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3. Résultats

3.4 Résumé des principaux résultats

La plainte d’insomnie est perçue par les médecins comme un ressenti subjectif du patient, de manque ou de mauvais sommeil, dont l’aspect physique est parfois mis en avant. Pourtant, ils considèrent que l’insomnie est souvent réactionnelle et rapportent la plainte d’insomnie à des problèmes anxio-dépressifs, une souffrance psychique ou un stress associés.

Bien qu’évoquant peu leur rôle de premier recours, ils reconnaissent que l’insomnie chronique est une problématique complexe, parfois difficile à identifier et à individualiser car fréquemment abordée en fin de consultation. Conscients de l’importance de la caractériser, ils détaillent pourtant insuffisamment la définition de l’insomnie chronique : ils ne s’accordent pas tous sur sa durée, et évoquent peu son retentissement diurne. Quant à la physiopathologie, les médecins admettent leur méconnaissance voire leur ignorance des mécanismes de l’insomnie.

Concernant le diagnostic de l’insomnie chronique, rares sont ceux qui proposent une consultation dédiée. Ils reconnaissent pourtant le rôle essentiel de l’interrogatoire pour caractériser l’insomnie. Selon les médecins, l’interrogatoire est plus ou moins détaillé : objectiver la plainte, décrire le sommeil, rechercher des facteurs environnementaux, déclenchants et favorisants. Les médecins ne croient pas beaucoup aux outils diagnostiques, qu’ils trouvent peu utiles en pratique. L’agenda du sommeil, dont l’intérêt est reconnu par certains n’est jamais réalisé et les questionnaires sont considérés comme peu adaptés en pratique.

L’examen clinique n’est quant à lui pas systématique selon les médecins, certains s’attachant tout de même à rechercher une pathologie somatique associée. La recherche de trouble organique du sommeil n’est pas toujours réalisée, et concerne surtout le SAOS, le syndrome des jambes sans repos étant peu évoqué. Les examens complémentaires ne sont pas systématiques, soit en cas d’orientation clinique soit afin de rechercher un SAOS par une polysomnographie.

Les référentiels concernant l’insomnie sont méconnus voire ignorés. Un seul médecin cite les recommandations de la HAS mais aucun ne s’y réfère, préférant valoriser leur expérience auprès des patients.

Concernant la prise en charge non médicamenteuse, les médecins participants proposent spontanément des conseils d’hygiène du sommeil en première intention, bien qu’ils ne les rappellent pas systématiquement chez des patients déjà traités. Parmi les alternatives thérapeutiques utilisées,

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la sophrologie est évoquée mais reste peu connue, l’acupuncture encore moins, mais l’hypnose se montre plus convaincante. Par contre, les TCC sont rarement proposées ou seulement dans certaines situations particulières. Par ailleurs, certains effectuent un soutien psychologique et une aide à la réflexion personnelle.

Le recours au spécialiste est variable selon les praticiens, qui reconnaissent ignorer le rôle précis des médecins du sommeil. De plus, leur accessibilité étant limitée, les médecins adressent plutôt à d’autres spécialistes comme les pneumologues ou les ORL en cas de suspicion de SAOS. Concernant les psychologues, psychothérapeutes et psychiatres, ils sont rarement proposés, du fait notamment d’une réticence au mot « psy » de la part de certains patients, et seulement dans certains cas particuliers ou à la demande du patient.

Selon les médecins, le suivi est variable, certains revoyant les patients systématiquement ou de manière régulière afin d’amorcer une prise en charge au long cours.

Alors qu’il n’était pas prévu de l’aborder, la prise en charge médicamenteuse reste omniprésente et les médecins reconnaissent y avoir trop souvent recours. S’ils admettent renouveler systématiquement et rarement réévaluer leurs ordonnances, certains tentent de limiter leurs prescriptions d’hypnotiques. Conscients des risques liés aux benzodiazépines et apparentés, ils cherchent à informer et pour certains à sevrer progressivement les patients, malgré les freins liés à la dépendance ou à l’opposition de certains patients. Les médecins peuvent également proposer d’autres thérapeutiques médicamenteuses, comme la phytothérapie, souvent évoquée. Des alternatives comme l’homéopathie sont parfois mentionnées mais rarement employées.

Face à cette plainte d’insomnie, l’ensemble des généralistes ressentent des difficultés dans leur pratique. Ainsi, des médecins perçoivent parfois une opposition de la part de certains patients. Mais la principale limite ressentie par l’ensemble des médecins concerne le manque de formation, initiale comme continue, responsable d’un manque de connaissances, que ce soit dans la physiopathologie, la démarche diagnostique ou les thérapeutiques dont les TCC. Par ailleurs, certains médecins estiment manquer de temps, reconnaissant que prescrire permet un gain de temps même s’il s’agit d’une solution de facilité. L’insuffisance de relais entre professionnels représente aussi un frein pour certains médecins, qui regrettent le manque de spécialistes du sommeil. Le fait que les TCC ne soient pas prises en charge se révèle aussi une limite pour quelques médecins.

Partant de ce constat, les médecins proposent des pistes afin d’améliorer la prise en charge. Ainsi, ils sont en demande de formations continues adaptées à la pratique de médecine générale. En parallèle, des médecins rappellent la nécessité d’éduquer les patients et de les informer. Pour cela, certains praticiens estiment qu’il est important de trouver du temps. Une modification des pratiques, moins axée vers les traitements médicamenteux, notamment en lien avec une meilleure formation et information apparait aussi comme un levier possible.

Faisant écho au manque de visibilité des professionnels du sommeil, mais à peine évoqué, un réseau sommeil est présenté comme une voie d’amélioration possible. Des médecins rappellent également l’importance de la conviction du thérapeute et du patient dans la prise en charge thérapeutique. Un seul médecin mentionne une augmentation de la rémunération des généralistes, sans que cette proposition ne soit relayée par ses collègues. Enfin, le déremboursement des hypnotiques est aussi une piste proposée par un médecin pour limiter leur prescription.

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