• Aucun résultat trouvé

4. Les mécanismes de recombinaison

4.2. La recombinaison homologue eucaryotique

Les mécanismes nucléaires de HR chez les mammifères et la levure sont assez proches de ceux retrouvés chez les bactéries. Ils sont régulés par le cycle cellulaire qui limite la HR aux phases G2 et S où les chromatides sœurs sont disponibles (Orthwein et al., 2015). Cette limitation favorise la recombinaison entre séquences véritablement homologues. En dehors de ces phases, des mécanismes de jonction d’extrémités tels que le non homologous end joining (NHEJ) ou le microhomology-mediated end joining (MMEJ) sont privilégiés pour la réparation

des DSB bien qu’ils puissent être délétères pour le génome (figure 15) (Chang et al., 2017a).

La réparation d’une cassure double brin débute par la résection des extrémités de la lésion par le complexe MRN (MRE11 ; RAD50 ; NBS1) et MRX (Mre11 ; Rad50 ; Xrs2) chez l’homme et la levure, respectivement (Johzuka et Ogawa, 1995; Ranjha et al., 2018). La nucléase MRE11/Mre11, assistée par RAD50/Rad50, clive l’ADN en amont de la lésion puis digère l’ADN de 5’ vers 3’ vers la lésion afin de contourner les protéines fixées à l’extrémité, formant une extrémité 3’ sortante simple brin (Neale et al., 2005). Après cette courte résection, les exonucléases 5’‑3’ EXO1/Exo1 ou DNA2/Dna2 sont recrutées pour dégrader davantage l’ADN et former une extrémité 3’ sortante simple brin de plusieurs milliers de nucléotides. Cette extension de la résection permet d’orienter la réparation vers la recombinaison homologue

ou Sans crossover

Avec crossover

Voie DSBR Voie SDSA Voie BIR

5’ 5’

5’

5’

Clivage ou dissolution des HJ

Synthèse complète du chromosome Pas de réarrangement

Figure 16 : Voies alternatives de terminaison de la recombinaison homologue. Après

résection des extrémités d’une cassure double brin, et invasion de l’ADN homologue par le nucléofilament de RecA/RAD51, plusieurs voies de résolution du mécanisme peuvent se mettre en place. A gauche, la voie double-strand break repair (DSBR), chez les eucaryotes, implique le recrutement de la deuxième partie de la DSB et la formation d’une deuxième jonction de Holliday. Ces deux HJ pourront être résolues par dissolution, en migrant l’une vers l’autre avant d’être prises en charge par une topoisomérase, ou bien clivées horizontalement ou verticalement, conduisant à un, deux ou aucun crossover. Au milieu, la voie

synthesis-dependant strand annealing (SDSA) permet de recruter rapidement la seconde extrémité de la

DSB après synthèse de la séquence manquante grâce à l’ADN homologue. La synthèse des brins complémentaires utilise directement l’ADN d’origine et n’entraîne pas de réarrangement.

A droite, la voie break-induced replication (BIR) utilise l’ADN homologue pour re-synthétiser

entièrement l’ADN ayant subit une DSB. Ce mécanisme peut conduire à des réarrangements importants lorsque les deux molécules d’ADN ne sont pas complètement homologues.

24 plutôt que vers d'autres mécanismes de jonction d’extrémités (Shibata, 2017). Lors de la résection, l’ADNsb est recouvert de protéines RPA qui le protège des nucléases cellulaires.

Comme la protéine RPA possède une affinité plus élevée pour l’ADNsb que la recombinase RAD51/Rad51 (homologue fonctionnelle de RecA), la formation du filament présynaptique nécessite l’action d’un médiateur similaire au complexe RecFOR chez E. coli (Benson et al., 1998). La protéine BRCA2/Rad52 inhibe l’activité ATPase de la recombinase, favorisant sa liaison avec l’ADN, et permet le remplacement de RPA par RAD51/Rad51 (Benson et al., 1998; Yang et

al., 2005). Tout comme RecA, les protéines RAD51/Rad51 vont former un filament sur l’ADNsb

