• Aucun résultat trouvé

Chapitre I : Introduction

I. 4 : La prolifération cellulaire

I.4.3 Les protéines RB

Le substrat principal des Cyclines est pRb et ses deux homologues p107 et p130. Ces membres de la famille RB gouvernent la progression de la phase G1. Le membre de cette famille le mieux caractérisé est pRb, une protéine produite à partir du gène humain

Rb-1, où l’inactivation des deux copies du gène promeut la formation de rétinoblastome ou

tumeur maligne de la rétine [87]. PRb, p107 et p130 partagent une structure moléculaire similaire, notamment au niveau de la longue région C-terminale pourvue de deux domaines

pocket A et B qui médient l’interaction avec les protéines oncovirales des E1A

(adénovirus), antigène grand T (SV40) et E7 (virus du papillome humain), où ces dernières bloquent la fonction des trois membres. Ces oncoprotéines s’associent avec le domaine

pocket, via un motif LxCxE. L’alignement des trois séquences de pRb, p107 et p130

montre que p107 et p130 possèdent un motif de liaison avec les Cycline A/Cdk2 et Cycline E/Cdk2. De plus, en région N-terminale de p107 et p130, est situé un site inhibiteur de la fonction des Cdks [88]. La région C-terminale des trois membres est pourvue d’un peptide signal de localisation nucléaire ou NLS, qui consiste en deux groupes de résidus basiques. Ce peptide, en plus de permettre la translocation nucléaire des protéines RB, est impliqué dans le translocation nucléaire des protéines E2F4 et E2F5, où tous deux ne présentent pas de NLS [89]. Les membres de la famille RB sont modulés au niveau post-traductionnel, notamment par phosphorylation. Des analyses phosphopeptidiques ont démontré que pRb

est phosphorylable sur une douzaine de résidus sérine et thréonine. La phosphorylation graduelle de pRb, p107 et p130 résulte en leur inactivation. Durant la phase G0, le contenu en ARN de la cellule est faible et la forme hypophosphorylée de pRb et p107 contribue à stabiliser l’état G0 en réprimant l’ARN ribosomal de même que l’expression de l’ARN de transfert. C’est par l’intermédiaire des Cyclines/Cdks au cours de la phase G1 que la phosphorylation des protéines RB est déclenchée et induit la sortie de la phase G0 et la progression successive de la phase G1 [90]. La sortie de la phase G0 s’effectue par la phosphorylation de pRb par Cycline C/Cdk3, suivie rapidement de la phosphorylation par le complexe Cycline D1/Cdk4/6 jusqu’à la moitié de la phase G1. L’inactivation de ces protéines est maximale lors de la période tardive de la phase G1 et ce, par la phosphorylation médiée par le complexe Cycline E/Cdk2 [91]. Les protéines RB ont la capacité d’associer les membres E2Fs afin de moduler leur activité transcriptionnelle. En s’associant le domaine transactivateur des E2Fs et les promoteurs régulés par les E2Fs, pRb, p107 et p130 bloquent l’activité de transcription des E2Fs et répriment de manière active les promoteurs dépendant des E2Fs. À l’inverse, p130 est phosphorylé durant la phase G0/G1 par des kinases non définies. Durant la phase G1 et au début de la phase S, la chromatine se restructure et forme des foci en périphérie du noyau où nichent dans ces régions pRb, p107, p130, les E2Fs de même que certaines HDACs. Au sein de ces foci sont localisés les sites de régulation des E2Fs [92]. Ces mêmes régions seraient considérées comme des sites initiateurs de la réplication de l’ADN lors de l’entrée des cellules en phase S. Au-delà de leur homologie de séquence, les trois membres pRb, p107 et p130 adoptent des profils différents d’expression et d’interaction avec les membres E2Fs. Considérant la fenêtre temporelle incluant la phase G0 (quiescence), G1 et la période précoce de la phase S (état de différenciation), pRb est exprimé de manière constante. À l’inverse, p107 est faiblement et hautement exprimé aux phases G0 et S, respectivement. De plus, p130 est hautement exprimé et faiblement exprimé aux phases G0 et S respectivement. Paradoxalement, pRb et p130 sont hautement exprimés dans plusieurs types de cellules différenciées.

Figure 6: La phase de transition G1/S.

En phase G0/G1, les complexes cyclines-cdks sont inactivés via les inhibiteurs des cdks (cdk-i). Ainsi, pRb, sous sa forme hypophosphorylée, est associée en complexe avec les facteurs de transcription E2Fs et les HDACs (complexe répresseur de la transcription). Au cours de la transition G1/S, pRb est phosphorylée progressivement par les complexes cyclines-cdks. À l’état hyperphosphorylée, pRb est dissociée des E2Fs et des HDACs (complexe activateur de la transcription) et favorise l’entrée des cellules en phase S

(Inspirée de Sherr et McCormick, 2002) [93].

On classe les facteurs transcriptionnels E2F1 à E2F3comme étant des activateurs de la transcription. E2F4 à E2F6, pour leur part, agissent comme des répresseurs de la transcription. PRb interagit seulement avec les E2Fs activatrices E2F1-3 et E2F4 alors que les deux autres membres, p107 et p130, n’associent que les E2Fs répresseurs E2F4 et E2F5.

