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Au cours de l’étude de l’expression de c-fos, il s’est imposé comme un bon modèle pour l’étude des mécanismes généraux de la transcription, tant le degré de sophistication de son contrôle est élevé (voir §II.2.1 et II.2.2). En particulier, il constitue un paradigme de l'intégration de signaux cellulaires pour déclencher rapidement et efficacement l'activation génique, sur un modèle "tout ou rien" qui favorise les comparaisons.

Le gène c-fos humain est unique et se trouve sur le chromosome 14 (en 14q24.3, Ekstrand and Zech, 1987). Chez la souris, il comprend 4 exons qui composent un messager de 2,2 kb (fig. 5 : schéma du gène murin).

1. Démarrage de la transcription : sites, facteurs et voies

1.1. c-fos et structure de la chromatine

L'état de compaction de la chromatine participe à la régulation de la transcription: il détermine l'accessibilité des séquences promotrices pour le démarrage et permet ou non la progression de l'ARN polymérase.

En tant qu'IEG, c-fos permet de suivre l'ouverture de la chromatine lors de l'activation génique, car il passe rapidement d'un état fermé à ouvert. Ainsi l'activation, par des facteurs de croissance, de la transcription des IEG coïncide avec la phosphorylation de l'histone H3 (Mahadevan et al., 1991) sur sérine 10 (Sassone-Corsi et al., 1999) par Msk1 (Thomson et al., 1999) et Rsk2 (Sassone-Corsi et al., 1999). Cette phosphorylation semble permettre l'acétylation de la "queue" N-terminale de H3 (Clayton et al., 2000) par diverses HAT, et donc l'ouverture de la chromatine. Ces modifications des histones permettraient aussi de créer des sites d'ancrage pour des coactivateurs de la transcription (Berger, 2001).

A l'inverse, la répression de c-fos est associée à l'activité de BRG1, un membre du complexe SWI/SNF (mating type SWItching/Sucrose Non-Fermenting). Ce complexe est une machine à remodeler activement l'ADN qui consomme de l'ATP pour modifier la structure de la chromatine (Murphy et al., 1999).

D'une façon générale, il semble que les modifications (acétylation, méthylation, phosphorylation) des histones concourent à mettre en place un code qui fournit une

information sur l'état de la chromatine et permet l'interaction avec des machines de remodelage (Strahl and Allis, 2000).

Figure 5 : Organisation du gène c-fos murin. Les principales séquences régulatrices abordées dans le texte sont représentées en bleu. Les flèches rouges désignent les sites hypersensibles à la DNase I (Renz et al., 1985). Les exons sont grisés. SIE : v-sis-conditioned

medium Inducible Element. SRE : Serum Response Element. CRE : Ca2+/cAMP Response Element. FIRE : Fos Intragenic Regulatory Element.

L'équipe de Rolf Müller a cartographié les sites hypersensibles à la DNase le long du gène c-fos (fig. 5). Ces sites sont l'indice d'une laxité locale de la chromatine, et correspondent à des régions régulatrices potentielles. Il apparaît que certains se trouvent en amont du site de démarrage de transcription et ont plus tard été identifiés comme le SRE, le CRE et le site de démarrage lui-même, définissant le promoteur (Renz et al., 1985, voir fig. 5). D'autres furent identifiés plus en aval; ils seront décrits au §III.3.2.6 et section résultats, II..

Il semble qu'entre la région du SIE et du SRE d'une part, et celle du CRE et du démarrage d'autre part, il existe un nucléosome fixe, dont la position et la compacité ne varient pas au cours de l'activation de c-fos (Herrera et al., 1997). Une autre étude inclut le CRE dans le nucléosome (Schild-Poulter et al., 1996) mais elle fut menée in vitro avec de courtes séquences, ce qui rend sa pertinence plus douteuse. Ce nucléosome permettrait de mettre en contact ces sites distants pour construire des super-complexes de facteurs de transcription et coactivateurs avec la machinerie basale de transcription.

Bgl II

2 3 4

BamHI

Hind III ATG Xho I

1

SIE SRE CRE Eco RI

FIRE

? STOP

1.2. Le promoteur

Le promoteur de c-fos a fait l’objet de nombreuses études visant à comprendre les mécanismes de son activation si rapide. Ainsi ont été découvertes les séquences gouvernant son activation par différents stimulus, dont je ne présenterai que les majeures (fig. 6).

1.2.1. Serum Response Element, SRE

Découverte par Richard Treisman (Treisman, 1985), cette séquence, aussi appelée

CArG box, est nécessaire et suffisante pour l'induction par le sérum de différents gènes

(souvent des IEG) dont c-fos, quoique moins efficacement que dans le contexte global du promoteur. La première protéine identifiée pour sa liaison au SRE fut SRF (Treisman, 1986), une protéine de 67 Kd contenant une MADS box (MCM1/Agamous/Deficiens/SRF box) et se liant au SRE sous forme de dimère.

