• Aucun résultat trouvé

problématique Pourquoi 1850 ? Les archives disponibles sont très lacunaires avant la seconde moitié 

Chapitre 1 Un public lycéen sélectionné

1 ­

Méthodologie : constitution des catégories sociales

« … aucune définition n’est satisfaisante pour l’historien, car aucune ne rend compte de la condition ni de la psychologie des hommes, qui au XIXe siècle

vivaient comme des bourgeois, réagissaient comme des bourgeois, se considéraient comme des bourgeois et étaient jugés comme tels par leur entourage et la société entière »162.

Nous ne pouvons qu’être en accord avec Adeline Daumard, quant à ces propos sur les  bourgeois. Cette difficulté de définition est confirmée par Dominique Barjot et Jean­Pierre  Chaline qui précisent pour cette catégorie de personnes « outre l’argent compte l’usage qu’on

en fait »163 et il faut rajouter tous ceux qui veulent y accéder, faire partie de ce groupe et être  reconnus par eux. Jacques Marseille tient le même discours sur ces couches moyennes, à la  Belle Époque : « tous ceux qui ne se sentent ni ne sont paysans ou ouvriers, ceux qui veulent

paraître bourgeois, mais qui faute de bonnes manières ne le sont pas »164, idée que développe  Norbert  Elias  dans  La civilisation des mœurs165. Ce  type  de  regroupement  n’est  donc  qu’artificiel. Certes, il permet de comprendre une société, à coup de caricatures, mais en ayant  l’inconvénient  de  la  figer.  Il  est  très  difficile  de  traiter  l’évolution  de  ces  catégories.  Dans 

histoire de Besançon166, coordonné par Claude Fohlen, Roger Marlin a recueilli des données 

sur  les  professions  à  Besançon  dans  les  annuaires  de  1861  et  1870.  Elles  permettent  de  visualiser, à l’échelle d’une ville, la construction d’une classe intermédiaire qui va, et veut  accéder à un échelon supérieur dans la stratification sociale. Il faut rajouter à ces professions,  tous  les  fonctionnaires  qui  dirigent  des  services  de  plus  en  plus  présents  dans  le  développement  d’une  ville.  Il  convient  donc  de  rajouter  à  ces  données,  également,  les  professions  médicales,  médecins,  dentistes  et  pharmaciens,  qui  prennent  de  plus  en  plus  d’ampleur et d’importance. 

       

162 Daumard Adeline, Les bourgeois au XIXe siècle, Paris, Flammarion, 1970, p.5. 

163 Barjot Dominique, Chaline Jean­Pierre, Encrevé André, La France au XIXe siècle : 1814­1914, Paris, puf, 1998 

(3e édition corrigée), p. 367. 

164 Marseille Jacques, Nouvelle histoire de France. II. De la Révolution à nos jours, Paris, Perrin, 2002, p.227.  165 Elias Norbert, La civilisation des mœurs, Paris, Calmann Lévy, 1973 (1ere éd. 1969). 

42  Professions  1861  1871  1890   Architectes  12  18  14   Entrepreneurs de bâtiments  10  28  35  Merciers   23  39  51  Boulangers  59  73  84  Charcutiers  25  37  25  Bouchers  1  25  65  Épiciers détaillants  37  191  190  Restaurateurs­ Pensions  11  30  45  Pharmaciens  14  31  35  Dentistes  4  21  22  Médecins  24  8  8  Avocats   31  30  42  Tableau 1: professionnels à Besançon à partir des données des annuaires du Doubs  Les chiffres présents dans ce tableau sont révélateurs du changement de la vie sociale  de  la  cité bisontine. En augmentation constante et régulière,  Claude  Fohlen la  caractérise  comme « une ville bourgeoise »167 au début de la période. Il explique ce renouveau par le fait  que la vie économique reprend « faisant de Besançon un centre d’échange »168 avec l’arrivée  de nombreux Suisses dans les milieux financiers et dans l’industrie horlogère. Le recensement  de 1846 estime à plus de 1 200 les horlogers venus de Suisse romande. Ce développement  nécessite des restructurations architecturales dans la ville, notamment autour du chemin de  fer en construisant la gare au centre de la ville en 1856. Le petit commerce est florissant ainsi  que l’artisanat horloger. La ville organise l’exposition universelle, en 1860, dont la troisième  division est consacrée à l’« horlogerie, orfèvrerie et bijouterie »169. 

