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4.   Méthodologie  d’étude  de  cas

4.1   Étude  de  cas  selon  la  perspective  infirmière  de  King

4.1.2   Recherche

Murray & Bayer (1996), mettent en avant comment un cadre théorique comme celui de l’atteinte des buts de King (1981) peut être appliqué dans un service de santé mentale. Bien que les auteurs présentent des résultats à partir d’un échantillon et qu’ils évaluent l’efficacité de l’utilisation d’un cadre théorique sur ce dernier, nous pouvons considérer qu’il s’agit plus d’une étude qualitative que quantitative. Car effectivement, le but premier est bien de tenter d’appliquer une théorie de soins spécifique, dans un champ d’application lui aussi spécifique.

Ainsi, l’hypothèse qui est avancée par les auteurs est qu’«une théorie infirmière peut être appliquée dans le développement des services de santé mentale» (Murray & Baier, 1996, traduction libre, p. 15).

La structure dans laquelle a été menée cette étude accueille des personnes sans-abri âgées de 19 à 63 ans, souffrant tous de troubles psychiques. Cette structure propose aux personnes un programme de transition. En d’autres termes, les patients intégrant celle-ci s’engagent dans un processus de réinsertion et les buts centraux de ce programme sont

[d’] aider les clients à trouver et à conserver un logement indépendant, obtenir des fonds d'admissibilité, et de développer des relations de soutien, y compris avec les autres clients et le personnel. Certains résidents veulent obtenir un emploi.… Éviter une ré hospitalisation à long terme ou répétée sont des objectifs supplémentaires qui ont été fixés par des résidents (p.17).

L’ensemble de ces objectifs à atteindre est abordé et élaboré au travers des concepts clefs de la théorie de King (1971) qui sont la communication, l’interaction et la transaction.

Pour les auteurs, «le contexte d'une personne, d'une maladie psychiatrique, la santé et les problèmes juridiques influencent la façon dont les objectifs sont formulés et rendus

opérationnels» (p.16), ainsi, il est nécessaire de s’appuyer sur les différents systèmes (interpersonnel, social) décrits par King et permettant une entrée en relation basée sur une entente mutuelle et une compréhension des différents contextes ou systèmes dans lesquels s’inscrit la prise en soins des personnes. Reprenant l’aspect théorique de King selon qui les objectifs sont développés au travers de la communication et de l’interaction qui se produit entre le personnel et les patients, les auteurs relèvent également le fait que «Les résidents interagissent avec les autres dans la poursuite de la réalisation de certains objectifs, et ces comportements s'établissent souvent dans un modèle qui devient effectif pour eux» (p. 17). Les auteurs exerçant au sein de cette structure, ainsi que l’ensemble de l’équipe pluridisciplinaire (composée principalement de travailleurs sociaux), considèrent chaque individu comme étant un être social et rationnel et apte à comprendre les règles qui régissent le programme. Ces règles leur sont transmises par oral puis par écrit lors de l’admission au programme.

S’il peut arriver que des personnes ne soient pas dans la capacité ou la volonté de respecter ces règles, le personnel fixe des limites appropriées. Si les règles sont constamment ignorées, et qu’une révision des objectifs ne peut être faite, il est demandé au résident de quitter le programme (Murray & Baier, 1996, traduction libre, p.17).

En d’autres termes, il est convenu avec les patients qu’un travail est entrepris avec eux avec pour but de mettre en place des objectifs propres à chacun. Ces buts sont définis et mis en place au travers de la communication et de la transaction entre le personnel et les résidents. Une sorte de contrat est établi entre les différentes parties afin de fixer un certain nombre de règles à respecter.