Cependant, la spécificité de liaison en fonction du type cellulaire reste à déterminer, puisque des résultats démontrent, par le biais du système double-hybride en levure, que p107 et p130 ont la capacité de s’associer aux trois E2Fs activatrices [94-96]. Les membres de la famille RB interagissent avec plusieurs partenaires, où pRb a l’habileté d’interagir avec plus de 110 protéines. Des interactions importantes, comme pRb/E2F et pRb/HDAC sont nécessaires pour la fonction répresseur des protéines RB, principalement lors de la phase précoce de la phase G1. Lors de la formation du complexe répresseur pRb/E2F, des enzymes modulatrices de la structure de la chromatine interagiront avec pRb afin d’augmenter la stabilité du complexe (Figure 6). En effet, les histones déacétyltransférases (HDACs) induisent une condensation de la chromatine de telle sorte qu’ils empêchent les E2Fs d’atteindre les régions promotrices de leurs gènes cibles. Au cours de la transition G1/S, principalement lors de la phosphorylation de Cycline D1/Cdk4/6 sur la région C- terminale pRb, l’interaction HDAC/pRb médiée par motif de liaison LxCxE aux domaines

pocket A et B est rompue, permettant ainsi aux complexes Cycline A/E/Cdk2 de lier les

domaines A et B et d’engager la relâche des E2Fs de pRb (Figure 6).

Durant la phase G0/G1, les facteurs transcriptionnels E2Fs répresseurs sont associés à leurs promoteurs respectifs et s’inscrivent en complexe avec p107 et avec p130. L’initiation de la phase G1 engage l’activation des diverses Cdks, ce qui compromet l’association du complexe E2Fs répresseur p107 ou p130. La phosphorylation de pRb par la Cycline D1/Cdk4/6 induit donc un switch des E2Fs lié au site de régulation, c’est-à-dire i qu’il se produira dans un premier temps la relâche des complexes répresseurs aux sites de régulation et, dans un deuxième temps, l’association des E2Fs activateurs aux sites transcriptionnels des promoteurs impliqués. La résultante étant la division cellulaire à cause de l’activation des protéines responsables de la progression du cycle, comme les protéines Mcms (qui contrôlent la réplication de l’ADN au niveau de la fourche même) et les Cyclines, dont les fonctions principales sont rattachées à la modulation du cycle cellulaire. Ainsi pRb contrôle la répression de la transcription coodonnée par les E2Fs et ce, par trois voies différentes : 1) pRb bloque l’activité transcriptionnelle des E2Fs simplement par une association directe avec le domaine activateur des E2Fs; 2) le recrutement de pRb au site de

régulation des E2Fs inhibe l’assemblage des complexes d’initiation de la transcription et, par conséquent, bloque l’activité transcriptionnelle des E2Fs, étant situés à proximité de ces complexes initiateurs; 3) pRb interagit avec des protéines impliquées dans le remodellage de la chromatine, ce qui entraîne, lors de sa liaison à cette dernière, un changement conformationelle de celle-ci, bloquant les sites de transcription nécessaires à l’activité des E2Fs. Plusieurs protéines participent à l’activité transcriptionnelle médiée par les E2Fs. La fonction des protéines RB est de moduler l’activité transcriptionelle des E2Fs pour ainsi contrôler la transcription des gènes impliqués dans la division cellulaire. pRb est également connue pour sa fonction biologique au cours du développement embryonnaire. Des études dans le modèle murin ont démontré que la mutation homozygote de pRb produit un embryon se développant normalement jusqu’à 12 à 13 semaines de gestation, où l’embryon meurt dû à un défaut de l’érythropïèse hépatique de même qu’à un problème survenu au cours du développement neural [97]. La génération de souris chimérique Rb-/-/p107-/- ou Rb-/-/p130-/- a permis d’observer la formation de rétinoblastomes, de tumeurs thyroïdiennes, d’ostéosarcomes et de lymphosarcomes [98]. L’ablation ou knock out des protéines pRb et p53 dans le modèle murin promeut un effet synergique sur la formation de tumeurs en comparaison avec les simples knock out, où le double knock out mène au développement de cancers du sein et de médulloblastomes [99]. De plus, pRb est impliqué dans la différenciation cellulaire. À l’inverse, l’expression de Cdk4 tend à diminuer au cours de la différenciation des cellules érythroleucémiques murines, où l’augmentation de pRb hypophosphorylé est renversée par la surexpression d’une forme mutée de Cdk4 constitutivement active [100]. De plus, le développement des os est défectueux dans les modèles murins p107-/-/p130-/- [99]. En effet, l’absence de ces 2 protéines est responsable d’une augmentation excessive de la prolifération des chondrocytes via le processus d’ossification endochondriale [101]. Les cellules déficientes pour le gène pRb ont une phase G1 de courte durée et une phase S allongée, ce qui résulte à des temps de division similaire à des cellules exprimant une forme fonctionnelle de pRb. À l’opposé, dans certaines conditions pathologiques comme le cancer, l’activation de ces protéines est anormalement contrôlée. En effet, dans la majorité des tumeurs, la protéine pRb est

constitutivement inactivée soit par une mutation directe de la protéine ou par un dysfonctionnement des Cdks. p107 est impliquée dans la formation de rétinoblastome. En effet, par le biais de modèles murins, il a été démontré que la mutation hétérozygote de pRb (pRb+/-) n’est pas suffisante pour le développement de tumeurs, alors que l’animal pRb+/-/p107-/- développe une dysplasie de la rétine. Cela démontre que p107 peut également agir comme suppresseur de tumeur [102]. De plus, p130 est faiblement exprimée dans les tumeurs nasopharyngées, incluant une mutation dans la portion C-terminale de la protéine et suggérant également que p130 agit à titre de suppresseur de tumeur pour p130 [103]. Dans les rétinoblastomes, le cancer du poumon à petites cellules et les sarcomes, la fonction de pRb est abrégée et ce, par la présence de mutations chromosomiques [104]. Dans les carcinomes cervicaux, des protéines oncovirales du virus du papillome humain, comme E7, promeut la dégradation de pRb spécifiquement et, par conséquent, élimine pRb des cellules [105].

Documents relatifs