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III. Modélisation couplée hydrodynamique/biogéochimique

7. Résumé de l’article

7. Résumé de l’article

L’Océan côtier, avec la proximité des fleuves, est caractérisé par d’importants apports en éléments nutritifs et matériel organique. Lieux d’une intense productivité biologique (Gregoire et al., 2004 ; Zhou et al., 2008 ; Lohrenz et al., 2008), ces régions océaniques contribuent ainsi à la transformation du matériel d’origine continental qui sera ensuite séquestré sur place ou exporté vers l’océan ouvert (Gao et Wang, 2008 ; Cai, 2011). Les variabilités naturelles des apports continentaux et de l’environnement hydrodynamique contrôlent le développement planctonique. A ces variabilités à hautes fréquences se surimposent aujourd’hui la modification anthropique des apports continentaux ainsi que le changement climatique observé (IPCC, 2007), qui peuvent aussi impacter plus ou moins directement les écosystèmes planctoniques. L’interaction entre l’ensemble de ces facteurs ayant des fréquences d’occurrence différentes va générer des liens complexes entre environnement hydrodynamique et écosystèmes. Ces relations doivent être mieux comprises qu’elles ne le sont aujourd’hui si l’on veut mieux comprendre le cycle du carbone à l’interface fleuve/océan.

Le panache du Rhône est une structure de dilution (ROFI pour Region Of Freshwater Influence, Simpson, 1997) qui dépend d’un équilibre entre la flottabilité de l’eau douce et son mélange avec les eaux marines environnantes sous l’effet du vent et des vagues. Un certain nombre de campagnes océanographiques ont documenté le fonctionnement des écosystèmes planctoniques le long du gradient de salinité (e.g. Naudin et al., 1997 ; Pujo-Pay et al., 2006). Ainsi, il a été démontré que la distribution en salinité pouvait tout aussi bien limiter ou favoriser la productivité phytoplanctonique (Naudin et al., 2001). En conditions spécifiques de vent, on observe sur le golfe du Lion la formation de lentilles d’eau dessalée qui peuvent être transportées loin de l’embouchure. De telles structures sont apparues bénéfique à la productivité biologique et au développement du phytoplancton de grande taille. Récemment, Diaz et al. (2008) émettaient l’hypothèse d’une capacité de ces lentilles à transférer du carbone organique au-delà du plateau continental. De plus, les eaux capturées au sein de ces lentilles s’enrichissent en phosphate par rapport au nitrate en raison d’une modification progressive de la structure du réseau microbien. Par conséquent, ces lentilles joueraient un rôle fertilisateur dans une région où le déficit en phosphore par rapport à l’azote peut s’observer dès la fin de la période hivernale (Diaz et al., 2001).

7. Résumé de l’article

Le rôle de telles structures dans la transformation et le transfert de matière organique doit être déterminé de manière plus précise, afin d’évaluer leur capacité réelle à exporter la matière organique hors du plateau et donc leur impact sur le bilan de carbone sur le golfe du Lion. Dans le but d’explorer les questions précédentes, une campagne océanographique a opéré un suivi lagrangien de lentilles d’eau dessalée en mai 2006 (BIOPRHOFI). Une analyse de ces observations a d’abord été effectuée et confrontée à l’état actuel des connaissances. Elle a ainsi permis de corroborer un schéma de fonctionnement de lentille d’eau dessalée proposé par Diaz et al. (2008). La représentation de la forte productivité biologique observée au sein d’une lentille d’eau dessalée est par ailleurs un excellent exercice de modélisation réaliste. Une calibration spécifique des paramètres du modèle biogéochimique dédiée aux écosystèmes de panaches fluviaux a été proposée et validée à partir des données in situ BIOPRHOFI. La réponse des différentes communautés planctoniques à la spécificité des apports du Rhône a été prise en considération, en particulier le déséquilibre entre la quantité de phosphate et celle du nitrate et les rapports internes N:P correspondant dans les organismes phytoplanctoniques.

Par cette approche, nous avons finalement pu évaluer le rôle des communautés planctoniques sur le dépôt de carbone organique particulaire (POC) au sein du golfe du Lion. Pour cela, nous avons choisi la période du 1er avril au 15 juillet 2006. Au cours de cette période de fin de printemps marquée par des pics de débit du Rhône, la zone de dépôt du matériel organique particulaire est identifiée proche de l’embouchure du Rhône puis vers l’ouest en suivant la côte, en accord avec des observations sédimentologiques (Durrieu de Madron et al., 2000). Le dépôt moyen de POC sur l’ensemble du plateau est estimé par le modèle entre 40 et 80 mgC/m2/d. Les détritus organiques participent majoritairement au dépôt de POC (82-92%), la contribution des organismes vivants (microphytoplancton dans le modèle) restant inférieure à 17%.

Une étude de sensibilité aux apports de matière organique particulaire (POM) dans les eaux du Rhône a permis d’estimer que la contribution des apports terrestres de POC au dépôt total de POC sur le plateau du Golfe du Lion est au maximum de 17% sur la période choisie. La zone principale de dépôt du POC terrestre est localisée sur la zone du prodelta. Au contraire, une influence remarquable des processus biologiques liés à la productivité marine par le plancton est mise en évidence plus au large au sein du plateau continental (entre 60 et 80 m de profondeur). Une rétroaction entre zooplancton et contenus en matière organique particulaire dans la colonne d’eau

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pourrait expliquer un contrôle du dépôt de POC par le zooplancton : les apports de POM terrestre favoriseraient le développement d’organismes vivants. A travers le processus de prédation par les échelons trophiques zooplanctoniques, les apports de POM terrestre favoriserait la rétention de matière organique au sein du réseau trophique (Dagg et al., 2004), limitant le dépôt de POC sur le plateau du Golfe du Lion. Le dépôt serait par conséquent dépendant du développement des communautés zooplanctoniques. En favorisant le développement de phytoplancton de grande taille, les lentilles d’eau dessalée pourraient paradoxalement avoir un impact négatif sur le dépôt de POC. De la même manière, les pics de débits du Rhône augmenteraient finalement le gradient de dépôt de POC entre le prodelta et les zones du large sur le Golfe du Lion. Les éléments biogéniques du Rhône seraient alors exportés par advection au-delà du golfe du Lion vers le large et le plateau Catalan, sous forme d’organismes zooplanctoniques.