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 Chapitre V : Discussion générale et perspectives

Le travail consistait à valider l’importance de l’implantation de la culture de la canne à sucre en cycle de plantation comme étant une phase essentielle pour la culture. Il s’agissait de montrer plus particulièrement que cette étape est très sensible aux effets de températures plus fraîches qui deviennent une contrainte majeure lors de certaines extensions de la culture sur de nouveaux terrains sous contrainte.

L’originalité du travail a été tout d’abord le choix de ce thème peu étudié parce que peu pertinent jusqu’alors et ensuite la démonstration d’une part de l’effet de la température sur les processus en jeu principalement lors de la levée et, d’autre part, de la possible adaptation variétale aux contraintes thermiques rendu possible grâce à la présence à La Réunion de variétés sélectionnées pour les Hauts. Enfin, l’intérêt de ce travail réside dans la valorisation des résultats obtenus en chambres climatiques par une représentation cartographique de l’adaptation géographique des variétés à des zones de culture.

L’objectif était plus particulièrement d’évaluer l’influence des températures fraîches d’altitudes tropicales sur l’implantation de la culture de la canne à sucre. La finalité était d’exploiter les résultats phénologiques pour évaluer le potentiel de nouvelles zones de culture dans les Hauts de La Réunion. La démarche consistait à sélectionner un matériel végétal sain et homogénéisé, permettant (i) de mettre en évidence, par des tests en chambres climatiques l’effet des basses températures particulièrement pénalisantes lors du débourrement mais aussi (ii) de quantifier l’adaptation variétale à l’aide d’un modèle de représentation de la levée. Au final, un exemple de valorisation des résultats de levée par projection géographique répond à la question d’adaptation géographique des variétés et ouvre des perspectives multiples de traitement des informations obtenues.

1. Résultats et limites

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Le travail effectué sur la qualité de la bouture montre tout d’abord l’importance de ce paramètre « qualité sanitaire » pour éviter des attaques d’insectes. Les variétés sensibles peuvent subir des dégâts important qui réduisent la capacité de levée. Dans le cadre d’expérimentations sur les capacités de levée intrinsèque aux variétés, il est primordial d’identifier toute cause de non levée (insectes ou autre sources de dégâts physiques) qui pourraient fausser l’interprétation des résultats. Notre approche par l’étude de portions de tiges a permis ensuite de mettre en évidence l’irrégularité de levée (en taux et en durée) des extrémités de tiges (4 derniers bourgeons du haut et du bas). L’intérêt est croissant pour le sujet de la capacité de levée des bourgeons en fonction de leur position d’origine le long de la tige-mère (topophysie). A La Réunion pour des besoins de remplacement de plants (Caro canne, Novembre 2008) mais surtout au Brésil en condition de plantation (Guimarães de Andrade Landell et al., 2012), l’utilisation de boutures d’un seul bourgeon est à l’étude. Dans un souci d’économie de matériel végétal, la méthode de plantation en boutures traitées Plene® (Martinho et al., 2010) ou les projets en plantation de boutures prélevées (démonstration au champ lors dernier congrès ISSCT juin 2013) tendent à valoriser la bouture pour sa valeur productive (en sucre ou éthanol) ou bien sa valeur reproductive.

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L’étude de la topophysie a ainsi deux intérêts :

- Connaitre les capacités propres à une variété en écartant tout impact parasitaire qui empêcherait la variété d’exprimer ses capacités à lever,

- fournir des règles de décision aux praticiens de la plantation qui souhaitent donner au matériel végétal sa valeur optimale.

Une étude sur les teneurs en hormones antagonistes, auxines et cytokinines, dans les bourgeons selon leur position d'origine sur la tige ou selon les variétés serait nécessaire pour confirmer les hypothèses élaborées. Elle aurait pour intérêt de lever un manque de connaissance encore actuel sur le sujet.

Le développement du genre Myscanthus une graminée d’une genre voisin de la canne à sucre toutes deux appartenant au «Complexe saccharum » (Pouzet, 2011) amène, pour des besoin récents de multiplication par voie végétative à partir de bourgeons, aux mêmes questions de capacité de levée en fonction de la position du bourgeon le long de la tige-mère. Une récente étude conclue que pour cette plante ce sont les 4 bourgeons du bas de tige qui possèdent la meilleure capacité de levée (Boersma and Heaton, 2012) ce qui lève de nouvelles questions scientifiques et renforce l’intérêt d’un complément d’étude hormonale.

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Le résultat majeur de cette étude est qu’il existe un effet de la température sur le débourrement, cet effet est différent selon les variétés et d’autant plus marqué que les températures sont fraîches. Les essais à partir de boutures sélectionnées hors impact parasitaire (par exemple une sensibilité phytopathologiques) ou de dominance apicale ont permis d’atteindre des taux maximum de débourrement très élevés. Basés sur des températures maîtrisées, relevées à proximité de la source du processus ils ont permis de construire un modèle qui montre les qualités intrinsèques de certaines variétés.

La validation en condition réelle, bien que satisfaisante montre des limites dues (i) au principe même de la linéarité de l’action de la température sur une gamme restreinte, (ii) à d’éventuelles problèmes de pratiques (dessèchement des boutures plantées - non démontré) ainsi que sur la qualité des boutures d’un seul bourgeon plantées à la verticale.