1846  1851  1861  1872  1891  39 949  41 295  46 786  49 401  56 055  Tableau 2 : Évolution de la population de la ville, sources, base Cassini de l'EHESS           167 Fohlen Claude, « De la prospérité à la stagnation (v. 1732­1848 », in Fohlen Claude (dir.), 1964, op. cit., p. 299.  168 Ibid., p. 301. 

169 Société d’émulation du Doubs, Exposition universelle de Besançon en 1860 : Catalogue général, Besançon, 

43 

Plutôt que les termes “bourgeois”, “élites” ou “notables” trop vagues, celui de “classes  privilégiées” est préféré pour caractériser le milieu d’appartenance des élèves du lycée. En  effet,  les  archives  montrent  que  des  avantages  sont  accordés  à  certains  milieux  professionnels,  pas  obligatoirement  fortunés  par  la  réduction  des  frais  de  scolarité.  Les  salaires ne sont pas forcément représentatifs de la position sociale. Ainsi, en prenant le cas  des  recteurs  du  Second  Empire,  Jean­François  Condette  explique  qu’il  est  désormais  « un

notable, un bourgeois qui doit affirmer sa présence parmi les élites régionales »170. L’historien  de l’école signale que le recteur Michelle, en poste à Besançon de 1848 à 1850, a peur de  prendre sa retraite  « parce qu’il va perdre son logement »171  et qu’il a contracté plusieurs  dettes. De même l’épouse de son successeur, Gardaire, de 1850 à 1853, met en avant le peu  de ressources de sa famille après le décès de son mari en 1856172. Les archives que nous avons  consultées regorgent de demandes d’exemption de frais de scolarité ou d’internat, totale ou  partielle, comme des militaires, des petits fonctionnaires et des instituteurs. De tels constats  indiquent que le positionnement économique des familles est certainement moins significatif  que  la  reconnaissance  sociale  au  sein  de  l’élite  bisontine.  Les  exemples  de  demandes  d’exonérations au ministre, à l’instar de celle du Lieutenant­Colonel Logerot en 1878, pour  lequel il est noté : « sans fortune et […] 3 enfants dont l’aînée est une fille »173, sont plus que  probants. Il convient aussi de signaler la prise en considération du poids que peut constituer  pour une famille une progéniture féminine au regard de la dote nécessaire à la mise en œuvre  d’un “bon” mariage au sein d’un milieu éminemment bourgeois. Il va sans dire que, dans le  cas de ce militaire haut gradé, l’appartenance à l’élite de la cité est implicite et qu’elle ne tient  aucunement  à  la  rente  ou  au  revenu  du  chef  de  famille,  mais  bien  plutôt  à  sa  fonction  considérée parmi les plus honorables dans ce contexte patriotique et revanchard. 

De plus, le XIXe siècle est le siècle de création de nouvelles catégories intermédiaires  comme les fonctionnaires de bureau174 et le renouvellement des élites175. Marie­Cécile Thoral  met en évidence, dès le XIXe siècle, des avantages certains : leur paie est mensualisée, une          170 Condette Jean­François, 2006, tome I, op. cit., p. 318.  171 Condette Jean­François, 2006, Les recteurs d’académie en France de 1808 à 1940 : Dictionnaire biographique  tome II, 2006, p. 183.  172 Ibid., p. 188.  173 AD Doubs, T 82, lettre du 20 mars 1878 du recteur au ministre. 

174  Thoral  Marie­Cécile,  « Naissance  d’une  classe  sociale :  les  fonctionnaires  de  bureau,  du  consulat  à  la 

Monarchie de Juillet. Le cas de l’Isère » in Revue d’histoire du XIXe siècle, n° 34, 2006, pp.93­110. 

