• Aucun résultat trouvé

Rôle pour la richesse spécifique et la diversité génétique

1.3. Impacts à l’échelle du paysage

1.3.2. Rôle du niveau de diversité d’habitats lié à l’agriculture pour la biodiversité

1.3.2.1. Rôle pour la richesse spécifique et la diversité génétique

D’une façon générale, il existe une relation positive entre la diversité spécifique, potentiellement reliée à la longueur des chaînes trophiques, et l’hétérogénéité des habitats, mesurée à des échelles locales ou paysagères, voire régionales (Weibull & Ostman, 2003; Weibull et al., 2003; Benton et al., 2003;

Eggleton et al., 2005; Purtauf et al., 2005; Bennett et al., 2006; Herzon & O'Hara, 2007). L’hétérogé-néité du paysage modifie les chaînes trophiques parce qu’elle induit une hétérogéL’hétérogé-néité de la distribu-tion spatiale des ressources, que ce soit par la croissance des plantes et la composidistribu-tion chimique des

tissus végétaux, par la présence de refuges et dans l’émission de signaux, qui génèrent de l’hétérogé-néité dans le comportement et le mouvement des animaux (Pastor et al., 1997). La composition de la mosaïque basée sur la proportion des différents éléments influence donc fortement la composition des communautés (Aviron et al., 2005). L’hétérogénéité ou la diversité des éléments est souvent reliée positivement à la richesse des communautés. L’effet de la complexité est mesuré en comparant la diversité des communautés, à plusieurs niveaux, dans des unités paysagères plus ou moins complexes.

Les comparaisons sont faites à différentes échelles spatiales afin d’identifier des échelles de réponses, différentes selon les groupes taxonomiques. Dans les études qui hiérarchisent les effets des paramètres spatiaux, la configuration spatiale a souvent un pouvoir explicatif moins fort que la composition.

Hétérogénéité de la mosaïque paysagère

La complexité et la diversité des habitats au sein du paysage permettent d’augmenter la richesse spécifique (Freemark et al., 2002). La place des prairies et du pourcentage de leur surface au sein d’une matrice paysagère permet le maintien d’une richesse spécifique élevée (Eriksson et al., 2002;

Cousins et al., 2003; Gibon, 2005). En effet, les systèmes prairiaux, et en particulier ceux qui sont peu productifs, sont les plus riches en espèces (voir section 1.2.2.). Ces systèmes peu productifs, traditionnellement localisés dans des régions où l’intensification agricole est peu marquée (Bakker &

Berendse, 1999; Hodgson et al., 2005; Poschold et al., 2005) sont en décroissance importante en Europe, soit par intensification, soit à l’inverse par abandon (Bakker & Berendse, 1999; Strijker, 2005 ; la Figure 1.3-3 montre l’exemple des pelouses calcaires en Allemagne). Ce type de prairies (semi-natural grasslands), à forte valeur patrimoniale, est donc l’objet d’importantes mesures (et d’études) de conservation et de restauration.

Figure 1.3-3. Diminution des surfaces de prairies calcaires entre 1900 et 2000, dans la région administrative de Bade-Wurtemberg en Allemagne (d’après Poschold et al., 2005).

Lavelle et al. (soumis) ont montré que pour des organismes peu mobiles tels que les vers de terre l’hétérogénéité de la matrice agricole a un effet sur la densité des populations (Figure 1.3-4). Les paramètres de structure et de qualité de la mosaïque paysagère qui influent sur cette densité varient selon les caractéristiques écologiques des espèces : c’est soit l’abondance des prairies permanentes fauchées ou non, soit la densité des lisières, soit la diversité des occupations du sol, soit la taille des agrégats pour les parcelles cultivées.

A l’échelle du paysage, Andrèn (1994) a montré par une approche théorique que la structure et la composition de la matrice paysagère influencent la dynamique des populations. En particulier, la diversité des habitats, au niveau du contexte paysager, influence la structure des communautés, ce résultat varie en fonction de l’échelle et du groupe taxonomique considéré (Clergeau et al., 2001). La persistance de nombreuses espèces d’oiseaux dans les paysages agricoles dépend de la présence d’habitats favorables au sein de la matrice paysagère. En particulier, la disponibilité en sites de nidification peut être un facteur clé pour expliquer la structure des communautés (Söderström et al., 2003). En règle générale, la diversité de la végétation des éléments semi-naturels favorise la biodiversité (Woodhouse et al., 2005). Une analyse des données de l’observatoire français des oiseaux communs en zone rurale pour la période 2001-2005 montre que l’instabilité temporelle des populations dans les paysages homogènes d’agriculture intensive pourrait être limitée par la présence d’habitats diversifiés adjacents aux parcelles (Devictor & Jiguet, 2007).

