• Aucun résultat trouvé

Chapitre 1 Synthèse bibliographique

1. Rappel sur l’émission acoustique

La norme AFNOR NFA 09350 [63] appelle Emission Acoustique (EA), le phénomène de libération

d'énergie sous forme d'ondes élastiques transitoires résultant des micro déplacements locaux internes au

sein d'un matériau soumis à sollicitation. On peut la rapprocher au phénomène d’activité sismique.

Plusieurs phénomènes peuvent être à l’origine d’émission, tels que :

- la relaxation de contraintes

- la propagation de fissures

- la corrosion

- les frottements

- les fuites (de liquides ou de gaz).

C’est l’analyse de ces ondes qui permet le diagnostic de l’intégrité de l’équipement, avec la localisation

des sources actives sur les différents équipements et leur criticité.

La détection est généralement réalisée par des capteurs de type piézo-électrique placés au contact de la

structure. Les capteurs sont liés par l’intermédiaire de préamplificateurs à un système d’acquisition et

de traitement des données d’émission acoustique (Figure 1-33). Le choix de l’instrumentation est dicté

principalement par les événements sources recherchés et les lois de propagation des ondes (modes,

vitesses et atténuations) observées [64].

48

Figure 1-33 Schéma du procédé d’émission acoustique

Les ondes sont modifiées lors de leur transition par des fonctions de transfert de tous les éléments

qu’elles rencontrent (essentiellement le matériau et le capteur). Il en résulte un signal final modifié,

appelé « salve » ou « hit » en anglais, différent de l’onde acoustique initiale. Les salves peuvent être

caractérisées par des paramètres de forme, des paramètres énergétiques ou des paramètres liés à leurs

spectres de fréquences [64].

Un signal d’émission acoustique ou salve, peut être caractérisé par un certain nombre de paramètres.

Les paramètres classiques : l’amplitude maximale, l’énergie, la durée du signal, le temps de montée, le

nombre de coups, sont présentés dans la Figure 1-34 :

Figure 1-34 Caractéristiques d'une salve

Capteur

Défaut

Onde

Signal

enregistré

49

D’autres paramètres peuvent également caractériser le signal, notamment des paramètres fréquentiels

(fréquence max, barycentre fréquentiel).

Les matériaux composites sont très émetteurs. J.Roget [65] liste les mécanismes source particuliers pour

ces matériaux :

- Les ruptures de fibres

- Les décohésions fibre-matrice

- Les fissurations de la matrice

- Des phénomènes plus macroscopiques (propagation de fissure)

L’émission acoustique permet avec l’aide de plusieurs capteurs de localiser la source d’émission. Cette

localisation peut alors être linéaire, bidimensionnelle voire tridimensionnelle. La méthode la plus simple

consiste à mesurer les temps d’arrivée (Δt) sur les différents capteurs. Une fois les Δt connus, la source

peut être déterminée par :

𝑉 ∆𝑡 = 𝐶𝑠𝑡 Equation 1-8

Avec V la vitesse de propagation

Un exemple de localisation est présenté dans la Figure 1-35. Les capteurs sont nommés C

1

, C

2

, C

3

, la

source S, la distance aux différents capteurs d

1

, d

2

, d

3

et ∆𝑡𝑦𝑥 la différence de temps d’arrivée d’une

même source aux capteurs C

x

, C

y

. Pour que le principe de localisation soit applicable, il faut que la

vitesse de propagation V soit constante.

50

La localisation de la source revient à déterminer l’intersection de l’hyperbole I et II. Suivant la précision

et l’utilisation, différentes configurations existent : les mailles triangulaires, carré, losange, équilatéral

centré, quinconce à 4 capteurs,…

L’émission acoustique est une méthode utilisée dans de nombreux domaines comme la caractérisation

de matériaux (déformation plastique, mécanique de la rupture, fatigue, corrosion,…), la surveillance des

fabrications (suivi de soudage, rupture d’outils en usinage,…), l’examen non destructif (contrôle des

capacités sous pression (métallique), qualifications des récipients en composites, …), la surveillance en

service (détection de fuite, diagnostic de machine,…) et pour d’autres applications diverses

(Surveillance médicale, géosismique,…).