175 Charle Christophe, Histoire sociale de la France au XIXe siècle, Paris, Editions du Seuil, 1991, « Anciennes et 

44 

pension de retraite est versée progressivement à tous et surtout « la possibilité, réduite, mais

pas absente, de promotion professionnelle, et donc sociale, en une seule génération »176. Cette  dynamique ne peut être mise en évidence par des photographies annuelles, des instantanées  qui  ne  peuvent  prendre  en  compte  les  évolutions  de  carrière.  Jean  Le  Bihan  reprend  de  nombreuses  études  sur  les  fonctionnaires,  notamment  celle  de  Jean­Paul  Jourdan,  qui  propose  une  classification  par  le  salaire.  Mais  il  préfère  la  notion  de  « position

hiérarchique »177, et  aboutit  à  la  création  de  trois  catégories  de  fonctionnaires,  les  hauts  fonctionnaires, les intermédiaires et les employés. Il justifie cette distinction par le fait que  l’employé  n’incarne  pas  “la  puissance  publique”,  ne  se  sent  pas  réellement  investi  d’une  mission. Nous souscrivons à sa proposition, les parents nommés “employés”, par exemple :  employés  des  postes,  à  la  gare…,  sont  classés  dans  la  catégorie  “autres”.  Par  contre,  les  fonctionnaires intermédiaires178, comme les receveurs, chefs de bureau ou chefs de gare sont  répertoriés  dans  la  catégorie  “postes  à  responsabilités“.  Face  à  l’imprécision des  registres  d’élèves, nous ne pouvons établir cette catégorie intermédiaire en tant que groupe à part  entière. Ainsi les hauts fonctionnaires repérés, préfets et recteurs, seront également placés  dans cette même catégorie “postes à responsabilités“ dans la mesure où ils sont susceptibles  d’évoluer au sein d’une hiérarchie.  

Nous avons rencontré un autre problème qui est celui des métiers émergents. Présents  au  début  de  notre  période,  ils  deviennent  des  professions  bien  rémunérées  qui  se  “notabilisent” comme les ingénieurs, les architectes. Christophe Charle distingue deux XIXe  siècles ; le premier avant la IIIe République et le second à partir des années 1870. Il intitule un  paragraphe  consacré  aux  nouvelles  élites  « les hommes nouveaux : self­made­men et

ingénieurs »179.  D’autres  secteurs  se  développent  comme  les  banques  (création  de  neuf  grandes banques entre 1852 et 1904180), les chemins de fer, l’industrie, les transports, etc.  Certains sont fonctionnaires, comme les ingénieurs des ponts­et­chaussées, d’autres sont à la  direction d’usines. Les écritures sur les registres de l’établissement étant peu précises, voire  lacunaires, nous avons préféré les regrouper dans « postes à responsabilités ». Avec le même 

        176 Thoral Marie­Cécile, op. cit., p. 101. 

177  Le Bihan  Jean,  «  La  catégorie  de  fonctionnaires intermédiaires  au  XIXe  siècle.  Retour  sur  une  enquête  », 

Genèses, n° 73, 2008, p. 7. 

178 Le Bihan différencie même des fonctionnaires intermédiaires supérieurs et inférieurs.  179 Charle Christophe, 1991, op. cit., p.250. 

45 

souci, nous avons repris une catégorie déjà rencontrée “professions libérales, juridiques et  comptables” dans laquelle nous avons inclus les médecins, banquiers, architectes, huissiers,  avocats ainsi que les juges qui sont fonctionnaires. Ces « bourgeois du savoir […] exerçant ces

activités intellectuelles, artistiques, juridiques, scientifiques ou encore administratives ne cessent de grandir en cette fin de XIXe siècle »181. Jean­Pierre  Chaline  et Dominque  Barjot  précisent, en référence à la bipolarisation de la société annoncée par la théorie marxiste, que :  

« … c’est une société plus que jamais ternaire que nous découvrons, le secteur tertiaire en rapide croissance multipliant les effectifs de ces milieux­ tampon, d’origine largement populaire, mais aux aspirations bourgeoises »182.

À Besançon, ce phénomène est perceptible avec la création, en 1865, de la Société  Nautique bisontine (SNB), étudiée par Christian Vivier183, et appelée par ses membres Cercle  nautique ou Cercle des canotiers, “cercle” qui selon Maurice Agulhon « a été la forme typique

de la société bourgeoise… »184.  Si  les  membres  du  bureau,  dans  la  période 1867­1872,  semblent équilibrés entre “classes privilégiées” et “salariés, employés, ouvriers”, 14 contre  10, la période suivante, 1873­1885, montre un déséquilibre très important 44 contre 3185. La  société  SNB  installée  et  confirmée,  il  devient  important  pour  nombre de  Bisontins de  “se  montrer” dans ce cercle que l’auteur qualifie de bourgeois. 

