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Rôle direct de LEKTI sur la mise en place d’un biais Th2 dans le syndrome de

Partie 3 : Etude de la réponse immunitaire chez les patients atteints du syndrome de

II- Rôle direct de LEKTI sur la mise en place d’un biais Th2 dans le syndrome de

Nos résultats ont démontré que l’épiderme déficient pour LEKTI jouait un rôle intrinsèque clé dans le développement de l’inflammation cutanée de type allergique et ce en absence de lymphocytes. Néanmoins, ces observations n’excluent pas le rôle du système immunitaire adaptatif dans la progression de la maladie. En effet, les patients SN développent de nombreuses manifestations allergiques (eczéma atopique, rhinite allergique et asthme allergique) accompagnées d’un taux élevé d’IgE sériques, ce qui suggère une réponse immunitaire de type Th2 exacerbée. Nous avons ainsi entrepris l’étude de la polarisation de la réponse T chez une cohorte de 10 patients atteints du SN. Nos résultats préliminaires ont permis de mettre en évidence une surexpression transcriptionnelle, de la cytokine Th2 IL4, par les PBMCs (Résultats, Partie 3). Ces résultats seront complétés par une étude du

profil de sécrétion cytokinique des lymphocytes CD4+ isolés et activés par un

stimulus non spécifique (anti-CD3/anti-CD28). Néanmoins, ces données suggèrent que l’absence de LEKTI pourrait favoriser le biais Th2 de manière plus ou moins direct. D’une part, il pourrait s’agir d’une anomalie secondaire à la réponse allergique cutanée, encore appelé « marche atopique ». Cette notion suggère qu’une sensibilisation répétée à travers la peau favoriserait le développement d’une hypersensibilité au niveau d’autres organes notamment les poumons. D’autre part, le biais Th2 et l’hypersensibilité systémique pourrait être une conséquence plus directe de l’effet de l’absence de LEKTI sur le système immunitaire.

LEKTI est essentiellement exprimée au niveau des tissus en contact avec l’environnement tels que la peau et les muqueuses. En plus de cette localisation qui semble évidente au regard de son rôle dans le maintient de la fonction de barrière et la régulation des signaux pro-inflammatoires, LEKTI est exprimé par les corpuscules de Hassal du thymus (HCs) (70). Il s’agit d’une structure kératinisée qui exprime un ensemble de gènes communs aux kératinocytes de l’épiderme, tel que des kallikréines (386) ou des cytokeratines (387). Le thymus n’est pourtant pas un organe destiné à rencontrer des agents exogènes, ni un organe soumis à des réactions inflammatoires. Le rôle de LEKTI au niveau de cette structure particulière reste donc à élucider.

Cependant, de manière intéressante, nous avons pu observer que PAR2 était exprimé par les HCs thymique, de même que TSLP (360). De plus, il semblerait que les KLK5 et KLK14 soient également exprimées dans le thymus (388). Ces protéases sont des cibles de LEKTI (22, 389) et ont la capacité d’activer le récepteur PAR2 (217). La présence de tous ces acteurs dans les corpuscules de Hassal suggère que la cascade moléculaire que nous avons identifiée pourrait donc être également mis en jeu dans cet organes.

En condition physiologique, TSLP exprimée par les HCs aurait un rôle dans le développement des lymphocytes T régulateurs (Treg) des cellules essentielles au contrôle de la réponse immunitaire. Ces cellules sont notament capables de moduler la réponse T aux allergènes. TSLP active les cellules dendritiques proches des HCs

qui vont ensuite induire la différenciation des Treg Foxp3+ (360). Peut-on imaginer

qu’une production incontrôlée de TSLP puisse affecter le mécanisme de

différenciation de Treg Foxp3+ ?

Une anomalie de la fonction ou du nombre des Treg Foxp3+ dans le SN coïnciderait

avec celles observées dans la dermatite atopique. En effet, bien que le nombre de ces cellules circulantes soit augmenté chez les patients DA (161), le nombre des

Treg Foxp3+ est diminué dans les lésions de DA (160). De plus, une étude récente a

montré que chez les patients DA présentant un taux d’IgE élevé, il existe une population de Treg circulant possédant des propriétés pro-Th2 (162). Ces cellules normalement destinées à moduler la réponse immunitaire joueraient alors un rôle inverse à leur fonction initiale en sécrétant des molécules favorisant la réponse allergique. Il serait ainsi intéressant de déterminer si cette population particulière de Treg est également présente chez les patients SN et participe au développement du phénotype atopique. La génération d’une telle population de Treg pourrait être un défaut intrinsèque au SN, indépendant des stimuli environnementaux. On pourrait donc proposer un rôle de LEKTI dans la régulation de l’homéostasie thymique et des lymphocytes Treg.

Un autre scénario pourrait être envisagé. Dans la medulla thymique, les cellules dendritiques (DCs) en contact avec les HCs produisant TSLP pourraient acquérir les mêmes propriétés que les DCs activées par TSLP dans un autre tissu. Est-ce qu’une fois en contact avec les thymocytes, ces DCs activées pourraient induire une prédisposition vers une différenciation Th2 ? Cette hypothèse suppose que LEKTI puisse réguler l’expression de OX40L à la surface des DCs thymique via l’induction

de TSLP de la même manière que dans la peau. Ainsi la formation du complexe OX40/OX40L prédisposerait les thymocytes à se différencier en Th2.

Enfin, le rôle de LEKTI dans le thymus pourrait également être indépendant de TSLP. Son rôle dans l’homéostasie du système immunitaire pourrait dépendre de l’inhibition d’autres protéases. D’autres protéases pourraient jouer un rôle équivalent de celui de la KLK5 et être exprimées dans les corpuscules de Hassal telles que les KLK6 (386) et 14, ou de protéases à sérine thymique comme TSSP (Thymus- Specific Serine Protease) (390). Cependant la TSSP est une protéase exprimée au niveau des cellules épithéliales du cortex (390). LEKTI étant exprimé par les HC localisés dans la medulla, la rencontre de l’inhibiteur avec cette protéase suppose une diffusion de ces deux partenaires potentiels. Ainsi d’autres cibles potentielles de LEKTI dans le thymus restent à identifier.

L’action de LEKTI dans le thymus reste à élucider, car jusqu’à présent nous ne savons pas si le microenvironnement Th2 mis en place au niveau de la peau est suffisant pour induire un désordre systémique. Ainsi, il sera nécessaire de déterminer

si le thymus SPINK5-/- participe au développement de la réponse inflammatoire. Ceci

nous permettra d’évaluer la contribution respective de la peau et du thymus dans le développement des maladies allergiques récurrentes du SN.

Pour répondre à cette question, deux modèles devront être développés : des greffes

de peau Spink5-/- sur des souris de même fond génétique et immunocompétentes et

des greffes de thymus Spink5-/- sur des souris nude athymiques. Que ce soit les

souris ayant reçu une greffe de peau ou celles ayant reçu une greffe de thymus, les études réalisées seront les mêmes :

- Mesure de la concentration sérique en IgE ; - Polarisation de la réponse T ;

- Etude du phénotype cutanée ; - Test de la sensibilité bronchique.

De cette façon, nous déterminerons si la peau et/ou le thymus sont responsables du développement de l’allergie au niveau systémique.

Ces résultats permettront une meilleure compréhension de la physiopathologie du SN mais également de la dermatite atopique dont la contribution des deux aspects, cutané et immunologique, reste encore à éclaircir.