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La capacité de migrer activement à travers l’organisme est une des propriétés fonda-mentales des cellules. De l’embryogénèse à la métastase tumorale, certaines cellules sont capables de se déplacer à travers le corps afin de remplir des missions bien parti-culières. Dans un organisme sain il s’agit de maintenir l’homéostasie de celui-ci. Mais si la fonction migratoire est altérée, des cellules cancéreuses peuvent devenir agres-sives et des métastases peuvent se disséminer dans l’organisme. Lors de la migra-tion, les cellules subissent d’importantes déformations lorsqu’elles doivent se faufiler à travers des constrictions très étroites. Puisque la mécanique est très impliquée dans le processus migratoire, nous pouvons nous demander : qu’est-ce qu’une modélisation numérique de la mécanique de la migration peut nous apprendre sur ce phénomène ? Nous avons par conséquent choisi d’implémenter des modèles en éléments finis afin d’explorer différents aspects de la migration.

Si nous nous intéressons de plus près à la cellule, deux structures sont impliquées de manière très importante dans le processus de migration : le noyau et le cytosque-lette. Le noyau est à la fois le plus gros et le plus rigide des organelles de la cellule. Lorsque la cellule migre et doit se déformer, il est un frein au mouvement car il se dé-forme moins facilement que le cytoplasme. À l’inverse, le cytosquelette est le moteur de la migration. C’est en effet la polymérisation de filaments d’actine et la présence de fibres contractiles d’acto-myosine qui vont permettre à la cellule de créer et rétracter des protrusions et de contracter des parties du cytoplasme. Outre la contraction et la polymérisation, le troisième pilier de la migration est la formation d’adhésions entre la cellule et son environnement. Si elle n’est pas ancrée, la cellule ne fait que pulser sur place, sans générer de mouvement net. Ces trois piliers sont présents de manière plus ou moins importante selon le mode de migration choisi par la cellule, puisque cette dernière peut adapter son comportement à son environnement. Elle peut alors passer d’un mode migratoire à un autre en favorisant l’un ou l’autre de ces piliers.

Dans cette thèse, nous nous efforcerons de répondre à trois questions autour de la migration cellulaire. Soulevées dans la littérature expérimentale, ces interrogations se

prêtent particulièrement bien à une étude numérique :

1. Quel est le rôle de la plasticité du noyau dans la migration confinée ?

2. 1. Par quel mécanisme une cellule peut-elle avancer lors de la migration confinée non-adhésive appelée ‘chimneying’ ?

3. Sur un substrat microstructuré avec des piliers, comment le noyau de la cellule peut-il se déformer et se placer dans les creux ?

Chacune de ces questions nous a permis de développer un point de modélisation pertinent. Tous les modèles développés reposent cependant sur un même socle, et c’est bien là la puissance de cet outil : un modèle de base qui nous permet d’étudier trois problèmes différents, et qui pourrait être décliné pour de nombreux autres. Les briques constituant ce socle sont (i) la loi constitutive du matériau, (ii) les déforma-tions actives dans la cellule et (iii) la synchronisation entre ces déformadéforma-tions et les forces extérieurs appliquées à la cellule.

Le premier chapitre présente un modèle visco-élasto-plastique du noyau de la cel-lule. Un noyau plastique faciliterait en effet la migration à travers des constrictions multiples en gardant une déformation résiduelle après la première constriction. Afin de supprimer tout interférence possible entre le comportement du noyau et les défor-mations actives du cytoplasme, ce modèle a été testé dans deux cas purement passifs. Nous avons d’abord simulé un test d’écrasement du noyau isolé du reste de la cellule. Une fois le comportement plastique de notre modèle validé, nous avons implémenté un modèle de cellule complète, avec un cytoplasme viscoélastique. Nous avons en-suite simulé un test de perfusion, dans lequel la cellule passe à travers une constric-tion de taille sub-nucléaire sous l’acconstric-tion d’un flux liquide. Deux tailles de constricconstric-tions ont été testées : 5 et 1µm de diamètre (sachant que le noyau a un diamètre de 8 µm).