La  catégorie  “autres”  regroupe  les  postes  d’employés  de  commerce,  secrétaires,  ouvriers,  ainsi  que  les  employés  fonctionnaires.  Ces  personnes  ont  peu  d’amélioration  salariale et donc sociale possible. L’évolution de cette frange de population est un signe de la  démocratisation  de  l’enseignement,  qui  modifie  obligatoirement  les  objectifs  assignés  à  l’école secondaire. 

D’autres spécificités sont à prendre en compte, comme la localisation géographique et  le  milieu  étudié.  Ainsi, nous  avons  ajouté une catégorie  “militaires” dans  la  mesure où la  Franche­Comté  est  une  région  de  cantonnement  de  l’armée,  de  par  sa  proximité  avec         

181 Ibid., p. 368.  182 Ibid., p. 374. 

183 Vivier Christian, L’aventure canotière : Du canotage à l’aviron. Histoire de la Nautique Bisontine, Thèse sous la 

direction d’Arnaud Pierre, Université Lyon I, 1994 et Vivier Christian, La sociabilité canotière : la société nautique

de Besançon, Paris, L’Harmattan, 1999.

184 Agulhon Maurice, Le cercle dans la France bourgeoise 1810­1848, étude d’une mutation de sociabilité, Paris, 

Armand Colin, 1977, p.17. 

185 Données tirées de la thèse de Vivier Christian, 1999, op. cit., Tome II : Annexes, Tableau 3, p. 175­176. Les 

catégories socio­professionnelles retenues par l’auteur sont différentes des nôtres. Pour les chiffres évoqués,  nous  avons  additionnés  dans  classes  privilégiées :  propriétaires  rentiers,  banquiers  industriels,  professions  libérales, négociants, courtiers, cadres, représentants de commerces, artisans, fabricants. 

46 

l’Allemagne et en 1870, sa frontière avec l’Alsace annexée. En 1846, le recensement indique  une population de près de 40 000 habitants (39 949 exactement), parmi lesquels les familles  de  militaires  représentent près de 5 000 personnes186. Des  avantages  seront accordés aux  enfants de troupes, signalés avec cette appellation dans les registres. Ils sont exonérés des  droits d’externat, tandis que pour les enfants d’officiers ou sous­officiers, est indiqué le grade  de leur père. Dans cette catégorie, nous avons inclus les gendarmes, les douaniers et quelques  policiers. 

Nous  avons  jugé  utile  de  faire  une  catégorie  « fonctionnaires  de  l’instruction  publique », en raison des exonérations de frais d’études d’externat, voire d’internat, qui sont  proposées à ses membres à partir de 1893187. De nombreux enfants d’instituteurs rentrent  dans les grandes écoles gouvernementales comme Polytechnique, confirmant cette possibilité  d’ascension sociale en une seule génération, évoquée par Marie­Cécile Thoral. Par contre, de  cette catégorie sont exclus les enfants des recteurs d’académie. Cette particularité concerne  quatre enfants scolarisés au lycée, dont une fille. Sans aller jusqu’à évoquer des passe­droits,  on peut s’interroger sur l’inscription en 1935 (hors de notre période d’étude), de la fille du  recteur Pariselle, alors qu’un lycée de jeunes filles est établi dans une rue perpendiculaire à  celle du lycée de garçons. 

Nous  sommes  conscients  que  toute  catégorisation  est  une  simplification,  une  caricature de la société surtout sur une période de 80 années. Ainsi la catégorie « propriétaires  rentiers », importante au début de la période disparaît petit à petit. Mais le passage de la  catégorie « autres » entre 1935 et 1938 de 33 à 127 uniquement pour le niveau collège permet  de  valider  l’hypothèse  du  changement  de  public  de  l’établissement,  un  début  de  démocratisation de l’enseignement public dans les villes, avec la gratuité voulue par la loi de  finances de 1930, au niveau de la sixième. 

Derrière le problème de l’origine sociale des élèves, il faut évoquer la lutte que se  livrent l’école publique et les institutions privées pour accueillir les garçons issus de familles  privilégiées et assurer ainsi l’avenir de la République et la survie financière de l’établissement.  Paul Gerbod écrit : « L’aristocratie entraîne dans son sillage la bourgeoisie. À Besançon, elles

envoient leurs enfants à l’Institution de Saint François­Xavier »188, au détriment du lycée. Les         

186 Marlin Roger, 1964, op.cit., p. 325. 

187  La  circulaire  ministérielle  du  24  avril  1893  exempte  de  frais  d’externat  les enfants  de  professeurs  et 

d’instituteurs. Avant cette date, ils demandent des exonérations qui sont accordées si l’élève travaille bien.  

