• Aucun résultat trouvé

Projet de recherche

Durant ma thèse au sein de l’équipe Bioconversion du SEESIB de Clermont-Ferrand, sous la tutelle du Pr. Jean Bolte et du Dr. Thierry Gefflaut, j’ai eu pour mission d’élargir les études de spécificité de substrats de l’AspAT et de la BCAT à de nouveaux analogues du KG afin de préparer une variété d’analogues du Glu (Schéma 66). Comme nous l’avons vu dans la première partie, ces composés sont des ligands sélectifs potentiels des différents récepteurs et transporteurs du système glutamatergique. L’évaluation des propriétés pharmacologiques des analogues du Glu a donc été envisagée dans le cadre d’une collaboration.

HO2C H2N CO2H R4 HO2C O CO2H R4 R3 R3 AT

Schéma 66 : synthèse d’analogues du Glu par transamination.

Nous avons essentiellement envisagé l’élaboration de nouveaux analogues du Glu substitués par des groupements fonctionnalisés en position 4 et incluant les fonctions alcool, acide, éther, amide et ester (Figure 37). En effet, nous avons vu que plusieurs analogues du Glu substitués en position 4 par divers groupements hydrocarbonés ont montré des sélectivités vis-à-vis des différents récepteurs et transporteurs du système glutamatergique. L’introduction d’hétéroatomes sur les substituants de la chaîne du Glu permet d’envisager des interactions supplémentaires au niveau des sites de liaison et pourrait donc permettre la mise au point de nouveaux ligands sélectifs. D’autre part, les fonctions ester et amide offre l’opportunité de générer assez facilement une grande variété structurale en modifiant la nature des substituants des fonctions ester (R) et amide (R et R’).

Nous avons également envisagé de synthétiser des analogues phosphorylés comme l’AP4 qui montre une sélectivité marquée pour les mGluRs du groupe III. Nous avons voulu savoir si notre approche chimio-enzymatique permettait d’accéder à ce type d’analogues du Glu. Enfin, nous nous sommes aussi fixés comme objectif la préparation d’un nouvel analogue contraint incluant un cycle β-lactame : cette structure a été définie en collaboration avec le Dr. L. Bunch. (Figure 37). En effet, le L-CBG II, dérivé cyclobutanique du Glu préparé au laboratoire, a montré une activité très intéressante en tant qu’agoniste sélectif des mGluRs II. Cette sélectivité offre un potentiel thérapeutique intéressant, comme nous l’avons évoqué dans le cas des analogues LY354740 (cf chap I). Le Dr. Bunch a par ailleurs effectué une étude de modélisation moléculaire qui lui a permis de supposer que l’introduction de la fonction amide au niveau du cycle pourrait permettre d’améliorer l’efficacité et la sélectivité d’action par rapport au dérivé cyclobutanique.

HO2C CO2H NH2 O R HO2C CO2H NH2 O R O HO2C CO2H NH2 N R O R' n n n HO2C P NH2 O R R' HO2C NH2 N H CO2H O

Figure 37 : structures des nouveaux analogues du Glu dont la synthèse a été envisagée dans ce travail.

Afin d’accéder à la plupart de ces analogues du Glu et à leurs précurseurs c’est à dire aux analogues du KG, nous avons envisagé de développer l’approche générale basée sur la condensation de Michael et l’oxydation d’acétate d’énol, méthode présentée précédemment.

D’autre part, nous avons aussi souhaité introduire un groupement azoture en bout de chaîne du substituant en position 4 afin d’effectuer des cycloadditions [2+3] avec divers alcynes. Cette approche de type « Click Chemistry » offre un accès potentiel à une nouvelle librairie d’analogues du Glu obtenus à partir d’un seul et même acide aminé (Schéma 67).

HO2C CO2H NH2 N3 HO2C CO2H NH2 N R N N R

Schéma 67 : cycloaddition entre un analogue du Glu et un alcyne.

Dans la partie bibliographique portant sur la pharmacologie des GluRs, nous avons vu que ces récepteurs comportent un site de fixation du Glu et d’autres sites de liaison d’agonistes ou d’antagonistes non compétitifs du Glu. Ainsi, la préparation de bi-ligands reliant un analogue du Glu à un autre ligand non compétitif serait un moyen d’obtenir une grande sélectivité d’action et de moduler la réponse des récepteurs et ainsi diminuer les effets secondaires. Cette approche nous a paru très intéressante notamment dans le cas des NMDARs. On peut en effet imaginer une molécule de Glu reliée par l’intermédiaire d’une chaîne carbonée à un autre ligand tel qu’une amine, qui bloquerait les canaux ioniques des iGluRs ou qui se fixerait sur d’autres sites tels que celui de la glycine (Figure 38).