L’hypothèse de linéarité retenue pour cette étude pèse lourd. Lorsque les températures prises pour référence n’appartiennent pas à la gamme dans laquelle la température à un effet linéaire sur le processus, ce dernier est mal représenté. L’utilisation de courbes en cloche, ainsi qu’une prise en compte différente des températures de la journée ou même des températures horaires constituent des pistes qui valorisent plus fidèlement l’influence des moments durant lesquels la température est en bordure ou hors de la gamme de linéarité ; ces pistes n’ont pas été développées dans cette étude.

Il existe des pistes pour améliorer la prédiction du modèle et plus particulièrement rapprocher les données prédites par ce nouveau modèle avec celles obtenues au champ. Parmi elles : travailler dans une gamme de 15°C à 19°C à proximité des températures limites basses de cette étude pour affiner

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nos connaissance sur la gamme de non linéarité de l’effet de la température (Liu et al., 1998), adopter un paramètre de mortalité, et enfin utiliser d’une population de boutures plus nombreuse. D’ores et déjà, cette méthode de sélection de variétés plus résistantes au froid est valorisable par eRcane52 pour sélectionner parmi les élites des variétés de chacune des 6 stations qui seront testées au champ sur la station d’altitude (Vue Belle II à 1000 m), cette fois sur l’ensemble des cycles de plantation et de repousses.

L’originalité des résultats obtenus provient de la présence de variétés aux comportements contrastés dont certaines adaptées aux Hauts de La Réunion comme la variété R583. Cette dernière a fait l’objet d’un travail de sélection qui a mis en valeur des qualités de vigueur dès le débourrement qui la distingue des autres variétés. Dans un travail récent, Parent et Tardieu (2012) relatent pourtant une uniformité des comportements variétaux. Ils se basent sur l’utilisation de données issues de la littérature (Campbell et al., 1998, Inman-Bamber, 1994, Mongelard and Mimura, 1972) faisant référence à des variétés anciennes (Q117, Q138, NCo376, N12 et H59.3775). La variété R583, mais aussi les variétés récentes en sélection avancée sur la station de Vue Belle II possèdent parmi leurs parents le clone hawaïen H 72.859753. Ce clone qui n’est pas planté commercialement et qui est utilisé dans de nombreux croisements actuels pourrait être à l’origine d’un apport génétique qui se traduirait par une qualité d’adaptation à basse température, avec une levée précoce, rapide, abondante et homogène (montré pour R583). Il semble pertinent de vérifier les capacités de débourrement de ce clone hawaïen ainsi que de sa descendance. Aussi les méthodes d’expérimentation et le modèle obtenu pourrait servir dans les travaux du projet Délicas (Cirad UMR PVBMT) qui visent à associer génotypage et phénotypage (Nibouche S. et al., 2010).

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Il existe un effet de la température sur les processus ultérieurs au débourrement-levée. Les développements des organes diffèrent selon les sites et selon les variétés. Dans notre étude, certaines variétés ayant levé plus rapidement que les autres conservent non seulement leur avance dans la course à la fermeture du couvert végétal mais cette avance peut éventuellement s’amplifier. Notre travail confirme l’Intérêt de se restreindre à l’acquisition de données sur la période durant laquelle se déroule le processus. Nos résultats montrent qu’il existe, dans les conditions d’expérimentation :

- un effet Génotype - un effet environnement

- une interaction génotype x environnement54.

La conservation du classement observé dans nos conditions confirme l’importance, dans nos travaux, de la phase de débourrement-levée pour des cannes à sucre plantées dans un milieu contraint par les basses températures. Ces résultats sont d’ailleurs extrapolables aux cycles d’implantation en repousse en tenant compte de la population plus grande de bourgeons. Ainsi, l’adaptation de certaines variétés dans les Hauts de La Réunion est bien liée à la capacité de ces

52 Cette technique a été transférée au cours de tests en chambre sur de nouvelles variétés en 2013.

53 H 72.8597 (backcross 1) de parents H50.4509 et H65.8425 (sources eRcane L. Barau)

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variétés à mieux valoriser les températures plus fraîches au moins dès le premier processus de débourrement impliqué dans l’installation de la plante. Si les vitesses de développement lors des processus ultérieurs ne sont pas, pour ces variétés, toujours strictement les meilleures, elles restent bien classées dans la course à la fermeture du couvert végétal.

La puissance des analyses statistiques est parfois limitée principalement par manque d’effectif. C’est le cas sur le site des Colimaçons où la grande variabilité des données selon les blocs ne peut être expliquée. Sur ce site, la différence de qualité de préparation de terrain avant plantation, bien que ne montrant pas de différence sur le plan de l’analyse chimique, peut masquer des différences de sol (structure - contact entre les boutures et la terre humide) qui ont pu engendrer des développements différents, décalées selon les plantes d’une même variété. N’ayant pas pu comparer les performances entre sites il est impossible de conclure sur les valeurs éventuellement communes des températures seuils et de l’effet de la température en général pour chacun des processus étudiés après la phase de débourrement-levée.

Les levées retardées entrainent un fonctionnement ralenti de la plante et s’amplifie au cours des processus qui procurent alors des mesures perturbées et donc les données entachées d’une trop grande variabilité. Il existe plusieurs pistes dans le protocole de mise en place des pieds à étudier, qui permettraient de ne considérer que les processus ultérieurs à la levée : (i) La sélection de pieds viables parmi les levées les plus homogènes et rapides, (ii) l’utilisation de pieds prélevés et transplantés ou de boutures classiques à 3 bourgeons plantées à l’horizontal.

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