47 

recteurs  d’académie  successifs  incitent  les  chefs  d’établissement  de  mettre  en  place  une  stratégie de conquête du public bisontin en exigeant la justification de toute baisse d’effectif.  Cette politique se développe en intensifiant la surveillance des élèves.  

L’objectif de  ce travail  statistique  est de  confirmer la  réalité de cette école à deux  vitesses,  décrite  par  Antoine  Prost.  Les  objectifs  poursuivis  par  l’école  secondaire  sont  différents  de  ceux  de  l’école  primaire.  La  connaissance  du  public  bisontin  qui  inscrit  ses  enfants au lycée est indispensable afin de comprendre leurs exigences et leurs attentes et  percevoir les changements. Selon Jean Imbert, pour le Secondaire, « dans la période 1800­

1880, il s’agit avant tout de donner une culture désintéressée aux enfants de la bourgeoisie »189. Si ces objectifs sont validés par les parents, alors ils inscriront leurs enfants  dans le lycée pour une scolarité payante. Jacques Gavoille190 constate qu’en 1876, 48 % de la  population du Doubs vit de l’agriculture et 33 % de l’industrie, soit une part plus importante  que  la  moyenne  française  de  25 %.  Besançon  et  Montbéliard  concentrent  les  premières  usines. De nouvelles professions apparaissent durant cette période. Elles émergent à partir du  monde ouvrier, afin d’encadrer les ouvriers et employés, dans les usines : contremaîtres, chef  d’atelier...  Les  attentes  de  ces  personnes,  ainsi  que  celles  des  petits  commerçants  qui  se  multiplient, sont différentes de la grande bourgeoisie et aristocratie établies. Ils sont dans  l’accession au niveau de vie supérieur et sont prêts à faire des sacrifices, pour assurer une vie  confortable à leurs enfants, mais, également, pour leur permettre d’accéder aux codes d’une  classe sociale supérieure.  

2 ­

La population accueillie au Lycée de Besançon

Le lycée de Besançon se développe durant cette période. Il accueille de plus en plus  d’élèves, ce qui nécessite des restructurations et agrandissements architecturaux. Le premier  chiffrage trouvé date de 1812. Il recense 353 élèves (171 pensionnaires et 182 externes). Dans  les mêmes locaux, le lycée reçoit, en janvier 1850, 331 élèves. Ils se répartissent de la manière  suivante : 72 internes, 14 demi­pensionnaires, 192 externes et 22 externes en pensions ou  institutions. En janvier 1889, le total est de 529 élèves, mais comme le montre le graphique,  les effectifs varient suivant les conjonctures. La guerre de 1870 est responsable d’une baisse  certaine,  qui  est  très  vite  effacée,  par  l’arrivée  d’élèves  alsaciens  et  un  renforcement  de         

189 Imbert  Jean, « Introduction » in Bousquet Pierre  et all.,  Histoire de l’administration de l’enseignement en

France. 1789­1981, Genève, Librairie Droz, 1983, p. 2.  

