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1-1-4- Présentation

Les voyageurs de ce corpus ne sont pas des marins de profession, ils ne sont pas non plus des scientifiques, ni des linguistes qui voudraient établir un dictionnaire des termes de marine. Ils sont des gens plutôt cultivés, jeunes ou moins jeunes, qui font un pèlerinage, un voyage qu’ils

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racontent. Simplement ils parlent de leur expérience de la mer, ressentie comme exceptionnelle et veulent la partager avec leurs lecteurs.

Au total, la partie des récits qui a trait à la navigation représente 1.124 pages sur un volume total de 6.985 pages dépouillées. Les auteurs du corpus consacrent, en moyenne, 16% de leur récit aux moments de navigation. Ce moment de leur voyage ne peut donc pas être considéré comme anodin.

Cependant, les écarts entre les auteurs sont importants. Bertrandon de la Broquière consacre 11 pages sur 275 à la partie maritime de son déplacement en 1432, alors que dans le texte de Ghillebert de Lannoy qui fait le même voyage douze ans plus tôt, 46 pages sur 178 sont relatives aux temps de traversées en Méditerranée.

En ce qui concerne Félix Fabri qui écrit en latin un récit de 1.500 pages environ divisé en neuf traités, nous avons choisi de limiter le dépouillement des occurrences de cet auteur aux navigations entre Venise et Jaffa lors de ses deux voyages, dans le premier et le troisième traité. Dans les 68 pages dédiées au récit des traversées par mer, sur les 181 pages au total de ces deux traités, plus de 1.000 occurrences ont été relevées, ce qui semble suffisant. Il n’en demeure pas moins, que les autres traités peuvent être exploités dès lors qu’ils offriraient la possibilité d’illustrer l’emploi d’un mot, de mieux comprendre sa signification, à cette époque.

38 auteurs XIIIème XIVème XVème XVIème XVIIème total

nb pages navigation 106 61 292 341 324 1124 nb pages récit 505 356 1447 2686 1991 6985 % partie navigation 21% 17% 20% 13% 16% 16% moyenne de pages des

récits par auteur 126 89 181 336 498 249

Les proportions de pages relatives à la traversée par mer sont assez proches ; les écarts par rapport à la moyenne que l’on note au XIIIème siècle et au XVème siècle sont dus à Philippe de Novare et à Félix Fabri16 qui consacrent respectivement 39% et 38% à la partie maritime de leur voyage. Au XVIème siècle, les auteurs du corpus sont plus abondants dans la relation de leur expérience outremer que dans la partie maritime qui, dès lors, devient relativement moins importante, du moins en proportion.

Au total, en ne dépouillant que la partie de récit relative au voyage par mer, on relève, pour l’ensemble des vingt-huit auteurs 10.423 occurrences pour 249 mots différents.

mots relevés total

nombre de mots 10 423

mots différents 249

nombre d'auteurs 28

Une remarque s’impose immédiatement.

16 Uniquement dans les premier et troisième traités qui seuls ont été dépouillés pour un relevé d’occurrences.

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Il apparaît que les 249 mots sont employés 10.423 fois soit en moyenne, environ, 41 fois chacun, ce qui masque des différences importantes d’autant plus que certains mots reviennent un grand nombre de fois. Il convient d’en comprendre la signification.

Il ne s’agit pas de faire une étude statistique des mots de marine employés par les différents auteurs aux différentes époques, il était cependant nécessaire d’avoir, au total, un échantillon suffisamment important de mots en appui au raisonnement.

occurrences XIIIème XIVème XVème XVIème XVIIème total nombre d'occurrences 715 776 3 298 2 806 2 828 10 423 mots différents 55 62 113 154 169 249 nombre d'auteurs 4 4 8 8 4 28 moyenne d'occurrences par

auteur 179 194 412 351 707 372 moyenne de mots différents

par auteur 14 16 14 19 42 9

Le fait qu’on ait relevé moins d’occurrences dans les textes du XIIIème siècle et dans ceux du XIVème siècle peut provenir d’une série de causes : une navigation mieux organisée, donc moins sujette à récit, un intérêt moindre des voyageurs et de leurs lecteurs pour cette partie maritime par rapport à leur croisade ou à leur découverte de la Terre Sainte, le fait que sur les quatre textes datant du XIVème

siècle, deux sont en latin médiéval et un en italien, dont la production est très riche, mais dont les seuls mots retenus sont ceux que l’on retrouve en français. En effet, les mots de marine retenus sont ceux, et uniquement ceux qui se sont trouvés, à un moment de leur vie, sous une forme ou

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une autre, en français. Toujours est-il que le nombre d’occurrences n’est pas équivalent pour chacun des siècles étudiés.

