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Contrairement aux universitaires de sa génération, dont la réputation était basée essentiellement sur les fonctions politiques et administratives, H. Djait a su acquérir une réputation qui a dépassé l’université et le monde universitaire pour intéresser un public plus large sur le plan international et national par sa production scientifique diversifiée. A commencer tout d’ abord par ses livres de pensée et d’histoire sur l’Islam des origines édités entre 1974 et 2012, écrits avec un style élégant, une méthodologie rigoureuse, et des idées controversées qui rompent avec tout ce qui est préconçue dans l’histoire et la civilisation arabo-musulmane. Ces différents livres se sont très vite propagés dans le monde musulman ainsi qu’occidental, ce qui s’est traduit pour certains de ses livres comme la personnalité et le devenir arabo-musulman, l’Europe et l’Islam, al-Kûfa: naissance de la ville islamique, la Grande Discorde: Religion et Politique dans l’Islam des origines ou la crise de culture islamique d’être édités plusieurs fois et traduits en plusieurs langues comme l’Arabe, le Français, l’Anglais, l’espagnol, le perse, le russe…

Outre la pensée et l’histoire, H. Djait a écrit énormément dans des revues et journaux Arabes et Français sur beaucoup de problèmesqui préoccupent l’opinion publique et surtout parmi les arabo-musulmans. Il a écrit sur la situation actuelle des musulmans en le comparant avec les autres peuples et civilisations, sur la religion et la politique, sur les intellectuels et leur rôle dans les sociétés arabo-islamique, la pensée arabo- musulmane et les lumières… Ces articles parus dans plusieurs journaux arabes comme al-Zamân irakienne publié à Londres ou al-Yam al-sâba’ publié à Paris et français comme Esprit, Revue de deux mondes… constituent selon les dires de H.

Djait un travail pédagogique qui vise la propagation de sa pensée chez un public averti qui n’est pas forcément académique. Il a écrit aussi plusieurs articles d’opinion sur l’actualité politique dans plusieurs autres journaux comme al-Quds al-Arabi ou al-‘Arab qui sont publiés à Londres sur les mutations à l’Est et le monde arabe, l’Islam religieux et l’Islam politique, sur les répercussions de la guerre du golfe sur la culture politique arabe…, H. Djait a écrit aussi dans la Presse tunisienne dont l’article le plus célèbre est l’éditorial intitulé

«Points d’ombre», paru dans Réalités en décembre 1988, un an après la prise du pouvoir par Ben ‘Alî en Tunisie. Cet article critique du régime Ben ‘Alî a entrainé la saisie du journal des kiosques et un procès à l’encontre du journal et de l’auteur de l’article. Cette réaction de la part du régime Ben ‘Alî était cruciale parce qu’elle a mis fin aux promesses mensongères du régime Ben ‘Alî qui a plaidé pour la liberté d’expression dans son fameux manifeste de 7 novembre 1987.

H. Djait n’a pas brillé sur la scène publique par ses articles de presse et de vulgarisation de sa pensée sur l’entrée du monde arabo-musulman dans la modernité, mais il a brillé également par la multitude des conférences qu’il a donné dans

plusieurs capitales arabes comme Beyrouth, Baghdâd, le Caire,

‘Amman, Riadh, Doha… et à l’Institut du Monde Arabe à Paris. Il a meublé aussi la scène culturelle de la Tunisie pendant les années 90 et les deux premières décennies du XXIème siècle par la présentation de ses livres ou les conférences qu’il donne dans la maison de culture Ibn Khadûn ou dans quelques hôtels de Tunis, Sousse et Sfax.

Actuellement H. Djait est très sollicité par les médias écrits et audio-visuels, dans la mesure où plusieurs journalistes arabes et occidentaux l’interviewent sur ses écrits, ses approches et les orientalistes, sur l’université tunisienne et les universitaires, sur l’élite et son rôle dans l’actualité du monde arabe, sur son opinion sur ce qui se passe dans le monde arabe, sur l’avenir des musulmans et essentiellement les arabes, les relations entre les arabes et le monde occidentale…

C’est vrai que H. Djait n’a pu émerger en tant qu’intellectuel dans le monde arabo-musulman qu’au milieu des années 80 et surtout pendant les années 90 à travers la traduction de ses livres par dâr al-talî’a, mais il a émergé avant en tant qu’éminent penseur et historien dans le monde occidental. C’est ainsi, qu’il a été désigné comme Professeur invité dans plusieurs universités américaines et européennes dont l’université de Mc Gill et à l’URAM (Monréal), Berkeley (Californie), l’université de Naples- Fréderic II, le collège de France et l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales EHESS (Paris).

Ce qui témoigne de la place incontestable de H. Djait dans le milieu académique français des années 70, est la préface qu’il a dédié au livre de Maurice Lombard (1904- 1965)(1). Fernand Braudel (1902- 1985) disait que M. Lombard «était le plus

(1) M. Lombard (Préface Hichem Djait), L’islam pendant sa première grandeur :VIII- XIème siècle, Paris, Flamarion, coll.

«Champs Historique», (n° 59), 1980, 280p.

brillant historien de notre génération, le seul qui fût incontestablement de la classe de Marc Bloch (1886- 1944)».

H. Djait a été aussi Professeur invité à plusieurs reprises par les universités marocaines comme l’université Mohamed V à Rabat et Hassan II à Casa Blanca.

H. Djait qui est Professeur émérite à la Faculté des Sciences Humaines et Sociales Université de Tunis, est membres de plusieurs commissions internationales, ce qui lui a permis de décerner de multiples distinctions nationales et internationales, qui lui ont été octroyées comme suit:

1989: le prix tunisien des sciences humaines 2007: le prix Sultan Ibn ‘Alî ‘Uwais pour la critique littéraire

2015: le blason d’or de l’association tuniso- méditerranéenne des études historiques, sociales et économiques

2015 (8 décembre), il est désigné personnalité culturelle arabe de l’année 2016 par la fondation arabe des études et de l’édition de Beyrouth.

2016: le Comar d’or de la création littéraire.

Plusieurs institutions universitaires et scientifiques lui ont rendu hommage dont le dernier fût organisé le 4 avril 2018 par l’Institut du Monde Arabe à Paris et l’Université de Tunis à la Faculté des Sciences Humaines et Sociales.

En guise de conclusion sur la biographie de H. Djait dans ses différents aspects, on peut dire qu’il a reçu une éducation à double piliers, d’une part le milieu aristocratique dans lequel il a vécu son enfance et reçu une formation traditionnelle en langue arabe, alimentée par une certaine modernité venue d’une abondante Production culturelle égyptienne, d’autre part,

la fréquentation du collège Sadiki, ses nombreuses lectures à la bibliothèque nationale et l’influence de quelques maîtres français lui ont permis de perfectionner sa formation en sciences humaines d’une façon générale et en langues étrangères et surtout le français.

Grâce à cette solide double formation, le jeune H. Djait avait pu poursuivre ses études à Paris pour avoir le diplôme d’agrégation et surtout pour approfondir sa formation en philosophie (Hegel), en psychanalyse (Freud, Alder, Kardiner…), en économie et sociologie (Max Weber). Le premier séjour de H.

Djait à Paris lui a permis aussi d’approfondir son savoir méthodologique. La formation multidisciplinaire et la maîtrise de la méthodologie scientifique ont permis à H. Djait dès ses premiers écrits de «révolutionner» la connaissance des arabo- musulmans sur l’histoire de l’Islam, et la place des arabo-musulmans nouvellement décolonisés par rapport à l’occident et surtout l’Europe.