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5. Les modelisations du comportement mécanique des argilites

6.2. Questions ouvertes et perspectives

Sur les sujets relatifs au comportement mécanique et thermo-hydro-mécanique des argilites traités dans ce mémoire, les questions essentielles restantes portent sur les aspects suivants :

Nature et connectivité des fractures de la zone EDZ : il s’agit d’une question

phénoménologique. La réponse de cette question affecte en effet le choix d’une hypothèse d’un milieu continu ou d’un milieu discret pour traiter et simuler le comportement mécanique et hydraulique de l’EDZ. Cette incertitude sera progressivement levée avec les observations et les mesures in situ réalisées dans le Laboratoire souterrain de Meuse/Haute-Marne.

Mécanismes de déformation : Compte tenu de la complexité de la texture des argilites, la

description quantitative des phénomènes à l’échelle microscopique reste encore un sujet ouvert. Il manque des données permettant de décrire à l’échelle microscopique les effets de l’eau, de la composition chimique de l’eau, du gaz (ou de l’air) sur les déformations (notamment les déformations différées) et sur la rupture des argilites. Ces données sont nécessaires pour valider ou chercher la limite de validation de certains modèles fondamentaux, tels que le modèle des milieux poreux de Biot, la loi de Darcy pour l’écoulement du fluide interstitiel.

Seuil de fluage : Existe-t-il un moyen in situ ou sur échantillons pour caractériser le seuil de

fluage ? La procédure des essais de fluage classiques, notamment le trajet de chargement, est-elle appropriée pour identifier ce seuil ? Des études théoriques et des investigations in situ ou sur échantillons sont nécessaires pour apporter des réponses à ces questions. La loi de Lemaître avec un seuil variable proposé dans ce mémoire nécessite d’être validée par l’interprétation des déformations différées mesurées in situ.

L’arrêt du fluage pendant 3 mois sur un trajet de refroidissement est observé. La question de la raison pour laquelle la baisse de température peut bloquer le fluage sur un temps aussi long reste ouverte.

Critère d’endommagement et de rupture en déformation à long terme : Les critères de

rupture et d’endommagement en déformation sont nécessaires pour calculer l’EDZ à long terme, notamment sous l’effet des déformations viscoplastiques. Une question essentielle se pose alors : est-il légitime d’utiliser le seuil de rupture en déformation obtenu sur des essais de courte durée (au maximum quelques années) pour évaluer la rupture sur des durées séculaires à millénaires ? Le suivi des déformations in situ dans le Laboratoire souterrain de Meuse/Haute-Marne permettra d’apporter des éléments de réponse à cette question.

Validation de l’approche statistique de la résistance du massif sur d’autres types de roches : la modification de la définition du paramètre S du critère Hoek-Brown permet de traiter

la dispersion naturelle des résistances à la compression uniaxiale. Cette méthode nécessite des tests d’application sur d’autres types de roche pour établir une relation empirique du calcul de la valeur α (équation 3-7) en fonction de la dispersion et peut-être du type d’ouvrages.

Paramètres du couplage THM : C’est par méthode inverse et par l’interprétation des mesures

hydromécaniques et THM dans les expérimentations in situ que l’on doit pouvoir réduire les incertitudes sur les paramètres de couplage, notamment sur le paramètre de dilatation différentielle αm. Par ailleurs, par la méthode inverse, les conductibilités thermiques peuvent être déterminées en interprétant les essais thermiques in situ. Cependant la précision d’une telle méthode n’est pas connue au stade actuel des connaissances.

Modèles rhéologiques et modélisations numériques : En raison de la faible perméabilité, et

de la non–linéarité du comportement et des couplages, les modèles rhéologiques complexes et les modélisations numériques interviennent à la fois dans la prédiction du comportement des ouvrages de stockage mais également en amont dans la détermination des paramètres des couplages et des paramètres des lois rhéologiques par l’interprétation des mesures sur échantillons et in situ.

Dans cette démarche, on doit se poser la question, avant de mener l’interprétation par modélisation, sur la cohérence et la représentativité des mesures des grandeurs mécaniques, thermiques et hydrauliques sur échantillons et in situ.

Comment juger la pertinence des modèles rhéologiques avec les données in situ ? Comment évaluer la capacité des modèles à reproduire les phénomènes ? Il est nécessaire d’établir préalablement des critères d’évaluation en concertation avec les développeurs et les modélisateurs.

Rôle du gaz : Il s’agit également d’une question phénoménologique. Le gaz d’hydrogène sous

pression produit par la corrosion a-t-il un impact sur le comportement mécanique des argilites ? Le modèle des milieux poreux non saturés (Coussy 1991) est-il adapté pour traiter ce problème ? Des études expérimentales et théoriques sont nécessaires pour apporter des éléments de réponse à ces interrogations.

Couplage chimique-mécanique : Le couplage chimique-mécanique devient de plus en plus

prépondérant avec le temps. De nombreux sujets restent ouverts à la fois sur le plan rhéologique et sur le plan numérique. Par exemple, quelles sont les propriétés mécaniques des produits de corrosion ? Comment réagissent les structures métalliques corrodées de l’alvéole avec la pression provenant des argilites après la fermeture des jeux fonctionnels ? Comment modéliser la fermeture des jeux fonctionnels ou le remplissage des jeux par les produits de corrosion ?

Extrapolation temporelle : La question essentielle sur le comportement différé de la roche reste

la validité de l’extrapolation dans le temps d’une loi calée sur des essais qui durent au maximum quelques années, sur une période de 102 à 106 ans. Pour y répondre, il est important de comprendre les mécanismes de déformation différée à l’échelle microscopique, tels que la viscoplasticité, la diffusion hydraulique, l’endommagement différé, la dissolution et la recristallisation. La compréhension des phénomènes à l’échelle microscopique permet d’encadrer la vitesse des déformations différées à très long terme.