Il faut nuancer la remarque précédente par le fait que le nombre de mots différents utilisés par les auteurs du XIIIème

siècle au XVIème siècle est sensiblement le même, ce qui est une preuve complémentaire de cohérence du corpus. Ce chiffre n’évolue que dans les récits du XVIIème siècle.

Le nombre de mots différents est de 249 au total, c’est-à-dire qu’un tiers des mots relevés n’est plus utilisé au XVIIème siècle, du moins par les auteurs de ce corpus, et il convient de faire la différence entre les mots disparus et les mots qui existent encore mais ne sont pas employés par les auteurs. On peut donner l’exemple du mot huissier qui est le nom d’un bateau construit par les Vénitiens pour les croisés de la quatrième croisade, utilisés par les deux auteurs des récits de cette croisade Robert de Clari et Geoffroy de Villehardouin ; ce mot a existé au XIIIème siècle et est tombé en désuétude. En revanche, Joinville parle de plongeur et c’est le seul du corpus à en parler, et pourtant ce mot existe encore ; le fait qu’il ne soit pas utilisé dans les autres récits relève du hasard des voyages, de scènes dont les voyageurs n’ont pas été témoins et qu’ils ne peuvent donc relater. Il faudra, en conséquence, dans l’analyse des mots retenus, tenir compte de ces aléas et encore une fois se garder de prendre les chiffres d’occurrences comme des éléments statistiques.

41 occurrences total nombre d'occurrences 10 423 mots différents 249 moyenne d'utilisation 42 nombre d'auteurs 28

occurrences par auteur 372 mots différents par auteur 9

Pour revenir à la moyenne de 42 utilisations par mot, il faut tenir compte du très important écart de fréquence des mots. En effet, un mot peut n’être employé qu’une fois dans l’ensemble du corpus, par exemple le mot navigable ; en revanche le mot mer est utilisé 1.105.

Entre ces extrêmes les fréquences varient.

mots utilisés total %

total 249 de 1 à 10 152 61% de 11 à 50 68 27% de 51 à 100 12 5% de 101 à 250 8 3% de 251 à 500 3 1% plus de 500 6 2%

Sur les 152 mots les moins utilisés, 48 ne sont employés qu’une fois, dans ce corpus.

La majorité des mots n’a que peu d’occurrences, sans doute parce que chaque voyageur parle de son expérience et que chaque voyage, donc chaque récit, est différent.

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On peut cependant remarquer que certains mots sont souvent utilisés. Le tableau suivant recense les occurrences supérieures à 500 pour l’ensemble des textes.

mots relevés XIIIème XIVème XVème XVIème XVIIème total nombre d’occurrences 715 776 3 298 2 806 2 828 10 423 dont + de 500 occurrences galère 92 21 347 125 46 631 île 23 120 285 173 118 719 mer 68 86 414 310 227 1 105 nef, nave 140 83 286 131 50 690 port 55 116 341 183 237 932 vent 24 49 275 198 256 802 soit 402 475 1 948 1 120 934 4 879 56% 61% 59% 40% 33% 47%

Les mots utilisés le plus fréquemment, au nombre de six, représentent environ la moitié des occurrences. Mais ce ne sont pas n’importe quels mots :

- le mot galère est le nom des navires de pèlerins, puis on le verra, son sens change un peu, pour plutôt désigner des navires de combat. En latin, puis en italien, on parle de galea, en ancien français de galie, de galee, puis au XVIème siècle, la forme galée tombe en désuétude et est remplacée par galère. La transformation de galée en

galère s’accompagne d’un changement de sens, les

navires ne sont pas les mêmes et n’ont pas la même fonction, la galère étant plus spécialisée.

