.75, i = 65o, d = 150pc.

comme la taille du bord interne Hrim calculée par [Dullemond et al. (2001)]

Ce modèle très simplifié ne prend pas en compte ni l’éclairement du disque par l’anneau, ni le fait que le disque soit en partie ombragé à cause de l’anneau. Néanmoins, ce modèle permet déjà d’avoir une bonne indication du genre d’images auquel les interférométristes seront confrontés. La figure 5.3 illustre le résultat de ce modèle pour des étoiles de Herbig Ae/Be de type AB Aur. Les paramètres physiques proviennent de [Dullemond et al. (2001)] et sont décrits dans la légende.

5.3.2 Potentiel imageur de AMBER sur le VLTI

Le papier SPIE présenté ci-après étudie la capacité d’AMBER d’imager de tels objets. Les angles d’approche sont les suivants: (i) quels sont les limitations intrinsèques dûes à une couverture non parfaite des fréquences spatiales ainsi qu’à une résolution limitée? (ii) Quid de la reconstruction d’étoiles jeunes de type Herbig Ae/Be, T Tauri et FU Orionis? (iii) Combien de nuits sont nécessaires pour avoir une reconstruction pertinente? (iv) Quelles sont les perspectives en ce qui concerne la possibilité de réaliser des images "instantanées" (en une nuit ou moins) avec le VLTI?

Ces questions ont leur réponse dans le papier, illustrée par des images de reconstruction des modèles1

avec les algorithmes CLEAN [Högbom (1974)] et MIRA [Thiébaut et al. (2003b)], ce dernier, étant spécifiquement dédié à la reconstruction d’images à partir de don-nées interférométriques (i.e. les algorithmes sont définis et optimisés à partir des observables réellement disponibles: le module carré de la visibilité et éventuellement la clôture de phase). La figure 5.4 reproduit le résultat de la reconstruction pour l’étoile AB Aur, observée pendant 7 nuits avec AMBER sur le VLTI, en utilisant 3 télescopes auxiliaires par nuit (le plan (u, v) résultant est montré en figure 5.5).

Voici un résumé des différentes conclusions:

– La structure clairsemée du plan (u, v) et présentant une direction préférentielle entraîne inévitablement des biais dans l’orientation de l’objet reconstruit ainsi que des artefacts à partir d’un niveau de dynamique de 103− 104

– Concernant les étoiles de Herbig Ae/Be, si CLEAN n’est pas adapté à ce genre de re-construction et n’arrive que modestement à résoudre les différentes structures de ces modèles, l’algorithme MIRA permet de recouvrer quantitativement certaine informa-tions telles que la position de l’anneau, sa taille ainsi que son flux par rapport à l’étoile au centre

– La dynamique entre l’étoile et le disque est bien trop importante pour que ce dernier soit reconstruit, son flux étant bien en deçà du niveau de bruit de la reconstruction – MIRA ne permet donc pas une reconstruction parfaite de l’objet. Néanmoins, celle ci

fournit des informations fidèles sur la nature de la source. Cette image peut donc être utilisée pour définir un modèle paramétrique affiné, avec des paramètres physiques ciblés – Concernant les étoiles T Tauri, les bords internes du modèle sont à la limite de la résolution ultime que l’ont peut obtenir avec le VLTI et ce genre d’algorithme de re-construction. De plus, imager les étoiles de type FU Orionis, marginalement résolues par le VLTI, n’apporte pas plus d’informations qu’un simple ajustement de modèle à peu de paramètres [Lachaume (2003)].

1. Il est à noter que seules les visibilités sont utilisées dans cette étude puisque les modèles sont centro-symétriques

5.3. RECONSTRUCTION D’IMAGES 147 −2 −1 0 1 2 −2 −1 0 1 2 Astronomical units Astronomical units −2 −1 0 1 2 −2 −1 0 1 2 Astronomical units Astronomical units −2 −1 0 1 2 −2 −1 0 1 2 Astronomical units Astronomical units −2 −1 0 1 2 −3.0 −2.5 −2.0 −1.5 −1.0 −0.5 0.0 Astronomical Units Normalized Flux −2 −1 0 1 2 −3.0 −2.5 −2.0 −1.5 −1.0 −0.5 0.0 Astronomical Units Normalized Flux −2 −1 0 1 2 −3.0 −2.5 −2.0 −1.5 −1.0 −0.5 Astronomical Units Normalized Flux

Fig. 5.4: Haut: de gauche à droite : (i) Modèle de AB Aur en échelle linéaire; (ii) recons-truction avec l’algorithme MIRA; et (iii) reconsrecons-truction avec l’algorithme CLEAN. Bas: Profil horizontal associé à chaque image.

Fig. 5.5: Plan (u, v) obtenu avec 7 nuits d’AMBER sur le VLTI, en utilisant 3 télescopes auxiliaires par nuit.

– Au moins 3 nuits complètes d’observations à trois télescopes utilisant chaque fois des bases différentes sont nécessaires pour obtenir une image ayant "du sens".

– En revanche VITRUV, le recombinateur 4 et 8 télescopes de seconde génération du VLTI [Kern et al. (2003)], sera à même de fournir des couvertures assez denses pour imager les étoiles jeunes à partir d’une seule nuit d’observation (imagerie "snapshot").

5.3.3 Perspectives

Je me suis attaché dans ce travail à étudier la possibilité de reconstruire avec AMBER des modèles centro-symétriques d’étoiles jeunes. La suite naturelle est bien entendu de modéliser des objets plus complexes, où la clôture de phase apportera des informations cruciales pour la reconstruction. Qui plus est, compte tenu de la couverture spectrale de AMBER – les bandes J, H, et K – une étape supplémentaire serait d’intégrer dans l’algorithme des a priori physiques permettant de reconstruire conjointement l’objet dans les trois bandes.

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