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Chez les mammifères et les oiseaux, si nous disposons d’un certain nombre d’informations sur la régulation du gène cyp19 dans les gonades (Bourguiba et al., 2003; Carreau, 2002; Genissel et al., 2001), il en existe très peu sur l’expression de ce gène au niveau cérébral et la majeure partie des données porte sur la régulation de l’expression de l’aromatase par les stéroïdes. Dans le cerveau de fœtus, où la mise en place d’un dimorphisme sexuel de certaines structures cérébrales est due à une aromatisation de la T en œstradiol, les mécanismes régulant l’expression de l’aromatase ne sont pas connus. Cependant, ils ne semblent pas dépendre des androgènes. En effet, après gonadectomie de fœtus de singe et traitement à la T, l’activité de l’aromatase cérébrale n’est pas altérée (Roselli and Resko, 1986). Dans le cerveau adulte, des études ont montré que, chez les mammifères, le gène cyp19 est régulé par les androgènes (Roselli and Resko, 1997). En effet, chez des rats adultes ayant subi une gonadectomie, les niveaux de transcrits de l’aromatase cérébrale et son activité enzymatique diminuent dans l’aire préoptique et l’hypothalamus. Après injection de T ou de 5Į-dihydrotestostérone, un androgène non aromatisable, les niveaux d’ARNm et de l’enzyme sont restaurés (Abdelgadir et al., 1994). Chez les oiseaux, le gène cyp19 est principalement régulé par les œstrogènes (Balthazart et al., 2003). Cependant, il existe une synergie entre la régulation de l’aromatase par les œstrogènes et les androgènes. En effet, chez la caille, la T régule l’aromatase ; cette régulation de l’aromatase passe par la conversion de la T en E2, mais également directement par des récepteurs aux androgènes. Un traitement à la T augmente le nombre de cellules

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immunoréactives pour l’aromatase (Balthazart et al., 1992a). Chez la caille, l’utilisation d’un inhibiteur de l’aromatase provoque une diminution du nombre de cellules aromatase-positives dans certaines régions comme l’hypothalamus, tandis que le nombre de cellules est constant dans d’autres régions comme l’aire préoptique. Cette observation concorde avec le fait que les régions, où l’effet de la T est bloqué par l’inhibiteur d’aromatase, expriment l’aromatase et des ERs. Au contraire, dans les régions dépourvues d’ER, le nombre de cellules aromatase-positives ne diminue pas. Ceci indique donc que chez les oiseaux, même si une régulation androgénique existe, la régulation de l’aromatase est principalement placée sous contrôle œstrogénique (Balthazart et al., 1992a).

Chez les poissons téléostéens, le gène cyp19a1b est positivement régulé par l’œstradiol. Cette régulation œstrogénique a tout d’abord été suggérée par des expériences de Northern blot réalisées sur des ARN préparés à partir de poissons rouges traités à l’E2 (Gelinas et al., 1998), ainsi que des données de RT-PCR semi-quantitative suivant les quantités d’ARNm codant l’aromatase pendant le développement sur des larves de poisson zèbre (Kishida and Callard, 2001). En effet, l’E2 induit une augmentation des transcrits aromatase B et l’ICI 182,780, un antagoniste des récepteurs aux œstrogènes, bloque l’induction des transcrits suggérant donc une participation des zfERs dans la régulation œstrogénique du gène cyp19a1b (Kishida and Callard, 2001). Cette régulation œstrogénique des messagers du gène cyp19a1b a également été montrée chez d’autres espèces comme le poisson crapaud, la rascasse et le medaka (Forlano and Bass, 2005; Halm et al., 2002; Melo and Ramsdell, 2001). Plus récemment, des études in vivo et in vitro menées dans notre équipe ont permis de confirmer cette régulation positive de l’aromatase par l’œstradiol et d’en préciser les mécanismes moléculaires. En effet, une très forte régulation de l’aromatase B par l’œstradiol a été mise en évidence par des expériences d’hybridation in toto et d’immunohistochimie sur des embryons de poisson zèbre de 48h. De plus, cette forte augmentation oestrogéno-dépendante des transcrits et de la protéine aromatase B est complètement inhibée par l’ICI182,780, confirmant définitivement l’implication des ERs dans la régulation du gène cyp19a1b (Menuet et al., 2005). D’autre part, Menuet et al (2005) ont montré par immunohistochimie que cette forte expression d’aromatase B, après traitement à l’E2, n’est observée que dans les cellules gliales radiaires. Des expériences in vitro ont également montré que la transcription d’un gène rapporteur cyp19a1b-luciférase, co-transfecté avec un vecteur codant un ER, n’est induite par l’E2 que dans certains contextes cellulaires illustrant la nécessité de facteurs cellule-spécifiques. En effet, la forte induction du gène rapporteur