- la fréquence du mot île correspond au grand nombre d’îles, grandes ou petites, rencontrées en Méditerranée,

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entre Venise, ou Gênes et Jaffa ou Alexandrie et que les auteurs ont entrepris de signaler dans leurs récits. Ils prennent le plus souvent la peine de les nommer. En latin, la forme est insula, isola en italien et isle en ancien français qui donne île en français moderne.

- Le mot mer correspond à l’élément environnant, souvent inquiétant et n’a que peu de synonymes. Les formes de ce mot sont mare en latin et en italien, mer en français. - Le mot nef ou nave est toujours très utilisé au XIVème

siècle, un peu moins au XVème siècle. En latin, la forme de ce mot est navem, nave en italien, nave en ancien français en concurrence avec la forme nef ; on trouve même dans un texte la forme nafve.

- Le nombre d’occurrences du mot port souligne à la fois qu’il est plus facile de décrire un port, qu’une journée en mer sans problème, mais également que c’est un soulagement d’arriver sur la terre ferme, qui représente la sécurité pour ces voyageurs. Le mot latin est portum, en italien ce mot prend la forme de porto ; la forme port est dans tous les textes en français.

- Le mot vent est fréquemment employé, le plus souvent pour qualifier la navigation, il est favorable ou contraire et quelques fois, souffle en tempête. Ce mot n’a qu’une seule forme en français, vent, sa forme latine est ventum et sa forme italienne est vento.

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Tous ces mots ont la même morphologie en latin, italien et français du moyen âge, comme en français de l’époque moderne. Ils ont été considérés comme un même mot sous des formes différentes en français, latin et italien : galère [galea, galee], île [insula, isola, isle], mer [mare], nave [nef, nave], port [portum, porto], vent [ventum, vento]. C’est ainsi que le mot tempête sera repris sous sa graphie moderne, même si jusqu’au XVIIème siècle, il a la forme de tempeste. Pour la suite de l’étude, la forme actuelle des mots sera utilisée, tels qu’ils sont repris dans l’annexe intitulée « Mots relevés dans le corpus ».

Ces six mots, galère, île, mer, nef, port et vent, sont utilisés par tous les auteurs à l’exception de Robert de Clari et de Bertrandon de la Broquiere qui ne citent pas le mot vent dans leur récit.

Au total, la fréquence de ces mots reflète bien la façon dont ces voyageurs qui découvrent la navigation en Méditerranée, ont vécu leurs traversées.

Cette découverte a-t-elle été retranscrite de la même façon dans le temps du Moyen Âge, XIIIème, XIVème et XVème siècles ou durant l’époque moderne, XVIème et XVIIème siècles ? Une analyse des mots utilisés par les auteurs du corpus permettra de répondre à cette interrogation.

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1-1-5- Moyen Âge

1-1-5-1. Les auteurs de langue latine Les mots de marine relevés dans la partie navigation des récits des auteurs ayant écrit en latin sont recensés dans le tableau suivant, par auteur.

Moyen Âge

Jacques de Vérone

Nicolas de

Martoni Rochechouart Adorno Fabri total textes latins 1336 1394 1461 1470 1483 nb pages navigation 8 35 11 32 68 154 nb pages récit 139 92 48 200 181 660 % 6% 38% 23% 16% 38% 23% nombre d'occurrences 104 433 154 359 1083 2 133 nb de mots différents 22 37 29 40 55 87 occurrences non reprises 7 7 6 11 31 62

Les auteurs qui écrivent en latin consacrent plus de pages au récit de leurs traversées maritimes que l’ensemble des auteurs du corpus. Felix Fabri expose longuement ce qu’il a appris de la vie en mer, de la navigation et, seules ont été dépouillées les 181 pages de deux traités sur les neuf de l’ensemble de son texte. Nicolas de Martoni consacre une grande partie de son récit à sa navigation entre la Terre sainte et l’Italie parce que son voyage de retour a été particulièrement agité.

Ces auteurs ont utilisé 87 mots différents qui font partie du vocabulaire retenu pour 2.133 occurrences.

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Les mots non repris dans cette étude, par exemple, trochlea, poulie ou buscarinus, pirate ont été abandonnés au bénéfice d’autres mots et ne se sont pas retrouvés en français. Comme leur voyage dans le temps s’est terminé avant l’époque du premier texte du corpus, nous avons considéré que nous ne pouvions les reprendre dans cette étude.

