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Chapitre V Discussion

5.4 Rôle des NGC pour le contrôle postural

Le modèle physiopathologique de ces trois désordres des NGC ne s’articule pas encore parfaitement bien et soulève plusieurs questions. Grâce aux résultats démontrés par nos recherches, cette thèse apporte un regard nouveau sur le rôle de la circuiterie des NGC pour le contrôle de la posture. Étonnamment, malgré que la physiopathologie responsable des mouvements involontaires soit opposée (hyperkinétique versus hypokinétique), il semble que les troubles du mouvement volontaire et automatique de ces différentes pathologies soient similaires.

Il est clairement établi que le dysfonctionnement des NGC est caractérisé par la présence de mouvements involontaires. Le modèle populaire de l’anatomie fonctionnelle des NGC dans les désordres du mouvement explique que les mouvements involontaires sont associés avec un trouble de l’inhibition des signaux de sortie ce qui résulte en une modification de l’activité motrice (Mink et al., 2001). Les symptômes involontaires typiques de la maladie de Parkinson sont hypokinétiques (tremblement de repos) causés par une hyperinhibition des signaux de sortie. Par opposition, les symptômes involontaires la MH ainsi que ceux du SGT sont plutôt hyperkinétiques (chorée, ballisme et tic respectivement) causés par une hypoinhibition des signaux de sortie.

Malgré cette opposition dans les mouvements involontaires, ces trois pathologies possèdent plusieurs similarités au niveau des symptômes sensorimoteurs. Premièrement, l’amplitude et la vitesse d’oscillation sont supérieures à celles des sujets contrôles dans les tâches posturales

statiques et dynamiques (Armand et al., 2009; Salomonczyk 2010; Lemay et al., 2008-2010; Blanchet et al., 2013b and c). L’amplitude de l’oscillation est supérieure même au stade précoce de la MH (Blanchet et al., 2013 chapitre IV; Salomonczyk et al., 2010). L’oscillation latérale est particulièrement affectée (Tian et al., 1992; Koller et Trimble 1985; van Wegen et al., 2001; Horak et al., 2005; Mitchell et al., 1995; Blanchet et al., 2013 chapitre III). Deuxièmement, elles démontrent une capacité inférieure à maintenir les limites maximales de la stabilité posturale (Mancini et al., 2008; Suarez et al., 2009; Blanchet et al., 2013 chapitre III; Blanchet et al., 2013 chapitre IV). Troisièmement, plusieurs similarités sont également rapportées dans les tâches de locomotion: l’akinésie (difficultés à initier la marche) et la bradykinésie (lenteur de mouvement) caractérisée par une hypokinésie marquée (ex : faire de petits pas) ainsi qu’une cadence inférieure (Delval et al., 2007; Koller et Trimble 1985; Jacobs et al., 2009; Delval et al., 2006-2009; Vissier et Bloem 2005).

Finalement, bien que les anormalités d’origine sensorielle ne figurent pas dans la description clinique de ces pathologies, des études neurophysiologiques suggèrent que la dégénérescence des circuits des NGC provoque divers déficits dans le traitement et l’intégration des informations sensorielles (Abbuzzese et Berardelli 2003; Vissier et Bloem 2005). Les troubles posturaux observés dans les dysfonctions des NGC sont associés aux déficits dans le traitement et dans l’intégration des informations sensorielles multimodales (Czechowicz et al., 2011; Tian et al., 1992; Blanchet et al., 2013 chapitre II; Blanchet et al., 2013 chapitre III; Vissier and Bloem 2005). De plus, une hypothèse récente, appuyée par plusieurs études, soutient que les déficits dans le traitement et l’intégration des signaux sensoriels seraient spécifiques aux informations proprioceptives pour le contrôle postural (Konczak et al., 2009; Carpenter and Bloem 2011; Nallegowda et al., 2004; Mancini et al., 2008; Tagliabue et al., 2009; Vissier and Bloem 2005; Blanchet et al 2013a and b). Les déficits de traitement et d’intégration spécifique aux informations proprioceptives dans les désordres des NGC provoquent des anomalies dans la construction de la représentation interne des limites de la stabilité ainsi qu’une perception erronée de l’axe vertical et de la position des différents segments corporelles.

Malgré les différences physiopathologiques qui distinguent ces différentes affections neurologiques, elles possèdent comme dénominateur commun : un désordre au niveau du striatum (pré-synaptique dans le cas de la maladie de Parkinson via la dégénération des projections dopaminergiques de la substance noir par compacta) qui affecte la cascade séquentielle de traitement en aval. Le striatum projette ces informations dans la voie directe et indirecte des NGC et pourrait expliquer la coexistence entre les désordres du mouvement hyperkinétiques et hypokinétique (Pradhan et al., 2010; Berardelli et al., 1999). Qui plus est, la majorité des cellules nerveuses de cette structure possèdent la capacité d’intégrer différentes sources d’informations sensorielles (visuelle, somatosensorielle et auditif) chez le chat (Nagy et al., 2006). Cela pourrait expliquer une partie des déficits de traitement et d’intégration sensorielle multimodale observée. Ainsi, les troubles sensorimoteurs posturaux communs dans les désordres des NGC pourraient être causés entre autres par la projection des signaux erronés du striatum vers le tronc cérébral via les voies directe et indirecte.

En somme, bien que les mouvements involontaires soient très différents dans les désordres des NGC, les déficits sensorimoteurs du contrôle du mouvement global sont très similaires. De plus, nous pouvons observer cette même tendance dans les mouvements fins (Abbuzzese et Berardelli 2003). Le traitement et l’intégration des afférences sont des facteurs critiques dans le contrôle moteur et de nombreuses d’études démontrent une association entre les deux (Mancini et al., 2008; Salomonczyk et al., 2010; Tagliabue et al., 2009; Tian 1991; Jacobs et Horak 2007). Plus la transformation sensorimotrice sera complexe, plus le mouvement sera affecté (Lemay et al., 2005). Certains chercheurs mentionnent que les déficits de l’intégration sensorielle déficiente accentueraient les troubles de la posture (Vissier et Bloem 2005; Horak et al., 2005; Tagliabue et al., 2009; Mitchell et al., 1995; Abbruzzese et Berardelli 2003). Est- ce que les troubles de traitements et d’intégration sensoriels accentuent les déficits du contrôle du mouvement et de la posture où ils en sont la cause? Plusieurs études devront encore être effectuées pour répondre clairement à cette question. Toutefois, un portrait de plus en plus étoffé permet de voir un lien commun dans les désordres du mouvement volontaire et automatique dans ces pathologies et supportent l’importance du rôle des NGC dans contrôle de la posture ainsi que dans le traitement et l’intégration des informations sensorielles particulièrement, pour les signaux proprioceptifs.