0 2.5

Figure 1.3-4. Réponses linéaires et non linéaires des densités de vers de terre européens à la composition du paysage (d’après Lavelle et al., soumis).

La densité des populations de Lumbricus rubellus augmente avec la diversité des usages des sols >1,25 ; O.

lactaeum n’est présent que quand la densité de lisière est >50 m/ha ; A. rosea disparaît si le taux de prairies de fauche dépasse 75%; la densité d’A. longa augmente avec la distance à la prairie la plus proche; la densité de A.

caliginosa montre une grande variabilité quand la contiguïté des cultures est >1,1. La densité des population est alors déterminée par la qualité du milieu.

L’hétérogénéité du paysage est également un facteur essentiel dans l’occupation de l’espace des ongulés sauvages ; c’est même le principal facteur explicatif de la variabilité de surface des domaines vitaux du Cerf-mulet (Kie et al., 2002). Les haies, couplées avec des parcelles de superficie réduite, constituent des éléments refuges pour les ongulés sauvages et des corridors de déplacement (e.g.

Coulon et al., 2004, 2006). Couplées à des jachères fixes "environnement et faune sauvage", elles favorisent l’accueil des Chevreuils par exemple (Havet, 2002). La présence de bosquets disséminés dans la matrice agricole favorise les espèces forestières, comme certaines populations de Chevreuil (Hewison et al., 2001).

Une première cause de baisse de diversité spécifique à l’échelle paysage/territoire/région est donc le changement d’utilisation des terres qui peut substituer des espaces à communautés pauvres en espèces à des espaces à communautés plus riches (soit par intensification, soit par abandon, cf. ci-dessous). De plus, dans le cas d’une intensification de l’agriculture (fertilisation importante à base d’engrais de synthèse, drainage profond, fauche intensive [plusieurs coupes par an], fauche précoce dans l’année), l’hétérogénéité spatiale tend à diminuer à toutes les échelles, de la parcelle aux régions en passant par le paysage (Benton et al., 2003), conduisant à une baisse de diversité à l’échelle de ce dernier.

La diminution des espèces rares et spécialistes de certains habitats et une prédominance des espèces les plus communes à caractère généraliste (Millan et al., 2003) sont observées. De la même façon, les travaux de Krauss et ses collaborateurs (2004) n’ont pas montré de corrélation positive entre la diversité du paysage et le nombre total d’espèces végétales à l’échelle de 250 m, mais seulement une corrélation positive pour les espèces spécialistes. A une échelle plus grossière, de quelques dizaines de km², les conclusions sont dépendantes de la durée des suivis. En effet, plus le suivi est long, plus l’effet de l’extensification des pratiques est visible et positif sur la diversité végétale ; des suivis sur des temps courts après extensification ne permettant pas de mettre en évidence des effets discernables aisément.

Par ailleurs, la fragmentation des réseaux de haies et la disparition des prairies réduisent fortement les disponibilités de zones de repos, d’alimentation et de reproduction à l’échelle des paysages, ce qui a des implications importantes sur l’architecture des réseaux trophiques et affecte considérablement les populations de prédateurs (mammifères carnivores, rapaces). Le déclin du Lièvre d’Europe (Lepus europaeus) serait dû à la perte de diversité des habitats au sein des agrosystèmes et plus particulière-ment à l’augparticulière-mentation des charges de pâturage et de l’ensilage de l’herbe dans les systèmes à dominante herbagère (Hutchings & Harris, 1996). La plupart des espèces de Chauve-souris ont souffert de la disparition des sites de reproduction (vieux arbres), des sites de chasse (haies, bois, prairies), et de la réduction des populations d’insectes en raison de la destruction de ces habitats permanents et de l’usage des pesticides (Walsh & Harris, 1996; Mitchell-Jones, 1998). Les chauves-souris sont en effet très exigeantes en terme de paysage car de nombreuses espèces répugnent à traverser de vastes espaces découverts. Leurs routes de vol suivent généralement les éléments linéaires du paysage : haies, lisières de bosquet, cours d'eau… où elles s'abritent du vent et peut-être des prédateurs, tout en collectant des proies pour certaines espèces (Limpens & Kapteyn, 1991; Verboom