En ce qui concerne les mots les plus employés, le tableau suivant en dresse la liste.

Moyen Âge J de Vérone N de Martoni Rochechouart Adorno Fabri total textes latins 1336 1394 1461 1470 1483 nombre d'occurrences 104 433 154 359 1083 2133 dont galea 7 5 2 7 161 182 insula 17 88 22 44 47 218 mare 24 34 21 46 128 253 navis 9 51 2 54 91 207 portum 8 80 12 57 74 231 ventum 11 17 16 19 123 186 total 76 275 75 227 624 1277 % 73% 64% 49% 63% 58% 60%

Les mots utilisés le plus fréquemment, au nombre de six, représentent plus de la moitié des occurrences. Il s’agit des mots galée, île, mer, nave, port et vent, c’est à dire les six mots les plus employés par l’ensemble des auteurs du corpus. Ce sont les mêmes mots, sous leur forme latine.

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Les cinq auteurs de langue latine, qui écrivent entre 1336 et 1470, utilisent ces six mots selon une fréquence allant de la moitié au trois quart du nombre d’occurrences totales relevées dans leurs récits. Les écarts de fréquence d’utilisation sont ici significatifs. Dans ses 11 pages consacrées à sa traversée entre Venise et Jaffa qui dure un mois, et qui ne comprend que peu d’escales en raison de la peste qui sévit en de nombreux endroits de Méditerranée orientale, Louis de Rochechouart, jeune évêque de 28 ans, parle peu de ses conditions de navigation, en revanche, il semble s’intéresser plus aux vents, qu’il s’efforce de nommer chaque fois que le vent change, ce qui explique qu’il utilise autant ces 6 mots plus conventionnels que les 23 autres mots de son vocabulaire marin. A l’opposé, Jacques de Vérone emploie les six mots du vocabulaire commun trois fois sur quatre, les 16 autres mots étant utilisés 28 fois au total parmi ces autres mots, 9 ne sont employés qu’une seule fois.

La deuxième remarque concerne le nombre de mots différents. C’est la question de savoir s’il y a un vocabulaire commun à ces cinq auteurs.

nombre de mots communs

nombre % aux 5 auteurs 12 8% à 4 auteurs 5 3% à 3 auteurs 11 8% à 2 auteurs 25 17% emploi isolé 89 63% total 142

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En fait peu de mots sont communs aux cinq auteurs ; en plus des six mots les plus fréquents, on trouve, sous leur forme latine, les mots ancre, golfe, littoral, marins, naviguer,

nef et tempête, puisque les cinq voyageurs en ont tous

essuyé au moins une.

On peut faire l’hypothèse que le grand nombre d’emplois isolés de mots correspond à des intérêts différents de chacun des voyageurs, l’un plus curieux des éléments naturels, l’autre plus intéressé par les types de navires. L’autre hypothèse est que les auteurs n’emploient pas les mêmes mots pour désigner les mêmes choses. Cela sera étudié plus loin. On peut cependant faire quelques remarques préalables.

Les textes latins datent l’un du début du XIVe siècle, écrit par un moine italien, un autre de la fin du XIVe siècle, rédigé par un notaire italien, et les trois derniers de la fin du XVe siècle, ont pour auteurs un moine allemand, un évêque français et un aristocrate flamand. La langue latine est pour tous une langue étrangère et on ignore si ces auteurs pensent directement en latin ou s’ils construisent leur récit dans leur langue maternelle en le traduisant immédiatement et directement en latin grâce à leur maitrise de la langue. Aux XIVe et XVe siècles, le latin n’est pas une langue morte, mais évolue en particulier par la proximité des langues vernaculaires et cette évolution est différente selon les zones. Dans ce corpus, à la diversité des origines s’ajoute la diversité des époques auxquelles les voyages ont été faits. Le latin n’a pas évolué de la même façon suivant les régions, la preuve en est qu’il a abouti à des langues

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différentes. A l’intérieur d’une région, il n’a cessé d’évoluer, de se transformer.

