• Aucun résultat trouvé

Résultats expérimentaux sur la cellule rainurée

CHAPITRE 4 Le régime ultime : observation de la loi en puissance 1/2

4.1 Résultats expérimentaux sur la cellule rainurée

L’expérience que nous avons menée avec la cellule à surfaces rainurées couvre 11 décades de Nombres de Rayleigh, depuis le régime purement diffusif (Nu=1), jusqu’à . La figure 4-1 représente les Nombres de Nusselt en fonction du Nombre de Rayleigh pour des Nombres de Prandtl inférieurs à 6. Nous avons aussi représenté sur cette figure, la variation des Nombres de Prandtl par rapport aux Nombres de Rayleigh. On remarque que les variations du Nombre de Ray-leigh sont effectués à Nombre de Prandtl quasiment constant.

La variation du Nombre de Nusselt présente quatre domaines bien distinct.

- En dessous de Ra=106, le seuil de convection est utilisé comme «régime test» de la

sensi-bilité de l’ensemble expérimental. En effet, pour des puissances de chauffage très faibles (quelques centaines de nanowatts) appliquées sur le flasque du bas, on observe entre flasques des différences de température inférieures à 700 µK. Au seuil de convection, le Nombre de Rayleigh critique de 4.104 est en accord avec les mesures réalisées sur nos autres cellules de même rapport d’aspect

Γ=0,5.

Si on compare les Nombres de Nusselt Nu rapportés à Ra2/7 obtenus avec les cellules à sur-faces rainurées et à surface lisse, on constate la bonne coïncidence des résultats (Figure 4-2) sur toute la gamme des Nombres de Rayleigh.

- Pour des Ra entre 3.107 et 2.1011, l’expérience montre que les Nombres de Prandtl restent proches de 0,90 ±0,25 et à la dispersion de mesures près les résultats sont indifférentiables. La couche limite thermique étant définie par son épaisseur , où h est la hauteur de la cel-lule, on vérifie que dans cette gamme de Ra, λth est au moins 1,5 fois plus épaisse que la rugosité.

Ra≈2×1011 1 10 100 1000 104 1 10 100 104 106 108 1010 1012 1014 Nu (Pr=0,7) Nu (Pr=1,1) Nu (Pr=1,5) Nu (Pr=3,5) Nu (Pr=5,7) Pr (Pr = 0,7) Pr (Pr = 1,1) Pr (Pr = 1,5) Pr (Pr = 3,5) Pr (Pr = 5,7) Nu Pr Ra pente 1/2 pente 2/7

Figure 4-1. Résultats obtenus dans la cellule à surfaces intérieures rugueuses. Nombres de Nusselt Nu, en

fonction du Nombre de Rayleigh Ra, pour différentes valeurs du Nombre de Prandtl. On note en particulier l’obtention d’un régime en loi de puissance 1/2, caractéristique du régime ultime de la convection.

Dans ces conditions, il a déjà été montré [Shen 1996] sur une gamme de Ra bien plus étroite ( ) que le transfert thermique n’est pas affecté par une rugosité noyée dans la couche limite thermique (Figure 4-6). Nos résultats confirment ce point et le valident sur une gamme bien plus étendue de Nombres de Rayleigh.

- Pour des Nombres de Rayleigh de 2.1011 à environ 2.1012, la présence de rugosité ne semble pas affecter le transfert thermique puisqu’à densité donnée, les mesures dans les deux cellu-les sont comparabcellu-les. On a alors . On note qu’une partie de ces points s’écartent significativement de la tendance Nu(Ra) constatée pour des Ra inférieurs.

Si l’on considère pour acquis le fait que la rugosité n’affecte pas ces résultats, il est alors pos-sible d’envisager une comparaison directe entre les mesures obtenues avec la cellule rainurée et celle de l’équipe de Santa Barbara [Xu 2000] et de l’équipe de l’Université de l’Oregon [Niemela 2000] (Figure 4-3). Trois observations s’imposent alors dans la gamme 107 à 6.1012 des Nombres de Ray-leigh.

• Sur deux décades de Ra, nos mesures à Pr=0,7 et Pr=1,1 se superposent à ±2% près à celle de Xu et de Niemela respectivement. L’écart en ordonnée entre ces deux séries de mesures est de 6 %. La masse volumique de l’hélium de la cellule étant relativement faible (inférieure à 14 kg/m3) une incertitude de détermination des propriétés de l’hélium peut difficilement expliquer un tel écart.

• Le Nu mesuré au Ra le plus élevé 1,4.1010 pour Pr=0,7 s’écarte nettement d’une des séries pré-cédentes pour se rapprocher de l’autre série. Compte tenu des faibles différences de température, un effet non-Boussinesq ne peut pas expliquer cet effet.

109<Ra<1011

Figure 4-2. Nu rapportés à Ra2/7 pour les cellules à surfaces lisses (Chillà-Chavanne) et rainurées. Les symboles pleins correspondent à cette seconde cellule.