En ajustant les paramètres mécaniques du modèle, nous avons pu tester deux lignées cellulaires : une lignée "contrôle" et une lignée où la lamina est affaiblie, rendant ainsi le noyau moins rigide. Dans la constriction la plus large, le noyau ne se déforme pas suffisamment pour observer une déformation plastique. Cette plasticité est cependant observée avec la constriction de 1 micron. Il est intéressant de noter qu’elle disparaît lorsque la lamina est affaiblie. Il semblerait alors que le cytoplasme vienne "tirer" sur le noyau pour inverser la déformation plastique. Il y a donc là une interaction mécanique fondamentale entre le cytoplasme et le noyau

Le deuxième chapitre aborde un mode migratoire appelé chimneying. Dans ce cas, la cellule confinée migre sans adhérer à son environnement. Ce mode est également particulier puisqu’il n’y a aucune polymérisation de filaments d’actine ; la seule dé-formation active est une contraction à l’arrière de la cellule. Une hypothèse générale-ment avancée pour expliquer le chimneying est le couplage entre un comportegénérale-ment

poroélastique du cytoplasme et la friction contre les parois environnantes. En effet, les flux de fluide interstitiel dans le cytoplasme semblent avoir un rôle majeur lors de la migration confinée. Nous choisissons alors une description poroélastique du cyto-plasme afin de rendre compte de ces flux et de leur influence mécanique. Par ailleurs, si la cellule ne forme pas d’adhésions, elle doit cependant s’ancrer d’une manière ou d’une autre pour ne pas osciller sur place. L’hypothèse du chimneying est donc qu’en poussant contre les parois qui la confinent, la cellule génère des forces de friction suff-isantes pour ne pas glisser. Le modèle implémenté repose donc sur la loi de comporte-ment poroélastique du cytoplasme, la contraction active de l’arrière de la cellule et la force de friction. Si, pour des raisons numériques, nous avons ici choisi un modèle 1D, la force de ce modèle réside dans l’auto-synchronisation entre la friction et les défor-mations actives. En effet, dans les travaux précédant cette thèse, la synchronisation était pilotée manuelle et nous avons donc franchi un pas ici vers un modèle plus au-tonome. Par ce modèle, nous montrons donc mécaniquement que la simple contrac-tion arrière, couplée à la friccontrac-tion et à la poroélasticité suffisent à créer un mouvement net vers l’avant.

Enfin, dans le troisième chapitre, nous nous sommes intéressés à l’étalement de la cellule sur un substrat microstructuré. Afin d’étudier la migration cellulaire, de nombreux dispositifs micro-fluidiques existent. Des substrats microstructurés avec des piliers ont récemment été développés afin d’étudier le processus de déformation du noyau pendant la phase d’étalement qui précède la migration. Lorsque la cellule s’étale sur les piliers, on observe une déformation du noyau qui vient alors se placer dans les creux entre les piliers. La question posée est alors celle du mécanisme à l’origine de cette déformation du noyau. Dans les cellules étalées, il y a une forte con-centration d’actine autour des piliers ainsi qu’au-dessus du noyau. Le noyau pourrait donc être tiré par les fibres d’actine vers les piliers ou bien poussé par la contraction du dôme d’actine qui le surplombe. Le modèle développé dans ce chapitre nous per-met également de valider que la gravité n’est pas responsable de la déformation du noyau. Les briques qui composent ce modèle sont : une loi de comportement visco-hyperélastique de type Mooney-Rivlin, une contraction active dans chacune des zones à tester et les forces extérieures (i.e. la force d’étalement et celle de contact). Notre modèle montre alors que les filaments qui tirent le noyau vers les piliers sont bien plus puissants que le dôme d’actine.

Nous montrons ici que notre modèle de base peut se décliner selon différents cas à simuler. Sa versatilité est un atout puisque cela permet de le confronter à de nom-breuses expériences. Ici, nous avons voulu explorer trois situations très différentes. L’étape suivante consisterait à synthétiser nos résultats en un seul modèle qui pourrait alors aborder la migration cellulaire de manière très concrète. Couplé avec une ap-proche plus moléculaire, cela permettrait d’avoir une vision plus ample de ce

proces-sus. Un tel modèle permettrait de mieux comprendre les phénomènes multiphysiques qui régissent la migration cellulaire, et d’appliquer ces connaissances dans un cadre médical. Dans le cas des métastases tumorales, on pourrait alors imaginer dévelop-per de nouveaux types de médicaments qui cibleraient les propriétés mécaniques des cellules ou de leur environnement.

List of Figures

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Modélisation de la mécanique de la cellule et son noyau dans le cadre de la

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