Les objectifs sont dirigés dans un délai de 90 jours. Dès lors que la pathologie du patient va altérer ses perceptions, la communication et les interactions, il devra recouvrir un minimum de rationalité pour être admis. Il s’agit ici, une fois de plus de tenir compte de l’environnement interne du patient, d’être à même de le resituer dans son contexte de prise en soins, afin de poursuivre l’atteinte de ses objectifs ou de modifier ces derniers (King, 1971). Mais «bien que le personnel puisse aider, faciliter et créer des opportunités, le résident doit effectuer le travail dans l'espace et les contraintes de temps spécifié» (Murray & Baier, 1996, traduction libre, p.17).

Ce type d’approche est similaire au travail entrepris avec Mlle Amo. dans le sens où un contrat était également mis en place avec la patiente. Les entretiens formels et informels entre la patiente et le reste de l’équipe étaient tous entrepris dans le but de communiquer autour de la situation de Mlle Amo. et de l’environnement dans lequel elle évoluait et des buts ou objectifs qu’elle s’était fixés. Un cadre temporel avait également été établi afin de pouvoir

juger de l’évolution de la situation et le cas échéant de pouvoir réajuster la pertinence des buts fixés par Mlle Amo. Outre les entretiens infirmiers, les diagnostics infirmiers mis en place conjointement par l’infirmier et la patiente représentaient également un outil d’évaluation journalier, permettant de présenter des résultats écrits et clairs à la patiente, afin de témoigner de l’efficacité du plan de soins mis en place.

L’ensemble de ces stratégies de soins était inscrit dans une dynamique de communication, d’interaction et de transaction avec la patiente.

L’application du modèle théorique de King (1981) au sein de la structure à démontrer dans cette étude qu’il était possible d’obtenir des résultats positifs en termes d’atteintes des objectifs pour les résidents, bien que ces derniers soient nuancés.

Effectivement, les patients n’ont pour la plupart pas été capables d’atteindre leurs objectifs dans le cadre qui leur était donné. Pour un tiers de ces derniers, les objectifs ont été atteints au-delà des 90 jours, tandis que 28,9 % d’entre eux n’ont pas pu s’adapter à la structure et aux règles du programme. Cependant, les 110 participants ayant terminé le programme ont démontré une croissance et un développement, un processus de maturation, ainsi qu’un niveau de santé plus élevé (p. 18).

Les auteurs relèvent au cours de cette étude un fait important: «Lorsque les perceptions changent dans un sens positif ou réaliste, un sentiment positif de soi est promu» (Murray & Baier, 1996, traduction libre, p.17).

Ainsi, ils peuvent observer que les patients sont alors capables de suivre les règles et les attentes, de s'engager dans des comportements et des rôles appropriés, et de gérer le stress de façon positive au sein d'un programme et d’un espace structuré.

Mais ce qui paraît d’autant plus intéressant et ouvre la possibilité d’affirmer que la théorie de King est un choix pertinent pour ce type de programme est le constat que les patients

… peuvent avoir des interactions plus harmonieuses, des fonctions plus adaptatives, participer à des relations avec les autres, et réaliser les tâches de développement plus appropriées à l'âge [chronologique]. Ces objectifs peuvent être atteints indépendamment du diagnostic, de la durée du séjour et du nombre d'hospitalisations antérieures (p.17). L’environnement social et interne des personnes ayant participé à ce programme est un environnement qui, comme dans le cas de Mlle Amo, serait susceptible de modifier le regard des soignants sur les problématiques de la situation, et de les inciter à prendre des décisions et mettre en place des objectifs selon leurs propres perceptions, sans tenir compte de la perception propre des personnes concernées.

La décision d’appliquer la théorie de King dans ce contexte paraît par conséquent adéquate dans le sens où cette dernière place le patient au centre de sa propre prise en soins, dans l’ici

et maintenant, considérant sa vision de sa propre situation et des perspectives qu’il est en mesure de projeter.

En conclusion, les auteurs déclarent que «Le modèle de King peut être utilisé comme un cadre pour évaluer et maintenir la santé d’un système social qui aide les clients à atteindre leurs objectifs déclarés» (Murray et Baier, 1996, traduction libre, p.17).

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