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3.4 Excitation des bases pyrimidiques uracile, thymine et cytosine en

3.4.4 Résultats : cytosine

Nous avons vu jusqu’à présent que dans certains cas, le spectre de photoélectrons en champ moyen-fort infrarouge pouvait se résumer à une transition multiphoto-nique non résonnante couplant les orbitales électromultiphoto-niques les moins liées de l’état fondamental de la molécule avec le continuum. Nous avons aussi vu que les états excités intermédiaires et particulièrement les états très excités et proches du seuil d’ionisation jouent un rôle dans le mécanisme d’ionisation (ils contribuent majori-tairement au signal de photoélectrons de l’uracile et sont visibles dans la thymine). Ces états sont potentiellement rattachables à des transitions résonantes à partir de certaines orbitales de l’état fondamental. La cytosine, par la richesse de ses confor-mères (4 totauconfor-mères contre 2 conforconfor-mères pour la thymine et 1 pour l’uracile), est la plus complexe des 3 molécules à analyser : les mesures effectuées font ressortir des effets moyens et dans le cas de la cytosine, la nature des orbitales HOMO, HOMO-1 et HOMO-2 est dépendante du conformère considéré. Il est donc très in-téressant de découvrir quelle peut être la signature en photoélectrons de la réponse de cette molécule et en quoi elle est comparable à la réponse des deux autres bases pyrimidiques.

3.4.4.1 Photoionisation et fragmentation

La cytosine présente un spectre de masse semblable aux deux autres molécules avec toujours une fragmentation principale par perte de HCNO avec la particularité de perdre un fragment H2CNO en grande quantité (68 et 67 uma) (figure3.27). Cela peut s’expliquer par la tautomérisation forte de cette molécule qui se traduit par la migration d’un atome d’hydrogène entre le groupement NH2, un atome d’azote du cycle de la molécule et l’atome d’oxygène (figure 3.28). Malgré ses similitudes avec les deux autres, ce spectre est plus riche : à basse intensité on observe toujours un pic à 95 uma, et un autre à 83 uma en plus de fragments à 68 et 67 uma. Le signal à 95 uma correspond à la perte du groupement NH2 et celui à 83 uma la perte de HCNH.

On remarque que le rapport du signal d’ion parent sur le signal de fragment n’est pas constant en fonction de l’intensité laser contrairement à ce que l’on a pu observer dans l’uracile et dans une moindre mesure dans la thymine. Il vaut 2.65 à basse intensité et de l’ordre de 1.7 à la plus haute intensité considérée en comparant avec les deux fragments principaux.

0 20 40 60 80 100 120 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 m/q Signal normalisé

Figure 3.27 – Spectres de masse de la cytosine sous excitation infrarouge à Δτ=25

fs aux intensités IIR = 1.25 × 1013W/cm2 (noir), IIR = 1.1 × 1013W/cm2 (rouge), IIR= 1.0 × 1013W/cm2 (bleu) et IIR = 8.8 × 1012W/cm2 (vert). Les spectres ont été normalisés en fonction de l’intensité du signal d’ion parent à IIR=1.25×1013W/cm2.

Figure 3.28 – Illustration des liaisons brisées dans les processus de fragmentation

de la cytosine. Les masses entre parenthèses correspondent aux fragments ioniques restant après la fragmentation. Les flèches noires indique les tautomérisations par changement de localisation de l’atome d’hydrogène ce qui conduit notamment à une perte de HCNO ou H2CNO lors de la fragmentation.

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champ fort infrarouge 133

0 20 40 60 80 100 120 0 0.5 1 1.5 2 m/q Signal Normalisé

Figure 3.29 – Spectres de masse de la cytosine pour différentes durées d’impulsion : Δτ=25 fs (noir), Δτ=40 fs(rouge),Δτ=55 fs (bleu) et Δτ=70 fs (vert) à l’intensité

IIR = 7.5 × 1012W/cm2. Chaque spectre a été normalisé par rapport au signal de l’ion parent.

