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2. IDENTIFICATION DES MEDICAMENTS A RISQUE PAR UN CODE-COULEUR 73

3.2. DISPOSITIFS DE PERFUSION MULTI-LUMIERES (OU PROLONGATEURS

3.2.3. Prolongateurs longs à faible volume résiduel

C’est dans ce contexte qu’un nouveau DM de perfusion multi-lumières, marqué CE, a été mis sur le marché depuis fin 2011. Il s’agit de l’Edelvaiss Multiline®

(Doran International, Toussieu-Lyon, France), dont la première version comporte huit accès (ML-8®) (figure 23). Ce prolongateur multi-lumières pré-rempli permet d’administrer jusqu’à sept médicaments et un véhicule de perfusion / solution d’hydratation simultanément et sans contact sur la même ligne. Ce principe est permis grâce à la présence de huit lumières distinctes regroupées en un seul tube de 150 cm. Chaque voie est ainsi reliée à une lumière spécifique située en périphérie du tube, dont le volume interne est très faible (V = 0,9 mL). Une voie de haut débit (voie High Flow – HF, V = 2,9 mL) est réservée au véhicule de perfusion ; celle-ci est

Figure 23. Photographie du dispositif Edelvaiss-Multiline® 8 voies (ML-8®) avec son support de fixation.

D’autres modèles ont été élaborés par la société, avec respectivement 3 et 5 voies d’accès, mais dont le principe reste identique (figure 24).

Figure 24. Photographie des deux dispositifs de perfusion multi-lumières Edelvaiss Multiline 3 voies (à gauche) et 5 voies (à droite), munis de valves unidirectionnelles et de tube multivoies d’une longueur de 150 cm.

Ces dispositifs de perfusion multi-lumières ont fait l’objet de plusieurs études, portant notamment sur l’impact de leurs caractéristiques (réduction de l’espace commun des médicaments perfusés simultanément, présence de valves anti-retour) sur le débit massique des médicaments administrés dans le contexte de la multi-perfusion [81–85].

Récemment, Foinard et al. [86] ont évalué au travers d’une première étude expérimentale l’intérêt de l’utilisation des DM de perfusion multi-lumières sur l’apparition de phénomènes de précipitation lors de l’association de furosémide (utilisée à trois concentrations différentes) et de midazolam, connus pour être incompatibles sur le plan physico-chimique. Pour ce faire, les auteurs ont comparé deux dispositifs multi-lumières (cf. le tripode VSET+M® et l’Edelvaiss Multiline-8®) et un dispositif mono-lumière, à savoir la rampe de robinets classiquement utilisée dans les services de soins (figure 25). Les trois DM différaient dans leur conception et leur volume interne. L’évaluation des dispositifs reposait sur une inspection visuelle de la tubulure de perfusion afin d’objectiver l’apparition de tout précipité et un comptage particulaire en cas d’absence d’incompatibilité visible à l’œil nu.

Figure 25. Représentations schématiques des DM de perfusion étudiés par Foinard et al. [85]. A, Dispositif standard (rampe de robinets). B, Dispositif tri-lumières (VSET+M®). C, Dispositif multi-lumières (Edelvaiss Multiline-8®). A noter que le dispositif tri-lumières VSET+M® n’est plus commercialisé actuellement (remplacé par la gamme CW+). Inspiré de Foinard et al. [86].

Lors de l’utilisation du dispositif standard, un précipité apparaissait, peu importe la concentration de furosémide utilisée. En revanche, leurs résultats montraient que l’utilisation de dispositifs de perfusion multi-lumières permettent, dans certaines conditions, de prévenir l’apparition de la précipitation se traduisant par une réduction significative des débits d’hydratation avec le dispositif Edelvaiss Multiline-8® (figure 26).

0 50 100 2,5

5 10

Plus faible débit de perfusion satisfaisant l'inspection visuelle et le comptage particulaire

C o n c e n tr a ti o n f u ro s ém id e ( e n m g /m L ) Dispositif standard VSET+M Edelvaiss Multiline-8

Figure 26. Résultats montrant les plus faibles débits de perfusion de SSI permettant de s'affranchir de toute réaction de précipitation, entre les trois DM de perfusion étudiés. Concernant le ML-8®, seule figure la combinaison de furosémide et de midazolam employant les accès les plus proches de la voie d’hydratation.

Cette étude a permis de confirmer l’hypothèse selon laquelle 1) il existerait une diminution du temps de contact entre les médicaments incompatibles entre eux et 2) les conditions de leur mise en contact dans le cathéter affectent le niveau de production de particules issue de l’incompatibilité médicamenteuse. Concernant le deuxième point, la géométrie spécifique de la sortie du tube permet d’établir une dilution préalable de chaque médicament par la solution d’hydratation avant leur rencontre, ce qui permet de réduire la formation des particules au cours de la perfusion simultanée de médicaments incompatibles.

Une simulation informatique de la perfusion simultanée des deux produits utilisés au cours de l’étude est représentée dans la figure 27 ci-dessous, permettant de mieux comprendre le phénomène de dilution opéré sur les produits par le véhicule d’hydratation.

Figure 27. Confirmation de l'hypothèse de la prévention des incompatibilités médicamenteuses grâce à la géométrie interne du prolongateur multi-lumières, réalisée par la simulation informatique des flux hydrique et médicamenteux. Vert : midazolam, jaune : furosémide, bleu : SSI. Réalisé par le fabricant Doran International.

La prévention des incompatibilités physico-chimiques d’origine médicamenteuse par la réalisation d’une « barrière hydrique » avait été évoquée dès le milieu des années 1980 [87,88]. Ainsi, Johnson et al. [87] ont utilisé la méthode basée sur l’administration de deux médicaments incompatibles par un système de perfusion IV rétrograde (figure 28). Les solutions incompatibles sont perfusés par un même point d’accès en prenant soin d’administrer entre deux une quantité de fluide qui permettra d’exercer le rôle de barrière hydrique, limitant ainsi le contact entre les produits. Grâce à cette méthode, les auteurs de l’étude sont parvenus à perfuser le bicarbonate de sodium et du chlorure de calcium en utilisant différents vecteurs d’hydratation (glucose, SSI et eau pour préparation injectable) sans occasionner de

précipité visible à l’oeil nu. Un volume de 2 mL d’hydratation suffisait à prévenir ce phénomène. Toutefois, cette méthode n’a pas été reprise en pratique clinique, vraisemblablement du fait des variations importantes du débit massique des médicaments qu’elle induit.

Figure 28. Montage de perfusion IV rétrograde utilisé pour prévenir les incompatibilités physico-chimiques au cours de la perfusion. Les solutions médicamenteuses incompatibles sont administrées par le robinet B (2 x 2 mL). Entre chaque administration, un volume d'environ 2 mL d’hydratation exerce un effet de barrière hydrique entre les 2 médicaments incompatibles. Inspiré de Johnson et al. [87].