En particulier, l’émission acoustique est utilisée dans l’industrie afin de tester l’intégrité mécanique de

certains composants comme les citernes et les tuyaux en composite. Cela donne même sujet à des normes

afin de pouvoir généraliser, homogénéiser et comparer les résultats entre eux. Le code CARP

(Committee on Acoustic Emission from Reinforced Plastics) et les normes ASTM E1118 [66] et E1067

[67] traitent de ce procédé de tests. Celles-ci précisent le principe de placement des capteurs, la

description du matériel, la mesure de la caractérisation et de l’atténuation des signaux, les performances

requises pour l’instrumentation, la calibration, etc. Les critères du code CARP sont empiriques et

reposent sur des calculs statistiques à partir de milliers d’expériences. Les chargements à réaliser

tiennent compte des différents effets (Kaiser et Felicity) et sont normalisés suivant les caractéristiques

de la citerne (caractéristiques de chargement, présence de vide, ..).

L’hypothèse qu’un phénomène mécanique précis va créer un signal particulier est la base de l’étude de

l’émission acoustique. A partir de ce postulat, l’identification par émission acoustique des différents

dommages mécaniques subis par le composite (fissuration de la résine, rupture de l’interface, rupture de

fibres,…) a été réalisé. Une des premières approches était de se concentrer sur la distribution en

amplitude des signaux. Dans la thèse de Xio-Lu Gong, il a été tenté de relier un type d’endommagement

et son évolution au sein du matériau avec un modèle phénoménologique de la distribution d’amplitude

[68]. Ainsi par le biais de différents essais (traction transversale, éprouvette Double Cantilever Beam

(DCB) pour essai en mode I et traction longitudinale), différents mécanismes d’endommagement seront

provoqués (microfissuration de la résine, coalescence des microfissures, rupture de l’interface, ruptures

des fibres). Les essais sont suivis en continu en parallèle par de l’émission acoustique permettant de

mettre en lumière une corrélation entre le mode d’endommagement et la distribution en amplitude. Par

exemple pour le cas de la microfissuration de la résine, celle-ci est favorisée lors de l’essai de traction

51

transversale et de d’essai en mode I DCB. L’endommagement est confirmé par des observations au

MEB.

Un modèle phénoménologique basé sur la distribution des amplitudes d’EA correspondant à chaque

type de mécanisme d’endommagement a été proposé (Figure 1-36).

Figure 1-36 Modèle de distribution en amplitude des différents mécanismes proposé par X-L. Gong [68]

Une autre distribution connue est celle réalisée par S. Barré & M.L. Benzeggagh [69]. Par l’étude

d’endommagement et de mécanisme de rupture de thermoplastiques renforcés de fibres courtes en

traction et en fatigue, ils ont pu ainsi déterminer un modèle en émission acoustique en distribution

d’amplitudes. Par études croisées de matériaux divers, (longueur de fibre, diamètre de fibre, qualité

d’adhésion,...) différents mécanismes d’endommagement sont activés suivant les essais (traction,

fatigue) et observés par MEB. L’enregistrement de la distribution en amplitude durant les essais permet

alors d’attribuer des plages d’amplitude à des mécanismes d’endommagement. Par exemple en

comparant deux matériaux en traction (A avec une adhésion forte et B avec une adhésion faible), la

plage d’amplitude 60-65 dB a pu être identifiée comme celle correspondant à la rupture d’interface. En

effet le matériau B qui possède une faible adhésion présente un nombre d’évènements acoustiques de

cette plage beaucoup plus importante que le matériau A. Le modèle suivant à donc été proposé (Figure

1-37).

52

Figure 1-37 Modèle de distribution en amplitude des différents mécanismes proposé par S. Barré et al [69]

L’utilisation de ce type de modèle a ainsi pu être effectuée par d’autres chercheurs afin d’identifier des

mécanismes d’endommagement lors de différents essais. Ainsi M.L. Benzeggagh & S. Benmedakhene

[70] ont utilisé le modèle développé par S. Barré et al [69] pour aider à identifier les mécanismes

d’endommagement d’un matériau composite fibres de verre polypropylène après des essais de choc

Charpy.

Aujourd’hui grâce à l'amélioration des techniques d'acquisition et d'analyse de traitement de signal, il

est maintenant possible de conserver plus d'informations à partir des signaux enregistrés. Ainsi, il est

possible de déterminer les signatures acoustiques spécifiques des phénomènes physiques observés.

Différentes études récentes montrent l’utilisation de ce type de technique. Cette partie sera décrite de

manière plus détaillé dans le chapitre 3.

On a pu voir la capacité de l’émission acoustique à la détection d’endommagement mécanique des

composites. Il semble donc possible de détecter les conséquences de la corrosion des composites comme

par exemple la corrosion de la résine thermodurcissable, des fibres de verre, des couches d’entoilage

entre le liner anti-corrosion et le renfort en SVR.

Documents relatifs