Figure 38 : bi-ligands interagissant sur différents sites des GluRs.

Site de fixation Glu Autres Sites

Projet de recherche

Des bi-ligands comportant 2 motifs Glu seraient aussi très intéressants pour interagir au niveau des récepteurs oligomériques comportant plusieurs sous-unités fixant le Glu.

Au cours de ce travail, nous avons aussi envisagé d’allonger la chaîne en position 4 du Glu, afin de tester la tolérance des ATs et d’orienter notre travail vers d’éventuels substrats immobilisés utilisables dans un procédé de transamination à grande échelle : un glutamate, fixé sur un support solide ou polymérique via une substitution du carbone 4, pourrait être substrat d’une transaminase comme l’AspAT ou encore la BCAT. Un polymère de type PEG greffé avec le Glu pourrait, par exemple, être préparé à partir d’analogues fonctionnalisés. L’idée est donc de « piéger » le substrat donneur immobilisé et l’AT à l’intérieur d’une membrane semi-perméable et d’y faire passer un courant continu en cétoacide (substrat accepteur). A la sortie de ce réacteur, une colonne de résine fortement acide permettrait d’accrocher le produit aminé de la transamination et ainsi de déplacer l’équilibre de la réaction enzymatique. En sortie de colonne, le flux en cétoacide repart dans le réacteur membranaire après ajustement du pH si besoin (Schéma 68). Le donneur immobilisé serait régénéré dans une étape indépendante en utilisant un donneur peu coûteux comme l’Asp, le Glu ou l’ACS. SO3H NH4OH R NH2 HO O R O HO O NH2 HO O OH O AT cétoacide résiduel pH Glu, Asp ou ACS KG, OA ou pyruvate cétoacide substrat

Schéma 68 : modèle de réacteur fonctionnant pour la préparation d’analogues du Glu à l’échelle industrielle. Dans la littérature, nous trouvons relativement peu d’exemples de synthèse enzymatique où le substrat est fixé sur un support solide, ou sur un polymère soluble dans l’eau tel que le PEG. Les applications les plus récentes concernent la synthèse peptidique à l’aide de protéases151,152 et la préparation d’oligonucléotides à l’aide de glycosyltransférases 153,154,155,156. Par contre, de nombreux

151 X. Wu, X. Bu, K. M. Wong, Z. Guo, Org. Lett., 2003, 1749-1752. 152

R. U. Ulijn, B. Baragana, P. J. Halling, S. L. Flitsch, J. Am. Chem. Soc., 2002, 10988-10989. 153 C. Schmitz, M. T. Reetz, Org. Lett., 1999, 1729-1731.

travaux ont été effectués sur le cofacteur NAD. En effet, l’utilisation de déshydrogénases pour la production d’alcools ou d’aminoacides chiraux à l’échelle industrielle dans des procédés en continu implique que le cofacteur soit immobilisé ou modifié pour rester confiné à l’intérieur d’un réacteur à membrane157,158. L’activité de l’enzyme avec le NAD modifié par une chaine PEG fixé au niveau du cycle adénine (qui interfère peu avec les enzymes) est conservée, avec cependant une augmentation du Km. La problématique que nous abordons avec le KG ou le Glu immobilisé est assez semblable : si le mode de fixation entraine peu de perte d’activité, le Glu immobilisé pourrait donc servir de donneur dans un réacteur membranaire, comme nous l’avons expliqué dans le paragraphe précédent. Ce « Glu immobilisé » pourrait par ailleurs présenter d’autres applications dans le domaine de la chromatographie d’affinité.

En parallèle de ce travail de synthèse, un projet de modélisation moléculaire a porté sur l’étude du site actif de l’AspAT d’E.coli. Cette étude a eu pour premier objectif d’expliquer et de comprendre l’énantiosélectivité et la spécificité de substrat de l’enzyme. D’autre part, un autre but était de définir un modèle de prédiction d’activité de l’enzyme, nous aidant à orienter nos travaux de synthèse vers des substrats potentiels de l’AspAT. Ce travail est présenté dans la seconde partie du mémoire.

154 G. Fanny, S. D. Jason, K. J. Jensen, T. R. Owen, M. Debra, Carbohydrate Research, 2003, 1951-1960.

155 K. Yamada, S-I. Nishimura, Tetrahedron Lett., 1995, 9493-9496.

156 M. Schuster, P. Wang, J. C. Paulson, C-H. Wong, J. Am. Chem. Soc., 1994, 1135-1136. 157

M-O. Moussan, K. Mosbach, Methods in enzymol., 1987, 3-8.

Documents relatifs