L’évolution du signal en fonction de la durée d’impulsion est très similaire aux deux autres molécules. On observe aussi une inversion dans le rapport du signal d’ion parent sur le signal de fragments (figure 3.29). On retrouve l’apparition du pic à 28 uma correspondant à HCNH+ mais aussi des signaux à 12, 14 et 16 uma ne pouvant être que les ions C+, N+ et O+.

3.4.4.2 Spectroscopie de photoélectrons : résultats

Spectre de photoélectrons en fonction de l’intensité laser : Les images obtenues pour la cytosine et présentées sur la figure 3.30 mettent clairement en évidence une structure dans la distribution de vitesse des électrons au niveau de chaque ordre ATI.

HOMO HOMO-1 HOMO-2 HOMO-3 0.41 eV 1.3 eV 0.96 eV 1.21 eV

Table 3.5 – Energies cinétiques attendues pour les contributions provenant des

orbitales HOMO à HOMO-3 sans décalage pondéromoteur dans le cas de la Cytosine (à partir des énergies d’ionisation expérimentales)

On observe également une diminution du rayon des anneaux au seuil d’ionisa-tion avec l’augmentad’ionisa-tion de l’intensité. Cette structure ressemble fortement à celle observée dans la thymine. Cette analyse des images est validée par les spectres de photoélectrons (figures3.31et3.32). On observe distinctement un pic de signal dont la position dépend de l’intensité relié à une transition de l’orbitale HOMO vers le continuum. De plus on voit apparaître au seuil d’ionisation les pics à 0.93 eV (C”) et 0.6 eV (B”) déjà présents dans les données provenant de l’uracile et de la thymine. Le pic à 0.37 eV (A”) n’est quant à lui pas distinguable dans ces spectres y compris au seuil d’ionisation. L’évolution principale du signal en fonction de l’intensité pro-vient de la variation du pic assimilé à l’orbitale HOMO (E”). L’amplitude du pic C” ne semble pas être modifiée en fonction de l’intensité infrarouge. Cela n’est pas le cas du signal B” dont l’amplitude semble évoluer en fonction de l’intensité laser contrairement au même signal dans la thymine. Les contributions aux spectres de photoélectrons sont plus nombreuses que dans les deux autres et l’apparition du pic D” vers 1.2 eV pourrait être assimilée à la contribution d’un tautomère différent de celui présenté sur la figure3.8.

Spectre de photoélectrons en fonction de la durée d’impulsion Les images de la distribution de vitesses des photoélectrons issus de la cytosine en fonction de la durée d’impulsion présentent la structure au seuil d’ionisation mise en évidence précédemment avec les mesures en intensité quelle que soit la durée d’impulsion. Par ailleurs, on observe une augmentation du signal le long

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Figure 3.30 – Images de la distribution de vitesse des photoélectrons de la cytosine

à Δτ=25 fs et en fonction de l’intensité laser : a) IIR = 1.25 × 1013W/cm2, b) IIR = 1.1 × 1013W/cm2, c) IIR = 1.0 × 1013W/cm2, d) IIR = 8.8 × 1012W/cm2 (violet), e) IIR = 7.5 × 1012W/cm2 et f ) IIR = 6.3 × 1012W/cm2. Chaque image brute est accompagnée de sa distribution inversée.

de l’axe de polarisation du champ laser. Cette augmentation de signal est visible sur les spectres de photoélectrons et induit une perte de résolution des pics ATI. Le décalage du signal du pic HOMO sur les courbes à 55 et 70 fs pourrait être dû l’élargissement des pics suite à l’augmentation des canaux d’excitation et de fragmentation de la molécule.

0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 5 10−1

100

Energie cinétique (eV)

Signal

normalisé

Figure 3.31 – Spectres de photoélectrons de la cytosine intégrés angulairement à Δτ=25 fs pour les intensités IIR = 1.25×1013W/cm2 (noir)IIR= 1.1×1013W/cm2 (bleu), IIR = 1 × 1013W/cm2 (rouge), IIR = 8.8 × 1012W/cm2 (violet), IIR = 7.5 × 1012W/cm2 (violet) et IIR = 6.3 × 1012W/cm2 (turquoise) à 25 fs.

Nous allons discuter plus en détail des processus qui nous permettent d’obtenir ces résultats sur les 3 molécules et de leurs similitudes.