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7. Les maires sortants parviennent-ils à acheter leur réélection? Le cycle électoral et son

8.1 Résumé de la thèse

L’idée centrale de cette thèse a été de mettre en relation le comportement de l’élu avec celui de l’électeur dans une perspective d’échange. Il y a échange lorsqu’un acteur utilise la richesse qu’il contrôle afin d’orienter la conduite d’un autre acteur dans le sens de ses intérêts. Tout cela, bien sûr, dans le but de lui faire faire quelque chose qu’il n’aurait pas fait autrement. L’objectif de la thèse se résume comme suit. D’abord, j’ai cherché à savoir si les élus municipaux du Québec ont utilisé les dépenses et la taxation afin d’inciter les électeurs à voter pour eux. Ensuite, j’ai cherché à savoir si les électeurs ont effectivement voté pour le maire sortant qui a mis en œuvre un cycle électoral des dépenses et de la taxation.

Un cycle électoral était présent si dans les deux années précédant une élection générale, en comparaison avec les deux premières années d’un mandat électif, les dépenses sont plus importantes ou le taux de taxation est plus faible. L’année au cours de laquelle se déroulera l’élection se nomme l’année électorale. L’année qui précède l’année où aura lieu le scrutin se nomme l’année préélectorale. J’ai testé la présence d’un tel cycle dans les municipalités québécoises lors du mandat 2006-2009. J’ai ensuite testé son effet sur la réélection des maires sortants lors de l’élection de 2009. Fait intéressant, les résultats empiriques ont démontré la présence d’un cycle électoral et aussi, un effet de ce cycle sur la réélection des maires sortants.

En lien avec ces résultats, j’ai présenté un cadre théorique original inspiré par le modèle du citoyen-candidat qui permet de prédire sous quelles conditions le cycle électoral aura un effet sur la réélection du candidat sortant. Ce cadre théorique met en relation la capacité de sanction de l’électeur médian avec les anticipations du politicien sortant à propos de cette même capacité de sanction. En premier lieu, j’ai soutenu que le cycle électoral ne peut pas expliquer la réélection d’un candidat sortant lorsque l’électorat est aveuglé. Dans ce cas de figure, l’électeur médian n’est pas en mesure de distinguer les bénéfices qu’il tire de la présence d’un cycle électoral.

En second lieu, j’ai soutenu que le cycle électoral favorise toujours la réélection du candidat sortant lorsque l’électeur médian est myope. Dans ces conditions, l’électeur médian a la capacité de percevoir les bénéfices qu’ils retirent d’un cycle électoral. Toutefois, il ne perçoit pas l’ensemble des coûts reliés au comportement de l’élu sortant.

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L’illusion fiscale dont l’électeur médian souffre va l’amener à voter pour le sortant qui lui offre des bénéfices immédiats même si cela se fait au détriment de son bien-être futur. En troisième lieu, j’ai soutenu que le cycle électoral favorise également la réélection du candidat sortant lorsque l’électeur médian est parfaitement rationnel et que le politicien sortant met en œuvre un cycle électoral en n’affectant pas la gestion financière du gouvernement. Selon ce schéma, l’électeur médian rationnel est en mesure de percevoir à la fois les bénéfices et l’ensemble des coûts liés aux comportements du sortant. Des bénéfices qui sont supérieurs aux coûts inciteront l’électeur médian à voter pour le sortant qui a mis en œuvre un cycle électoral.

En quatrième lieu, j’ai soutenu que le cycle électoral n’a pas d’effet sur la réélection pour un électeur médian parfaitement rationnel lorsque le sortant affecte la santé financière du gouvernement. Dans ce cas de figure, les coûts annulent les bénéfices d’un cycle électoral. J’ai proposé un « indice des ressources disponibles pour s’informer » pour mesure la capacité de sanction de l’électeur et une « mesure du bilan financier des municipalités » pour mesurer les anticipations du politicien afin de tester ce cadre théorique. Du point de vue empirique, j’ai testé douze hypothèses qui seront pour la plupart en partie confirmées.

Les quatre premières hypothèses concernaient directement la présence d’un cycle électoral. Il a été démontré que les élus mettent bel et bien en œuvre un cycle électoral des dépenses et de la taxation, et ce, peu importe la taille de la municipalité. Plus précisément, 1) les dépenses ont augmenté fortement en année électorale et au contraire, ont diminué légèrement en année préélectorale, et ce, toujours en comparaison avec les deux premières années d’un mandat électif. 2) Le taux de taxation n’a pas significativement changé en année électorale mais a diminué plus rapidement en année préélectorale. 3) Le cycle a été plus important dans les villes de plus de 20 000 habitants. 4) Il y a eu une différence dans la direction et l’intensité du cycle électoral selon que le maire sortant a été élu, défait, élu sans opposition ou encore s’il n’a pas sollicité un autre mandat. À l’instar du comportement général découvert, le taux de taxation a diminué en année électorale seulement pour les maires sortants qui ont remporté une élection contestée en 2009.

Les quatre hypothèses suivantes concernaient l’effet du cycle électoral sur les résultats électoraux des maires sortants. 5) Le cycle électoral des dépenses a expliqué en partie la réélection sans opposition des maires sortants. Plus précisément, une augmentation de

145 dépenses en année préélectorale a favorisé l’élection sans opposition des maires sortants. Le comportement efficace à la réélection sans opposition a été montré différent du comportement moyen observé dans les municipalités québécoises. De plus, un changement dans les dépenses en année électorale n’a pas eu d’effet sur la réélection sans opposition. 6) Il en est de même pour un changement dans le taux taxation en année électorale et préélectorale. Ces deux variations dans le taux de taxation n’étaient pas statistiquement liées à l’élection sans opposition.

Le cycle électoral des dépenses et de la taxation a eu un effet sur le pourcentage de vote obtenu par le maire sortant. Il a également eu un effet sur la probabilité de sa réélection. 7) Plus précisément, une diminution du taux de taxation en année électorale a favorisé la réélection du maire sortant. 8) Une diminution des dépenses en année préélectorale a favorisé également la réélection du maire sortant. Ce résultat significatif a constitué une anomalie par rapport à l’hypothèse mais correspond au comportement moyen découvert dans le changement des dépenses qui ont diminué significativement en année préélectorale. Toutefois, une augmentation des dépenses en année électorale et une diminution de la taxation en année préélectorale n’ont pas eu d’effet sur la réélection des maires sortants.

Les quatre dernières hypothèses étaient en lien avec le cadre théorique qui mettait en relation la capacité de sanction de l’électeur médian et les anticipations du politicien à propos de cette même capacité. Ce cadre théorique avait pour but de spécifier les conditions où le cycle électoral aurait un effet sur les résultats de l’élection. Le cadre théorique a été entièrement confirmé empiriquement.

En effet, 9) les tests empiriques ont montré que le cycle électoral est sans effet sur la réélection du maire sortant dans les municipalités qui ont obtenu un score de zéro sur l’indice des ressources disponibles pour s’informer. 10) Le cycle électoral des dépenses et de la taxation a eu un effet sur la réélection des maires sortants pour les municipalités ayant obtenu un seul point sur l’indice des ressources disponibles pour s‘informer. 11) Le cycle électoral de la taxation a eu un effet sur la réélection pour les municipalités qui ont obtenu deux points ou plus sur l’indice des ressources disponibles pour s’informer et qui ont présenté un bilan financier positif au cours de leur mandat. 12) Le cycle électoral a été sans effet sur la réélection pour les municipalités qui ont obtenu deux points ou plus sur l’indice des ressources disponibles pour s’informer et ayant présenté un bilan financier négatif au cours de leur mandat

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