0,2 0,3 0,4 106 107 108 109 1010 1011 1012 1013 Surf. Lisse 40,5 kg/m3 Surf. Lisse 37,9 kg/m3 Surf. Lisse 19 kg/m3 Surf. Lisse 17,2 kg/m3 Surf. Lisse 13,9 kg/m3 Surf. Lisse 4,69 kg/m3 Surf. Lisse 3,24 kg/m3 Surf. Lisse 1,55 kg/m3 Surf. Lisse 0,605 kg/m3 Surf. Lisse 0,128 kg/m3 Surf. Lisse 0,108 kg/m3 Surf. rain. 66,3 kg/m3, Pr=5,7 Surf. rain. 39,8 kg/m3, Pr=3,5 Surf. rain. 39,8 kg/m3, Pr=1,5 Surf. rain. 13,5 kg/m3, Pr=1,1 Surf. rain. 1,57 kg/m3, Pr=0,7 Nu/Ra 2/7 Ra 6% 275>λth>110 µm

• Les mesures réalisées à Pr=1,5 pour ne se superposent ni aux mesures pour Pr=0,7, ni à celles réalisées pour Pr=1,1. Les trois séries de mesures pour les Nombres de Prandtl de 0,7 , de 1,1 et de 1,5 semblent plutôt former une structure triangulaire ou parallélépipédique représentée sur la figure. A posteriori, on peut noter que ce caractère «parallélépipédique» de la distribution des points entre Ra=108 et 1012 est aussi présent sur les mesures de la cellule à sur-face lisse, bien que légèrement brouillé par une plus grande dispersion expérimentale (Figure 4-2).

L’explication la plus vraisemblable de ces observations est la présence d’une instabilité de l’écoulement dans cette fenêtre de Ra. Notons que le Pr ne peut expliquer le basculement d’un régime d’écoulement à un autre.

La transition laminaire-turbulente d’une couche limite est connue pour être un phénomène très sensible à l’environnement. L’observation de ces sauts de Nu pourrait ainsi être la signature de l’amorce d’une telle transition.

Ces observations peuvent être mises en parallèle avec celles de Belmonte et al. [Belmonte 1994]. Pour un Nombre de Prandtl de 0,7 et un Nombre de Rayleigh de 2.109, ces auteurs ont mis en évidence un changement de régime à partir de mesures locales de fluctuations de température. L’interprétation mise en avant par les auteurs est aussi une transition laminaire-turbulente de couche limite.

- Au dessus de Ra=2.1012, la dépendance Nu(Ra) est mesurée pour trois Nombres de Prandtl différents : Pr= 1,5, 3,5 et 5,7. Ces séries à Nombre de Prandtl constant sont obtenues avec les

den-Ra<1012 6% 0,2 0,3 0,4 106 107 108 109 1010 1011 1012 1013 Cellule rainurée (Pr=0,7) Cellule rainurée (Pr=1,1) Cellule rainurée (Pr=1,5) Cellule rainurée (Pr=3,5) Cellule rainurée (Pr=5,7) Niemela et al. (0,6<Pr<1,3) Xu et al. (Pr=4) Nu/Ra 2/7 Ra

Figure 4-3. Nu rapporté à Ra2/7 en fonction de Ra pour différentes expériences. Les points d’Oregon [Niemela 2000] sont tels que pour , et ceux de Santa Barbara [Xu 2000] vérifient Pr=4,0. Toutes les cellules présentent un rapport d’aspect de Γ=0,5.

sités de 39,8 kg/m3 (Pr= 1,5 et 3,5) et 66,3 kg/m3 (Pr= 5,7) et dans une région de température et de densité loin du point critique1. Les données peuvent être interpolées par une loi de puissance avec γ=0,505±0,010. Dans une représentation de en fonction du Nombre de Rayleigh (Figure 4-4), la dépendance de Nu(Pr) est faible (environ 13 % de variation pour 280% d’augmentation de Pr)2. Des mesures à Pr plus élevés (10,4 et 12,5) confirment que l’éventuelle dépendance en Pr est très limitée (Figure 4-7).

1. Le point le plus proche du point critique est tel que T=5,54 K et ρ=66,3 kg/m3

2. Dans nos communications de ces résultats ([Roche 2000] [Chabaud 2000]), les Nombres de Rayleigh, de Nusselt et de Prandtl étaient calculés sans faire appel à notre révision des équations de McCarty, mise en oeuvre après nos expé-riences sur la mini-cellule. Il faut toutefois noter que l’incidence de cette correction n’est pas sensible sur la détermina-tion de l’exposant γ. Nu= σ⋅Raγ Nu Ra⋅ 0,5 0,0004 0,0005 0,0006 0,0007 0,0008 0,0009 0,001 1010 1011 1012 1013 Cellule rainurée (Pr=0,7) Cellule rainurée (Pr=1,1) Cellule rainurée (Pr=1,5) Cellule rainurée (Pr=3,5) Cellule rainurée (Pr=5,7) Nu/Ra 1/2 Ra

L’exposant γ=0,505 trouvé est robuste à une inclinaison de la cellule de 4,9° et à l’application, sur le flasque inférieur, d’un chauffage ponctuel et dissymétrique. Il est intéressant de noter que l’inclinaison amé-liore le Nombre de Nusselt de 4,5% ±0,5 (Figure 4-5). Cette observation est à com-parer avec l’observation différente, rappor-tée dans le régime de turbulence dure et pour un Nombre de Prandtl comparable (approximativement 3) [Ciliberto 1996]. Dans ces conditions, une inclinaison de 10° est ainsi sans conséquence sur le transfert thermique total.