& Huitema, 1997; Verboom & Spoelstra, 1999; Serra-Cobo et al., 2000; Downs & Racey, 2006). Les communautés de petits mammifères (rongeurs et insectivores) tendent à se banaliser avec l’intensifica-tion de l’agriculture. Les habitats linéaires plantés abritent des communautés de petits mammifères plus abondantes que les talus herbeux (Butet et al., 2006). De même, les habitats permanents (haies, bois, friches, prairies permanentes) hébergent des communautés plus abondantes et plus diversifiées que les parcelles de culture où le travail du sol affecte fortement la diversité des espèces et l’abondance des populations en place (Heroldova et al., 2007). Les petits rongeurs et insectivores sont plus ou moins affectés par la raréfaction des graines et des insectes (Tew et al., 1992). Par exemple, le Rat des moissons (Micromys minutus) a été particulièrement affecté par la perte des prairies et l’augmentation des céréales d’hiver (Perrow & Jowitt, 1995). De même les populations de Campagnol des champs (Microtus arvalis) ont fortement décliné en Europe avec une disparition des épisodes de pullulations dans les secteurs où une forte proportion des prairies a été convertie en cultures céréalières (Butet & Leroux, 2001; Gorman & Reynolds, 1993). Cette évolution a de fortes implications pour la conservation des populations de rapaces spécialistes prédateurs de campagnols nichant dans ces paysages agricoles ouverts à dominante prairiale (Salamolard et al., 2000; Gorman & Reynolds, 1993).

Plusieurs études sur des modèles différents ont montré que la réponse de la biodiversité à la fragmentation n’est pas linéaire et qu’il existe des seuils entraînant l’extinction des populations (Fahrig, 2003).Des études théoriques suggèrent que l’effet de la fragmentation n’est apparente que si l’habitat favorable est peu présent dans le paysage, c'est-à-dire inférieur à un seuil de 20-30% (Fahrig 1998, Flather &

Bevers 2002). Quelques travaux basés sur des données empiriques ont confirmé cette valuer autour autour de 30% (Andrèn, 1994; Andren, Delin et al. 1997). Il apparaît qu’en deçà de ce seuil une augmentation de la connectivité peut pallier les effets négatifs de la fragmentation sur la biodiversité (Fahrig and Merriam, 1985).

Le rôle de l’historique des changements de complexité paysagère explique également la présence et la résistance des espèces aux modifications de structure du paysage (Ernoult et al., 2006). En effet, le changement d’utilisation des terres et la modification des pratiques agricoles vers une plus forte intensification, depuis les années 50 en Europe, ont entraîné la diminution de la diversité végétale étant donnée la modification de la structuration des paysages (Baessler & Klotz, 2006; Pacha & Petit, 2008). Ainsi l’historique de la gestion agricole du paysage agit sur la dynamique de la diversité végétale. En effet, la pérennité des pratiques agricoles, sur des séquences temporelles de l’ordre du siècle, favorisent la richesse spécifique et la présence des espèces spécialistes au sein des prairies (Gustavsson et al., 2007) en comparaison à de séquences courtes caractérisées par une alternance régulière des pratiques agricoles (par exemple alternance régulière du pâturage et de la fauche).

Les groupes taxonomiques ont des échelles de réponses variables à l’hétérogénéité du paysage, notamment en fonction de leur capacité de déplacement et de leur besoin en types de milieux différents. En règle générale, l’hétérogénéité du paysage est un facteur important pour expliquer la richesse en espèces pour les groupes "mobiles", l’effet étant plus fort dans les parcelles cultivées que dans les prairies permanentes.

Cette variabilité des réponses observées peut en partie être comprise en utilisant une classification des espèces en fonction de leur place dans les chaînes trophiques et de leur degré de spécialisation. Les plantes répondent principalement à des changements à échelle fine de l’ordre du mètre à quelques dizaines de mètres, les herbivores en majorité à des modifications opérant à échelle intermédiaire de l’ordre de la centaine de mètres par exemple pour les insectes herbivores, et les prédateurs à des échelles variables selon leur degré de spécialisation. Parmi ces derniers, les espèces spécialistes sont plus sensibles aux échelles fines, en relation

avec la distribution spatio-temporelle de leur ressource, et les généralistes aux échelles larges pouvant aller jusqu’à plusieurs kilomètres pour les rapaces par exemple.

