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Recherche alimentaire des abeilles

RESULTATS ET DISCUSSIONS

I. Diversité et activité pollinisatrice des apoïdes sur les plantes étudiées

5. Le navet (Brassica rapa L.) 1. Floraison de la plante

5.5. Recherche alimentaire des abeilles

Pour l’abeille domestique, la majeure partie des visites florales concerne la récolte exclusive de nectar (fig.33a). Les plus grandes proportions de collecte de nectar sont observées de12h à15h.Lepollen estsurtoutprélevéde9h à11h.A l’inverse,laplupartdes visites de L. mediterraneum sont consacrés à la récolte des deux produits ensemble (fig.33b) et cela, à toutes les heures de la journée. Le nectar est également récolté toute la journée, mais

Espèces N Nombre de fleurs visitées par minute

A. mellifera 33 14 ± 0,65

les plus grandes proportions sont observées à 12h et 14h. Le pollen est surtout prélevé à 11h et 13h.

5.6. Effet de la pollinisation entomophile sur le rendement grainier

La présence d’insectes pollinisateurs améliore le rendement de la culture (tab.25). Le nombre de graines par siliques (obtenu à partir de 1000 siliques libres et 1000 siliques encagées) est significativement plus élevé sur les plants libres que sur ceux encagés (t = 10,08 ; ddl = 1998 ; P = 0,000). Le nombre de siliques par plant, établi à partir des plants de 8 quadrats (4 libres et 4 encagés), est aussi plus élevé sur les plants libres. Cependant, la différencen’estpassignificative (t = 1,24 ; ddl = 398 ; p = 0,21). Le poids moyen de 1000 graines (10 x 1000 graines) issues des quadrats encagées est, par contre, significativement

0% 20% 40% 60% 80% 100% 9H 10H 11H 12H 13H 14H 15H 11 19 27 25 28 24 14 113 188 273 251 284 242 137 n = m = Apis mellifera (a)

Figure 33. Pourcentages des produits floraux récoltés par

A.mellifera (a) et L.mediterraneum (b) sur Brassica rapa aux

différentes heures de la journée (floraison 2003) (n = nombre total de spécimens observés ; m = nombre moyen de spécimens

observés). 0% 20% 40% 60% 80% 100% 9H 10H 11H 12H 13H 14H 15H Pollen + nectar Nectar Pollen (b) 2 4 5 4 2 13 27 33 28 13 Lasioglossum mediterraneum n = m =

plus élevé que celui des graines provenant des quadrats libres (U = 0 ; p < 0,01). Par ailleurs, les siliques des plants encagés ont donné un pourcentage de graines avortées (10,3%) supérieur à celui des plants libres (4,12%) (ε= 10,6; p = 0,000). De même, les siliques des plants encagés ont donné un pourcentage de graines mal formées significativement plus élevé (1,9%)queceluidesplantslibres(0,9%)(ε= 5,88; p = 10-8

).

Tableau 25. Rendement grainier de Brassica rapa en présence (quadrats libres) et en absence (quadrats encagés) de pollinisateurs (floraison de 2003). ES = erreur standard ; QL = quadrats libres ; QE = quadrats encagés

Traitement Nombre de siliques/plant Nombre de graines/silique Poids de 1000 graines (gr) QL Moyenne ± ES 29 3,8 11,7 0,4 1,8 0,04 QE Moyenne ± ES 25,5 3,9 8,1 0,6 2,2 0,03 5.7. Discussion

Les observations menées sur Brassica rapa lors de la période de floraison de 2003 montrent que les principaux visiteurs de la plante sont des hyménoptères apoïdes appartenant à trois familles :Apidae,HalictidaeetAndrenidae.L’abeilledomestiqueestlevisiteurleplus fréquent sur les fleurs, elle constitue à elle seule 86% des visites observées. Les Halictidae, représentés essentiellement par Lasioglossum mediterraneum viennent en deuxième position avec 10% des visites. Enfin, les Andrenidae et malgré la diversité des espèces présentes sur les fleurs ne constituent que 4% du total des visites observées.

Lesvisitesdel’abeilledomestiqueetdeLasioglossum mediterraneum sur la plante sont plusnombreusesdanslamatinéeeten débutd’aprèsmidi.L’activitédesdeux abeillesest synchronisée avec la sécrétion de nectar et la production de pollen par les fleurs. Ces dernières sécrètentplusdenectardansla matinée(Mohr& Jay 1990)etc’estdurantcette période que le pollen est intensément collecté par les abeilles (FAO 1995).