cytoplasme E2 Facteur cytoplasme noyau Aromatase B + ER cyp19a1b TATA CRE ERE

AhR ERE½ GxRE

Facteur Gx

+

Facteur Gx

Cellule gliale radiaire

Figure 13 : Représentation schématique de la régulation du gène cyp19a1b par l’œstradiol dans les cellules gliales radiaires. La coopération entre ER et un

facteur nommé Gx (spécifique des cellules gliales radiaires) se fixant sur un élément de( p q g ) réponse appelé GxRE conduit à une forte régulation positive du gène cyp19a1b uniquement dans ces cellules. AhR : site de liaison pour le « aryl hydrocarbon receptor »; CRE : « cyclic AMP response element »; E2 : œstradiol; ERE : élément de réponse aux œstrogènes; T : testostérone; TATA : boîte TATA, site de recrutement pour la machinerie de transcription.

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cyp19a1b-luciférase n’est observée que dans des lignées cellulaires « neurogliales » comme les P19 différenciées (cellules issues d’un tératocarcinome de rat qui se différencient en cellules gliales et en neurones en présence d’acide rétinoïque) et la lignée U-251 MG, lignée d’astrocytes humains (Le Page et al., 2006; Menuet et al., 2005). L’induction du gène rapporteur cyp19a1b-luciférase nécessite donc la présence de ER, d’un contexte neuroglial et implique également un élément de réponse aux œstrogènes (ERE) fonctionnel sur le promoteur proximal du gène cyp19a1b (Kazeto et al., 2001) dont la mutation aboutit à la suppression complète de l’induction du gène rapporteur (Menuet et al., 2005). D’autre part, la délétion de différentes régions situées en aval de l’ERE sur le promoteur du gène cyp19a1b a permis de localiser un élément de réponse qui serait impliqué dans la spécification neurogliale de la régulation de ce gène (Le Page et al., 2008). Cet élément est constitué d’un motif de 20 paires de base et a été nommé GxRE (élément de réponse au facteur glial x, puisque la nature du facteur glial reste inconnue). Différentes mutations de la séquence GxRE conduisent à une diminution de l’induction du gène rapporteur cyp19a1b-luciférase allant parfois jusqu’à une perte d’induction de 80% (Le Page et al., 2008). Cependant, cette induction n’est jamais complètement abolie suggérant l’existence d’une synergie fonctionnelle entre le GxRE et l’ERE. Enfin, l’insertion de la séquence GxRE dans une construction ERE-TK-luciférase, transfectée dans différentes lignées gliales ou non, aboutit à une induction du gène rapporteur uniquement dans des lignées neurogliales. Ceci confirme donc le fait que le GxRE confère une spécificité gliale à l’expression du gène cyp19a1b (Le Page et al., 2008). La régulation du gène cyp1a1b par l’E2 dans des cellules de type glial nécessite donc la présence de l’ERE, du GxRE et la présence d’ERs (Le Page et al., 2008; Menuet et al., 2005) (Figure 13).

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