Cette distinction par niveau trophique est intéressante pour raisonner la gestion des composantes de la biodiversité dans les systèmes agricoles : les organismes participant à la production sont soit des plantes, soit des herbivores et peuvent donc être gérés principalement à des échelles fines ou intermédiaires ; les prédateurs qui répondent aux modifications du paysage sur toute une gamme d’échelles différentes, ne sont qu’indirectement liés à la production agricole, en tant qu’auxiliaires ou déprédateurs.

Conclusions

La littérature montre qu’il existe une relation positive entre la diversité spécifique et l’hétérogénéité des habitats, mesurée à des échelles locales, paysagères, voire régionales. Au niveau du paysage, les éléments peu représentés et les zones non agricoles jouent un rôle prédominant de refuge et d’habitat et permettent ainsi l’augmentation de la biodiversité. L’importance des couverts prairiaux et notamment des prairies peu productives dans la composition du paysage est un facteur favorable à la biodiversité.

Les transformations récentes des paysages dans les régions d’agriculture intensive, en favorisant les espaces ouverts aux dépens des éléments semi-naturels plus ou moins boisés, ont entraîné une baisse de la biodiversité. L’homogénéisation du paysage conduit à une banalisation des communautés par diminution des espèces rares et augmentation des espèces communes. Cette dynamique dépend de l’histoire du paysage et en particulier de la vitesse des changements.

Hétérogénéité des habitats : le rôle des éléments non productifs dans et autour de la parcelle

La confusion/synonymie de terminologie existant entre field margins, field boundaries et fields trips a été levée par (Marshall & Smith, 1987 ; Figure 1.3-5).

De nombreuses études (Mineau & McLaughlin, 1996; Cousins & Eriksson, 2001; Sullivan & Sullivan, 2006; Smart et al., 2006) soulignent le rôle important pour la biodiversité d’habitats peu représentés et des éléments non productifs comme refuges (bords de routes, îlots de végétation au milieu des parcelles…). Les effets des bords de champs sur la diversité végétale et animale sont dépendants de l’interaction entre plusieurs facteurs qui ne sont pas toujours étudiés séparément dans la littérature. Les principaux facteurs interagissant sont la gestion de la bordure, l’utilisation agricole des parcelles cultivées, le type de système de production et la structuration du paysage (Le Cœur et al., 2002). Les pratiques culturales réalisées à l’intérieur même des parcelles cultivées exercent des actions de répression indirectes (dérive d’herbicides, flux de nitrate) sur la diversité des espèces de la bordure des champs (De Snoo, 1999). Les bords de champ au sens large incluent les haies, talus, fossés, bords herbeux, bords de cours d’eau, chemins ruraux, bermes de routes... Ils participent à l’hétérogénéité au

Figure 1.3-. Echelles spatiales de réponse caractéristiques des organismes de différents groupes trophiques en fonction de leur degré de spécialisation (d’après Tscharntke et al., 2005).

Les cercles pleins représentent des réponses très fortement probables, les cercles vides des réponses possibles mais peu fréquentes.

niveau du paysage à la fois par la diversité de leur forme, de leur composition floristique et de leur gestion associée aux activités agricoles (Le Coeur et al., 2002).

Néanmoins, un consensus transparaît sur le rôle refuge joué par les bords de champs pour favoriser la diversité végétale (Le Cœur et al., 2002; Marshall & Moonen, 2002; Marshall, 2005; Cousins, 2006) et augmenter la diversité des arthropodes auxiliaires, carabiques, syrphes et araignées (Marshall, 2004).

Ils sont nécessaires pour les orthoptères en zone de grande culture. Les chemins creux augmentent la richesse des espèces forestières au niveau du paysage (Deckers et al., 2005) et les chemins enherbés celle des insectes floricoles (Dover et al., 2000). Les bordures de champs peuvent être gérées afin d’avoir un rôle conservatoire pour des espèces végétales menacées (Marshall & Moonen, 2002). Ce rôle refuge est plus ou moins efficace selon la nature des espèces végétales en fonction de leur caractère généraliste ou spécialiste ainsi que de leur pouvoir compétitif (Krauss et al., 2004; Cousins, 2006). Les bords de champ favorisent une augmentation de la richesse spécifique et de l’abondance des espèces végétales car elles sont considérées comme source de propagules pour les habitats et parcelles cultivées contigus (Marshall et al., 2006). Il s’agit là d’un exemple de fonctionnement des populations en système source-puits entre deux éléments du paysage (Lepš, 2005). En particulier, la diversité des communautés d’adventices à l’intérieur même des parcelles cultivées est aussi influencée par la structure paysagère. Gabriel et al. (2006), en comparant des paysages plus ou moins marqués par l’activité agricole, montrent que le nombre d’espèces (en particulier les espèces dicotylédones) est très relié à la complexité du paysage, et ces auteurs avancent l’hypothèse d’une contribution des plantes des bordures au maintien de la diversité spécifique.

