Chapitre I : Alliages magnétiques à mémoire de
II. Alliages Magnétiques à Mémoire de Forme
II.1. Réarrangement de la structure martensitique par le champ magnétique
L’effet mémoire de forme magnétique est un Réarrangement de la martensite maclée Induit
Magnétiquement (RIM). Les phases martensites des AMMF possèdent un axe de facile
aimantation du fait de leur anisotropie magnétocristalline. En l’absence de champ magnétique
extérieur, les moments magnétiques de chaque variante pointent en direction de l’axe de facile
aimantation de la maille martensitique (axe c). Lorsqu’un champ magnétique est appliqué au
système, les moments magnétiques tendent à s’aligner dans la direction du champ magnétique
afin de réduire l’énergie magnétique du système. L’alignement se réalise par la croissance de
la variante la plus favorablement orientée par mouvement des plans de macle (figure I.5). Les
plans de macle commencent à se mouvoir lorsque le champ magnétique dépasse une valeur
critique pour laquelle la différence d’énergie Zeeman entre deux variantes dépasse l’énergie
mécanique nécessaire au déplacement collectif des atomes au voisinage du plan de macle
[Ullakko et al., 1996]. Cet aspect est développé dans les paragraphes II.1.3 et III.2.3.
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Figure I.5. Représentation schématique du réarrangement de la martensite maclée par application
d’un champ magnétique extérieur. Le schéma présente l’exemple d’une martensite pseudo-orthorhombique, le petit axe c est l’axe de facile aimantation.
L’activation de ce processus nécessite deux conditions : une forte anisotropie
magnétocristalline et une faible contrainte de réarrangement. La première condition assure le
blocage des moments de chaque variante selon l’axe de facile aimantation. La seconde
condition, corrélée à la première, assure que le mouvement des plans de macle se réalise dans
un champ modéré, bien inférieur au champ nécessaire à aligner les moments dans la direction
du champ par simple rotation. De plus, il a été démontré que le mouvement des plans de
macle se réalise en l’absence de mouvement des parois des domaines magnétiques.
L’augmentation de l’aimantation dans les variantes dont l’axe de facile aimantation est
quasiment perpendiculaire au champ, se réalise uniquement par rotation des moments
magnétiques pendant le mouvement des plans de macle [Lai et al., 2007].
II.1.2. Déformations géantes induites par le champ magnétique
Comme décrit précédemment, un processus de démaclage se produit lorsque les variantes de
martensite sont soumises à l’application d’un champ magnétique extérieur. Une variante croît
au détriment de l’autre et ce phénomène est accompagné d’une déformation macroscopique.
L’optimisation de cet effet a conduit à l’observation de déformations de 9.5%, induites par un
champ magnétique inférieur au tesla, dans une martensite monocristalline [Sozinov et al.,
2002]. Le mécanisme pour obtenir de telles déformations est décrit en figure I.6.
L’échantillon est d’abord soumis à une contrainte mécanique pour obtenir un état où une
variante unique de martensite (variante A de la figure I.6) occupe tout le volume de
H H = 0
a a a
c
c
a a
c
c
c
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l’échantillon. La variante cristallise dans une maille pseudo-orthorhombique avec une
tétragonalité inférieure à un (c/a<1). Les structures cristallographiques des différentes phases
martensites des alliages Ni-Mn-Ga sont détaillées au paragraphe III.1. Son axe de facile
aimantation est orienté le long du petit axe c. Lorsqu’un champ magnétique perpendiculaire à
l’axe de facile aimantation de la structure est appliqué, la variante dont l’axe de facile
aimantation est très proche de la direction du champ (variante B de la figure I.6) nuclée dans
la variante initiale (variante A de la figure I.6) pour réduire l’énergie magnétique du système.
Les nouvelles variantes sont maclées avec les variantes initiales. Lorsque le champ
magnétique appliqué dépasse une valeur critique, les nouvelles variantes croissent par
mouvement des plans de macle. Finalement, la structure de l’échantillon est uniquement
composée de la nouvelle variante. L’intensité de la déformation dépend de la tétragonalité de
la phase martensite. Elle peut atteindre 10% [Sozinov et al., 2002], une valeur deux ordres de
grandeur supérieure aux déformations observées dans les matériaux piézoélectriques [Park et
Shrout, 1997, Li et al., 2008] et magnétostrictifs [Pasquale, 2003] (voir paragraphe II.3.2).
Figure I.6. A partir d’un état variante unique, l’application d’un champ magnétique perpendiculaire
à la direction de facile aimantation de la variante initiale transforme les variantes A en variantes B et induit une élongation ∆l ≈ l(a/c-1) dans la direction perpendiculaire au champ magnétique appliqué.
