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La résistance métabolique liée à une augmentation de la détoxication des insecticides:

INTRODUCTION BIBLIOGRAPHIQUE

Chapitre 4. Mode d’action des insecticides néonicotinoïdes sur les récepteurs nicotiniques neuronaux des insectes.

1) La résistance métabolique liée à une augmentation de la détoxication des insecticides:

La résistance métabolique implique les cytochromes P450 qui sont des hémoprotéines intervenant dans des réactions d’oxydoréduction d’un grand nombre de molécules. La modification des molécules xénobiotiques telles que les insecticides par les cytochromes P450 entraine leur dégradation et/ou leur élimination, diminuant ou annihilant l’activité neurotoxique de ces composés. Ce mécanisme de détoxication semble être largement impliqué dans la résistance des insectes vis-à-vis des néonicotinoïdes. En effet, le premier cas de résistance vis-à-vis de l’IMI identifié chez B. tabaci au début des années 90 (Cahill et coll. 1996), a été corrélé à une augmentation de la détoxication reflétée par la surexpression deux gènes codant pour les cytochromes P450 CYP6CM1 et CYP4C64 (Nauen et coll. 2002; Yang et coll. 2013). De la même façon, la souche 5191A de M. persicae, résistante à l’IMI, présente une sur-expression du gène codant pour le cytochrome P450 CYP6CY3 (Puinean et coll. 2010 a et b).

Introduction. Chapitre 4. Mode d’action des néonicotinoïdes chez les insectes 2) La résistance par modification structurale du site de liaison des insecticides au sein des nAChRs. Les mécanismes conduisant à la modification du site de liaison sont les suivants :

- mutation de résidus clés favorisant la liaison aux insecticides. L’analyse des variations de séquences au sein des transcrits de sous-unités provenant de populations sensibles et résistantes vis-à-vis de l’IMI a permis l’identification de mutations ponctuelles qui se sont avérées être à l’origine de la résistance. Ainsi, la mutation R81T de la sous-unité Mpβ1 confère la résistance à une souche de puceron du pêcher M. persicae identifiée dans le sud de la France et le nord de l’Espagne (Slater et coll. 2012; Bass et coll. 2011). De même, chez la cicadelle brune N. lugens, la mutation Y151S identifiée au niveau des sous-unités Nlα1 et Nlα3 est impliquée dans la résistante à l’IMI (Liu et coll. 2005). Le rôle de cette mutation ponctuelle a été évalué par électrophysiologie à l’aide des nAChRs hybrides exprimés dans l’ovocyte de xénope. Ainsi, l’effet de l’IMI est fortement diminué en présence de nAChRs impliquant les sous-unités mutées Nlα1Y151S et Nlα3Y151S tandis que l’ACh provoque des réponses similaires quels que soient les récepteurs hybrides exprimés (Liu et coll. 2006; Yixi et coll. 2009). D’autre part, des mutations au niveau des sous-unités Dα1 ou Dβ2 peuvent conférer une résistance au NIT chez D. melanogaster (Perry et coll. 2008) tandis que la mutation G275E au niveau de la sous-unité TPα6 est responsable de la résistance au spinosad6 chez une souche du thrips du palmier T. palmi (Bao et coll. 2014). Ainsi, les mutations ponctuelles à l’origine d’une résistance aux néonicotinoïdes peuvent toucher à la fois des sous-unités α et β, soulignant l’importance des composantes principale et secondaire du site de liaison dans l’action des insecticides.

- modification post-transcriptionnelle. L’altération des mécanismes d’épissage alternatif de la sous-unité α6 conduit à une résistance pour le spinosad chez la teigne des choux P. xylostella. En effet, une mutation au niveau de la zone d’épissage de l’intron 9 de Pxα6 provoque une rétention d’intron qui conduit à la production de protéines tronquées entre le TM3 et le TM4 (Baxter et coll. 2010). Chez la mouche orientale des fruits B. dorsalis,

6 Le spinosad est un insecticide de la famille des spinosynes qui ciblent les nAChRs. Il correspond à un

mélange des spynosines A et D dérivés de la bactérie du sol Saccharopolyspora spinosa (Millar et Denholm 2007)

Introduction. Chapitre 4. Mode d’action des néonicotinoïdes chez les insectes c’est une mutation au niveau de l’intron 2 qui est responsable de la production de transcrits tronqués de la sous-unité Bdα6 associées à la résistance au spinosad (Hsu et coll. 2012).

- modification du niveau d’expression des sous-unités. Chez la mouche M. domestica, une diminution de 60% du niveau d’expression de la sous-unité Mdα2 est associée à la résistance de l’insecte pour l’IMI. Aucune mutation n’a été identifiée au niveau de cette sous-unité et les mécanismes responsables de cette sur-expression restent encore à élucider (Markussen et Kristensen 2010).

Il apparait difficile de définir un mécanisme de résistance commun à une molécule insecticide. Pour exemple, même si la résistance au spinosad implique la modification de la sous-unité α6 chez D. melanogaster (Perry et coll. 2007), P. xylostella (Baxter et coll. 2010),

B. dorsalis (Hsu et coll. 2012) et T. palmi (Bao et coll. 2014), ce n’est pas le cas chez le thrips

californien F. occidentalis (Hou et coll. 2014). De manière générale, la résistance métabolique est également impliquée dans les cas de résistance par modification des nAChRs, comme c’est le cas pour la souche mutante R81T de M. persicae (Bass et coll. 2011). De plus, les souches identifiées comme résistante pour un insecticide, peuvent présenter une résistance croisée pour d’autres néonicotinoïdes. Ainsi, la souche de L. decemlineata résistante à l’IMI présente une résistance croisée pour le DTF, la CLT, l’ACE, le THI et le TMX (Mota-Sanchez et coll. 2006). De même, le puceron M. persicae résistant à l’IMI apparait également résistant vis-à-vis du TMX, du THI et de l’ACE (Bass et coll. 2011; Slater et coll. 2012). Chez N. lugens, les mutations Nlα1Y151S et Nlα3Y151S précédemment décrites et responsables de la résistance à l’IMI, entrainent également une diminution de la réponse des nAChRs pour cinq autres néonicotinoïdes, l’ACE, le NIT, le THI, la CLT et le TMX (Yixi et coll. 2009) mais ont par contre une incidence plus faible sur la réponse des récepteurs au DTF (Liu et coll. 2006; Yixi et coll. 2009). Ces cas de résistance multiple rendent difficile le contournement de la résistance identifiée pour une molécule par l’utilisation d’autres néonicotinoïdes.