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IV.3. COMPARAISON DU COMPORTEMENT ISOLANT/CONDUCTEUR

IV.3.1. Propagation dans les deux matériaux: inhibition dans le plastique

Afin de valider cette interprétation, examinons plus en détail le comportement de la distance de pénétration moyenne du point de vue collisionnel et électrique. Comme nous avons déjà vu, le pouvoir d'arrêt dû aux collisions des électrons rapides dans un matériau est, en première approximation, proportionnel à la quantité ρx. (cf. [III.26]). A parité

d'épaisseur, donc, les électrons sont environ trois fois moins ralentis dans le plastique que dans l'aluminium. A titre indicatif, nous montrons sur la figure 4.19, l'évolution de dépôt d'énergie, calculé par le code de propagation PropEl, en fonction de l'épaisseur traversée, pour des électrons de 500 keV. Nous présentons le cas d'une cible de 100 µm d'aluminium comparé au cas d'une cible de plastique de même épaisseur.

0 100 4 10-3 8 10-3 0 50 100 150 200 Al C H J/! m/Je - épaisseur (!m) couche de propagation Mo Pd Th=500 keV

Fig.4.19. Dépôt d'énergie, calculé par le code collisionnel, en fonction de l'épaisseur de la cible, dans le cas de l'aluminium et du plastique, pour des électrons de 500 keV.

IV: PROPAGATION DANS UN ISOLANT OU CONDUCTEUR

L'énergie déposée dans la couche de propagation d'aluminium est, comme prévu, sensiblement supérieure. Dans les deux cas, au niveau des couches fluorescentes, le dépôt augmente drastiquement en raison notamment du numéro atomique élevé du molybdène et du palladium.

Rappelons néanmoins que les nombres d'arrêt Lb, Lf et Lω de l'aluminium et du

plastique sont différents. Cependant, cette différence n'influe pas de façon appréciable sur le dépôt total d'énergie, comme montré, par exemple, dans le cas présenté sur la figure 4.20. Afin de pouvoir comparer les deux matériaux, nous avons ici reporté l'énergie déposée par unité de ρx, exprimée donc en J·cm2/mg, dans une cible de 100 µm d'aluminium et dans une

cible de 300 µm de plastique. Nous avons donc comparé le dépôt d'énergie dans les deux matériaux à parité de ρx, afin mettre ainsi en évidence les éventuelles différences des

nombres d'arrêt. Aucune différence appréciable est visible entre les deux cas. C'est essentiellement le rapport de densité des deux matériaux qui conduit à une différence sur le pouvoir d'arrêt total. Nous observons le même comportement pour des électrons de

180 keV. La distance de pénétration linéaire attendue par une analyse purement

collisionnelle est alors d'environ trois fois supérieure dans le cas du plastique.

5 10-4 2 10-3 0 10 20 30 CH Al E dep (J·cm 2 /mg) !*x (mg/cm2) couche de propagation

Fig.4.20. Dépôt d'énergie en unité de ρx, dans une cible de 100 µm d'aluminium, comparé au cas d'une cible de 300 µm de plastique.

Examinons maintenant en détail l'action des effets électriques qui sont directement exprimés à partir de la distance de pénétration électrique z0. Afin de comparer cette distance

avec les pénétrations obtenues expérimentalement, nous devons connaître la conductivité de la matière traversée par les électrons rapides. Comme nous l'avons déjà vu au chapitre

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précédent, celle-là est strictement liée au chauffage induit par le passage même des électrons. De même que l'expérience effectuée au RAL, nous attendons ici un chauffage non négligeable des cibles. Celui-ci, provoqué par le transfert de l'énergie aux particules rencontrées par les électrons au cours de leur propagation, est approximativement proportionnel à la quantité ρ·xexp, comme indiqué par le modèle simple exposé dans le

chapitre précédent (cf. formule [III.27]). Dans le cas des deux séries, nous obtenons expérimentalement des distances moyennes de pénétration tout à fait comparables dans les deux matériaux. Le volume concerné par la propagation étant alors comparable dans les deux cas, nous pouvons nous attendre de façon assez qualitative à une température dans le plastique d'environ trois fois supérieure à la température induite dans l'aluminium. De façon analogue au chapitre précédent, nous avons estimé ce chauffage à partir de l'énergie déposée calculée par le code collisionnel, qui s'adapte bien au cas de l'aluminium. Nous montrons dans la figure 4.21, la température induite par le dépôt d'énergie dans le cas d'un faisceau d'électrons de 1 J et de 2 J. 0 2 0 4 0 6 0 0 4 0 8 0 1 J 2 J T p (eV) épaisseur (!m)

couche de propagation (Al)

Fig.4.21. Evolution du chauffage induit par des électrons rapides de 500 keV, dans une cible de 100 µm d'aluminium, obtenu à partir des tables Sesame.

