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3. Résultats et discussions

3.3. Programme d’interventions de gestion

3.3.2. Recommandations générales

Actuellement, la libre circulation du public à travers les pentes boisées accessibles du parc entraine une série de dégradations en cascade néfastes pour la vitalité du peuplement. En effet, le piétinement récurrent et dispersé dans ces sous-bois détruit littéralement la litière ou la couverture herbacée (Figure 8), autorise l’exportation contre-productive de bois morts, expose le sol dénudé à la lumière et à la pluie ; ce qui favorise finalement le ruissellement de l’eau et des éléments nutritifs plutôt que leur infiltration. Or, comme décrit plus haut, si les réserves en eau du sol sont insuffisantes et si les besoins physiologiques estivaux des arbres augmentent dans le contexte de réchauffement climatique, ils ne peuvent alors plus répondre à leurs besoins physiologiques de base et ils dépérissent. N’ayant pas/plus le contrôle sur les changements climatiques en cours, augmenter les réserves utiles en eau du sol est donc le seul moyen dont dispose le gestionnaire pour limiter l’impact des stress hydriques sur les arbres.

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Figure 8. Le sol dénudé des sous-bois par le piétinement est la porte ouverte vers sa dégradation.

De manière réaliste et déductive,

- vu le rythme accéléré des dépérissements observés depuis l’été 2018,

- vu que les données5 climatologiques récentes montrent que depuis 20 ans la courbe de nos émissions de CO2 suit assez précisément celle envisagée par le pire scénario du GIEC (le scénario RCP8.5 qui prédit une augmentation de près de 4 °C à la fin du siècle par rapport aux normes pré-industrielles),

- vu l’intensité et la fréquence croissantes des canicules estivales attendues dans les 20 prochaines années à venir à cause de l’inertie6 du système climatique et

- vu l’état de dégradation du sol, principalement dans les pentes,

la hêtraie centenaire du parc Duden laissée en l’état actuel risque probablement de dépérir complètement d’ici 2030.

Dans ce cadre, le status quo paraît peu désirable. C’est pourquoi, pour espérer limiter la vitesse de dépérissement de la hêtraie centenaire, favoriser sa régénération et optimiser les chances de survie des arbres d’avenir, il paraît donc utile de mettre en œuvre dès à présent des mesures capables à tout le moins de freiner le processus de la dégradation du sol et au mieux de contribuer à améliorer progressivement sa qualité (aggradation).

Par conséquent, il est proposé de mettre en défens 120 hêtres vétérans supplémentaires implantés sur une surface de près de 3 ha dans les pentes au cœur du parc (Figure 9).

Cette mesure n’a pas la prétention de pouvoir sauvegarder la hêtraie patrimoniale du parc Duden ad vitam aeternam, ni de la « muséifier », mais au moins de retarder son échéance fatale dans des conditions de sécurité acceptables.

5 https://www.pnas.org/content/117/33/19656

6 L’inertie du système climatique est en partie liée à la très grande stabilité du CO2 atmosphérique et autres gaz à effet de serre.

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Figure 9. Proposition de mise en défens de 120 hêtres supplémentaires situés dans des pentes peu accessibles.

Page 17 sur 19 En effet, au-delà des freins sociologiques au changement que pourrait susciter la mise en défens d’arbres (notamment celui de sacrifier une partie de liberté de circuler n’importe où sans limite ou celui de restituer une parcelle boisée au désordre apparent de la nature sauvage), cette mesure relativement simple à mettre en œuvre comporte plusieurs avantages qui pourraient avoir des impacts bénéfiques sur les plans administratif, économique, écologique et pédagogique :

- 1°) une majorité de hêtres vétérans en dépérissement pourraient se démonter naturellement dans des conditions de sécurité acceptables, c’est-à-dire en l’absence de cible humaine supposée ;

- 2°) les coûts récurrents liés au contrôle et à la sécurisation individuelle des arbres pourraient être considérablement réduits ;

- 3°) Davantage d’espace difficilement affectable à d’autres fonctions utiles du parc pourrait être pleinement consacrés à l’amélioration et la protection de l’état de la biodiversité, conformément à la stratégie européenne 2020 pour la biodiversité7.

- 4°) La biomasse tombée au sol sous diverses formes pourrait être maintenue en place, alimenter la vie du sol, favoriser la reconstitution d’une litière forestière vivante, stimuler la régénération d’une couverture végétale, limiter l’érosion du sol par ruissellement et favoriser le stockage de l’eau dans le sol, là où les plantes l’utilisent (Figure 10).

Figure 10. L’apport de biomasse au sol est la première étape du processus de formation de l’humus dont le sol a besoin pour mieux retenir l’eau, tel une éponge.

7 http://biodiversite.wallonie.be/servlet/Repository/2020-biodiversity-strategy-fs.pdf?ID=27323&saveFile=true

Page 18 sur 19 Enfin, toute intervention mécanique intrusive dans le volume vital des arbres, c’est-à-dire le volume imaginaire qui englobe leurs parties aérienne et souterraine (Figure 11), est fortement déconseillée pour ne pas ajouter des perturbations supplémentaires aux stress existants. A cet égard, le creusement de fosses, rigoles ou tranchées à l’aplomb des arbres en place devrait être évité autant que possible ; de même que le remblaiement asphyxiant de leur pied avec la terre d’excavation.

Figure 11. Le volume vital d’un arbre comprend son tronc et sa couronne, mais aussi sa rhizosphère souterraine.

Dans tous les cas, le choix des mesures de sécurisation les plus conservatoires de ce patrimoine arboré remarquable sont recommandées jusqu’à obtention d’un niveau de risque acceptable et compatible avec une fréquentation quotidienne par un public relativement abondant.

Pour rappel, en cas de grands vents > 80 km/h, la fermeture de l’accès au parc par le public reste toujours fortement conseillée, par mesure de précaution, principalement en raison du risque important de rupture de branches mortes.

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