��  ���������� ��������� ���� �� ������� ���� ��� ������ ���� �� �� ���������� ��������������� ����  ���������  ��  �����������  �������  ��  ����������  ��  �����  ��  ��������  ������  ��  ����  ��  ��������� �� ��� ������������� ������� ��� �� ������ ��������� ��� �������� �������� ���  ���������� �� ������������ ��� ��������� ����������� ��� ��� ������������ �� �� ����������� ���  ���������� ���� ������� ���������� ��� �� ��������� ��� ��� ���������� �� �� ����������� ����  ��� ������������ �������� ��� �������� ��� ������ ���� � ���� ����� �� ���� �������� ��� �������  ���� ���� �� ���� �� ������� �� ������� ���������         ��������� �  ��������� � ������ ��� ������� ��� �������� ���������������  �� ������ ����� ���� ���� ���� ��������� � �� ����������� ���� � ������� ��� ������������  ����������� �������� ��� �� ��� �������� ���� ������ ����������� ������� ����� ������� ����  ���� ����� � ���� �� ������ �� ����� ����� �� �������� �� ����� �� ������ ��� �������� ���  ������ ��� ���������� �� ����� �� �������� ���� ��� �������� �������������� ������������� ���  ��� ������� ���� �� ����� �� ��������� �� ����������� ���������� ���� ��� ����� ������������  ���� ������� ����� ��������� �������� ��� �������� ���� �� ���������� ���������� ��� ���������  ���� ������ ���� �� ������� �������� ����� �����������   �������������� ��� ��������� �� ���� ��� ���� ���� ����� ������ � �� ������ ������ ��  ������ �� �� �������� ������ ��� �������� ��� ��������� � ��������� �� �������� ��������� ��  ��������  ����������  ��  �������  �����  ��������  ��  ������������  ���  ����������  ���  �������  ��������� �� ���� �� ��������������� ��� ���������� � ������������ �������� � �������� ���  ������  ������  ���  ���������  ����  ��  �����������  ������������  ���  ���������  ��  �������  ���  ��  ������� ��� ������ ���� �� ����� �������� ����������� �� �������� ���������� ���������� �������  � ��� ��� ��� ��� ��� ��� ���

�������������������

��  ����� � ����� �������������� ���� �� ������ �� ��������� ������� �� ����� �� �� �������� ���  �� ������ ���������� �� �� ����­������������� �������� ���� ���� ��� ����� ��� ��������� ��  ��������� ������� ����� �� ����� �� ��������� �� ����� ���� �� ��� ���������� �� ������ �����  �  �������������  ��  �������  �����������  ��  ���  ��  �����  ����������������� ����������� ��� ��� ����������� ������������� �� �������������  ��  �������  ���������  ���  �����  �������  ����  ���  ���������  ��  ����  ��  �������  ��  ����������  �����������  ��  ����������  ��  ������  �  ��������������� ��� ������������ ��� �������������� �� ������� ���� ����������������    ��������� � � ��������� � ������ ��� ������� ��� �������� ���������������    �� � ­ ��� ���������� �������� ��� ������� ��������  ���  ���������  ��������  ���������  ��  ����������  ���  �������  ����  ���  ���������  ��  �������  ����������  ��������  ������� ����­�����  �������������  ���  ����������  ����  ���  �����������  ���  ������������  ���  ���  ���������  ������  ��  ���������  ��  �����  ���  �������������� ���� �� �� ������ �� ����­��������� ��� ���������� ������� �� ����­�����  ��  �������  ������  ��  ������������  ��  ������  ��  ������  ��  ���  ����������  ������  ���  ��  �����  ��������� ������� ��� ������� ��� ������������ � ���������������� �� ����������­������������           ��� �� ��������� ����� ������ �� �� ������� ���� �� ��������� �� ����� �� ���������  � ��� ��� ��� ��� ��� ��� ���

�������������������������

������������� ��� ������������� �������� ������� �� �������

��      �� ������������ �������� �������� ��� ������� ���������� �� ����������� �� ���������  �� ����� ������� ���� �� ���� �� ���������� �������� ���� �� ������ �� ���� ��� ������� ��  ��������  ��  ��  �����������  ������������  ���  �������  ����  ����  ������������  ���  ������  ����  ��������� �� � ��������������� ��������� �� ��� ���������� ���� ��� ������� ������������� ���  ������ �������� � �������������� �����­���� ����� ������� ����������� ������� ���� ��� ����  ���������� �� ����������� ������������ ������������� � ��� ����������� ��� �� ������������  ���  �����������  ���������  ������������  � ����������������  ������������  ���  ����  ���������� �� �����������   ������ ����� �������� ��� ������� ��� ����� �� ��������� ������ �� �� ����� ��������  ����������� ���� ��������� ���������� ��������� �� ����� �� �� ������������� �� �� ��� ����� ��  �������  ������  ���  ������  ��  �������  ���������  ��  �����  ��  ��������  ��  ������  ����������  ��������������� ���� �������� ��� ������� ��� ���� ��������� ������������� �� ����������� ���������� ��� ������������������������������������������������������������������������������������������� ��������� ��� ���� �������� ���������� ���� �������� ���� ����� ��������������� ����� ���  ������� �������������� ��� ����������� �� ���������� ���������� �� ���� ��� ��������� ��� ����  ���� ��������� ���� ������� � �� ������������ �������  �� � ­ �� ����� ������­����� � ��������  �������������������������������������������������������������������������� �������������������������������������­��������­������������������������������������ ��������� ������� ��� ������������ ��� ������� �� ����� ������� ������������ �������� ��������������������������������������������������������������������������������������         ��� �� ������ ����  � �� �� �� �� ��� ��� ��� ��� ��� ���

��������������������������

����­���� ����­����

51 

la conscience régionale. Le collège royal de Besançon est au contraire soupçonné en raison des opinions libérales affichées par certains enseignants »193.