Nous remarquons que la température est, dans ce cas, relativement faible, si on la compare, notamment, à celle que nous avons obtenue lors de l'expérience au RAL. Constatons d'abord que, dans ce cas, nous avons une énergie totale dans le faisceau d'électrons un peu plus faible. De plus, nous avons ici observé que la distance de pénétration mesurée est comparable à l'épaisseur moyenne des cibles. Nous attendons donc à ce qu'une fraction non négligeable des électrons s'échappe de la cible. Une partie de

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l'énergie n'est pas déposée dans la cible. La température est de l'ordre de quelques eV. Nous nous attendons, en raison des considérations précédentes, à une température de 10-

15 eV maximum dans le plastique. Dans le cas des basses intensités, nous obtenons une

température légèrement inférieure, mais très comparable.

Ces considérations nous permettent maintenant de faire des prévisions sur l'état macroscopique des cibles traversées par les électrons et plus particulièrement sur la distance électrique (cf. formule [II.24]). Celle-ci dépend non seulement de la conductivité mais également de l'intensité laser.

A parité d'intensité laser, elle sera inférieure d'un facteur trois environ dans le plastique par rapport à l'aluminium. Les effets électriques seront donc sensiblement plus efficaces dans ce matériau. En même temps, dans le même matériau, elle sera d'un ordre de grandeur inférieur pour le cas des hautes intensités, où l'inhibition électrique devient plus importante.

Nous pouvons maintenant comparer les prévisions théoriques concernant les effets électriques et collisionnels, avec les résultats expérimentaux. Soulignons d'abord qu'une petite imprécision sur les paramètres définissant la distance électrique selon la formule [II.24], conduit à une valeur de z0 qui peut être très différente de la valeur réelle. La

conductivité de la matière et la température des électrons, en particulier, ne sont pas connues avec une précision suffisante. Nous avons donc préféré raisonner de façon inverse, et déduire la distance "électrique expérimentale" zélec à partir directement des distances

collisionnelle xcoll et expérimentale xexp. Pour cela, nous avons utilisé la moyenne

harmonique suivante (cf. [II.36]):

zélec =

xcoll ! xexp

xcoll " xexp

[IV.5]

Nous obtenons les valeurs résumées dans le tableau 4.1.

zélec (1° série) xexp (1° série) zélec (2° série) xexp (2° série)

Aluminium ≈ 240 µm ≈ 60 µm ≈ 1140 µm ≈ 250 µm

Polyéthylène ≈ 140 µm ≈ 100 µm ≈ 300 µm ≈ 230 µm

Tab.4.1. Distances électriques déduites de la moyenne [IV.5].

Nous constatons donc que la variation de zélec en fonction du matériau et en fonction

de l'intensité laser reproduit le comportement attendu. Cette distance est, dans le cas de l'aluminium, sensiblement supérieure à xexp: les effets électriques jouent un rôle mineur et la

propagation est essentiellement collisionnelle. Dans le cas du plastique, zélec est assez

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entre zélec et xexp du plastique est approximativement du même ordre dans le cas des deux

intensités.

A partir des valeurs de zélec déduites directement des données expérimentales, nous

pouvons, à posteriori, obtenir des informations sur l'état du plastique dans les cas des deux séries de tirs. Les paramètres fondamentaux de l'expression de Bell pour la distance électrique ([II.24]) sont la conductivité, la température Th des électrons et l'intensité laser. A

partir de cette expression, alors, nous obtenons les conditions suivantes:

zélec

(

)

2°! 2.2 " z

(

élec

)

Ilaser Th2 # $ % & ' ( !4 3 Ilaser Th2 # $ % & ' ( ) * + + , + + -.2°! 3 ".1° [IV.6]

Bien que les coefficients obtenus ci dessus n'ont pas une validité quantitative, ils indiquent clairement une tendance: le chauffage induit dans le cas à hautes intensités est plus important.

En conclusions, les résultats concernant la distance de pénétration sont tout à fait cohérents avec une interprétation qui confère à la propagation un caractère essentiellement "collisionnel" dans le cas de l'aluminium et plutôt de "type électrique" dans le plastique.

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