à partir d’un noyau. La nucléation et la formation du nucléofilament de RAD51/Rad51 sont régulées par de nombreuses protéines, comme les complexes BCDX2 et CX3 chez l’Homme ou la translocase Srs2 chez la levure, qui favorisent ou déstabilisent le filament, respectivement (Masson et al., 2001; Krejci et al., 2003). Le mécanisme de recherche de la séquence homologue par le filament présynaptique n’est pas encore élucidé. L’hypothèse actuelle considère qu'il y a une association temporaire du filament présynaptique avec de multiple loci d’ADN jusqu’au décèlement d’une région présentant suffisamment d’homologie. La protéine BRCA1 permettrait alors l’invasion de brin et l’association avec les régions alentours pour augmenter et vérifier l’homologie (Zhao et al., 2017). Une fois la D-loop formée, la recombinase RAD51/Rad51 est dégagée par la translocase à ADNdb RAD54 afin d’augmenter la stabilité de la structure triple brin. Les polymérases d ou e synthétisent alors l’ADN au niveau de l’extrémité 3’ en utilisant la séquence homologue comme matrice (Solinger et al., 2002).

Le mécanisme de recombinaison homologue peut ensuite évoluer vers trois voies différentes : le break-induced replication (BIR), le synthesis-dependant strand annealing (SDSA)

ou la voie canonique de double-strand break repair (DSBR) (figure 16). Lors du BIR, la synthèse

d’ADN va continuer jusqu’à l’extrémité du chromosome (Sakofsky et Malkova, 2017). Comme la polymérase utilisée n’est pas assistée de facteurs augmentant la fidélité de synthèse, le brin synthétisé présentera un taux de mutations plutôt élevé. Aussi, le BIR est rarement privilégié si d’autres mécanismes sont possibles. Si la D-loop est déstabilisée par certaines hélicases, la recombinaison homologue est dirigée vers la voie du SDSA. Après synthèse d’une courte séquence d’ADN, l’hétéroduplex se sépare et la séquence néosynthétisée s’hybride avec la seconde extrémité de la cassure double brin (Nassif et al., 1994). Le brin d’ADN manquant est ensuite synthétisé en utilisant le brin complémentaire comme matrice. Si la D‑loop est stabilisée, le mécanisme est dirigé vers le DSBR (Nimonkar et al., 2009). La seconde extrémité de la cassure double brin est recrutée par l’ADNsb de la D‑loop grâce à la protéine BRCA2/Rad52. L’ADN complémentaire du second brin lésé est synthétisé en utilisant le second brin de l’ADN homologue comme matrice. La voie du DSBR mène à la formation de deux HJ qui sont généralement éliminées par dissolution, pour limiter les réarrangements génomiques. Pour cela, les deux HJ sont déplacées l’une vers l’autre par les complexes BTRR

25 (BLM‑TOPOIII ‑RMI1‑RMI2) et STR (Sgs1‑Top3‑Rmi1) chez l’homme et la levure, respectivement (Chen et al., 2014; Matos et West, 2014). Les contraintes de l’ADN liées à la migration des HJ sont relâchées par la topoisomérase jusqu’à la formation d’un hémicaténane, une structure où un brin de l’ADNdb est enroulé autour du brin du second ADNdb en un point, qui est ensuite résolue par RMI1/Rmi1. Dans certains cas la dissolution des HJ est impossible. Ces structures à quatre brins sont alors résolues par des résolvases, dont la principale est GEN1/Yen1 (Ip et al., 2008). Ces nucléases forment un dimère au centre de la HJ et réalisent deux incisions sur l’un ou l’autre de ses bras, conduisant ou non à la formation de crossover.

Comme pour les autres eucaryotes, la réparation des cassures double brin dans le génome nucléaire des plantes utilise principalement des mécanismes de jonction d’extrémités (NHEJ, MMEJ) plutôt que la recombinaison homologue (Puchta, 1999). La machinerie de recombinaison est très conservée au sein des organismes et les plantes présentent des homologues à pratiquement tous les facteurs énoncés précédemment (Schuermann et al., 2005). La HR chez les plantes est liée à d’autres mécanismes tels que le nucleotide excision repair (NER) ou la photomorphogénèse (Lieberman et al., 2004; Molinier et al., 2008).