L’abeille domestique a visité la plante principalement pour le nectar. En effet, le navet commed’autresespècescultivéesdeBrassica (Brassica napus ; B. oleracea) représente une

bonne source de nectar pour les abeilles (Hammer 1966 ; Mc Gregor 1976 ; Free 1993), et la plupart des abeilles qui visitent ces plantes récolent principalement le nectar (Free & Nuttall 1968 ; Goodman 1982 cité par Free 1993 ; Free & Fergusson 1983 ; Mishra et al. 1988 ; Free 1993). L. mediterraneum a, par contre, consacré la majorité de ses visites à la récolte des deux produits ensemble.

L’observation du comportementde butinage desdeux abeillesmontreque toutesleursvisites peuventêtrefécondantespuisqu’elleseffectuentun butinagepositifsurlesfleursquelquesoit le produit récolté. Sur Brassica napus, quelques abeilles domestiques pratiquent un butinage négatiflorsqu’ellesrécoltentlenectar,etcecien introduisantlalangue entrelesfiletsdes étamines à la base de la fleur («vol de nectar») (Free & Fergusson 1983 ; Mohr & Jay 1988 cités par Free 1993). La prévalence d’un telcomportementdebutinageréduit quelquefois considérablement la valeur pollinisatrice de l’abeille domestique (Delbrassine & Rasmont 1988).

Brassica rapa est presque complètement autostérile (Downey et al.1970 ; Williams et al.1987 ; Morandin & Winston 2004). Par conséquent, la pollinisation croisée est

indispensablepourl’obtention derendementsélevés.Nosobservationsmontrent,en effet,que laprésenced’insectespollinisateurscontribueàl’amélioration delaproduction delaplante. Le rendement grainier obtenu à partir de la pollinisation croisée est plus élevé que celui obtenu par autopollinisation.

De nombreux travaux ont aussi montré que les rendements de la plante sont plus élevés en présence de pollinisateurs en comparaison avec ceux obtenus sans pollinisateurs (Jones & Rosa 1928 cités par Free 1993 ; Koutensky 1958 ; Latif et al. 1960 ; Downey & Bolton 1961 ; Pritsh 1965 ; Williams 1978 ; Sihag 1986 ; Mishra et al. 1988 ; Singh et al. 1996). Fries & Stark (1983) ont constatéquedesdensitésélevéesd’abeillesdomestiquesdansles champs de B. rapa augmentent le rendement grainier de la plante et aussi le rendement en huile des graines.

Aux Etats-Unis, Abel et al (2003)constatentquel’abeilledomestiquepeutnepasêtre le meilleur pollinisateur de Brassica rapa. Ces auteurs obtiennent des rendements en graines plus élevés de la plante, ainsi que de deux autres Brassicaceae (Brassica napus L. et Sinapis

alba L.) en présence de colonies de deux osmies (Osmia cornifrons et O. lignaria).

Leventpeutaussiassurerletransportdepollen d’uneplanteàuneautre(McGregor1976)et surunedistancepouvantatteindrejusqu’à2,5 Km (Timmonset al. 1995), mais le rôle des

insectes, particulièrement les abeilles, est plus important.

Selon nos observations, les siliques des plants encagés ont aussi donné des pourcentages de graines avortées et mal formées plus élevés que ceux des plants libres. Par contre, le poids moyen en graines est significativement plus élevé sur les plants encagés que sur ceux accessibles aux pollinisateurs.

Sur Brassica oleracea, Sinha & Chakrabarti (1985) ont également reporté un poids moyen de 1000 graines supérieur sur les plants encagés en comparaison avec celui obtenu sur les

plants libres. Les plants encagés compenseraient leur faible production en graines en formant des graines plus grosses.

En effet, Hebblethwaite et al (1984) ont constaté sur Vicia faba que les plants encagés sans abeilles produisaient moins de graines par gousse que ceux encagés avec abeilles parce que beaucoup de leurs graines avortent, mais les plants compensent leur faible production en graines en formant des graines plus grosses.

En conclusion, nos observations montrent que dans la région de Constantine,l’abeille domestique constitue le principal pollinisateur de la plante. Elle est aussi le visiteur le plus important de la plante dans de nombreuses régions tels que l’Angleterre (Williams et al. 1987), le Canada (Mohr & Jay 1990), la Finlande (Varis 1996) et la Russie (Nikitina 1950). En Inde, par contre,c’estApis Cerana indica qui est le pollinisateur le plus commun (Mishra et al. 1988). Du fait de son autostérilité plus ou moins forte selon les variétés, et étant donné

le nombre très élevé de fleurs à polliniser, il est recommandé d’introduiredes colonies d’abeillesdansleschampsen floraison.4 à6 ruchesparhectaresontnécessairesdepuisle débutjusqu’àlafin delafloraison (Philippe1991).

6. Le radis (Raphanus sativus L.)