Le collège catholique Saint­François­Xavier ouvre le 5 novembre 1850, en face du lycée, 

« dans l’intention avouée de le concurrencer »194.  Dans  le  rapport  de  l’inspection  générale 1861 :  

« Le lycée de Besançon dont nous venons d’achever l’inspection se trouve dans une situation très difficile. D’une part les familles aristocratiques et à leur suite une partie considérable de la bourgeoisie trouvent de bon ton d’envoyer leurs enfants à l’Institution St François­Xavier qui est patronnée par le cardinal Mathieu. De l’autre, l’autorité municipale a fondé au commencement de cette année scolaire une École d’horlogerie […]. C’est là vous le voyez, une véritable école professionnelle semblable aux écoles annexes de nos lycées. Les enfants des ouvriers et contremaîtres y vont chercher un genre d’instruction qui, d’ordinaire, est donné dans les écoles de l’État. Ainsi privé de l’aristocratie et déserté par les enfants du peuple, le lycée de Besançon est réduit à une minorité qui va toujours diminuant »195.

Ce que confirme le recteur dans ses rapports au ministre : « L’influence cléricale est la

plus persistante, non sur les basses classes, mais sur les classes élevées et moyennes… »196.  Critiquant  l’attitude  de  monseigneur  Mathieu,  qui  s’attire  les  bonnes  grâces  de  l’élite  bisontine :  « Il ramène une croix de Saint­Grégoire au préfet et celle de Pie IX au receveur

général. Les enfants de ce dernier sont élevés à l’Institution St François­Xavier »197. Le rapport  de l’inspecteur général, en 1861, indique que sont également inscrits les enfants de l’ingénieur  en chef du département, de l’ingénieur civil et du président du tribunal de première instance. 

« Il est notoire que les familles qui tiennent le premier rang dans la ville de Besançon, et même celles de hauts fonctionnaires publics, envoient leurs enfants à Saint­François­Xavier »198. 

Cette rivalité est importante, les chiffres de 1858 pour le département du Doubs sont  de 537 élèves pour le public contre 520 pour les établissements privés et pour Besançon, 353  élèves inscrits au lycée contre 270 pour l’institution Saint­François­Xavier199. Cette lutte se  poursuit durant toute la période. L’inspecteur d’académie, en 1877, confirme que la petite  bourgeoisie inscrit ses enfants au lycée, mais « la grande fortune, les hauts fonctionnaires civils        

193 Fiétier Roland, Histoire de la Franche­Comté, Paris, Privat éditeur, 1977, p. 395.  194 Marlin Roger, 1964, op.cit., p. 350.  195 Archives nationales, F/17/7563, Inspection générale, rapport du 17 mai 1862.  196 Archives nationales, F/17/2649 : rapports trimestriels 1858­1863  197 Ibid.  198 Archives nationales, F/17/7563, Inspection générale, résumé des observations 1861.  199 AD Doubs, T323, procès­verbaux du Conseil académique : 1826­1861 

52 

ou militaires envoient de préférence leurs enfants dans les deux grands établissements religieux de Besançon : les frères de Marie et le collège des Eudistes »200.

En 1885, le proviseur Bon écrit dans ses rapports bimensuels : « l’intérêt de la France

républicaine et l’intérêt de notre lycée est de soustraire à l’influence cléricale et d’attirer chez nous le plus grand nombre possible d’élèves »201. L’inspecteur d’académie s’émeut, en 1888,  de la concurrence qu’il juge déloyale des écoles primaires confessionnelles202. En fixant un  tarif de l’externat privé à la moitié de celui du lycée, les effectifs des petites classes ont chutés  de moitié. À Besançon, cette rivalité entre public et privé est un élément structurant de l’école. 

Documents relatifs