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Chapitre 1 : Description du milieu de propagation ionosphérique au

1.2. Impact de l’ionosphère sur la propagation des signaux GNSS

1.2.1. Réfraction ionosphérique à grande échelle

En 1901, l’expérience de transmission radio entre l’Angleterre et les Etats-Unis, menée par Marconi, montre pour la première fois l’existence d’une couche d’atmosphère réfléchissant les ondes électromagnétiques, similaire à une couche métallique conductrice. L’hypothèse de l’existence d’une couche d’atmosphère ionisée est émise et vérifiée dans les années 1920. Offrant de larges applications aux communications radio longue distance, les moyens expérimentaux d’étude de l’ionosphère se développent. L’ionosonde, radar dédié à l’étude de l’ionosphère, permet ainsi de cartographier les différentes couches conductrices en identifiant la fréquence des signaux en-deçà de laquelle ces derniers ne peuvent traverser. C’est la fréquence plasma (#, fréquence de pulsation naturelle du plasma ionosphérique, définie pour une incidence verticale sur la couche ionosphérique par :

() = 2+1 ,! ²

- .

(1.6)

! est la concentration des électrons en el.m-3, la charge élémentaire en Coulombs et

la masse de l’électron12. En remplaçant les constantes par leur valeur, cette

fréquence devient :

12 La fréquence plasma est également définie pour les ions. Du fait de la grande différence de masse entre les

ions et les électrons ( ≫ ), on néglige la fréquence plasma des ions par rapport à la fréquence plasma

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() ≈ 91! . (1.7)

L’angle d’incidence du signal sur la couche ionosphérique joue sur la fréquence maximale qui peut être réfléchie par l’ionosphère, ou maximum usable frequency (MUF) :

(%2& = cos 6′ .(# (1.8)

6′ est l’angle entre la verticale locale au point d’impact du signal sur l’ionosphère I1 et la

direction de propagation du signal, comme représenté sur la figure 1.7.

Figure 1.7 : Liaison récepteur terrestre – satellite vue dans le plan méridien.

D’après (1.6), la réflexion des ondes en deçà de la fréquence plasma est liée à la concentration électronique de l’ionosphère. À des fréquences supérieures à (#, les ondes peuvent traverser le milieu et subissent les effets de la réfraction due à ces concentrations d’électrons, comme lors de la traversée de tout milieu transparent. En utilisant les équations de Maxwell-Boltzmann, en négligeant la fréquence des collisions et la gyrofréquence par rapport à la fréquence du signal, on arrive à l’expression de l’indice de réfraction 8 du milieu ionosphérique, ou équation d’Appleton-Hartree13 :

13 Cf. annexe 1 pour le détail des calculs.

Antenne réceptrice LOS I2 Satellite émetteur Verticale locale aurécepteur Couche ionosphérique perturbée 6 I1 Verticale locale au point I1 6′ Irrégularités ionosphériques

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8² = 1 −(( .# (1.9)

( est la fréquence du signal propagé. En injectant la formulation (1.6) dans (1.9), le développement limité au premier ordre de cette expression donne :

8 ≈ 1 −8+! - ( , (1.10)

soit, numériquement, 8 ≈ 1 −40 !

( . (1.11)

En bande L (entre 1 et 2 GHz), l’indice de réfraction est très proche de 1 car le milieu traversé est très peu dense (cf. figure 1.1). D’après (1.11), sa valeur est également inférieure à 1. Cela signifie que la vitesse de phase, définie par => =@? , est supérieure à la célérité de la lumière A. La vitesse de groupe, =B = ?²

CD, est inférieure à A. Il en résulte

une avance de phase et un retard de groupe. Ce retard du paquet d’onde peut être traduit comme une distance supplémentaire qu’aurait à parcourir le signal dans le vide (pseudo-distance) et s’écrit :

ΔF ≈ 40 ( G ! H

IJ

, (1.12)

ΔF ≈40 ( KL M , (1.13)

où le STEC (Slant Total Electron Content) est l’intégrale du contenu électronique sur la distance parcourue par le signal de l’émetteur au récepteur et s’exprime en m-2. Il

s’exprime également en unité TEC (TECU), qui correspond à :

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Des modèles empiriques tels que NeQuick [Radicella, 2009] ou IRI (International Reference Ionosphere) [Bilitza, 2001] fournissent une modélisation de la densité électronique moyenne mensuelle en fonction de la localisation, de la date et des conditions d’éclairement solaire. Ils permettent ainsi l’estimation du TEC oblique (STEC), le long du Line-Of-Sight (LOS) d’une liaison Terre-Satellite quelconque, ou l’élaboration de cartographies verticales du TEC (VTEC) comme illustré sur la figure 1.8.

