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III/ Méthodologie

3/ Profils de la classe et des enquêtés

Afin de mener notre enquête, nous avons choisi d’interroger des enseignants d’une même classe dans le but de pouvoir comparer des pratiques auprès de mêmes élèves. Il est par ailleurs essentiel de préciser que notre terrain d’enquête est aussi le lieu de stage de l’un

d’entre nous. Pour cette raison, la communication avec les enquêté-es a été relativement facilitée, ceci expliquant le tutoiement dans plusieurs des entretiens.

Les quatre enseignants interrogés ont en commun une classe de 4ème (que nous nommerons la 4ème A) et occupent tous actuellement la fonction de professeur principal d’une classe à différents niveaux (6ème, 4ème, 3ème). Il est important de préciser que l’une des enseignantes interrogées, Virginie (le prénom a été changé par respect de

l’anonymat), professeure de Sciences Physiques, est aussi la professeure principale de la

classe de 4ème A. Cette classe de 4ème compte 29 élèves. Parmi eux, deux sont reconnus en situation de handicap par la MDPH : un jeune syrien malvoyant, Issam (le

prénom a été changé par respect de l’anonymat) récemment arrivé en France, et, qui a

intégré la classe après la rentrée, ainsi que Juliette (le prénom a été changé par respect

de l’anonymat), dyslexique et dyscalculique. Même si Issam ne maîtrise pas la langue

française, il progresse vite, et, les deux élèves sont considérés comme étant très autonomes par les enseignants interrogés. C’est une classe plutôt difficile avec quelques comportements inadaptés. Il faut noter que c’est la seule classe de l’établissement où aucun élève n’a souhaité participer au Conseil de Vie Collégienne (CVC), instance représentative et participative des élèves à la vie de leur établissement. Ceci illustre bien le profil de la classe et son manque d’investissement et d’engagement. Par ailleurs, c’est une classe où les élèves peinent à s’écouter les uns les autres. La professeure principale avait d’ailleurs entrepris une réflexion autour d’un blason des besoins des élèves en heure de vie de classe afin de définir avec eux quelques conduites à adopter pour améliorer le climat de classe ainsi que la relation avec les enseignants, mais, les élèves n’ont pas souhaité continuer ce travail.

En ce qui concerne le profil des enseignants interrogés, nous avons pu nous entretenir avec quatre d’entre eux, dont la professeure principale. Il est d’ailleurs important de préciser que tous se sont portés volontaires pour répondre à nos questions suite au mail envoyé à l’ensemble des treize enseignants de cette classe de 4ème. On peut donc supposer qu’ils sont tous relativement à l’aise avec le sujet de l’inclusion scolaire et assument probablement leurs pratiques au sein de la classe. De plus, et s’il n’est pas possible de connaître avec certitude le discours et l’état d’esprit des enseignants n’ayant pas répondu à notre invitation, on peut inférer une représentativité relative de cet échantillon vis à vis de l’équipe éducative. En effet, ces enseignants et personnels d’éducation sont malgré tout nombreux, viennent de disciplines différentes et sont, comme

la professeure principale, des « personnels ressources », souvent moteurs dans une équipe. Voici leurs profils respectifs :

Sujet 1 (que nous appellerons Julien) (cf retranscription entretien annexe 3) :

Julien est un homme, de 40 ans, qui enseigne les Sciences de la vie et de la Terre depuis 17 ans. Il a commencé à travailler en collège en Auvergne, en zone d’éducation prioritaire, puis, dans un lycée « Prévention violence » en Picardie. Il est maintenant enseignant au Collège Alouette, depuis neuf ou dix ans, et intervient principalement auprès des classes de 6ème, 4ème et 3ème. Il est sensible à la pédagogie Freinet et a longtemps fait partie d’une association dont l’objectif était d’ouvrir un Collège-Lycée en pédagogie Freinet. Julien est lui-même parent d’un enfant bénéficiant d’un PAI (Projet d’accueil individualisé) pour cause d’allergie alimentaire.

Sujet 2 (que nous appellerons Christine) (cf retranscription entretien annexe 4) :

Christine, 50 ans, est professeure d’Anglais et évolue depuis presque 20 ans au sein du Collège Alouette. Riche de 27 ans de carrière, elle a connu le collège et le lycée, et a quasiment toujours occupé le rôle de professeure principale. Elle a choisi son métier par réelle conviction et pour aider les élèves en difficulté : « Je suis prof dans le Public pour

essayer d'aider. Moi, je viens d'un milieu populaire, mes parents n'avaient pas fait d'études, donc moi, c'est plutôt ça que je visais ».

Sujet 3 (que nous appellerons Romuald) (cf retranscription entretien annexe 5) :

Romuald, 48 ans, est professeur de Mathématiques depuis trois ans. Après une longue expérience dans le milieu de l’entreprise, dans le domaine de l’informatique, où il avait notamment des missions de management, il a choisi la reconversion professionnelle. Il a d’abord exercé pendant un an dans une commune voisine, pendant son année de stage, et, il est en poste au Collège Alouette, depuis sa titularisation. Il est aussi professeur principal d’une autre classe de 4ème.

Sujet 4 (que nous appellerons Virginie) (cf retranscription entretien annexe 6) :

Virginie, 48 ans, est enseignante de Physique-chimie depuis près de vingt ans. Après une courte expérience de contractuelle et de vacataire, cette enseignante a obtenu son CAPES en interne. Trois ans plus tard, en 2007, elle a été affectée au sein du Collège

Alouette, au sein duquel elle enseigne encore aujourd’hui. Elle est professeure principale de la classe de 4ème sur laquelle porte notre enquête, mais, est mobilisée sur une classe de chaque niveau du collège.