Même en absence de phytocides comme dans le cas de parcelles conduites en agriculture biologique, le morcellement du paysage (réduction de la taille des parcelles, présence de haie) semble indispensable à un maintien d’une forte diversité biologique (van Elsen, 2000).

Contrairement aux espèces végétales et aux arthropodes épigés, le rôle des bords de champ comme zone refuge pour les organismes du sol a été peu étudié, de même que l’effet de la fragmentation du milieu (Rantalainen, 2005). Cependant, les bords de champ, les haies peuvent constituer des refuges pour les organismes du sol comme cela a été montré pour les collemboles (Frampton, 2002) et les vers de terre (Brown, 1999). Par exemple, Werff et al. (1998) ont mesuré la vitesse de recolonisation d’un champ par les vers de terre à partir d’un champ contigu : cette vitesse est de 2 m /an pendant 4 ans puis de 11 m /an les années suivantes ; l’apport d’amendement organique (fumier) ne permet pas d’accélérer la recolonisation, alors que la culture en place ainsi que la direction des rangs ont une influence significative. Toutefois, le plus fréquemment, la recolonisation d’un champ par des effectifs importants de vers de terre est liée au développement des populations résiduelles à

Figure 1.3-5. Définition des bords de champ (Marshall &

Smith, 1987).

l’intérieur de ce champ plus qu'à une recolonisation de l’extérieur par les bordures de ce champ. Ceci est sans doute lié aux plus faibles capacités de dispersion active de ces organismes qui ne peuvent pas rapidement coloniser un milieu d’où ils sont absents même s’il sont présents et abondants dans des parcelles voisines (Hedlund et al., 2004). De plus, l’importance des modes de dissémination passifs (par exemple par la terre transportée sous les roues des tracteurs ou les sabots du bétail) a également été soulignée par Marinissen (1992b) dans des sols de polders hollandais. Il a été également montré pour les vers de terre que les champs en culture continue peuvent être plus favorables que le milieu constitué par les bords de champs (Lagerlöf et al., 2002). Les espèces de vers endogés telles que Aporectodea caliginosa et Alollobophora chlorotica établissent de fortes densités en milieu agricole dans la mesure où le travail du sol est modéré et des apports organiques (résidus de culture ou fumier) sont réalisés. Alors que les espèces épigées Lumbricus rubellus et L. castaneus sont plus dépendantes des zones non cultivées (Lagerlöf et al., 2002).

Les effets cités précédemment sont fonction de l’intensité et de la nature des pratiques agricoles subies (Poschlod & Bonn, 1998; Mineau & McLaughlin, 1996; Juttersonke & Arlt, 2002), de la nature des cultures contiguës (Hovd & Skogen, 2005) et de la composition floristique de la bordure et/ou des habitats en connexion (Le Cœur et al., 2002). La diversité végétale des bordures de champs est plus élevée dans des territoires diversifiés en termes de système de production (Tarmi et al., 2002) et plus faible lorsque les pratiques sont intensives (Smart et al., 2002). Une gestion intensive (fauche fré-quente et apport fréquent d’herbicides) sur les bords de champs diminue la diversité des lépidoptères, des hétéroptères. La gestion qui favorise le plus la diversité des carabes et celle des insectes floricoles (papillons, apoïdés...) est la non intervention ou la fauche tardive, après floraison.

Cependant, une gestion "allégée" des bordures dans un but de préservation de la biodiversité peut être ressentie comme une pratique à risque suivant le type de culture par les agriculteurs (cf. Chapitre 3).

Conclusions. Les éléments non productifs inclus dans, ou jouxtant, les parcelles jouent un rôle clé pour la biodiversité dans les paysages agricoles en tant qu’habitat, corridor pour les mouvements ou refuge saisonnier pour de nombreuses espèces. Ils augmentent la diversité végétale et la diversité des insectes auxiliaires. Leur rôle a été moins étudié pour la faune du sol, mais il semblerait qu’ils soient des refuges pour certaines espèces comme des collemboles et des vers de terre.

Leur impact sur la biodiversité dépend de leur nature, qui peut aller d’une simple bande enherbée à un

Leur impact sur la biodiversité dépend de leur nature, qui peut aller d’une simple bande enherbée à un