Figure 1.8 : Exemple de cartographie VTEC fournie par le modèle NeQuick, 08/02/2000 [http://t-ict4d.ictp.it/nequick2].

Les récepteurs GNSS sont des appareils de mesure très utilisés aujourd’hui pour déterminer le contenu électronique de l’ionosphère : on travaille dans ce cas avec les phases obtenues sur les deux fréquences GPS L1 et L2 (respectivement 1,575 et 1,228 GHz). Le retard ionosphérique étant fonction de la fréquence d’après (1.12), la différence des mesures de pseudo-distances14 des signaux donne :

ΔF − ΔFN ≈ 40 ( KL M −40 ( N KL M , (1.15) STEC ≈40(((N ( N − ( ) . 10 SNT(ΔF − ΔF N). (1.16)

14 Le signal GNSS transmet le temps d’horloge du satellite émetteur. La pseudo-distance est alors calculée par

le récepteur par ∆F = A∆ où ∆ est la différence entre le temps d’horloge de l’émetteur et le temps d’horloge

du récepteur au moment où il reçoit le signal. Le décalage entre horloges n’étant pas connu, la distance que l’on peut en déduire est biaisée, d’où le terme de pseudo-distance (ou pseudo-range).

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Le STEC est ici exprimé en TECU. Le VTEC peut en être déduit par une relation géométrique, fonction de la position du satellite par rapport au récepteur, en supposant l’homogénéité horizontale de l’ionosphère15. La figure 1.9 représente le STEC et le VTEC

déterminés à partir des mesures de phase sur L1 et L2 d’un récepteur type Septentrio PolarX situé à Tromsoe (Norvège).

Figure 1.9 : STEC et VTEC pour le satellite GPS n°26 (valeurs non calibrées), le 14/07/2012, entre 05:00 et 10:00 UT

Comme la position du satellite varie au cours du temps, l’épaisseur d’ionosphère traversée augmente et donne au STEC sa forme en « U ». Le VTEC varie beaucoup moins que le STEC, les variations étant dues cette fois aux gradients de concentration en azimut.

Les radars sont également utilisés pour cartographier l’ionosphère et nourrir des modèles de météorologie spatiale. Citons par exemple les réseaux SuperDARN et EISCAT, déjà évoqués dans la partie 1.1. La figure 1.10 montre les différentes informations obtenues à partir de ces sondages ionosphériques radar (EISCAT) : la température, la vitesse et la concentration des particules chargées. Des modèles ont été développés à partir de ces outils radar pour décrire l’état de l’ionosphère et rejouer certains scenarii d’orages magnétiques, comme par exemple le modèle TRANSCAR [Blelly et al., 2005]. 15 Cf. annexe 2. STEC VTEC S T E C e t V T E C ( T E C U )

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Figure 1.10 : Extrapolation de données EISCAT (de haut en bas) : concentration électronique, températures des électrons, température des ions, vitesse des ions dans la direction du LOS ; du

16/02/1993 à 10h au 17/02/1993 à 21h [Blelly et al., 2005].

Les fluctuations de densité électronique peuvent être suivies et étudiées grâce à ces réseaux radar, dans la limite de leurs domaines de résolution spatiale et temporelle (cf. section 1.1.2). Or, avec l’augmentation des fréquences des signaux utilisés en télécommande-télémétrie dans les liaisons Terre-satellite, les études ont montré qu’il existe des fluctuations rapides des concentrations d’électrons, à des fréquences de l’ordre du Hz et présentant des structures de dimension inférieure au km. Étudiées grâce au réseau de satellites GNSS, ces irrégularités provoquent des pertes de signal et jusqu’au décrochage des récepteurs. Ce phénomène de variation rapide est appelé la scintillation ionosphérique.

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