Alors que SRF est requis pour la prolifération des fibroblastes (Gauthier-Rouviere et al., 1991), ce n'est pas du tout le cas pour les cellules ES (Schratt et al., 2001). Dans ces cellules srf-/- l'activation d'IEG (dont c-fos) contenant un SRE est pourtant sévèrement compromise. Cela limite le rôle de SRF dans la prolifération au développement tardif, ce qui est cohérent avec le fait que les souris srf-/- se développent bien jusqu'à E6 puis meurent (Arsenian et al., 1998).

De façon étonnante, les sites de phosphorylation identifiés dans SRF sont peu conservés (Treisman, 1995) et ne semblent pas requis pour l'activation transcriptionnelle. Cela a mené à la recherche et l'identification de partenaires capables de relayer l'action des facteurs de croissance sur le SRE, sous forme d'un complexe ternaire (Ternary Complex Factor, TCF). C'est ainsi que Elk1 (Hipskind et al., 1991) et SAP-1 (Dalton and Treisman, 1992) ont été découverts. Ces facteurs de la famille ets sont phosphorylés par les MAPK activées (et donc nucléaires) avec une spécificité encore mal comprise, peut-être liée à l'organisation nucléaire des domaines transcriptionnels.

Plus récemment, un nouveau TCF a été cloné, Net/ERP/SAP2 (Giovane et al., 1994). Ce TCF est plutôt inhibiteur et sa phosphorylation par JNK déclenche son export vers le cytoplasme (Ducret et al., 1999).

1.2.2 Ca2+/cAMP Response Element, CRE

Cet élément a été isolé comme une séquence permettant la réponse à l'AMPc (Berkowitz et al., 1989; Fisch et al., 1989; Sassone-Corsi et al., 1988). Il est la cible des membres de la famille CREB (Montminy and Bilezikjian, 1987). Les facteurs ATF, les

CREM et les membres de la famille Jun peuvent aussi se fixer sur un CRE, ce qui crée une combinatoire de dimères susceptible de fournir une grande diversité de réponses, certains étant inhibiteurs, spécifiques d'un tissu particulier, réglés par épissage alterne (Tian et al., 1996)...

La signalisation AMPc n'est pas la seule qui active la transcription à partir du CRE : le calcium, via les CAMK (Ca2+/CaM-dependent protein Kinase, voir §III.2) et les facteurs de

croissance, via Rsk (Xing et al., 1996), ciblent CREB et la transcription associée.

Ainsi, l'activation de CREB par phosphorylation sur ser133 intègre les signaux de différentes voies de signalisation.

Dans certains systèmes la phosphorylation de CREB sur ser133 augmente son affinité pour le CRE (Nichols et al., 1992), mais il semble que le plus souvent il soit constitutivement fixé sur l'ADN, et que cette modification change plutôt ses partenaires d'interaction (comme par exemple le coactivateur CBP, Chrivia et al., 1993). Dans tous les cas elle augmente la capacité de transactivation de CREB (Sheng et al., 1991), sauf lorsque ser142 est phosphorylée également (Sun et al., 1994 et publication n°1).

L'importance de la voie CREB dans la réponse au calcium (et probablement à d'autres stimulus) varie selon les types cellulaires : dans les cellules PC12, le CRE tient un rôle majeur (Sheng et al., 1988; Sheng et al., 1990) alors que d'autres mécanismes interviennent dans d'autres types cellulaires.

1.2.3. Autres sites

Outre le SRE et le CRE, d'autres sites ont été identifiés dans le promoteur de c-fos. Le SIE, activé en réponse au PDGF (Platelet-Derived Growth Factor) et d'autres cytokines (Wagner et al., 1990), est la cible des facteurs de transcription STAT (Signal

Transducers and Activators of Transcription), qui sont phosphorylés sur tyrosine par les

kinases JAK (Janus-Kinase), ce qui les active et les envoie dans le noyau (Rane and Reddy, 2000).

Le site FAP (Fos AP-1-like, Velcich and Ziff, 1990) est un consensus pour AP-1 qui chevauche le SRE. Les fixations d'AP-1 et SRF seraient mutuellement exclusives. Il a été proposé que cet antagonisme est à l'origine de la transrépression de c-Fos sur son propre promoteur (Gauthier-Rouviere et al., 1992). En transfection transitoire le FAP semble participer à l'induction de c-fos par le calcium (Wang and Simonson, 1996). On ignore toujours l'identité des facteurs qui se fixent sur ce site et son rôle dans la régulation de c-fos.

Il existe plusieurs sites de fixation pour YY1 sur le promoteur ; ces facteurs permettraient l'activation ou la répression de sites voisins (SRE, CRE) par la courbure de l'ADN qu'ils occasionnent (Natesan and Gilman, 1995).

Figure 6: Sites principaux identifiés sur le promoteur murin de c-fos. Leurs séquences sont indiquées en bas, leur position par rapport au démarrage de transcription, en haut. Les nombres désignent la distance par rapport au site de démarrage en paires de bases.

Figure 7: Principales voies de signalisation qui débouchent sur le promoteur de c-fos. Le site de démarrage de transcription est représenté par une flèche brisée.

SRE

SIE CRE

CaMK

PKA PKC

STAT SRF

TCF

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