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Répartition par secteur et répartition spatiale

8.2. Instruments économiques pour diminuer l’eutrophisation

8.2.2. Efficacité économique des politiques publiques

8.2.2.3. Répartition par secteur et répartition spatiale

Xepapadeas (2010) rappelle que lorsqu’il s’agit de résoudre les problèmes liés à l’eutrophisation, il est nécessaire de coupler des modèles écologiques et des modèles économiques. Or, si pour les deux modèles il y a des similarités telle la compétition pour des ressources rares, il y a aussi une différence fondamentale, liée au fait que dans les systèmes économiques les agents résolvent des problèmes d’optimisation dynamique, c’est à dire des raisonnements rationnels prenant en compte leurs anticipations sur l’avenir, alors que dans les systèmes écologiques, le comportement ou l’état des agents tient compte de l’évolution passée, en ayant cherché à s’adapter au fil de l’histoire du système représenté. Dans ce cadre, une représentation adéquate des systèmes associant écologie et économie

6 Henry C., 1974, Option values in the economics of irreplaceable assets, Review of Economic Studies, 41, 89-104. 7 H.M. Markowitz, 1952, Portfolio selection, Journal of Finance, 7, 77-91.

nécessite des modèles dynamiques non linéaires complexes. Une telle représentation devrait prendre en compte et combiner des éléments tels que les interactions stratégiques entre les agents économiques, les non convexités induites par les bouclages non linéaires, les différentes échelles spatiales et temporelles, et la représentation de différentes dynamiques spatio-temporelles. Ne pas prendre en compte ces caractéristiques pourrait conduire à ne pas représenter des phénomènes importants observés dans la réalité, telles que des bifurcations dans le système ou des irréversibilités ; cela pourrait aboutir à des états peu désirables sur le plan économique ou écologique.

Ahlvik et Pavlova (2013) étudient la meilleure stratégie à mettre en place, sur le plan international, afin de réduire la pollution en mer baltique. Ils montrent qu’un des problèmes est le comportement de passager clandestin de certains pays, qui pourraient profiter de l’effort mené par d’autres, sans en faire eux-aussi à la même hauteur. On notera que la résolution de ce problème est intéressante, en elle- même, mais aussi parce que la difficulté se rencontre à l’identique ou presque à un niveau géographique plus fin, par exemple entre les différents bassins versants d’un même cours d’eau ou à l’intérieur de chaque bassin versant. Il est à noter que les pollutions par eutrophisation ont aussi un effet local, ce qui tempère un peu cette tentation. Le problème du passager clandestin a pour origine l’absence d’autorité régulatrice. Au final, un traité entre tous les pays, avec des objectifs modestes, semble plus efficient qu’une coalition entre un nombre plus petit de pays, mais avec des objectifs plus ambitieux. D’autres solutions existent, par exemple laisser certains pays subventionner ou directement aider (financement, assistance technique, concessions dans les négociations…) des actions dans d’autres ; Ce qui est en contradiction avec le principe pollueur payeur, puisque c’est finalement le pollué ou la victime qui paye. Une autre possibilité serait d’allouer des permis d’émission aux différents états et par exemple de permettre à chacun de mener des actions de réduction de la pollution dans d’autres pays de manière à respecter ses propres quotas d’émission.

Arheimer et al. (2004) étudient le changement de pratiques permettant de réduire la pollution en nitrates dans le sud de la Suède. Ils mobilisent pour cela la participation de parties prenantes pour imaginer différents scénarios d’action et des outils de modélisation numérique pour en calculer les effets. Comme seule la concentration en nitrate est prise en compte (les auteurs sont conscients de cette limitation), et que ce polluant provient majoritairement des activités agricoles, c’est un changement des pratiques agricoles (changement de cultures, dates d’épandage des engrais et de labour etc.) qui permet de diminuer le plus la charge en nitrates à l’estuaire (de 30 %) alors que la mise en place de zones humides ne le diminue que de 5 %. La participation des parties prenantes a permis de voir, dans ce cas, avec les 16 participants du jeu, que les agriculteurs préféraient comme outil des contrats, passés avec quelques personnes de confiance.

Fezzi and al. (2010) ont travaillé sur les coûts pour les agriculteurs de différentes mesures envisageables pour réduire l’eutrophisation : réduction de 20% de l’emploi d’engrais, diminution de 20 % du nombre de bovins à l’hectare, conversion de 20 % de terres arables en prairies non pâturées (prairies fauchées) sans engrais. Ils montrent (leur travail concerne un bassin versant en Angleterre) l’impact du choix de la mesure (parmi les trois précédentes), et surtout la variabilité de cet impact d’une exploitation à l’autre ; en parallèle ils rappellent l’importance de l’hétérogénéité des sols et des pratiques agricoles sur les effets de telles mesures concernant l’eutrophisation. Ainsi il est important de réfléchir tout autant aux modalités d’application locales, qu’au choix d’un instrument. La forte hétérogénéité des coûts supportés par les agriculteurs peut ainsi poser des problèmes de chute de revenu agricole et d’augmentation de la pauvreté rurale. Des travaux à partir de Systèmes d’Information Géographique montrent tout leur intérêt ici. Cette étude, comme le proposent les auteurs, gagnerait aussi à être étendue en prenant en compte des effets de plus long terme, comme la capacité d’investissement des exploitations.

Langpap et al. (2008) font une étude économétrique à partir de données concernant quatre états américains (Californie, Oregon, Washington et Idaho), pour examiner l’effet de différentes politiques foncières (taxation, acquisition foncière, subventions…) sur la pollution des eaux. Globalement ils

montrent que ce sont les politiques visant la réduction de l’urbanisation et de l’agriculture qui ont le plus d’effets, avec celles qui visent directement les zones humides.

8.2.2.4.Aspects méthodologique pour le secteur agricole et les pollutions diffuses