Le processus de réarrangement conduit également à une augmentation abrupte de
l’aimantation [Heczko et al., 2002 ; Heczko, 2005 ; Wilson et al., 2007]. La figure I.7
représente le cycle d’aimantation typique ainsi que l’évolution de la déformation avec le
champ magnétique pour un monocristal Ni-Mn-Ga. Avant les mesures d’aimantation,
l’échantillon est soumis à une contrainte mécanique pour obtenir un état possédant une unique
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variante. La croissance de la nouvelle variante résulte en une augmentation abrupte de
l’aimantation en raison du grand degré d’alignement de l’aimantation des nouvelles variantes
par rapport au champ. Comme le montre la figure I.7, une hausse de l’aimantation (∆M)
d’environ 50% de l’aimantation à saturation est induite pendant le réarrangement structural.
Ce processus est accompagné d’une déformation macroscopique d’environ 5,5%. Le procédé
de désaimantation ne suit pas le même chemin que le procédé d’aimantation, indiquant que le
matériau conserve la déformation après le réarrangement. L’application d’un champ
magnétique inverse aligne les moments magnétiques dans la direction du champ mais ne
permet pas de retrouver la structure initiale.
Figure I.7. Cycle d’aimantation (en haut) et déformation en fonction du champ (en bas) d’un
monocristal Ni-Mn-Ga présentant un effet RIM. Les mailles de la variante initiale (I) et de la variante générée par le champ (II), sont représentées sur la figure [Heczko et al., 2002].
II.1.3. Réversibilité de la déformation lors de la suppression du champ magnétique
Afin d’obtenir une déformation complètement réversible lors de la suppression du champ
magnétique, une contrainte de compression peut être appliquée perpendiculairement à la
direction du champ appliqué [Heczko, 2005]. Une telle contrainte peut faire nucléer la
variante initiale dans la variante générée par le champ lors de la cessation de ce dernier,
donnant lieu au retour à la forme initiale accompagné d’une chute abrupte de l’aimantation.
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L’intensité de la contrainte doit être supérieure à la contrainte de réarrangement mais
inférieure à la contrainte exercée par le champ magnétique. Si la contrainte appliquée est plus
faible que la contrainte de réarrangement, le réarrangement inverse est partiel et l’échantillon
contient les deux types de variantes lorsque le champ est supprimé. Si la contrainte appliquée
est plus élevée que la contrainte exercée par le champ, le processus de RIM est supprimé. Les
trois cas sont illustrés en figure I.8. La figure I.8 révèle que, même dans le cas du
réarrangement réversible, une hystérésis des champs d’activation est observée entre les
procédés d’aimantation et de désaimantation.
Figure I.8. Cycle d’aimantation (en haut) et déformation en fonction du champ (en bas) d’un
monocristal Ni-Mn-Ga sous différentes contraintes de compression appliquées perpendiculairement à la direction du champ magnétique. L’échantillon montre un réarrangement partiellement réversible, un réarrangement réversible et l’absence de réarrangement pour des contraintes mécaniques appliquées de 0,6 MPa, 1.4 MPa et 3 MPa, respectivement. Le sens d’application et de suppression du champ magnétique est indiqué par des flèches [Heczko, 2005].
La présence d’un comportement hystérétique peut être expliquée par les inégalités
ci-dessous :
extérieure mec ent réarrangem mec ent réarrangem magσ σ
σ ≥ +
Equation (I.3.) ent réarrangem mec inverse ent réarrangem mag extérieure mecσ σ
σ ≥
−+
Equation (I.4.)15
Dans les inégalités précédentes, σ
magréarrangementet σ
magréarrangement−inversecorrespondent aux contraintes
exercées par le champ magnétique lors du réarrangement et du réarrangement inverse. Ces
contraintes sont proportionnelles à l’intensité du champ magnétique appliqué.σ
mecréarrangementet
extérieure mec
σ représentent respectivement la contrainte mécanique de réarrangement (plateau de la
figure I.3.) et la contrainte mécanique extérieure appliquée à l’échantillon. Ces contraintes ne
dépendent pas du champ magnétique.
L’inégalité (I.3.) décrit la première partie du cycle, où la force induite magnétiquement doit
être suffisante pour dépasser la contrainte de réarrangement et la contrainte extérieure.
L’inégalité (I.4.) représente le processus de réarrangement inverse, pour lequel une grande
contrainte extérieure est nécessaire pour nucléer et faire croître les variantes initiales. Les
inégalités précédentes peuvent être réécrites sous la forme :
ent réarrangem mec extérieure mec ent réarrangem mag