1-1-5-2. Les auteurs de langue française Les mots de marine relevés dans la partie navigation des récits des auteurs ayant écrit en ancien français sont recensés dans le tableau suivant, par auteur.

auteurs Clari Villehardouin Novare Joinville Anglure Caumont Lannoy Broquiere Lengherand total 1204 1204 1243 1248 1395 1418 1420 1432 1485 nb. pages navigation 11 23 37 35 14 44 46 11 33 254 nb. p. récit 84 136 96 189 102 136 178 275 223 1419 % 13% 17% 39% 19% 14% 32% 26% 4% 15% 18% nb. occurrences 103 126 180 306 143 441 239 77 447 2062 nb. mots différents 21 17 23 41 29 44 22 16 44 106

La partie maritime des récits de voyage des auteurs du Moyen Âge de langue française du corpus est quantitativement très variable ; Bertrandon de la Broquière consacre à son voyage maritime peu de pages, 4% de son récit alors que Philippe de Novare en parle dans 4 pages sur dix. Il est vrai que le récit de Novare n’est pas celui d’un pèlerin, mais d’un chevalier basé à Chypre qui combat pour sauvegarder les États Latins d’Orient.

Si la partie consacrée au voyage en mer présente tant de différences, alors que c’est assurément la partie la moins convenue, la moins importante d’un pèlerinage, et pour cette raison, c’est que les traversées maritimes sont chaque

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fois dissemblables, constituent une expérience unique. Cette différence de traitement constatée donne un indice supplémentaire qui tend à démontrer que la navigation procure au voyageur des émotions qu’il a besoin de raconter.

Sans reprendre les remarques faites pour les auteurs de langue latine, nous allons faire ressortir les mots les plus fréquemment utilisés dans le tableau ci-après.

auteurs Clari Villehardouin Novare Joinville Anglure Caumont Lannoy Broquiere Lengherand total 1204 1204 1243 1248 1395 1418 1420 1432 1485 nb. occurrences 103 126 180 306 143 441 239 77 447 2062 dont galée 11 8 36 37 7 2 14 11 45 171 île 2 8 6 7 11 100 15 7 35 191 mer 11 6 23 28 14 73 43 20 37 255 nef 16 35 18 71 18 83 35 1 16 293 port 9 20 21 5 23 34 68 2 77 259 total 49 77 104 148 73 292 175 41 210 1169 % 48% 61% 58% 48% 51% 66% 73% 53% 47% 57%

Dans ces textes un peu plus de la moitié des occurrences est le fait de la répétition de quelques mots qui sont les mêmes pour île, mer et port, sans doute pour les mêmes raisons. Le mot nef est plus représenté que le mot galée et cela nécessitera un développement ultérieur. En revanche, le mot vent est moins présent, il ne représente que cinq pour cent des occurrences totales dans les récits en ancien français, nous en chercherons les raisons.

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Il faut remarquer les limites de notre statistique, en effet, un auteur peut utiliser un mot fréquemment, et donc augmenter, de façon plus ou moins importante, le nombre d’occurrences de ce mot. Par exemple, Nompar de Caumont emploie, à lui seul, cent fois le mot île, plus que les huit autres auteurs réunis, sans doute parce qu’il lui semble essentiel de ponctuer sa navigation par une énumération des îles, même les plus petites, qui sont sur la route de la Terre sainte. Il faut se souvenir que la plupart des voyageurs, au moins à l’aller suivent la même route maritime et rencontrent les mêmes paysages et les mêmes îles au cours de leur cabotage.

Si l’on s’intéresse aux nombres de mots communs à plusieurs auteurs, on obtient le tableau suivant :

nombre de mots communs aux 9 auteurs 5 à 8 auteurs 1 à 7 auteurs 2 à 6 auteurs 1 à 5 auteurs 2 à 4 auteurs 12 à 3 auteurs 10 à 2 auteurs 20 emploi isolé 53 total 106

Les mots communs aux neuf voyageurs sont les mots cités comme les plus fréquents. Huit auteurs parlent des voiles, sept emploient les mots vaisseau et vent, six citent barque et cinq utilisent les mots golfe et rive.

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On peut remarquer que les emplois isolés sont comparativement moins importants chez les auteurs de langue française, un peu moins de la moitié, que chez les auteurs de langue latine, environ les deux tiers. Cela est dû, sans doute, au plus grand nombre de textes qui permet une meilleure homogénéité. D’abord, le français, langue dans laquelle ils rédigent, est leur langue maternelle ; ensuite les

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