En complémentarité de ces entretiens et dans l’objectif de nourrir notre réflexion, nous avons pu interroger une AESH (accompagnante des élèves en situation de handicap) (cf

guide d’entretien Annexe 2) :

Sujet 5 (que nous appellerons Lydia) (cf retranscription entretien annexe 7) :

Lydia a 41 ans, est mère de famille, et exerce le métier d’AESH depuis l’année dernière. Elle a commencé au lycée professionnel voisin et exerce maintenant sur les deux établissements. Elle a choisi ce métier, dans un moment de réorientation professionnelle, parce qu’elle avait envie d’aider les autres et de se sentir utile ; « vers ce métier qui je

pense est un métier d'aide, de soutien, pour des enfants qui en ont besoin quoi ». Elle est

en effet sensible à cette problématique, du fait, entre autres, que l’un de ses neveux est sourd et muet ; « donc, c'est un premier poste dans ce domaine-là pour moi...euh, c'est

quelque chose, c'est un poste qui m'intéresse depuis un moment parce que...bon, j'ai un neveu déjà qui est sourd-muet… ».

Enfin, afin d’avoir une vision plus globale de la politique inclusive mise en place au sein de l’établissement et du suivi des élèves en situation de handicap, nous avons rencontré l’enseignant référent à la scolarisation des élèves en situation de handicap de la circonscription (cf guide d’entretien annexe 2) :

Sujet 6 (que nous appellerons Nicolas Meunier) (cf retranscription entretien annexe

8) :

Nicolas Meunier, qui semble avoir autour de 45 ans, est enseignant référent depuis maintenant quatre ans. Auparavant, il était professeur des écoles spécialisé et travaillait en classe ULIS (Unité localisée pour l’inclusion scolaire). En tant qu’enseignant référent, il intervient sur tous les établissements de la circonscription, du premier degré (écoles maternelles et élémentaires) au second degré (collèges et lycées), ainsi que dans deux établissements médico-sociaux (IME, institut médico-éducatif, et ITEP, institut

thérapeutique, éducatif et pédagogique). Son rôle principal est de s’assurer de la mise en œuvre des PPS ( Projets personnalisés de scolarisation), définis par la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées) pour les élèves en situation de handicap, au sein des établissements scolaires. Cette année, Nicolas Meunier suit 258 dossiers. Comme évoqué lors de l’entretien, il fait le lien entre les trois entités que sont la MDPH, l’Éducation nationale (notamment à travers les enseignants) et les familles.

Récapitulatif des profils des enquêté-es

Sujet 1 Sujet 2 Sujet 3 Sujet 4 Sujet 5 Sujet 6

Sexe Homme Femme Homme Femme Femme Homme

Âge 40 50 48 48 41 Environ 45 Profession Enseignant SVT Enseignante Anglais Enseignant Mathématiques Enseignante Sciences Physiques AESH Enseignant référent à la scolarisation des élèves en situation de handicap Années d'expérience 17 27 3 19 1 4

Parmi les quatre enseignants interrogés, trois exercent cette profession depuis plus de quinze ans et font donc preuve d’une expérience conséquente, notamment dans la gestion du groupe-classe. Quant à Romuald, enseignant de Mathématiques depuis trois ans, après une vingtaine d’années dans le milieu de l’entreprise, dans l’informatique, il apporte un regard nouveau sur l’exercice d’enseignant. Cependant, et malgré des années d’expérience qui diffèrent, tous s’accordent autour d'une passion commune pour leur profession. Ils affirment aussi que les pratiques et attendus spécifiques liés aux principes de l'École inclusive n’ont pas bouleversé la formation universitaire préparant au métier.

En ce qui concerne Lydia, l’AESH, son expérience d’un an seulement ne l’empêche pas, il nous semble, d’avoir une analyse juste sur la situation des élèves en situation de handicap. Elle exerce ce métier par choix, avec bienveillance envers les élèves qu’elle accompagne.

situation de handicap depuis seulement quatre ans mais côtoie l’Éducation nationale depuis quelques années déjà, en tant que professeur des écoles spécialisé. Son expérience démontre donc un intérêt particulier porté vers les élèves en situation de handicap ainsi qu’une expérience de terrain certaine.

Ces six portraits nous ont permis de nourrir notre enquête de réflexions, tantôt communes, parfois contrastées. Cette vision spécifique de l’école inclusive que nous permettent les témoignages de professionnels intervenant auprès des élèves en situation de handicap, à divers niveaux d’accompagnement d’ailleurs, sera confrontée aux recherches scientifiques portant sur cette question ; des recherches notamment étudiées en amont de ce travail.

IV/ Résultats

Nos divers entretiens ont mis en lumière une vision commune ainsi que des difficultés partagées, notamment par les enseignants. Cependant, l’entretien avec l’enseignant référent à la scolarisation des élèves en situation de handicap vient parfois contrebalancer différents arguments émis par les professeurs. Enfin, quelques-unes de nos hypothèses ont pu être confirmées ou infirmées lors de nos échanges. Toutefois, il semble difficile d’établir des généralités sur un échantillon aussi restreint et à partir de témoignages de professionnels engagés et volontaires. L’analyse de nos résultats s’articule, dans un premier temps, autour des difficultés évoquées par les enseignants pour une inclusion effective, puis, dans un second temps, autour des pratiques de compensation que les professeurs mettent en place au sein de la classe, et, enfin, autour de l’un des points-clés de notre problématique, la notion de « réussite pour tous ».

A/ Une politique globale remise en cause

Tous les enseignants que nous avons interrogé s’accordent sur des difficultés communes qui posent les conditions de l’inclusion et la manière dont elles sont vécues par les enseignants et, plus spécifiquement, au sein de cet établissement scolaire.